Ce soir je vais tuer l'assassin - Jacques Expert

le procès.
– Moi, je ne pourrais pas supporter de voir l’assassin de mon fils en liberté.
Avant même qu’elle ajoute « et toi ? », comme elle le fait à chaque fois, je
réponds aussitôt :
– Il y a des gars qui disent que, à sa place, ils n’attendraient pas le procès et qu’ils
iraient le flinguer.
– Et qu’est-ce qu’il a répondu, Rodriguez ?
– Pas grand-chose. Qu’il fallait attendre, ou plutôt une connerie du genre : « J’ai
confiance dans la justice. »
Ce n’est pas à elle que je vais raconter ce que Rodriguez m’a confié, le soir où je
l’ai raccompagné chez lui, cette confidence qui m’a tant effrayé : il avait promis à
sa femme qu’il tuerait l’assassin de leur fils. Dieu sait ce que Christine en ferait si
elle l’apprenait.
Avant de raccrocher, Christine me recommande de ne pas traîner ce soir et, enfin,
d’être très prudent sur la route. Je réponds imperturbable : « Comme toujours, ma
chérie... comme toujours. » Puis j’appelle Angoulême. Comme ce con de Soussin
est injoignable, je laisse un message sur son portable : « Frédéric, je viens de parler
de la situation dans votre secteur avec le patron. Ce ne sont pas trois mois qu’il vous
donne pour rétablir la situation, mais deux. Je suis vraiment désolé, mais M. Delmas
est à cran en ce moment avec la crise qui s’annonce. » Et je conclus d’un amical :
« Bonne soirée, Soussin. »
Je repense à Christine. Combien de temps encore pourrai-je la supporter ? S’il
n’y avait pas mes gosses, je m’en débarrasserais sur-le-champ. Il faudra que j’y
songe sérieusement quand l’affaire sera tassée.
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