#1257 - Numéro 1 : Éclairages sur le cinéma
#1257 : la revue de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
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Un marché énergétique européen en évolution<br />
Côté russe, c’est la crainte de perdre des parts de marché chez son principal<br />
client, l’UE, qui motive <strong>le</strong> projet. À une possib<strong>le</strong> concurrence américaine – que<br />
<strong>le</strong> prix actuel du GNL américain rend encore incertaine, car il demeure peu rentab<strong>le</strong><br />
économiquement – s’ajoute une trip<strong>le</strong> volonté européenne de diversification<br />
des approvisionnements – gaz de Méditerranée orienta<strong>le</strong>, GNL qatari, etc.<br />
– et de transition vers des énergies décarbonées.<br />
Certains États envisagent même de se passer tota<strong>le</strong>ment, à court terme, du<br />
gaz russe. C’est <strong>le</strong> cas de la Pologne, dont <strong>le</strong>s contrats avec Gazprom courent<br />
jusqu’en 2022 : <strong>le</strong> pays a d’ores et déjà annoncé qu’il ne souhaitait pas <strong>le</strong>s<br />
renouve<strong>le</strong>r.<br />
Dans <strong>le</strong> même temps, Gazprom fait face à un embryon de concurrence interne<br />
en Russie. En perdant son monopo<strong>le</strong> d’exportation en 2013, la compagnie a vu<br />
émerger un concurrent : Novatek, qui se positionne <strong>sur</strong> <strong>le</strong> créneau du GNL et<br />
s’est associé au Français Total et au Chinois CNPC pour deux projets de terminaux<br />
de grande amp<strong>le</strong>ur dans la péninsu<strong>le</strong> russe de Yamal – à l’embouchure de<br />
la rivière Ob, au-delà du cerc<strong>le</strong> arctique – capab<strong>le</strong>s d’approvisionner l’Europe et<br />
l’Asie.<br />
L’entreprise pousse à une libéralisation du secteur gazier en Russie. Gazprom<br />
voit donc dans <strong>le</strong> Nord Stream 2 un moyen de sécuriser sa relation avec son partenaire<br />
européen en traitant directement avec l’Al<strong>le</strong>magne, sans pays de transit.<br />
Pour la Russie, c’est éga<strong>le</strong>ment un moyen de sortir la question ukrainienne de<br />
sa relation énergétique avec l’UE, qu’el<strong>le</strong> altère depuis <strong>le</strong> début des années 2000.<br />
Les crises gazières, opposant l’Ukraine à la Russie (2005-2006, 2007-2008,<br />
2008-2009), dues en grande partie à des différends commerciaux, avaient<br />
causé des ruptures d’approvisionnement hiverna<strong>le</strong>s dans l’Est de l’UE que <strong>le</strong>s<br />
Européens gardent en mémoire.<br />
Ce projet de gazoduc concentre donc à la fois des enjeux politiques et économiques<br />
importants pour l’UE. L’échéance des contrats ukrainiens, fin 2019, y<br />
ajoute une tension supplémentaire et <strong>le</strong>s prochains mois vont s’avérer décisifs<br />
pour <strong>le</strong> projet, à la croisée des pressions russes et américaines qui jouent <strong>sur</strong> <strong>le</strong>s<br />
équilibres internes de l’UE.<br />
Le Nord Stream 2<br />
n’est pas seu<strong>le</strong>ment<br />
une question<br />
européenne,<br />
il traduit aussi la<br />
compétition russoaméricaine<br />
pour<br />
l’accès au marché<br />
européen.<br />
Le gazoduc Nord Stream,<br />
en cours de construction,<br />
reliera la Russie<br />
à l'Al<strong>le</strong>magne par la mer<br />
Baltique<br />
© Nord Stream 2 / Wolfram Scheib<strong>le</strong>, CC BY-NC-ND<br />
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne / Juin 2019<br />
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