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Joseph Cardijn. Au nom des jeunes ouvriers

Joseph Cardijn, le fondateur de la JOC, naît en 1882 dans une famille ouvrière et passe une grande partie de son enfance et de son adolescence à Hal en Belgique. Il devient prêtre en 1906. Convaincu de la valeur de chaque jeune ouvrier et ouvrière qui, dit-il, valent « plus que tout l’or du monde », il va consacrer sa vie à leur cause, créant la JOC en 1925. Le mouvement connaîtra une expansion croissante et au moment de sa mort, en 1967, sera répandu sur tous les continents. De Pie XI à Paul VI, tous les papes ont soutenu l’action de Cardijn qui sera créé cardinal en 1965, deux ans avant sa mort. Cinquante années ont passé depuis son décès. S’ils ne sont pas enga- gés dans le mouvement social-chrétien, peu de nos contemporains ont entendu parler de lui. Il était donc important de faire découvrir ou redécouvrir l’itinéraire de cet homme dont l’action a marqué la vie de plusieurs générations.

Joseph Cardijn, le fondateur de la JOC, naît en 1882 dans une famille ouvrière et passe une grande partie de son enfance et de son adolescence à Hal en Belgique. Il devient prêtre en 1906. Convaincu de la valeur de chaque jeune ouvrier et ouvrière qui, dit-il, valent « plus que tout l’or du monde », il va consacrer sa vie à leur cause, créant la JOC en 1925. Le mouvement connaîtra une expansion croissante et au moment de sa mort, en 1967, sera répandu sur tous les continents.
De Pie XI à Paul VI, tous les papes ont soutenu l’action de Cardijn qui sera créé cardinal en 1965, deux ans avant sa mort.
Cinquante années ont passé depuis son décès. S’ils ne sont pas enga- gés dans le mouvement social-chrétien, peu de nos contemporains ont entendu parler de lui. Il était donc important de faire découvrir ou redécouvrir l’itinéraire de cet homme dont l’action a marqué la vie de plusieurs générations.

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Claire Van Leeuw<br />

<strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong><br />

<strong>Au</strong> <strong>nom</strong> <strong>des</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>ouvriers</strong><br />

Préface d’Étienne Grieu


<strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong>


Claire Van Leeuw<br />

<strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong><br />

<strong>Au</strong> <strong>nom</strong> <strong>des</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>ouvriers</strong><br />

Préface d’Étienne Grieu, s.j.<br />

« Béthanie »


Directeur de collection : Charles Delhez, s.j.<br />

© 2017, Éditions jésuites<br />

Belgique : 7, rue Blondeau • B-5000 Namur<br />

France : 14, rue d’Assas • F-75006 Paris<br />

email : info@editionsjesuites.com<br />

http://www.editionsjesuites.com<br />

Dépôt légal : D.2017, 4323.09<br />

ISBN : 978-2-87356-745-3<br />

Imprimé en Belgique


À Stéphane, mon mari,<br />

pour son soutien et ses précieux conseils ;<br />

à Étienne, Cécile et Florence, mes enfants,<br />

pour leur patience ;<br />

à mes parents<br />

qui m’ont toujours parlé de <strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong> avec beaucoup<br />

d’estime ;<br />

à ma sœur Bernadette<br />

pour sa relecture attentive ;<br />

au Père Charles<br />

pour sa confiance.<br />

Merci !


Liste <strong>des</strong> abréviations<br />

A.C.J.B. Action catholique de la <strong>jeunes</strong>se belge<br />

A.C.J.B.F. Action catholique de la <strong>jeunes</strong>se belge féminine<br />

B.I.T. Bureau international du travail<br />

C.J.O.M. Christelijke jeugdorganisatie voor meisjes<br />

C.R.A.B. Centre de recrutement de l’armée belge<br />

C.S.C. Confédération <strong>des</strong> syndicats chrétiens<br />

J.O.C. Jeunesse ouvrière chrétienne<br />

J.O.C.F. Jeunesse ouvrière chrétienne féminine<br />

J.O.C.I. Jeunesse ouvrière chrétienne internationale<br />

K.A.J. Kristene arbeidsjeugd<br />

L.N.T.C. Ligue nationale <strong>des</strong> travailleurs chrétiens<br />

M.O.C. Mouvement ouvrier chrétien<br />

O.S.F.C. Œuvres sociales féminines chrétiennes<br />

S.N.V.T. Service national <strong>des</strong> volontaires du travail<br />

U.C.L. Université catholique de Louvain<br />

Verdinaso Verbond der dietsche nationaal-solidaristen


V.K.A.J.<br />

V.N.V.<br />

Vrouwelijke katholieke arbeidsjeugd<br />

Vlaamsch nationaal verbond


Préface<br />

L<br />

e portrait de <strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong> <strong>des</strong>siné par Mme Van Leeuw<br />

fait faire un pèlerinage aux sources de la J.O.C. et,<br />

plus largement, de l’Action catholique en milieu populaire.<br />

À travers l’itinéraire du fondateur, ce sont en effet les intuitions<br />

majeures du mouvement qui sont mises en lumière.<br />

Ainsi, tout d’abord, de cet épisode qui jouera un rôle<br />

clé pour toute la vie de <strong>Cardijn</strong> : alors qu’il a quinze ans et<br />

qu’il est depuis peu au petit séminaire de Malines, il reçoit<br />

lors de son premier retour dans la ville de Hal, un accueil<br />

plutôt glacial de la part de ses anciens comparses de jeu et<br />

d’école : « […] il réalise que pour certains de ses anciens<br />

camara<strong>des</strong> de classe qui, eux, ont commencé à travailler<br />

en atelier ou à l’usine, il est devenu sans le savoir et sans<br />

le vouloir, un ennemi, un “traître” ayant “choisi le camp<br />

<strong>des</strong> riches” futur “soutien de l’exploitation capitaliste”. Les<br />

dé<strong>nom</strong>inations “petit curé” ou “calotin” fusent » (p. 36).<br />

9


joseph cardijn<br />

Comme le souligne Mme Van Leeuw, c’est pour le jeune<br />

<strong>Cardijn</strong> la révélation du fossé considérable qui déjà s’est<br />

creusé entre le monde ouvrier et l’Église.<br />

Toute la vie de <strong>Cardijn</strong> sera au service de leurs retrouvailles,<br />

ce qui, plus que l’invention de formes pastorales<br />

nouvelles, plus également que la nécessaire mise en cause de<br />

certaines manières de voir et de faire dans l’Église, concerne<br />

finalement, la redécouverte de la force de l’Évangile, capable<br />

de transformer non seulement <strong>des</strong> existences mais<br />

aussi <strong>des</strong> rapports sociaux déséquilibrés ou injustes. Tout<br />

le récit donne à voir et à sentir comment l’action du jeune<br />

abbé, du pasteur de la <strong>jeunes</strong>se de Laeken, de l’initiateur<br />

de la J.O.C., du développeur de cette intuition en Belgique<br />

puis dans bien d’autres pays, enfin du cardinal et conseiller<br />

<strong>des</strong> papes, est avant tout focalisée par ce désir et cette<br />

recherche : comment faire pour que l’Évangile déploie sa<br />

vigueur et révèle ses capacités à contrer les mécanismes qui<br />

enferment certains dans un <strong>des</strong>tin sans horizon ?<br />

Le portrait est riche et nuancé. Il donne à voir, comme<br />

on pouvait s’y attendre, un homme passionnément engagé<br />

dans ce qu’il fait, très courageux (il prend de gros risques,<br />

notamment durant les deux guerres mondiales et connaîtra<br />

la prison à plusieurs reprises), entreprenant, ayant un<br />

sens aigu <strong>des</strong> relations, mais aussi quelqu’un qui réfléchit,<br />

qui cherche, qui enquête, soucieux sans cesse de toucher<br />

presque physiquement la réalité, un homme habité également<br />

par un grand souci de formation, convaincu au plus<br />

profond de lui-même qu’il y a un potentiel inexploité extraordinaire<br />

chez les <strong>jeunes</strong> ouvrier-ères. Mais <strong>Cardijn</strong>, c’est<br />

aussi un spirituel qui veut « se tuer pour le salut de la classe<br />

10


préface<br />

ouvrière » (p. 39 et 120), hanté par le désir que la Bonne<br />

Nouvelle puisse toucher les milieux populaires et être portée<br />

par eux, certain que l’Église en recevrait un surcroît de<br />

vigueur, de fraîcheur et de crédibilité.<br />

De plus, l’auteur, en prenant soin de dépeindre le<br />

contexte dans lequel <strong>Cardijn</strong> naît, grandit et œuvre, montre<br />

comment son action s’inscrit dans tout un mouvement et<br />

recueille les fruits du « catholicisme social », <strong>des</strong> recherches<br />

<strong>des</strong> premiers chrétiens démocrates, du début du syndicalisme<br />

chrétien, et enfin d’une pastorale <strong>des</strong> <strong>jeunes</strong> en cours<br />

de restructuration (avec l’A.C.J.B. notamment), le tout<br />

dans le cadre de la redécouverte de l’importance cruciale<br />

pour l’Église de l’apostolat <strong>des</strong> laïcs.<br />

À l’heure où l’Action catholique est à la recherche d’un<br />

second souffle, en quoi ce livre peut-il l’aider ? Il n’est pas<br />

conçu, je crois, dans un esprit nostalgique (ah, comme la<br />

J.O.C. d’antan était forte et audacieuse !) mais il permet de<br />

revisiter les sources et de montrer ce qu’elles gardent de tout<br />

à fait actuel : notamment cette intuition que les mieux placés<br />

pour découvrir la manière dont l’Évangile s’adresse à leur<br />

réalité, sont précisément ceux qui vivent cette réalité. Peutêtre<br />

faut-il seulement que les mouvements de <strong>jeunes</strong>se de<br />

l’Action catholique soient, aujourd’hui encore plus qu’hier,<br />

<strong>des</strong> mouvements d’initiation à la foi, à l’expérience spirituelle,<br />

à la fréquentation de la Bible, afin que justement,<br />

cette intuition de départ puisse continuer d’exister.<br />

Grand merci à Mme Van Leeuw de nous rafraîchir ainsi<br />

la mémoire !<br />

Étienne Grieu, s.j.


Introduction<br />

D<br />

ébut août 1964. Des dizaines de milliers de <strong>jeunes</strong><br />

<strong>ouvriers</strong> en provenance de toute l’Europe affluent<br />

à la nuit tombante vers un stade de Strasbourg, siège du<br />

Parlement européen. L’ambiance est festive. Avançant au<br />

son <strong>des</strong> accordéons et <strong>des</strong> harmonicas, portant <strong>des</strong> pancartes,<br />

tout sourire, ils distribuent à la volée <strong>des</strong> tracts<br />

revendiquant <strong>des</strong> droits pour la <strong>jeunes</strong>se travailleuse.<br />

Nous sommes en plein Euro-Rallye de la Jeunesse<br />

ouvrière chrétienne. Ils sont plus de vingt mille <strong>jeunes</strong> jocistes,<br />

dont deux mille délégués, originaires de quatorze<br />

nations. Réunis depuis le 29 juillet, ces délégués ont, durant<br />

les trois jours précédents, travaillé intensivement dans<br />

de <strong>nom</strong>breuses commissions d’étu<strong>des</strong>. Ils veulent que les<br />

responsables européens n’oublient pas de les prendre en<br />

compte, eux qui demain participeront à l’édification de<br />

l’Europe, et ils font proclamer et acclamer le « Statut du<br />

13


joseph cardijn<br />

jeune travailleur ». Un message de Paul VI leur est radiodiffusé<br />

:<br />

Nous saluons en vous la Jeunesse ouvrière chrétienne,<br />

celle que Dieu a suscitée au cœur de notre siècle par<br />

le moyen d’un de ses prêtres : votre admirable et infatigable<br />

fondateur ; votre et Notre cher Monseigneur<br />

<strong>Cardijn</strong>.<br />

Les acclamations fusent. Les jocistes sont touchés au<br />

cœur.<br />

Monseigneur <strong>Cardijn</strong>, qui préside la messe finale le lendemain,<br />

a alors plus de quatre-vingts ans. Quelques mois<br />

plus tard, il sera créé Cardinal.<br />

Mais comment est née la Jeunesse ouvrière chrétienne ?<br />

Pourquoi est-elle née ? Qui est exactement cet homme,<br />

<strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong>, né dans une famille mo<strong>des</strong>te, côtoyant à<br />

la fin de sa vie les plus grands ?<br />

*<br />

Faisons un bond de plus de quatre-vingts ans en arrière.<br />

Le 13 novembre 1882 naît à Bruxelles le petit <strong>Joseph</strong>.<br />

À ce moment, la Belgique occupe une excellente position<br />

éco<strong>nom</strong>ique. En raison de sa situation géographique, de<br />

ses abondantes ressources minières, de son industrie et de<br />

ses moyens de communication, elle est considérée comme<br />

l’un <strong>des</strong> pays les plus industrialisés et les plus riches de la<br />

planète. Mais hélas, cette industrialisation n’a pas profité<br />

à tous : les conditions de vie de la classe ouvrière sont alors<br />

très difficiles.<br />

14


introduction<br />

Même si les historiens ont calculé que le salaire d’un<br />

mineur a augmenté de plus de soixante pourcents entre<br />

la moitié du dix-neuvième siècle et les années 1870 à 1880<br />

et que cette croissance a dépassé celle du coût de la vie, le<br />

salaire de départ était tellement insignifiant — car uniquement<br />

régulé par la loi de l’offre et de la demande — qu’au<br />

début <strong>des</strong> années 1880, l’ouvrier recevait encore un salaire<br />

inférieur à celui qu’il aurait été juste de lui donner.<br />

Considérons la situation de l’ouvrier vers le milieu du<br />

dix-neuvième siècle. Comme le constatait à l’époque un<br />

chef d’entreprise de la région d’Alost, les <strong>ouvriers</strong> ne gagnaient<br />

pas assez pour vivre et trop pour mourir : ils ne<br />

pouvaient pas faire vivre leur famille décemment. En plus,<br />

certains patrons appliquaient le truck-system : une partie du<br />

salaire <strong>des</strong> <strong>ouvriers</strong> était payée en argent, l’autre consistait<br />

en bons avec lesquels ils devaient payer leurs achats dans<br />

les magasins liés à l’usine. Ensuite, les <strong>ouvriers</strong> travaillaient<br />

jusqu’à douze à quatorze heures par jour, sans compter les<br />

trajets entre le domicile et l’usine, parfois fort longs, d’autant<br />

qu’ils étaient généralement effectués à pied. En outre,<br />

ils étaient soumis, sans beaucoup de protection, à l’arbitraire<br />

patronal. Que survienne un accident ou une maladie<br />

et ils se retrouvaient sans aide aucune, réduits à la misère.<br />

De plus, ils étaient privés du droit de vote aux élections et<br />

du droit de s’associer, quelle que soit l’action envisagée.<br />

<strong>Au</strong>cune protection particulière n’était accordée, ni aux<br />

femmes, ni même aux enfants, quelquefois mis au travail<br />

dès l’âge de six ans pour aider leurs parents à boucler leur<br />

budget. Tous étaient susceptibles de devoir travailler la nuit<br />

et soumis aux mêmes horaires. L’obligation du « livret de<br />

15


joseph cardijn<br />

travail » où étaient inscrits, outre les dates d’entrée et de sortie<br />

<strong>des</strong> différentes places occupées, les motifs de départ et les<br />

appréciations sur le comportement <strong>des</strong> <strong>ouvriers</strong>, permettait<br />

aux patrons de repérer les <strong>ouvriers</strong> les plus revendicatifs et<br />

de ne pas les engager.<br />

Les étu<strong>des</strong> sociales de l’époque, corroborées par les travaux<br />

<strong>des</strong> historiens, sont éloquentes. Et <strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong><br />

lui-même, dans les étu<strong>des</strong> sociales qu’il mènera, parlera<br />

avec justesse « <strong>des</strong> tares et <strong>des</strong> abus qui ont contaminé le<br />

travail pendant tout le dix-neuvième siècle » et qui avaient<br />

pour conséquences un logement misérable et une promiscuité<br />

malsaine, la malnutrition et la mauvaise santé, une<br />

instruction élémentaire ou inexistante, l’alcoolisme, l’« immoralité<br />

»…<br />

L’histoire de la conquête <strong>des</strong> droits <strong>des</strong> travailleurs a<br />

maintes fois été écrite ailleurs : je me bornerai à en évoquer<br />

très brièvement certains moments importants.<br />

Venir en aide aux <strong>ouvriers</strong> a d’abord été le fruit d’initiatives<br />

privées : les patronages pour les apprentis et les sociétés<br />

ouvrières pour les adultes, par exemple, ont vu le jour à<br />

l’instigation de catholiques sociaux souvent proches de<br />

la Société de Saint-Vincent-de-Paul. Mais ces initiatives,<br />

comme d’autres, ne touchaient tout compte fait qu’une<br />

minorité d’<strong>ouvriers</strong>.<br />

<strong>Au</strong> Parti catholique, qui aurait justement dû être du côté<br />

<strong>des</strong> pauvres, comme le fut plus tard <strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong>, les<br />

conservateurs, tel Charles Woeste, ont été très longtemps<br />

majoritaires et ne voulaient pas réglementer le travail. <strong>Au</strong><br />

même moment, au Parti libéral, Frère-Orban ne le souhaitait<br />

pas non plus.<br />

16


introduction<br />

Il fallut attendre 1866 pour que soit supprimée l’interdiction<br />

<strong>des</strong> rassemblements <strong>ouvriers</strong>, mais ce « droit de<br />

coalition » était cependant restreint dans la pratique. Pour<br />

le reste, ce n’est que dans la seconde moitié <strong>des</strong> années 1880<br />

que les choses commencèrent à changer sous la pression<br />

d’un mouvement ouvrier de plus en plus revendicatif et<br />

agressif. Le gouvernement à majorité catholique d’<strong>Au</strong>guste<br />

Beernaert, avec le soutien du roi Léopold II, vote alors toute<br />

une série de lois : répression du truck-system et création <strong>des</strong><br />

Conseils d’Industrie et du Travail composés paritairement<br />

de représentants <strong>des</strong> patrons et <strong>des</strong> <strong>ouvriers</strong>, démocratisation<br />

du fonctionnement <strong>des</strong> conseils de prud’homme<br />

(actuellement tribunaux de travail) et, alors que <strong>Joseph</strong><br />

<strong>Cardijn</strong> a sept ans, interdiction du travail industriel aux<br />

enfants de moins de douze ans, réglementation du temps<br />

de travail pour les <strong>jeunes</strong> et interdiction de certains travaux<br />

pour les filles de moins de vingt et un ans. De plus, le<br />

Gouvernement multiplie les lignes de chemin de fer vicinal<br />

et crée les abonnements <strong>ouvriers</strong>, permettant ainsi aux <strong>ouvriers</strong><br />

de rentrer chaque soir chez eux. Il soutient également<br />

la création d’habitations et de logements à bon marché.<br />

Le 15 mai 1891 — <strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong> a alors huit ans et<br />

demi —, le pape Léon XIII publie une lettre encyclique<br />

considérée aujourd’hui comme le texte fondateur de<br />

la doctrine sociale de l’Église : Rerum novarum. Léon XIII<br />

y allie charité et justice et dénonce le manque de protection<br />

et la situation déplorable <strong>des</strong> <strong>ouvriers</strong> : « Peu à peu, les<br />

travailleurs isolés et sans défense se sont vus avec le temps<br />

livrés à la merci de maîtres inhumains et à la cupidité d’une<br />

concurrence effrénée. » Il affirme donc que « l’autorité<br />

17


joseph cardijn<br />

publique doit prendre les mesures voulues pour sauvegarder<br />

la vie et les intérêts de la classe ouvrière. Si elle y manque,<br />

elle viole la stricte justice qui veut qu’on rende à chacun<br />

son dû ». Ce texte qui encourage également le syndicalisme<br />

chrétien et le catholicisme social, sera perçu comme légitimant<br />

l’action du gouvernement Beernaert.<br />

À Hal, où il habite après que ses parents ont rejoint la<br />

famille paternelle, le jeune <strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong> a l’occasion de<br />

participer avec son père à <strong>des</strong> meetings de l’abbé Daens,<br />

un <strong>des</strong> fondateurs du « Christene Volkspartij » qui s’oppose<br />

au Parti catholique conservateur et dont le programme<br />

inclut la défense du prolétariat et la lutte contre les injustices<br />

socio-éco<strong>nom</strong>iques. Un film a popularisé cette figure<br />

importante du combat social catholique flamand, élu parlementaire<br />

en 1894, et auquel les conservateurs s’opposèrent<br />

avec force, allant jusqu’à écrire au Pape pour l’empêcher de<br />

mener ses actions. Bien <strong>des</strong> années plus tard, parlant de sa<br />

<strong>jeunes</strong>se, l’abbé <strong>Cardijn</strong> raconte :<br />

C’était aussi l’époque où le père Daens et d’autres commencèrent<br />

à s’engager pour remédier à la situation intolérable<br />

que vivait la classe ouvrière. Je me souviens <strong>des</strong><br />

grands meetings que le père Daens organisait à Hal et auxquels,<br />

nous, <strong>jeunes</strong> étudiants, assistions parce que ses<br />

paroles nous allaient droit au cœur. C’est ainsi que,<br />

même si j’étais étudiant, je me sentais interpellé. C’était<br />

tout mon avenir, ma vocation.<br />

L’abbé <strong>Cardijn</strong> a-t-il été tenté de faire de la politique<br />

pour défendre les <strong>jeunes</strong> travailleurs ? Son idée force sera<br />

18


introduction<br />

plutôt de confier aux personnes concernées, <strong>des</strong> laïcs en<br />

l’occurrence, — <strong>ouvriers</strong> et <strong>jeunes</strong> <strong>ouvriers</strong> —, le soin de se<br />

défendre, tout en leur accordant le soutien et la formation<br />

nécessaires pour qu’ils y arrivent. C’est ce que nous verrons<br />

dans les pages qui suivent.<br />

1


Une naissance<br />

à Schaerbeek<br />

Étonnamment, l’acte de naissance de <strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong><br />

indique qu’il est né le 18 novembre 1882 alors que,<br />

d’après les registres de baptême de l’église Saint-Servais,<br />

il a été baptisé le 16 novembre, deux jours auparavant. À<br />

l’époque, les enfants étaient baptisés rapidement après avoir<br />

vu le jour, mais tout de même pas in utero ! L’explication de<br />

ce phé<strong>nom</strong>ène est simple et l’intéressé l’a souvent donnée,<br />

comme en 1962, à la B.R.T. :<br />

En fait, je suis né le 13 novembre, mais ma mère était<br />

très malade et mon père n’avait qu’une idée en tête :<br />

c’était de me faire baptiser et de m’envoyer à Hal pour<br />

y recevoir une éducation. C’est ainsi que mon père m’a<br />

déclaré plus tard sans vraiment y réfléchir. […] Plus tard<br />

cela m’a créé <strong>des</strong> problèmes.<br />

21


En lecture partielle…


Table <strong>des</strong> matières<br />

Liste <strong>des</strong> abréviations ................................. 7<br />

Préface, par Étienne Grieu, s.j. ......................... 9<br />

Introduction ...................................... 13<br />

Une naissance à Schaerbeek .......................... 21<br />

Enfance au Pays de Hal .............................. 27<br />

« Je veux devenir prêtre » ou le départ pour Malines ........ 39<br />

Courte plongée dans le mileu de l’École <strong>des</strong> Sciences sociales<br />

à Louvain ........................................ 53<br />

Professeur et enquêteur à Basse-Wavre .................. 61<br />

Enfin ! ........................................... 69<br />

La Première Guerre mondiale ......................... 85<br />

Joies et difficultés de l’après-guerre ................... 103<br />

305


table <strong>des</strong> matières<br />

La « Jeunesse syndicaliste »<br />

et la « Fédération Joie et Travail » .................... 111<br />

Du côté masculin ................................ 111<br />

Du côté féminin ................................. 116<br />

Oppositions et critiques ............................ 118<br />

Des étudiants à l’aide ............................. 119<br />

Les débuts du mouvement jociste .................... 121<br />

La naissance de la Jeunesse ouvrière chrétienne (J.O.C.) ....... 121<br />

Le congrès de Marcinelle ........................... 124<br />

Réunion à l’Évêché ............................... 127<br />

<strong>Au</strong>dience privée avec Pie XI ......................... 129<br />

Premier congrès de la J.O.C. ......................... 133<br />

Les oppositions continuent .......................... 138<br />

La J.O.C. se développe ............................. 139<br />

Dans le nord du pays .............................. 140<br />

<strong>Au</strong> féminin .................................... 141<br />

<strong>Au</strong>mônier général ................................ 142<br />

<strong>Au</strong> quotidien ................................... 145<br />

La seconde moitié <strong>des</strong> années vingt et les années trente .... 147<br />

<strong>Au</strong> Vatican .................................... 149<br />

Organisation, réalisations et vie du mouvement ............ 150<br />

Déménagement indispensable ........................ 161<br />

Le pèlerinage de la J.O.C. et de la K.A.J. à Rome ........... 163<br />

Reconnaissance épiscopale ........................... 168<br />

Quadragesimo anno ............................... 169<br />

Jubilé <strong>des</strong> 25 ans de prêtrise .......................... 169<br />

La crise ....................................... 174<br />

La Centrale jociste ............................... 176<br />

Oppositions .................................... 185<br />

306


table <strong>des</strong> matières<br />

Le jocisme : mouvement pour la défense de l’ouvrier ? ........ 191<br />

Départ de Fernand Tonnet et Paul Garcet ............... 192<br />

Les dix ans du jocisme ............................. 194<br />

La montée <strong>des</strong> totalitarismes ......................... 197<br />

Expansion du jocisme hors de la Belgique ................ 200<br />

Relations suivies avec Pie XI et le Saint-Siège .............. 208<br />

L’élection de Pie XII et le pèlerinage international .......... 210<br />

La Seconde Guerre mondiale ....................... 213<br />

Internationalisation et grands voyages intercontinentaux .. 229<br />

En Belgique .................................... 229<br />

La J.O.C. internationale ........................... 242<br />

Cardinal ! .................................... 270<br />

Le concile Vatican II .............................. 277<br />

L’apostolat <strong>des</strong> laïcs ............................... 277<br />

La quatrième session du concile ....................... 279<br />

Été 1967 ....................................... 281<br />

En guise de conclusion ............................ 287<br />

Appendice. Portrait de Mgr <strong>Cardijn</strong> .................. 291<br />

Bibliographie succincte ............................ 303<br />

1


Dans la collection « Béthanie »<br />

Karin Seethaler, La force de la contemplation. Trouver la guérison dans<br />

le silence, 2016.<br />

Giovanni Cucci, Paradis virtuel ou enfer.net ? Risques et possibilités de la<br />

révolution digitale, 2016.<br />

Gérard Fomerand, Le christianisme intérieur, une voie nouvelle ?, 2016.<br />

Francesco Lorenzi, La route du Soleil, 2016.<br />

Ghislain du Chéné, Marie, femme de Cléophas. <strong>Au</strong>tobiographie, 2016.<br />

Gérard Bénéteau, Quelque 2000 ans après… Osez encore y croire, 2016.<br />

Tommaso Guadagno, Un chemin du cœur. Enseignement et prières pour<br />

entrer dans le Réseau Mondial de Prière du Pape, l’Apostolat de la Prière,<br />

2016.<br />

Dolores Aleixandre, <strong>Au</strong>x portes du soir. Vieillir avec splendeur, 2016.<br />

Bénédicte Oriou, Rassure mes copains, 2016.<br />

Nikolaas Sintobin, Moquez-vous <strong>des</strong> jésuites… Humour et spiritualité,<br />

2016.<br />

Christian Vinel, La maladie peut faire grandir. Témoignage et réflexions,<br />

2015.<br />

Pape François, 100 textes sur la miséricorde, 2015.<br />

René Stockman, La boîte de Pandore. Réflexion sur l’euthanasie sous une<br />

perspective chrétienne, 2015.<br />

Jacques Naedts, Saint Monon. Le saint ermite de Nassogne, 2016.<br />

Robert De Coster, La Parole qui a changé le monde. Six révolutions de<br />

Jésus de Nazareth, 2015.<br />

Nicole Timbal, Pierre Teilhard de Chardin. Un homme de Dieu au cœur<br />

de la matière, 2015.<br />

Monique Hébrard, Pour une Église au visage d’Évangile. Douze urgences,<br />

2014.<br />

Luc Lannoye, Car ils seront consolés. Les grâces de l’écoute et prière, 2014.<br />

Rosario Carello, 80 fioretti du pape François. Récits authentiques, 2014.<br />

Juvénal Rutumbu, La Pâque du chrétien, 2014.<br />

Corinne Delalande, Quand je rencontre mon frère malade, 2014.


José Davin, Les personnes homosexuelles. Un arc-en-ciel près <strong>des</strong> nuages, 2014<br />

Michel Salamolard, Communautés chrétiennes. Osez la crise !, 2014.<br />

José Davin, Lorsque la vie prend de l’âge. Pour continuer sereinement la route,<br />

2013.<br />

Marthe Mahieu, L’étoile de Nativitas. Monica Nève au cœur <strong>des</strong> Marolles,<br />

2013.<br />

Jean-Marie de Marneffe, La joie d’un moine. Journal mystique, 2013.<br />

José Mpongo Ponte, Les voies du bonheur conjugal, 2013.<br />

Henri Weber, Quand bourgeonne l’espérance. 24 récits tout simples, 2013.<br />

Arthur Buekens, Quand la Bible parle de pardon, 2013.<br />

Gérard Fomerand, Renaissance du christianisme. Le retour aux origines,<br />

2013.<br />

Giorgio Gonella, Le vent parfumé du désert. Sur les traces de Dieu, entre<br />

solitude et communion, 2013.<br />

José Davin et Paul-Emmanuel Biron, Quand germe la semence. Chemins<br />

pour l’Église de demain, 2012.<br />

Christophe Rouard, Quinze regards sur les apparitions de Beauraing, 2012.<br />

Mgr André-<strong>Joseph</strong> Léonard, La Divine Tragédie. Libre parcours dans la foi<br />

chrétienne, 2012.<br />

Dan Beaurain-Gaël, François d’Assise, l’insoumis de Dieu, 2012.<br />

Pascale Dalcq, Et votre joie sera parfaite. Témoignage. Itinéraire d’une résurrection,<br />

2012.<br />

Pierre Favre, La foi dans la peau. Témoignage, 2012.<br />

Didier Vandevelde et Bruno Senny, Dieu en rit encore. Perles d’ados, 2012.<br />

Hubert Jacobs (dir.), Saints et bienheureux de Belgique, 2012.


Achevé d’imprimer le 30 mars 2017<br />

sur les presses de l’imprimerie Bietlot, à 6060 Gilly (Belgique).


<strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong><br />

<strong>Joseph</strong> <strong>Cardijn</strong>, le fondateur de la JOC, naît en 1882 dans une<br />

famille ouvrière et passe une grande partie de son enfance et de son<br />

adolescence à Hal en Belgique. Il devient prêtre en 1906. Convaincu<br />

de la valeur de chaque jeune ouvrier et ouvrière qui, dit-il, valent<br />

« plus que tout l’or du monde », il va consacrer sa vie à leur cause,<br />

créant la JOC en 1925. Le mouvement connaîtra une expansion<br />

croissante et au moment de sa mort, en 1967, sera répandu sur tous<br />

les continents.<br />

De Pie XI à Paul VI, tous les papes ont soutenu l’action de <strong>Cardijn</strong><br />

qui sera créé cardinal en 1965, deux ans avant sa mort.<br />

Cinquante années ont passé depuis son décès. S’ils ne sont pas engagés<br />

dans le mouvement social-chrétien, peu de nos contemporains<br />

ont entendu parler de lui. Il était donc important de faire découvrir<br />

ou redécouvrir l’itinéraire de cet homme dont l’action a marqué la<br />

vie de plusieurs générations.<br />

Claire Van Leeuw<br />

Claire Van Leeuw est historienne de formation. Mariée, mère de trois<br />

enfants, elle est bénévole dans le secteur social au centre-ville de Bruxelles.<br />

ISBN 978-2-87356-745-3<br />

Prix TTC : 24,90 €<br />

9 782873 567453 Collection « Béthanie »<br />

Photo de couverture : © AGR-AE – Fonds <strong>Cardijn</strong> n° 82

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