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JOURNAL ASMAC - No 4 août 2017

Identité Maladies des voies respiratoires/BPCO Plus de médecine, moins de bureaucratie!

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Maladies des voies respiratoires/BPCO
Plus de médecine, moins de bureaucratie!

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POINT DE MIRE ▶ IDENTITÉ<br />

Une contrainte plutôt qu’une prise<br />

en charge<br />

Les relations des personnes transsexuelles avec le système de santé sont très difficiles. Pendant la<br />

transition, les institutions médico-psychiatriques sont souvent un facteur de stress plutôt qu’une<br />

aide. Qu’il s’agisse de l’accompagnement psychothérapeutique, de prestations de soins ou séjours<br />

hospitaliers, le système de santé n’est toujours pas préparé aux personnes transsexuelles.<br />

Myshelle Baeriswyl, D r ès lettres, psychologue et sexopédagogue<br />

L’alliance contre nature du droit, de la<br />

médecine, de la psychothérapie, de la psychiatrie<br />

et des personnes transsexuelles<br />

trouve son origine au plus tard dans les<br />

recommandations de soins (Standards of<br />

Care, SOC) publiées en 1979 par l’International<br />

Gender Dysphoria Association. Un<br />

des principaux soucis à l’époque était (et<br />

l’est encore aujourd’hui) de distinguer les<br />

«vrais transsexuels» de ceux qui ne devaient<br />

pas bénéficier de mesures médicales<br />

de ce genre.<br />

Les standards pour le traitement et l’évaluation<br />

de transsexuels («Standards der<br />

Behandlung und Begutachtung von<br />

Transsexuellen», Becker et al., 1997) publiés<br />

par un groupe d’experts allemands<br />

n’y ont rien changé. Ils n’étaient pas orientés<br />

selon les besoins des personnes transsexuelles,<br />

mais servaient en premier lieu<br />

à satisfaire la soif de pouvoir et de contrôle<br />

de la psychiatrie et de la médecine (Hamm<br />

und Sauer, 2014). Dans la septième édition<br />

des SOC, on parle certes d’une approche<br />

flexible pour satisfaire «aux différents<br />

besoins sanitaires des personnes transsexuelles,<br />

transgenres et au sexe non<br />

conforme» (Coleman et al., 2012, p. 2). Les<br />

directives de traitement linéaires habituelles<br />

restent cependant valables, aussi<br />

en Suisse. C’est-à-dire d’abord le diagnostic,<br />

la psychiatrie et l’expérience quotidienne,<br />

ensuite le traitement hormonal et<br />

le changement de prénom (petite solution)<br />

et dans un second temps seulement,<br />

les traitements chirurgicaux et changements<br />

d’état civil (grande solution) (Richter-Appelt<br />

& Nieder, 2014, p. 16).<br />

Les préjugés l’emportent<br />

sur le savoir<br />

Certes, la Suisse n’a pas de loi sur les<br />

transsexuels, ce qui rend l’application de<br />

ces directives moins contraignante, mais<br />

malgré cela, sans diagnostic psychiatrique,<br />

pas de prestations des caisses-maladie,<br />

pas de transition médicale. Le chemin<br />

des personnes transsexuelles dans le<br />

système de santé passe toujours encore par<br />

leur (psycho-)pathologisation. Dans le<br />

système de santé, elles butent sur des compétences<br />

insuffisantes ou inexistantes, des<br />

directives discriminatoires ou des craintes<br />

et incertitudes du personnel médical et<br />

soignant. Quelques exemples:<br />

D’après une étude américaine de 2016,<br />

63% des endocrinologues seraient prêts à<br />

effectuer une thérapie hormonale avec<br />

leurs patient(e)s, mais la moitié d’entre<br />

eux ne connaissent pas les directives de<br />

l’Endocrines Society de 2009. Et seulement<br />

20% se sentent «très à l’aise en discutant<br />

de l’identité sexuelle et/ou de<br />

l’orientation sexuelle» (Irwig, 2016). Seulement<br />

30% des 176 facultés de médecine<br />

américaines et canadiennes abordent le<br />

thème de la transition dans leur cursus,<br />

alors que l’American Medical Association<br />

soutient depuis 2008 le «transition-related<br />

health care» (Obedin-Maliver et al., 2011).<br />

En Suisse, les thèmes ayant trait à la<br />

transsexualité sont inexistants dans les<br />

cursus des institutions de formation médicales,<br />

psychologiques et psychothérapeutiques.<br />

Un grand sondage mené par la Fédération<br />

suisse des gays Pink Cross en collaboration<br />

avec le Centre interdisciplinaire de<br />

compétence de l’âge de la HES Saint-Gall<br />

sur la question «Les structures de soins et<br />

de vieillesse en Suisse sont-elles préparées<br />

à la prise en charge de personnes LGBTI?»<br />

a produit des résultats décevants: autant<br />

dans les établissements médico-sociaux,<br />

les organisations de soins à domicile que<br />

dans la formation infirmière, les thèmes<br />

liés à la transsexualité sont pour ainsi dire<br />

inexistants. A ce jour, les thèmes LGBTI<br />

sont plus ou moins, voire totalement absents<br />

des lignes directrices des établissements<br />

de soins suisses. Le guide «Diversité<br />

dans les établissements médico-sociaux»<br />

de la Croix-Rouge Suisse (CRS) (titre original:<br />

«Diversität in Alters- und Pflegeheimen»)<br />

reste méconnu. Dans les organisations<br />

de soins à domicile, les thèmes<br />

LGBTI sont pris en compte dans les lignes<br />

directrices de la moitié des organisations<br />

ayant répondu sous le titre «Gestion de<br />

la diversité et des différentes formes de<br />

vie». Mais une ligne directrice spécifique<br />

LGBTI fait défaut et il n’y a que quelques<br />

institutions qui disposent d’un code de<br />

conduite correspondant. Dans la formation<br />

infirmière, 21 sur 28 institutions de<br />

formation ont ancré les thèmes LGBTI<br />

sous une forme ou une autre dans l’enseignement,<br />

cela varie toutefois fortement<br />

suivant le niveau de formation. Cette thématique<br />

n’est guère enseignée dans les<br />

formations de courte durée et de base.<br />

Loin de la normalité<br />

Si l’on demande aux personnes transsexuelles<br />

de relater leurs expériences dans<br />

le système de santé, le tableau n’est pas<br />

plus réjouissant. Beaucoup parlent d’attitudes<br />

ou de réactions négatives voire hostiles<br />

du personnel (hospitalier). Souvent,<br />

on leur refuse un titre correct correspondant<br />

à leur identité sexuelle. Souvent, ils<br />

sont appelés par leur ancien nom et de<br />

faux pronoms personnels. Il n’est pas rare<br />

que ces patients soient attribués au faux<br />

service, c’est-à-dire des femmes transsexuelles<br />

chez les hommes et inversement.<br />

Lors de la visite du médecin-chef, il est<br />

souvent indiqué, en présence d’autres patients,<br />

que la personne est transsexuelle,<br />

ce qui équivaut à un outing forcé. Parfois,<br />

il peut aussi se produire, comme l’auteur<br />

l’a personnellement vécu, un véritable<br />

spectacle: le jour de mon entrée à l’hôpital,<br />

N o 4 Août <strong>2017</strong><br />

VSAO <strong>JOURNAL</strong> <strong>ASMAC</strong><br />

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