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Accumulation du capital et gains de productivite au Maroc

Taoufik Abbad | Economiste-Chercheur La réflexion développée dans cet ouvrage part d’un constat alarmant et pressant. Le processus continu et renforcé de l’accumulation du capital, dans lequel s’est engagé le Maroc depuis les années 2000, a permis certes de préserver la stabilité des équilibres fondamentaux et d’amortir les différents chocs exogènes, aussi bien internes qu’externes, mais il n’a pas permis d’insuffler un accroissement plus important des gains de productivité et d’accélérer la transformation de la base productive. Ce livre, basé sur une utilisation extensive de données statistiques, propose de décrire les soubassements du processus d’accumulation du capital au Maroc et de mettre en exergue les inhibiteurs chroniques qui condamnent l’économie marocaine aux affres d’une productivité faible.

Taoufik Abbad | Economiste-Chercheur
La réflexion développée dans cet ouvrage part d’un constat alarmant et pressant. Le processus continu et renforcé de l’accumulation du capital, dans lequel s’est engagé le Maroc depuis les années 2000, a permis certes de préserver la stabilité des équilibres fondamentaux et d’amortir les différents chocs exogènes, aussi bien internes qu’externes, mais il n’a pas permis d’insuffler un accroissement plus important des gains de productivité et d’accélérer la transformation de la base productive. Ce livre, basé sur une utilisation extensive de données statistiques, propose de décrire les soubassements du processus d’accumulation du capital au Maroc et de mettre en exergue les inhibiteurs chroniques qui condamnent l’économie marocaine aux affres d’une productivité faible.

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GAINS DE PRODUCTIVITÉ, COÛT DU TRAVAIL ET MARGES DES ENTREPRISES<br />

<strong>du</strong> travail. L’hétérogénéité est constatée, également, <strong>au</strong> nive<strong>au</strong> <strong>du</strong> t<strong>au</strong>x <strong>de</strong> marge <strong>de</strong>s entreprises,<br />

plus particulièrement, <strong>au</strong> sein <strong>de</strong>s branches exposées à la concurrence internationale. Entre les<br />

<strong>de</strong>ux pério<strong>de</strong>s 2000-2007 <strong>et</strong> 2008-2014, il a été observé une amélioration <strong>du</strong> t<strong>au</strong>x <strong>de</strong> marge <strong>de</strong><br />

l’in<strong>du</strong>strie alimentaire <strong>et</strong> tabac <strong>et</strong> <strong>de</strong>s <strong>au</strong>tres in<strong>du</strong>stries manufacturières, alors que l’in<strong>du</strong>strie <strong>du</strong><br />

textile a connu une dégradation <strong>du</strong> t<strong>au</strong>x <strong>de</strong> marge. L’amélioration la plus significative <strong>de</strong> ce t<strong>au</strong>x<br />

entre ces <strong>de</strong>ux pério<strong>de</strong>s revient <strong>au</strong>x activités extractives alors que la baisse la plus prononcée<br />

revient <strong>au</strong> secteur <strong>du</strong> commerce. Dans l’ensemble, six sur treize branches d’activité ont connu<br />

une amélioration <strong>de</strong> la variation moyenne <strong>du</strong> t<strong>au</strong>x <strong>de</strong> marge, quatre branches ont enregistré <strong>de</strong>s<br />

changements minimes <strong>et</strong> les trois restantes une dégradation. Les <strong>gains</strong> <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ctivité, le coût<br />

réel <strong>du</strong> travail <strong>et</strong> les termes <strong>de</strong> l’échange en ont contribué <strong>de</strong> manière différenciée.<br />

Les résultats ont montré, en outre, que l’<strong>au</strong>gmentation <strong>de</strong>s marges <strong>de</strong>s entreprises ne s’est<br />

pas tra<strong>du</strong>ite par une remontée correspondante <strong>de</strong> l’investissement pro<strong>du</strong>ctif <strong>et</strong> que la répartition<br />

<strong>de</strong> l’excé<strong>de</strong>nt brut d’exploitation a servi plus le règlement <strong>de</strong>s charges <strong>et</strong> la distribution <strong>de</strong>s<br />

divi<strong>de</strong>n<strong>de</strong>s <strong>et</strong> moins le réinvestissement. De ce fait, seule une partie <strong>du</strong> théorème énoncé <strong>au</strong><br />

milieu <strong>de</strong>s années 70 par le Chancelier allemand Helmut Schmidt (les profits d’<strong>au</strong>jourd’hui sont<br />

les investissements <strong>de</strong> <strong>de</strong>main <strong>et</strong> les emplois d’après-<strong>de</strong>main) s’est réalisée, le reste a fait<br />

déf<strong>au</strong>t comme l’indique le n<strong>et</strong> rebond <strong>de</strong>s divi<strong>de</strong>n<strong>de</strong>s versés <strong>du</strong>rant la pério<strong>de</strong> 2008-2014 qui<br />

s’est accompagné d’un repli <strong>du</strong> rythme <strong>de</strong> l’investissement <strong>et</strong> <strong>de</strong> moins en moins <strong>de</strong> créations<br />

n<strong>et</strong>tes d’emplois. En eff<strong>et</strong>, la formation brute <strong>de</strong> <strong>capital</strong> fixe a fortement décéléré en passant <strong>de</strong><br />

7,1% l’an entre 2000 <strong>et</strong> 2007 à seulement 2,7% l’an entre 2008 <strong>et</strong> 2014, <strong>de</strong> même, pour l’emploi<br />

avec <strong>de</strong>s créations n<strong>et</strong>tes <strong>de</strong> seulement 84 mille entre 2008 <strong>et</strong> 2014 contre 150 mille entre 2000<br />

<strong>et</strong> 2007.<br />

L’affaiblissement <strong>de</strong> l’investissement va <strong>de</strong> pair avec le vieillissement <strong>du</strong> stock <strong>de</strong> <strong>capital</strong><br />

puisque la formation brute <strong>du</strong> <strong>capital</strong> fixe évolue à un rythme moins élevé que celui <strong>du</strong> t<strong>au</strong>x <strong>de</strong><br />

dépréciation <strong>du</strong> <strong>capital</strong> (synonyme <strong>de</strong> déclassement). Selon la littérature économique, ce t<strong>au</strong>x se<br />

situe dans un intervalle entre 4% <strong>et</strong> 6% selon le nive<strong>au</strong> <strong>de</strong> développement <strong>du</strong> pays. Concernant<br />

les pays émergents, il est <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 5%. Sur c<strong>et</strong>te base, la progression <strong>de</strong> la FBCF à un rythme<br />

inférieur <strong>au</strong> t<strong>au</strong>x <strong>de</strong> dépréciation positionnerait l’économie dans une phase d’accumulation<br />

négative puisque la consommation <strong>du</strong> <strong>capital</strong> fixe <strong>au</strong>gmente très sensiblement <strong>de</strong> manière à<br />

amputer la valeur ajoutée <strong>et</strong>, par conséquent, la pro<strong>du</strong>ctivité.<br />

La non réinjection <strong>de</strong>s profits réalisés dans la sphère pro<strong>du</strong>ctive <strong>et</strong> dans <strong>de</strong> nouvelles capacités<br />

<strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction pèserait à moyen terme sur le potentiel <strong>de</strong> croissance <strong>de</strong> l’économie, accélèrerait<br />

le vieillissement <strong>du</strong> stock <strong>de</strong> <strong>capital</strong> <strong>et</strong> donnerait un coup d’arrêt <strong>au</strong> progrès technique. Ceci<br />

rendrait ainsi difficile la montée en gamme <strong>de</strong>s pro<strong>du</strong>its domestiques, la génération <strong>de</strong>s <strong>gains</strong> <strong>de</strong><br />

pro<strong>du</strong>ctivité <strong>et</strong> surtout, le reversement <strong>de</strong> la courbe <strong>du</strong> chômage, avec toutes les conséquences<br />

sur les conditions <strong>de</strong> la compétitivité structurelle <strong>et</strong> sur la vitalité <strong>de</strong> notre société (précarisation<br />

<strong>et</strong> déqualification <strong>de</strong>s emplois, déclassement social, <strong>et</strong>c.).<br />

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