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Franck Lozac'h Poèmes amoureux

Poèmes d'amour

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FRANCK LOZAC'H<br />

<strong>Poèmes</strong> <strong>amoureux</strong><br />

1


L’Huile fraîche<br />

À Sandrine<br />

Repose sur ce sein que la paresse offense,<br />

Et brûle en ma raison tes prochaines fumées.<br />

De mon ravissement, embrasse les carences<br />

Qui s'imposent sur ma joue frappée et profanée.<br />

Alors pour ta liqueur, bois le fruit des délices<br />

Et organise un songe où tu reposeras.<br />

Qu'importe, vraie beauté, les mouvements factices,<br />

Car l'appel de ta chair me redemandera.<br />

Ah ! Courir sur les flots antiques de lumière !<br />

Qu'une étincelle éclaire et chante tes fureurs !<br />

À l'ombre du platane, je te vois, tu es fière ! ...<br />

Parée de tes bijoux, de parfums délicats,<br />

Tu lances des étoiles pour orner mes lueurs,<br />

Adorable beauté que j'aime, et qu'il brusqua !<br />

2


Je croyais voir<br />

Je croyais voir en l'or de tes cheveux un nuage tendrement<br />

endormi sur des aquarelles mortuaires. J'y discernais un convoi de<br />

broderies éparses, et j'embrassais dans cet amas confusément respiré<br />

la rêverie lointaine. Je m'égarais dans les parfums, dans les sueurs de<br />

nos amours anciennes.<br />

Mais toi d'un geste dédaigneux, presque machinal tu passas ta<br />

main blanche et bien faite dans ce désordre de mèches blondes, et la<br />

noble rêverie s'est plu à se défaire, n'est-ce pas, Isabelle ?<br />

3


C'est un spleen<br />

C'est un spleen qui renferme toute la nostalgie d'une lueur<br />

sublime, une douloureuse faiblesse de cœur recueillie dans la<br />

solitude, morne solitude près du feu pétillant de la cheminée, où le<br />

seul ami est peut-être encore cette bouteille de vin rare et ce verre de<br />

cristal.<br />

Glacial amour, amour tendrement chéri, amour rêvé, amour<br />

volatilisé que la fantaisie de la femme reproduit inlassablement<br />

comme pour retenir son idéal, comme pour retenir le temps !<br />

Et la dernière lueur du brasier s'est plu à mourir. Ce n'est plus<br />

qu'une lumière douceâtre qui baigne la chambre décorée de bibelots<br />

rares et de meubles fort anciens.<br />

Ce n'est plus qu'un désir impossible qui resplendit encore dans<br />

l'âme d'Agathe. Ce n'est plus qu'une douleur inconsolable qui vit dans<br />

le cœur d'Agathe.<br />

4


Enivrée par le nectar, elle s'endort entourée de somptueuses<br />

étoffes posées nonchalamment sur le divan superbe.<br />

Parée de somptueux bijoux, l'œil hagard et livide, soulevant<br />

d'une main nonchalante quantité de soierie déposée sur le divan, elle<br />

rêve des délicieuses soirées passées chez les De Busy.<br />

Et des images tenaces, toujours martelant son âme voyageuse<br />

s'amoncellent les unes contre les autres comme une pellicule de film<br />

inlassablement répétée.<br />

Et dans ses souvenirs voués déjà à l'ennui, elle multiplie les<br />

scènes, grossit les visages, et espère embrasser dans cet<br />

amoncellement de détails, l'instant unique et sublime que son esprit<br />

s'était juré de ne jamais oublier : le regard saisissant du jeune homme<br />

aux yeux foncés, tirant vers un marron extrême, - ce regard de feu<br />

exprimant toute la force et l'intrépidité de la jeunesse conquérante.<br />

Oui, malheureuse, presque envoûtée par ce sourire d'ange, par cette<br />

bouche suave, elle éternise son évasive rêverie sur le caporal blond.<br />

5


C'était un vieux boudoir<br />

C'était un vieux boudoir où tremblaient des spectres d'ombres,<br />

où un mal invisible rôdait lugubre parmi les meubles de la pièce.<br />

Point de mots, points de regards - une attente éternelle épiait le<br />

moindre bruit, l'infime craquement des planchers. Les boiseries<br />

comme travaillées nuitamment gémissaient de douleurs et de plaintes<br />

répétées.<br />

À travers les carreaux de la fenêtre obscure, une lune pâle,<br />

ronde comme une hostie propageait ses rayons blanchâtres - un<br />

instant sublime que la peur éternisait, un instant d'inquiétude et de<br />

bonheur en soi.<br />

Il y avait les masses inertes de nos chairs blotties dans de<br />

profonds fauteuils. Les yeux du chat luisants étaient prêts à s'enfuir.<br />

Et nos mains transpiraient de faiblesse et d'effroi.<br />

Un coup de tonnerre puissant et le silence disparaît. Un cri<br />

perçant de sa gorge étroite, s'expulse et se propage en dissonance<br />

dans la pièce. Un cri inhumain et la femme indécente se transforme<br />

en vampire !<br />

6


L'architecture de la femme<br />

L'architecture de la femme ouvre ses yeux et dépose ses rayons<br />

rougis par le soleil. Pieds nus, tête penchée contre le regard pensif de<br />

l'éclusier, l'eau monte le long de la façade de bois - la cour est<br />

haletante. Elle vocifère l'inexpérience et sa paresseuse blancheur.<br />

Quant aux tapisseries, elles noircissent lentement sous les<br />

fouets du saule pleureur.<br />

7


Que tu proposes nue<br />

Que tu proposes nue<br />

À ma souffrance ancienne<br />

Fruits, délices conçus<br />

Avec liqueurs suprêmes,<br />

Lentement de l'éclat<br />

Reposé sur un cœur<br />

Un souffle poussera<br />

Cris sublimes et candeurs ...<br />

Perdue une seconde,<br />

Dans ce combat royal,<br />

Ma faiblesse profonde,<br />

Ô destinée fatale !<br />

S'émancipe quelque peu ...<br />

Semble vivre et se meurt<br />

Dans la lueur du soir,<br />

Et chasse mon désespoir !<br />

8


À ma dormeuse<br />

Je ne veux pas ce soir, licencieuse ennemie,<br />

Respirer en ton corps le doux parfum des songes,<br />

Ni déplacer mon cœur sur tes seins endurcis,<br />

Ni la jouissance facile où parfois tu me plonges.<br />

J'espère sur cette bouche inventer un amour<br />

Puissant et immortel que tu composeras,<br />

Redorer cette nuit jusqu'aux lueurs du jour<br />

Dans la chambre lugubre offerte à nos ébats !<br />

Qu'importe, les espoirs de nos mains en détresse,<br />

Le souffle accéléré que réchauffaient nos yeux !<br />

Je demande plus fort que houle et que tendresse,<br />

Un bonheur sans silence pour l'esprit ingénieux.<br />

Car de son pur cristal où le génie descend<br />

Rêvent de vrais soupirs qu'avait soufflé l'enfant.<br />

9


Ô si pure et si loin<br />

Ô si pure et si loin qu'une lueur m'émeut !<br />

Hélas ! Belle sous le doux bercement de la fleur,<br />

Je vis la merveilleuse dans les antiques feux,<br />

Une pâle beauté saignante de douleurs.<br />

Telle défaite de l'éternel complice encore !<br />

Lourde de somnolence, ô baisers de saveurs,<br />

Maint drame répété en mon cœur à éclore !<br />

Et l'œil pour les substances divines et les douceurs.<br />

Se pose sur l'inconnue, le blond désir rêvé !<br />

C'est le terrible aveu, terme clair de l'espoir.<br />

Enivré de nature, je croyais voir couler<br />

Sur votre bouche rouge la blancheur d'un cristal.<br />

10


Le Germe et la Semence<br />

Venise<br />

Et dans ce lieu fétide où dorment des gondoles,<br />

L'eau morne et transparente fut raison de soupirs,<br />

Ô sanglots répétés et si mouvantes violes,<br />

Contre un ciel de grisailles qui voulait s'obscurcir.<br />

Des barques s'étiraient sur l'étendue. Nos rêves<br />

Profonds comme l'amour s'inclinaient lentement,<br />

Et penchaient plus encore par le vent qui soulève,<br />

Tremblaient, espoirs perdus, bercés au gré du temps.<br />

Et toi ma calme sœur, tu chantais ma faiblesse<br />

Lorsqu'un vol de corbeaux foudroya le vrai ciel.<br />

Pour noircir les souffrances d'une odieuse paresse,<br />

Je vis dans tes yeux clairs les rayons d'un soleil,<br />

11


D'un soleil pâlissant, or, rouge et fatigué<br />

Qui semblait se mourir à l'orée de tes yeux.<br />

J'y trouvais un déluge de larmes délaissées<br />

Croyant à l'avenir de nos étés heureux.<br />

12


Ta main alanguie<br />

Ta main alanguie, profusion de saveurs,<br />

Qui contemple la nuit, désinvolte froidure,<br />

Ta main a délaissé sur le drap <strong>amoureux</strong><br />

Les stigmates profonds de ses sombres morsures !<br />

Et cette nonchalance abattue, aigre ou vile,<br />

Décline lentement dans ses douleurs dorées.<br />

Ses souffrances sont grâces et ses pensées occultes !<br />

La survivance s'éteint, antique et froissée<br />

Pareille au vieil orage sur nos murs tapissés.<br />

Je te goûte, fruit mûr, palme je te caresse.<br />

J'ondule, ô mon silence, parmi tant de furies,<br />

Luxure de mes nuits qui te désintéressent !<br />

13


La vieille maîtresse<br />

Quand respirant encore sa poitrine, soumise !<br />

De tes yeux couleront les tristesses du soir ;<br />

Quand de vives querelles, des sanglots et des crises<br />

Viendront s'imprégner sur ton fétide mouchoir ;<br />

Quand vieillie et défaite sous son joug inhumain,<br />

Tu trembleras de honte par ses peines, obscurcie ;<br />

Suppliante, à genoux et joignant les deux mains,<br />

Tu diras des mots tendres pour consoler tes nuits ;<br />

Alors femme fatidique, ô cœur égaré !<br />

Sur mon sein balbutiant de confuses paroles,<br />

Baisant et implorant d'autres chaleurs rêvées<br />

Alors tu tomberas dans mes extases molles !<br />

Et ta bouche et ta lèvre pour des plaisirs encore<br />

Viendront sucer mon sang, délice de mon cœur !<br />

Et impure et esclave, oubliant le remords,<br />

Tu dormiras repue, voluptueuse sœur !<br />

14


Plaidoyer pour deux crânes<br />

Par des liens soudés, par la honte prescrite,<br />

C'est le deuil contracté sur les terres nuptiales,<br />

La haine apparente vit dans les doigts crispés.<br />

Avec ces faces macabres, de progressives vengeances,<br />

L'indescriptible fièvre, puis des moments hagards.<br />

C'est la mort qui sommeille déjà dans chaque esprit.<br />

Le frottement constant de deux pieds qui se touchent<br />

Glacés sous les draps noirs d'interminables nuits ;<br />

Le geste cadencé, immuable des bouches,<br />

C'est la perle suprême de l'entente infinie !<br />

Oh ! Les démons intimes, les déplorables bêtes,<br />

Qui sont assermentés par l'alliance jaunie,<br />

Et ces cœurs enchaînés à ces atroces têtes !<br />

Oh ! Les années terribles dans les bas-fonds d'un lit !<br />

15


Sa grâce accoutumée<br />

A.P.V.<br />

Sa grâce accoutumée<br />

S'enivre de soleil.<br />

Ô la nymphe égarée<br />

Dans ses rayons vermeils,<br />

D'un brin de pureté,<br />

Sur son onde, s'éveille,<br />

Si sensible beauté.<br />

Et le vent dégarni<br />

Plisse dans les roseaux<br />

Les substances réunies<br />

Par le calme des eaux.<br />

Elle, baignée à demi,<br />

Évasive sans trop<br />

Elle dit, mélancolie.<br />

16


Les bruissements subtils<br />

De son regard si fin<br />

Ont découvert fragile<br />

L'œil clair qui est le mien.<br />

J'emporterai l'exil<br />

Car te sachant au bain<br />

Je ne pourrais, sensible,<br />

T'imposer le tien.<br />

17


Que tu proposes nue<br />

À Sandrine<br />

Que tu proposes nue<br />

À ma souffrance ancienne<br />

Fruits et délices conçus<br />

Avec liqueurs suprêmes,<br />

Lentement de l'éclat<br />

Reposé sur un cœur<br />

Un pur souffle unira<br />

Cris sublimes et candeurs !<br />

Éloignée une seconde<br />

De ce combat royal<br />

Ma faiblesse profonde<br />

De sa pensée fatale<br />

S'émancipe peu à peu ...<br />

Semble revivre et meurt<br />

Dans les lueurs du soir,<br />

Et chasse mon désespoir !<br />

18


Éloignement<br />

Folle aimée qui d'une jouissance<br />

Offre des fruits langoureux,<br />

Oserai-je te parler<br />

Quand résonne ce cœur pluvieux ?<br />

L'enchanteresse s'éloigne<br />

Au plus profond du corps<br />

Elle désire, elle décline<br />

Dans ses cheveux soyeux<br />

Sa délivrance la tord,<br />

Le sommeil est cherché.<br />

La jambe longue, la jambe fine<br />

Posée sur le bord du lit<br />

S'étale dans un rêve<br />

Tout imprégné de fleurs.<br />

La pâle, l'amoureuse encore,<br />

Sur le drap bleu s'est endormie.<br />

19


Je veux te dédier<br />

Je veux te dédier, chatoyante parure, sur des coussins bercés<br />

par le luxe et l'encens, cet hymne solennel bordé de sa froidure, et<br />

promis aux secousses vengeresses du Néant.<br />

Alors je te convie entre ces quatre murs, au sublime festin de<br />

l'inconnu malheur, et je prépare, cynique, une noble mixture qui<br />

brûlera ta peau et percera ton cœur.<br />

Et quand, momie étrange et desséchée, sur un plateau superbe,<br />

je te poserai nue, tu vibreras encore de spasmes saccadés, admirable<br />

beauté que j'aime et que je tue !<br />

20


Quand exténuée, ravagée<br />

Quand exténuée, ravagée par cette douleur latente, quand<br />

l'ombre même transformée en supplice déploie ses grands bras et<br />

gesticule menaçante en tourbillons immenses, ô l'éternelle substance<br />

succombe aux tentations du plaisir et oublie un court instant le martyr<br />

qu'elle endure, et oublie la tâche inhumaine qu'elle s'est vouée.<br />

Malgré les horribles contorsions, les déchirures internes, les<br />

feux superbes sortis de la panse de Lucifer, pas un croyant ne viendra<br />

soulager ces mortelles blessures.<br />

Qui oserait se fourvoyer pour soulager un mal dont il ne peut<br />

apprécier la monstruosité ? Toi, pauvre créature, disposée sur le drap<br />

de satin, lourde de fatigue amoureuse, toi que j'embrasse confusément<br />

pour éloigner mes craintes, saurais-tu entendre les hurlements de mes<br />

désespoirs ?<br />

Tu reposes, ivre de servitude passée dans un grand lit<br />

d'allégresse ! Tu rêves avec ta chevelure imprégnée de parfums<br />

21


exaltants à une contrée lointaine ; Quelle monotonie insipide dans tes<br />

yeux évasifs ! Quelle lente paresse par ton corps sacré !<br />

Quelle force encore me pousse à combattre moi qui suis englué<br />

dans une toile d'araignée ? Moi qui à l'orée de mes vingt ans espérais<br />

une terre ferme, moi qui marche sur des sables mouvants ?<br />

Sont-ce les derniers soubresauts d'une mort fatidique ?<br />

J'entrevois comme des images sacrées dans mes rêves, une marche<br />

funèbre, des soldats bleus fusil en main, et j'entends un caporal crier<br />

en joue.<br />

Parfois c'est une corde qui se balance dans un mouvement<br />

régulier, et moi je place ma gorge entre ses nœuds serrés. Plus loin, le<br />

tombeau où mon corps sera exhumé, les pleurs des femmes et les<br />

fleurs artificielles.<br />

Mais tout ceci n'est d'aucun intérêt pour vos pauvres<br />

consciences que d'entendre les gémissements malingres d'un poète<br />

inconnu.<br />

22


Dans mon rêve épuré<br />

Dans mon rêve épuré, je discerne ton nom<br />

Dans les lieux à venir, j'entends battre tes yeux<br />

Je sais ton chant, je sais ta voix et ta beauté<br />

Et le regard d'amour qui encombre tes bras.<br />

J'écoute frémir mon heure puissante et ténébreuse<br />

Que l'instant et l'histoire encenseront encore<br />

J'embrasse l'enfant violence des voluptés<br />

Et je dors lentement à l'ombre de mon ombre.<br />

Je me plais à vêtir le monologue qui dure<br />

Patience, dévouement, sagesse, supplices<br />

Tasses d'or et d'argent jetées contre nos cieux<br />

Et délires et délices et salive et amour<br />

Et les ans passeront comme un souffle inhumain.<br />

J'observe la douceur et l'orgueil de ces transes<br />

La chaude montée au cœur qui est rose et bleue<br />

Et j'approuve en moi-même le désir de survivre<br />

Pour rester longtemps presque mort en nous deux.<br />

23


Même rêverie<br />

Dans mon rêve épuré, je discerne ton nom.<br />

Déjà je sais ton chant, ta voix et ta beauté,<br />

Et le regard d'amour qui enroule tes bras.<br />

J'entends frémir mon heure si grave si ténébreuse<br />

Que l'instant et l'histoire encenseront encore.<br />

Et j'embrasse l'enfant, fruit de nos voluptés,<br />

Et je dors lentement à l'ombre de mon ombre.<br />

Je me plais à vêtir les paroles qui fuient.<br />

Patience et sagesse, dévouement et supplice,<br />

Et délires et délices et salive et amour !<br />

Les années passeront comme un souffle inhumain.<br />

Je contemple la vie et l'orgueil de ces transes,<br />

La chaude montée au cœur qui est rose et bleue,<br />

Car j'éprouve en moi-même le désir de survivre<br />

Pour rester allongé presque mort en nous deux.<br />

24


Immolée sur les plaies<br />

Immolée sur les plaies sanguinaires des suicides,<br />

Soulevée par la pure vengeance des Dieux marins<br />

Dans sa candeur, violée aux furies de ses eaux<br />

Rejetée par les vents sous les courants torrides<br />

Même dans la bravoure, la vague rejette l'épave.<br />

Mais affreuse et tremblante presque morte déjà ivre<br />

Dans les excès de fièvre sous l'ardeur de l'été<br />

Transparente parfois mais libre sur les mers<br />

O Beauté vénérée derrière les larges terres<br />

Mon âme désinvolte, accablée de remords<br />

Quand sur toi le malheur, repose, que faut-il faire ?<br />

Alors vers quels plaisirs dans l'univers fangeux<br />

Faiblesse de conquêtes, ô sœur de l'infini<br />

Détourner de ce joug, l'impossible grandeur ?<br />

Règne, siècle, frayeur ! Ame promise, que faire ?<br />

25


Les membres décharnés<br />

Les membres décharnés, vomis sous les silences<br />

Que la chambre lugubre a subi en dormant,<br />

Et des voiles jaunis, perdus de transparence,<br />

Univers trop sordide et pâmoison du temps !<br />

Ils mêlent pourtant des corps, des âmes, des sens,<br />

Des actions divines offertes chaque nuit !<br />

Ils combattent des formes, jouissent de leur transe,<br />

Et tombent agenouillés sur un cadran qui fuit !<br />

Veules de béatitude dans leur macabre loi<br />

Unissant des plaisirs sur des lèvres plissées,<br />

Nous !, sans plus d'harmonie pour deux cœurs qui festoient !<br />

Et des frayeurs étranges m'occupent tout à coup :<br />

Ne sont-ce pas des spectres ou des esprits vidés,<br />

Ces deux chairs qui s'écroulent dans la mansarde floue ?<br />

26


J'ai dû aimer<br />

J'ai dû aimer sous d'autres cieux,<br />

Mais je ne sais plus quel matin,<br />

Agile et noble comme le feu<br />

La beauté au regard divin.<br />

C'était désir stérile mêlé de grâces<br />

Que l'ivresse emplissait sans grandeur ;<br />

Quand l'âme libre enfin s'efface,<br />

L'amour de Dieu devient pêcheur.<br />

Quiconque use de ses ongles sur sa peau<br />

Et comprime son souffle dans l'abus,<br />

Vrai, bannira l'horrible fardeau<br />

De l'acte facile sur le corps nu.<br />

Mais la beauté en fruit lubrique<br />

Métamorphose son idéal<br />

Sous les saccades rythmiques<br />

De son galeux caporal !<br />

27


La protubérance excessive<br />

La protubérance excessive<br />

Qui me servait de sommeil<br />

S'éclipse dans les premières senteurs<br />

De mon vaste ciel.<br />

Que d'inconnus rivages<br />

Et que de sources à explorer !<br />

L'infini commérage<br />

A déjà bouillonné.<br />

Chastes idées reçues,<br />

Catacombes enfantines,<br />

Quand l'espoir est perçu<br />

La chaleur me fascine !<br />

D'autres vents se sont engouffrés<br />

Sous ma porte vagissante.<br />

Mon tendre esprit, il est arrivé<br />

Le seuil étroit de ma pente !<br />

28


Clairons, sonnez l'expansive<br />

Et heureuse cérémonie<br />

Puisque des femmes agressives<br />

Sur les couches se sont endormies.<br />

Ô la câline, la débaucheuse,<br />

Le tempérament étrange !<br />

Elle gît Sandrine la pleureuse<br />

Comme le sourire de mon Ange !<br />

29


Éloignée mais si proche<br />

Éloignée mais si proche<br />

Par le rêve qui te ressemble,<br />

De l'âme quand tu approches<br />

C'est tout un corps qui tremble...<br />

Ne connaissant le triste émoi,<br />

Tu avances insolente sœur<br />

Et me parles maintes fois<br />

Sans savoir ma douleur.<br />

Pour ma faiblesse extrême,<br />

Voici ces quelques vers.<br />

Affreuses lignes ou diadème ?<br />

Qu'importe ! Puisque je t'aime !<br />

30


Le serpent<br />

Avec ses contorsions voulues en son lugubre<br />

Déclin, c'est le serpent annelé jusqu'au cou<br />

Orientant des instincts à moi-même si salubre,<br />

Sur mon ventre pâmé, à l'instant le plus doux.<br />

Et qui va comme une amertume sommeillait,<br />

Transformer la nuisance prochaine de mes frayeurs,<br />

Pareil au rarissime amant qui se penchait.<br />

Des voiles, des langes clairs pour ces maux confus,<br />

Et des accords parfaits entre nature, oublis,<br />

Qui condamnent pourtant les plaisirs que l'on tue ! ...<br />

Ho ! Le reptile immonde jouant entre ses mains<br />

Parmi la blancheur troublante des autres pensées !<br />

Par ton acte morose, il se perdrait des riens<br />

Qui pleurent en leurs soupirs les saignantes aimées !<br />

31


Alors tu te réveilles<br />

Alors tu te réveilles, ô beau corps de déesse !<br />

Tu cherches mes désirs comblés par les tourments.<br />

La pointe de ton sein sevré de sang se dresse,<br />

Mon admirable amie et mon sublime amant !<br />

Si mon ventre s'éteint, j'appelle tes lueurs.<br />

Je jouis de l'incomparable volupté<br />

De rester en moi-même et d'être un autre ailleurs,<br />

De créer un génie aux plaisirs insensés !<br />

Je verrouille ta chair, la place du bonheur.<br />

Je dors paisiblement dans le cœur des Aimées.<br />

J'invoque ta richesse, ta sublime saveur,<br />

Ta substance promise et ton nectar sacré !<br />

32


Le Moût et le Froment<br />

Ainsi ai-je vu<br />

Ainsi ai-je vu de lourds chevaux traîner de superbes cohortes<br />

de sel. C'était au sortir du rêve. Oisive, entretenue par la fatigue du<br />

matin, l'imagination jouit, reine du lieu de la chambre. Elle conduit le<br />

repos jusqu'aux portes de l'inconnu. Encore du drôle peuplé de<br />

romantisme, des croissants de bonheurs comme des étapes<br />

successives. Elle égrène sa course puisque le sommeil gagne et<br />

condamne les premières heures du lever ! Quand je distribue les rôles<br />

de chacun, par de mesquines allusions, je les sais composer l'image<br />

sacrée et transformer à leur goût les règles de mon propre jeu.<br />

Silence, distorsions comme des cambrures sur de planes<br />

figures, puis des mouvements cycliques dans des bourrasques d'eaux<br />

pleines : elle se plaît avec l'impossible, rit de ses nombreuses<br />

découvertes. Amie de l'absolu, du négatif, femme ou démoniaque<br />

Circé, qui est-elle ?<br />

33


Dans le dégoût<br />

Dans le dégoût, la femme s'envole et s'enivre des fraîcheurs<br />

matinales. Les veines sont gonflées par les saveurs extrêmes et le<br />

sang bat sous la peau lisse et fatiguée. Allongée, le corps nu sous le<br />

drap de satin, la respiration est courte, saccadée par moments. Puis<br />

une longue bouffée d'air pur gonfle sa poitrine. Le sein droit<br />

découvert dévoile une pointe violacée, tendre et ferme. La main<br />

caresse un autre corps qui repose à ses côtés. Un visage lourd de rides<br />

et d'espérances oubliées. Les yeux transparents d'amertume collent un<br />

plafond grisâtre. Et la lèvre pendante encore semble boire avec<br />

avidité ses vingt ans.<br />

34


Sans famille<br />

Sans famille, il est permis de rêver. Sans femme, sans enfant,<br />

l'unité de soi-même est grande. Le retour à la vie libère des<br />

attachements et des seuls ennuis. Mesure-t-on les plaisirs retrouvés ?<br />

donnée".<br />

"J'aime, dit-elle. Si le respect est un droit que la fortune me soit<br />

Faible femme, que veut-elle dire ? Illusions des mots,<br />

incompréhension absolue ! Mon corps déchiré s'éloigne de la naïve,<br />

et l'inconstante perdue ne me parle plus.<br />

Présent dans ses états d'âme, je divaguais aussi, perdant ma<br />

vigueur et mes longues nuits. Moi, <strong>amoureux</strong>, je cherchais l'accord de<br />

mes chairs, mais mon esprit s'enfuyait ailleurs.<br />

L'esprit allait vers d'autres lieux. Sa demeure était mienne pour<br />

quelques jours. Je revins dans la chambre sans plus de choix que de<br />

voir de nouvelles femmes s'offrir à moi.<br />

35


Un phallus de cristal<br />

Un phallus de cristal incrusté de pierreries, d'émeraudes et de<br />

saphirs, avachi et mou sur un coussin de velours avec des garnitures<br />

d'or.<br />

Je m'imagine et m'appartiens. Au point le plus haut de<br />

m'appartenir une vision terrestre de beauté transparente m'apparaît,<br />

une femme vêtue d'un voile léger, bercée par un vent flotte devant<br />

mes yeux et sa chevelure noire baigne et tournoie autour de son<br />

corps. Ses pieds recouverts d'une robe limpide sont soulevés audessus<br />

du sol. Elle tend ses deux mains vers moi, s'approche<br />

lentement et son corps glisse. Son regard me fixe, elle m'invite à me<br />

lever et à la rejoindre.<br />

Sur le point de la rejoindre alors si près que je m'enivrais de<br />

son parfum, si près que ses doigts tendus touchaient les miens, elle<br />

disparut comme une bonne fée inaccessible aux simples mortels que<br />

nous sommes.<br />

Un phallus de cristal incrusté de pierreries et d'émeraudes et de<br />

saphirs, raide et tendu sur un coussin de velours avec des garnitures<br />

d'or.<br />

36


L'or<br />

L'or sur des paupières repose près des yeux <strong>amoureux</strong>. Il<br />

dormirait des anges berçant ta chevelure noire. Sur le lit défait, le<br />

corps langoureux sourit, amas de chair lassée, confusion de membres<br />

affaiblis.<br />

Au lieu-dit de l'espoir<br />

Au lieu-dit de l'espoir, une femme se présenta nue à mes yeux.<br />

Avec des coups de poing terribles, je la chassai. Elle résista sous des<br />

abords disgracieux à mes avances. Elle s'émut de mon intelligence et<br />

de mes capacités étrangères à ses possibilités. Je la violai sans la<br />

retourner. Je m'enfuis dans les déserts de l'indifférence. Peu après, je<br />

la haïssais sans méchanceté. Premier ménage.<br />

37


J'ai fauté avec la belle<br />

J'ai fauté avec la belle, avec l'éternelle beauté. Le printemps<br />

s'est engouffré sous la farouche sœur, et a gonflé sa robe rose comme<br />

l'air filait dessous. Nous nous sommes allongés près d'un vieux chêne.<br />

Sa poitrine respirait, se déplaçait sous la robe légère.<br />

La goutte a coulé belle<br />

La goutte a coulé belle sur la hanche bombée<br />

Le sang s'est répandu entre les lèvres ouvertes<br />

Le sperme est sur les dents de la femme courbée<br />

Le liquide jaunâtre sur la langue est séché.<br />

La fille s'est tordue entre les draps salés<br />

L'amour a pleuré pur au bord de son délire<br />

Le lit fait de soupirs a murmuré encore<br />

Et la nuit vagabonde s'est enfuie au grand jour.<br />

S'est inclinée la tête sur le rêve endormi.<br />

38


Tout près, si près<br />

Tout près, si près, si proche aux délices d'entendre,<br />

Comme une ombre lassée des plaisirs de la chair,<br />

Femme endormie, tu m'appartiens ce soir, très tendre<br />

Ou tu remues la tête baignée dans la lumière.<br />

Tète ce sein<br />

Tète ce sein, fœtus rejeté du ventre de ta femme !<br />

Bois le lait maternel qui gonfle les mamelles de réconfort, qui<br />

dresse les pointes rouges vers le ciel !<br />

Que la soif brûle tes entrailles, avide nourrisson, et que ta<br />

petite main faite de doigts agrippe la tétine précieuse !<br />

Comme son haleine chaude glisse dans ton appareil digestif !<br />

Comme la semence blanche de ta mère est douce à avaler !<br />

39


existence !<br />

Ignorant petit homme, bats-toi pour survivre dans cette<br />

40


Nuits grasses de sperme<br />

Nuits grasses de sperme qui roulait sur des poitrines, et tombait<br />

en cascades dans des gorges assoiffées ! Ô jets immondes qui<br />

fécondaient une vulve étroite !<br />

Sexe s'engouffrant dans ses rondeurs lourdes et interdites !<br />

Place innée pour les couples de chair !<br />

Laideur qu'on appelle amour ! Je me rends à vos pieds, femmes<br />

humaines ! Hélas, j'aime encore !<br />

Et toutes les vomissures bues, les urines goulûment avalées, les<br />

crachats léchés sur vos ventres tombés. Les langues qui s'introduisent<br />

dans les parties intimes de vos corps de possédées.<br />

Ô femmes, et ces matières fécales arrachées avec l'index<br />

honteux et ces doigts sucés avec délectation ?<br />

Qu'ai-je donc appris ? Que l'amour était une horreur ? Que le<br />

plaisir était une douleur stupide ? Un sexe gratté jusqu'au sang par<br />

des ongles très longs, des glands brûlés et sucés jusqu'aux entrailles,<br />

un pénis tordu et mordu par des dents tout blanches avec un rire ou un<br />

41


ictus sur vos bouches entrouvertes ? Ô femmes, je ne sais plus.<br />

Fallait-il sodomiser et rire de la laideur, et de son acte ? Cela<br />

était-il le bonheur ? Ô femmes ou démons, le rouge n'a jamais envahi<br />

vos visages de salopes !<br />

Que l'homme fait de conscience s'en repente ! Jamais plus, et<br />

plus jamais, et maudits soient les plaisirs éphémères !<br />

42


Nue. Elle était nue.<br />

Nue. Elle était nue. Et la jambe longue et la fesse lourde étaient<br />

un appel à l'amour, à la caresse, à la jouissance et à l'ivresse.<br />

Le sein superbe et droit, viril comme une tigresse, dressé au<br />

ciel appelait la morsure sublime de l'homme.<br />

Ma langue léchait encore cette aisselle que des gouttes de pluie<br />

trempaient de saveur. Mes yeux remplis d'éclairs et de désirs<br />

appelaient ses yeux bleus. L'ivresse et les soupirs berçaient de leur<br />

langueur mélancolique l'âme satisfaite et rassasiée de plaisir.<br />

Et la femme, bouche ouverte, la chevelure bleue renversée en<br />

arrière soupirait d'aise.<br />

43


Des caresses nonchalantes<br />

Des caresses nonchalantes sur des coussins de pourpre d'or,<br />

baignées dans une lumière molle. Les corps fatigués comme une<br />

ombre chinoise, se donnent sur les murs de la chambre.<br />

La flamme bienveillante regarde les monstres énormes surgir<br />

et souffler inexorablement. Les langues s'unissent et se mêlent dans<br />

un palais merveilleux, les odeurs et les chaleurs éveillent les<br />

sensations des désirs enfouis.<br />

Ô râles, cris sauvages des bêtes griffées ! Les corps se fondent,<br />

lutteurs inassouvis de chair et de jouissance ! Les corps s'usent dans<br />

un combat de plaisir monotone.<br />

La bête crache, hurle et s'éteint. Les survivants se délassent et<br />

meurent dans les draps parfumés d'excréments et de senteurs anales.<br />

Ô les maudits dont les sexes sont gonflés du suc épais ! Les saletés<br />

respirées, léchées et avalées ! Les contacts vicieux et lâches. Les<br />

coins de chair ensanglantés et brûlés !<br />

Toutes les erreurs et tous les naufrages sillonnent dans ma tête.<br />

Mais le plaisir se meurt, hélas le plaisir est oublié !<br />

44


Laure, ne m'en veux pas<br />

Laure, ne m'en veux pas. Je quitte l'espoir et je m'engage dans<br />

la ténèbre. Il ne faut pas m'en vouloir. Il faut pardonner mon égoïsme.<br />

J'ai besoin de me cacher et de vivre sur moi-même comme un<br />

homme trop gras qui se nourrit de ses réserves.<br />

Laisse-moi le repos ! Ne me dérange pas. L'obscurité me<br />

mènera à la lumière. Est-ce Dieu que je recherche ? Est-ce l'ambition<br />

qui frappe à ma porte, et qui me somme de m'enfermer ?<br />

Je ne te parlerai point d'amour, ma Laure tant aimée. Si je me<br />

recroqueville à la manière de la marmotte qui a froid, ce n'est pas que<br />

j'aie peur de l'avenir (je ne crains pas hélas ma folle jeunesse) ; je<br />

désire comprendre et entendre. Oui, je veux savoir d'où provient la<br />

force qui m'anime et m'inspire.<br />

45


La vague langueur<br />

La vague langueur des poses amorties paresse ou se meurt dans<br />

l'infini de ton mouvement. Et ton buste, ô reine, dans ce coup de reins<br />

sublime érecte ta poitrine orgueilleuse.<br />

C'étaient l'ivresse et l'assouvissement des sens ! La moiteur<br />

défendue dans ta chevelure noire, dans ce duvet paresseux où la<br />

mélancolie s'épuise et que la source tarit.<br />

C'étaient l'automne nonchalant, les derniers soupirs et les<br />

odeurs délicates !<br />

C'étaient des bouches fatiguées, des corps épuisés qui<br />

s'appelaient encore !<br />

46


Pour le plaisir des quatre yeux<br />

Pour le plaisir des quatre yeux, le souffle de l'amour frôle les<br />

corps fatigués.<br />

sentent bon.<br />

Pour un orgasme à venir, les sexes se rapprochent, les sexes<br />

Les langues s'appellent, et les yeux et les lèvres dans un<br />

mouvement immuable se comprennent déjà.<br />

Mon haleine chaude, mon amour et la pointe de ton sein rouge<br />

de désir.<br />

Ta chevelure se perd dans la mienne, oui la béatitude de ton<br />

sourire pour mon sourire !<br />

L'élan du couple, la force du couple, la force de l'union.<br />

Et le calme serein après le tumulte, et les ébats <strong>amoureux</strong>, le<br />

grand calme dans la nuit sans fin.<br />

Le calme étrange quand les corps s'entrelacent et se délassent.<br />

47


Les formes rondes sous la lumière tamisée, les formes<br />

mouvantes diluées dans l'espace.<br />

L'amour se meurt, mon amour, et déjà tu revis.<br />

48


Une beauté au comportement bizarre<br />

Une beauté au comportement bizarre a taché ma jeunesse, et<br />

j'ai heurté les rocs de la consternation. Plus loin dans des<br />

mouvements incertains, la belle s'est métamorphosée en reine, non !<br />

en ange.<br />

Angélique apparut pour la première fois au bal. Son<br />

magnétisme était foudroyant. Dans les chambres, elle a tourné son<br />

regard vers moi et sa silhouette féminine glissait sur les tapis. Je<br />

transpirais une sueur aigre et m'essuyai du revers de la manche.<br />

Elle flottait, plutôt qu'elle ne marchait. Et j'ai suivi sa<br />

démarche au-delà des murs où elle a disparu. Au balcon, je vis son<br />

spectre traverser l'allée faite de roses rouges et d'œillets multicolores.<br />

Elle m'échappait, je m'avançais.<br />

Plus tard dans le parc, je reconnus sa démarche, et je courus à<br />

sa rencontre. Je l'ai prise par la taille, et je tombais à ses genoux.<br />

Elle s'assit sur mes hanches sous les chênes roux. J'embrassais<br />

sa poitrine et je glissais tous mes bras dans ses cheveux.<br />

49


Peut-être roulerai-je avec elle vers les sous-bois, et dans l'herbe<br />

foncée. Au premier choc, je me suis enivré de tendresse, et hagard<br />

d'amour je me suis laissé emporter pour les tourbillons d'illusions.<br />

Vers la première heure, je m'endormis.<br />

50


J'ai besoin de ta poitrine<br />

J'ai besoin de ta poitrine où je cueillerai le fruit de nos<br />

entrailles. J'ai besoin de ton odeur douce de pucelle où j'engouffrerai<br />

mes cheveux. Que m'importe l'inceste, Marie. Il n'y a pas d'inceste<br />

entre toi et moi. Ton corps m'appartient et je suis ton corps. Ne souris<br />

pas, Marie, de ton sourire d'ange. Ne te moque pas de moi. Je suis<br />

purifié et je suis le fruit de ta chair.<br />

Un ange ou un Dieu a posé son aile blanche sur la tête des<br />

morts. La femme s'est ouverte et le feu de l'amour a réchauffé ses<br />

jambes et ses seins. Et son sexe a brûlé d'une chaleur vive.<br />

J'ai jeté un baiser sur tes lèvres, moi avec ma bouche infectée<br />

de mensonges et de crimes, moi avec ce cœur qui bat au rythme de<br />

l'envie et du vice de la chair. C'est avec une humeur étrange que je me<br />

suis allongé près de toi. Et j'ai senti ton haleine chaude, et l'orgasme<br />

si proche qu'il semblait te contenir.<br />

J'ai caressé tes jambes lentement, et je me suis couché sur ton<br />

épaule. J'ai bu dans ton œil pur le plaisir qui libère. J'ai bu le sang du<br />

pauvre, la jouissance infinie.<br />

51


Ne m'accable pas de péchés. Mes sens inassouvis ont demandé<br />

le droit au bonheur. Je lèche ton sein, et je me repose dans tes odeurs.<br />

Ô femme, que n'es-tu femme et déesse et vierge et bontés !<br />

Pourquoi tant de haine dans ce cœur, toi qui as joui de mon parfum de<br />

rêve ? Marie, baigne-moi dans tes caresses, baigne l'enfant sacré dans<br />

tes faiblesses de mère !<br />

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<strong>Poèmes</strong> Amoureux<br />

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