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Ne tolérant plus l’embarras de ces hommes, il avait dit comme par défi :<br />
– Soyez rassurés, <strong>je</strong> ne mettrai pas sur le trottoir la chambre de mon fils.<br />
Tous trois l’avaient dévisagé, tétanisés par sa sortie. Le moustachu avait<br />
interrompu le trouble qui les avait saisis :<br />
– Excusez-nous, nous ne voulions pas vous blesser.<br />
– Je n’ai pas besoin d’excuses, messieurs. Mon fils a été tué par un salopard de<br />
chauffard, mais la vie continue, non ?<br />
Ils étaient restés sans voix, et leur envie de se retirer était si palpable qu’il avait<br />
pris l’initiative de refermer la porte. Mais, immobile derrière celle-ci, il avait eu le<br />
temps d’entendre le moustachu prendre les autres à témoin :<br />
– Pauvres gens, <strong>je</strong> me demande comment ils arrivent à tenir.<br />
Il les avait écoutés s’éloigner dans l’escalier. Ils avaient parlé fort, comme s’ils<br />
voulaient qu’il entende.<br />
– Il donne le change, avait dit Dubreuil, du numéro 28. Il ne faut pas lui en<br />
vouloir.<br />
– Si ça se trouve, c’est quelqu’un qu’il connaît qui a tué son petit. C’est atroce,<br />
avait ajouté Latil du 53.<br />
– Quelle tristesse...<br />
Voilà ce qui lui revient en mémoire alors qu’il quitte la cité des Coteaux,<br />
seulement éclairée par les phares de sa Volvo break, son arme dans le coffre. Et il se<br />
dit que la pétition qu’il a signée n’a pour l’instant servi à rien.<br />
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