JOURNAL ASMAC No 5 - Octobre 2015

Ill. 2: Vénus de Stratzing, Autriche
La masse à modeler et à former est un
matériel fascinant, et probablement des
enfants talentueux s’en sont servi, laissant
libre cours à leur imagination. Il devait
aussi être passionnant de voir comment
un morceau d’ivoire peut être sculpté en
mammouth ou en homme-lion 14 . Avec des
traits vifs, les femmes dansantes de Gönnersdorf,
Allemagne, ainsi que divers
animaux ont été gravés dans des plaques
de pierre 15 . L’artiste a-t-il d’abord exercé et
essayé ses traits sur le sol, comme pour les
ébauches des peintures rupestres? Des
enfants ont-ils copié ces gestes?
Les peintures étaient fabriquées à partir
d’ocre jaune et rouge, d’hématite, de graphite,
de calcaire coquillier 16 ou de charbon
de bois. Elles étaient utilisées aussi
bien pour des peintures corporelles que
pour orner les murs de roche.
Combien de temps les artistes de ces peintures
rupestres ont-ils observé leurs modèles,
spécimens de la faune de l’époque
ou humains. Combien de temps ont-ils
passé à tenter de les représenter aussi fidèlement
que possible avant de graver ou
de peindre leurs œuvres à l’emplacement
approprié de la caverne? Les images, animées
par la lueur dansante des flammes,
ont certainement fasciné adultes et enfants.
Quelles histoires se sont-ils racontées,
quelles chansons ont-ils chanté? Le
chant et la danse constituent une unité
harmonieuse originelle. Alors que le
chant noue des liens émotionnels au sein
du groupe 17 , la danse est illustrée par la
Vénus du Galgenberg en Autriche – une
petite figurine de serpentine 18 (ill. 2) – ,
par les gravures sur pierre des femmes
élancées de Gönnersdorf en Allemagne 19 ,
par les deux «sorciers» de la grotte des
Trois-Frères, mais aussi par les traces de
pas d’enfants dans le sol argileux de
Montespan 20 , en France. Les enfants ont
sans doute participé aux chants et aux
danses.
On utilisait pour l’expression musicale des
flûtes en os de vautour, en ivoire de mammouth
et en os de rennes (ill. 3), des
racleurs en os et en bois, des phalanges
sifflantes, des percussions en os, des
rhombes, arcs musicaux, hochets en
corne et osier ainsi que des cadres de tambours
en branches souples 21 . De simples
hochets – petits morceaux de silex agités
dans le creux de la main – émettent un
son haut et cristallin. Le cri du hibou,
imité par un ocarina formé en joignant
Ill. 3: Flûte en os de Grubgraben,
Autriche
les mains, était certainement connu des
enfants du Paléolithique. Les trois tombes
de nourrissons de Krems-Wachtberg, en
Autriche, ne nous renseignent pas sur les
«jouets», néanmoins, des colliers en
perles d’ivoire ont été déposés dans la
tombe à côté des jumeaux nouveau-nés 22 .
Les jeunes enfants ont probablement joué
à l’intérieur avec des pierres, des os, des
cornes et des morceaux de bois. Les enfants
plus âgés mesuraient certainement
leur force dans des bagarres et comparaient
leur souplesse, endurance et vitesse
en courant, en se battant et en grimpant.
Ces aptitudes constituaient un avantage
certain dans un environnement qu’il fallait
partager avec des bêtes sauvages et des
animaux de proie. La chasse à la lance et
au javelot ainsi que toutes les stratégies de
survie devaient être apprises dès le plus
jeune âge, car avec une espérance de vie
moyenne de 30 ans, il fallait vite être autonome
et participer à la quête de nourriture
pour la communauté. La maturité
sexuelle, qui avait lieu entre 10 et 14 ans,
et un rite d’initiation marquaient le passage
vers l’âge adulte. Les deux garçons de
Sungir, Russie, ont été enterrés avec les
armes de chasseur 24 .
N o 5 Octobre 2015
VSAO JOURNAL ASMAC
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