26.03.2018 Views

Ce soir je vais tuer l'assassin - Jacques Expert

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Heureusement, M. Delmas n’avait pas voulu la croire. J’étais dans la boîte depuis<br />

six ans et considéré comme un homme à classer dans la catégorie des<br />

irréprochables, des types sans histoires. Je reconnais que ma réputation a joué en ma<br />

faveur, alors que celle de la fille... Mais, pendant quelques jours, c’est vrai que j’ai<br />

eu peur pour mes miches. J’a<strong>vais</strong> un autre avantage : j’étais le meilleur vendeur de<br />

Gaboriaud SA et M. Delmas a vite fait son choix entre une connasse et un mec qui<br />

rapportait du pognon. D’ailleurs, à la suite, ou plutôt grâce à cet incident<br />

malheureux, j’a<strong>vais</strong> été nommé chef du service des ventes. J’émarge maintenant à<br />

4 263 euros net, sans compter les primes et le treizième mois. Je ne me plains pas, le<br />

patron ne jure que par moi et j’ai le deuxième salaire de la maison. Sans forfanterie,<br />

ce n’est pas mon genre, <strong>je</strong> suis le numéro deux de la boîte.<br />

Comme toujours, quand il y a une promotion dans une entreprise, ce n’est pas du<br />

goût de tout le monde et Christine avait fini par apprendre ma pseudo-liaison. Je ne<br />

vous raconte pas le cirque qu’elle m’a fait ! Bien sûr, j’a<strong>vais</strong> tout nié. La preuve en<br />

était que la mythomane, en CDD, avait été lourdée malgré ses menaces d’« aller aux<br />

prud’hommes et de faire cracher la boîte ». C’était mal connaître le boss... Deux<br />

costauds de la manutention l’avaient foutue dehors et on n’avait plus jamais entendu<br />

parler de cette salope. Je me suis toujours demandé si le patron ne s’était pas tapé<br />

cette garce avant moi et avait préféré régler tout ça à sa façon. C’est bien son genre<br />

au boss, comme à elle, d’ailleurs... Je ne veux pas savoir et, au final, <strong>je</strong> suis le<br />

gagnant de l’histoire. Merci, madame ! Mais, franchement, faire tout ce ramdam<br />

pour un petit coup à l’heure du dé<strong>je</strong>uner, il faut vraiment avoir un pèt’au casque.<br />

Finalement, quand <strong>je</strong> repense à cette histoire, <strong>je</strong> crois que Christine avait surtout<br />

eu honte que les gens l’apprennent. Je reconnais que ce n’est jamais agréable de<br />

passer pour une femme trompée, la cocue de service. Aussi, elle prenait les devants,<br />

me défendait, et elle soutenait partout, surtout devant nos amis, que « cette<br />

malheureuse était plus à plaindre qu’à blâmer », que « c’était une mythomane qui<br />

avait trouvé ce moyen pour ramasser du pognon », que « son pauvre J.-P. en avait<br />

bavé des ronds de chapeau avec cette histoire ». Mais le mal était fait et, depuis, j’ai<br />

l’impression que Christine me surveille comme le lait sur le feu. Ça m’a servi de<br />

leçon et, comme <strong>je</strong> l’ai dit, <strong>je</strong> me tiens à carreau. Surtout, <strong>je</strong> fais supergaffe. Je<br />

reconnais à Christine une grande, ou plutôt deux grandes qualités : elle s’occupe<br />

bien des gosses et elle est une excellente cuisinière. Dommage que, ce <strong>soir</strong>, les frites<br />

soient un peu tièdes. J’adore quand elles sont craquantes et qu’elles brûlent la<br />

langue.<br />

Comme tous les <strong>soir</strong>s, les petits ont plein de choses à raconter : l’école, les<br />

copains, le foot, le piano et l’anniversaire qui approche. Amandine veut absolument<br />

9

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!