Un réservoir à pensées (Octobre 2016)

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EXPRESSO Enquête Il faut une révision du code du travail Il faut que l’Etat externalise tous les services qui ne relèvent pas de sa spécialité Il faut en fi nir avec les logiques de rente Il faut opérer une dévaluation, même mineure, voire transitoire, du dirham Mettre en place des Agences de développement du tourisme Tarik Sijilmassi PDG Crédit Agricole Compte tenu de la spécificité de la banque que je représente, je parlerai plus particulièrement de l’économie rurale. Il me semble que le plan Maroc Vert donne un véritable cadre de travail pour la promotion de l’agriculture marocaine. Dans la phase actuelle, l’accent est mis sur l’encouragement de la valorisation des produits et la meilleure création de valeur ajoutée avec la logique de filières intégrée. Cependant, j’estime que ce programme, et plus largement l’économie rurale, serait grandement favorisé par des mesures d’accompagnement fondamentales: l’amélioration du cadre de vie en milieu rural, la proximité des services de base, l’accès à l’éducation, à la santé, aux loisirs sont nécessaires. En effet, le monde rural a besoin de compétences humaines pointues, d’experts, de conseillers en investissement, de professions libérales... Il y a aussi besoin de services valables de loisirs, de logements... bref, il faut rétablir les équilibres pour que le monde rural redevienne un espace attrayant pour l’investissement et pour les jeunes cadres et professionnels qui seraient amenés à y habiter. Mohamed Benmira DGA Medasys Il faut que l’Etat externalise tous les services qui ne relèvent pas de sa spécialité, comme par exemple les fonctions IT. Nous vivons dans l’ère de la spécialisation et il existe des prestataires taillés pour des missions pointues qui ne peuvent être assurées par la puissance publique. Fiscalement parlant, je voudrais relever une Jalil Benabes Taarji Président ANIT Deux mesures me semblent urgentes: D’abord, l’augmentation pérenne du budget de l’ONMT à 200 millions de dirhams par an, sur trois ans cumulés, et sa stabilisation dans le temps. Ensuite, la mise en place urgente des Agences de développement du tourisme (ADC), qui étaient prévues dans la vision 2020 signée en 2011, et qui n’ont jamais vu le jour pour différentes raisons, mauvaises pour la plupart. Les ADC sont un outil de gouvernance qui me paraît indispensable et qui fait cruellement défaut à l’architecture actuelle du secteur. Enfin, il s’agit de totalement exonérer l’acquisianomalie terrible. Comment se fait-il, alors que le pays a un besoin crucial d’argent frais sous forme d’investissement productif, qu’en cas d’augmentation de capital, les liquidités injectées dans le capital depuis un compte courant, par exemple, soient taxées. Si je veux créer une holding et y consolider mes accents, je dois payer. Idem en cas d’opération d’achat et de vente d’entreprise. Le facteur pénalisant de cette taxation improductive est immense, il incite l’investisseur à conserver son cash plutôt que d’en faire profiter l’économie du pays. Ce problème revient régulièrement sur le tapis mais force est de constater que la volonté politique d’y remédier n’est pas au rendez-vous. Hélas! Adil Bennani DG Toyota Maroc Généralement, une révision du code du travail est nécessaire pour donner plus de flexibilité aux entreprises en matière d’emploi. Plus de mesures incitant à l’investissement productif sont les bienvenues. Pour ce qui concerne l’automobile, dans un contexte où l’environnement est au centre de nos préoccupations, un cadre réglementaire favorable aux énergies propres devrait voir le jour avec un système de bonus/malus et une TVA réduite sur les véhicules émettant moins d’un certain taux de CO2. Par ailleurs, nous avons 1,5 million de véhicules qui ont plus de 20 ans d’âge; une prime à la casse permettrait le renouvellement d’un parc vétuste avec une dynamisation de tout le secteur. Le gouvernement a déjà reçu une proposition complète de mesures allant dans ce sens. Nous avons grand espoir que 2017 nous apporte quelques bonnes surprises. Ahmed Baroudi DG SIE (Société d’Investissements énergétiques) Le pays ne peut plus faire l’économie d’une réforme urgente de l’enseignement. De nos jours, le niveau dont font montre nos jeunes diplômés est incomparable avec celui ayant trait pendant les années 80. Le grand échec de l’école est de ne plus transmettre le sens du civisme, du devoir et du patriotisme. Il s’agit également de se conformer aux besoins et attentes du marché du travail en adaptant les programmes académiques. Enfin, faisons à tout prix s’épanouir la créativité. Comment? En encourageant l’incubation de startups innovantes, tel que cela est fait sous d’autres cieux. Il faut en finir avec les logiques de rente et de situation qui gangrènent notre pays. La solution est dans la création de valeur. 42 EconomieEntreprises Octobre 2016
Enquête tion de biens d’équipement touristiques de la TVA. Cette mesure, me semble-t-il, est à l’étude est pourrait apparaître dans la prochaine loi de finances. Hicham Bensaid Alaoui Directeur des Risques - Euler Hermès ACMAR S’il devait y avoir une mesure phare à instaurer afin de créer les conditions d’une reprise, ce serait celle d’une dévaluation, même mineure, voire transitoire, du dirham. Cette mesure aurait, à court terme, le mérite d’impulser davantage de compétitivité aux exportations marocaines, tout en maintenant le déficit de la balance commerciale à des niveaux acceptables, dans un contexte de prix faibles des commodities, notamment les hydrocarbures, qui représentent l’essentiel de nos importations. Thami Ghorfi Président ESCA Ecole de Management Il faut rendre l’investissement efficient au plus vite. Si, en la matière, la vision est globalement bonne, il y a un déphasage trop important et donc trop coûteux entre le discours et la mise en œuvre des stratégies au service de l’investissement. Les entrepreneurs souffrent trop souvent du décalage entre le discours des décideurs et les processus pour faire aboutir les projets. Nous avons besoin d’ingénieries et de compétences qui favorisent la fluidité et l’efficience de ces processus. L’illustration a été faite par l’Office des changes dans sa démarche, qui engage une ingénierie innovante qui fait gagner l’Etat, les banques et les contribuables, dans l’opération de contribution libératoire des avoirs à l’étranger. Le second chantier est celui de l’export. Nous avons mis de nombreuses stratégies et mobilisé des compétences et des ressources pour faire du Maroc une plateforme d’exportation et un hub pour l’Afrique subsaharienne. Il faudra à mon sens interconnecter tout cela pour accélérer le pas et augmenter très rapidement le nombre d’entreprises exportatrices. Avec quelque 6.000 exportateurs, notre hub n’a pas encore la taille critique… pour un réel impact social. Fouad Abdelmoumni Economiste, Transparency Maroc Il faut d’abord cerner les principaux handicaps à la croissance qui sont à mon sens de deux ordres. Premièrement, les dépenses militaires et le conflit du Sahara qui nous coûtent annuellement l’équivalent de 7% de croissance. L’autre problème «Le monde rural a besoin de compétences humaines pointues» est la mauvaise gouvernance qui nous coûte 2% de croissance. Dans ce sens, les pistes de relance seraient: forcer la marche pour la résolution de l’affaire du Sahara et le rapprochement avec l’Algérie pour accélérer la construction maghrébine. L’autre piste serait que le prochain gouvernement prenne des mesures pour interdire les interférences sur les décisions des organes de contrôle et de justice. Youssef Aqallal DG de Catalyst Business Solutions Il est demandé aux entreprises, tout à fait à juste titre, de payer leurs impôts, leurs taxes en temps et en heure, sachant qu’en cas de retard celles-ci sont fortement pénalisées. Dans le même temps, plusieurs organismes publics et semi-publics continuent, pour leur part, de régler tardivement leurs fournisseurs. Il faut donc d’une part, durcir les sanctions et pénalités contre ces mauvais payeurs et de l’autre encourager les bons payeurs (car heureusement il en existe...) en leur accordant, à titre d’exemple, des abattements sur leurs impôts. C’est une véritable stratégie de conduite du changement qu’il faut adopter pour progressivement contraindre les opérateurs économiques à s’acquitter de leurs factures dans les temps impartis. Il en va de la trésorerie de beaucoup d’entreprises qui périssent asphyxiées alors qu’elles ont, sur le papier, un business modèle viable… 43 EconomieEntreprises Octobre 2016
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