#1257 - Numéro 1 : Éclairages sur le cinéma

l’avenir à construire paraît néanmoins bien lourde à porter. Un étudiant noir
témoigne du racisme dont lui et ses camarades sont victimes en RDA. Des étudiants
racontent leur vie universitaire et parlent de leur difficulté à accéder à
certains livres. La censure idéologique est ouvertement critiquée et mise face
à ses contradictions. Cette évocation des limites de la RDA s’entremêle néanmoins
avec de brèves séquences de ces étudiants sortant dans des bars et se
rendant dans une fête foraine. Au-delà du seul Mur, c’est donc la complexité de
la situation est-allemande qui est présentée. Des problèmes comme le racisme,
le manque d’ouverture et les failles du discours socialiste sont frontalement
abordés, mais non sans lueur d’espoir pour l’avenir à travers le portrait de la
jeune génération.
Le documentaire s’attache ainsi à présenter tous les enjeux de la situation
est-allemande, pour en souligner les contrastes forts. Il s’agit de réinscrire la
construction du Mur dans l’histoire de la RDA, de montrer la frontière qu’il
matérialise et de comprendre comment il s’intègre peu à peu à la vie des habitants.
Cette prise en compte de la pluralité des points de vue, loin d’aboutir
à une neutralité, évite au contraire l’écueil manichéen en conservant une distance
critique et en faisant dialoguer des opinions divergentes. Il en ressort
une vision nuancée, et finalement assez mélancolique. Le film s’achève sur
les rues décorées pour Noël avec en fond musical une chanson française dont
l’une des phrases dit : « Y’a trop de misère dans mon quartier, viens donc quand
même danser. » Si aujourd’hui, on ne peut que regretter la difficulté d’accès au
film (qui n’existe pas en version DVD) et l’absence de sources sur sa genèse, on
ne peut cependant qu’en souhaiter la valorisation et la redécouverte. En effet,
alors que l’Allemagne s’apprête à célébrer l’anniversaire d’un événement qui
entraîna le basculement de toute l’Europe, Derrière le Mur, loin du sensationnalisme,
capte la complexité et souligne la singularité de ce que fut la réalité
est-allemande. Il fait enfin directement écho aux propos du documentariste
allemand, Thomas Heise, qui déclare : « On va redécouvrir la RDA, j’en suis à
peu près sûr. [...] C’est simplement une question de recul, c’est comme une petite
République alpine qui a existé il y a quatre cents ans et dont on ne sait plus rien.
D’un coup, elle commence à briller et elle devient quelque chose de formidable. 4 »
Des problèmes
comme le racisme,
le manque
d’ouverture et les
failles du discours
socialiste sont
frontalement
abordés, mais
non sans lueur
d’espoir pour
l’avenir à travers
le portrait de la
jeune génération.
4 Hélène Camarade, Élizabeth Guilhamon, Matthias Steinle et Hélène Yèche (dir.), La RDA et la société
postsocialiste dans le cinéma allemand après 1989, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du
Septentrion, 2018, p. 317-318.
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne / Juin 2019
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