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Un réservoir à pensées (Octobre 2016)

L’année 2016, c’est un euphémisme, ne fut pas glorieuse. Pire taux de croissance depuis 1999, des investissements en berne et, plus généralement, une perte de confiance des opérateurs, qui compromet la dynamique générale de l’Economie. Pis, le modèle de développement même, sur lequel repose le Maroc depuis quinze ans, a été enterré par la patronne des patrons Miriem Bensalah herself. Face à ce constat, et à quelques jours des élections législatives, EE a décidé de mettre les cerveaux économiques les plus brillants du royaume à contribution pour trouver un remède au mal. Notre appel à l’écosystème des affaires a tout de suite fait mouche, au point où, submergés par l’afflux de propositions, nous avons dû procéder à une sélection pour ne garder que celles que nous avons jugées les plus pertinentes. Toujours est-il que parmi ces «100 idées pour relancer le Maroc», plusieurs pistes de redressement seraient immédiatement applicables par le gouvernement, si tant est qu’il se forme enfin (sic).

L’année 2016, c’est un euphémisme, ne fut pas glorieuse. Pire taux de croissance depuis 1999, des investissements en berne et, plus généralement, une perte de confiance des opérateurs, qui compromet la dynamique générale de l’Economie. Pis, le modèle de développement même, sur lequel repose le Maroc depuis quinze ans, a été enterré par la patronne des patrons Miriem Bensalah herself. Face à ce constat, et à quelques jours des élections législatives, EE a décidé de mettre les cerveaux économiques les plus brillants du royaume à contribution pour trouver un remède au mal. Notre appel à l’écosystème des affaires a tout de suite fait mouche, au point où, submergés par l’afflux de propositions, nous avons dû procéder à une sélection pour ne garder que celles que nous avons jugées les plus pertinentes. Toujours est-il que parmi ces «100 idées pour relancer le Maroc», plusieurs pistes de redressement seraient immédiatement applicables par le gouvernement, si tant est qu’il se forme enfin (sic).

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100 IDÉES POUR<br />

RELANCER LE MAROC<br />

Pour Economie Entreprises, 100 personnalités de premier plan proposent 100 idées<br />

au prochain gouvernement pour faire redémarrer la machine économique<br />

XA<br />

LES DESX<br />

XXE<br />

VINGT ANS<br />

DE SUPPLICESXX<br />

XXB<br />

LA XX


ENQUÊTE<br />

Réalisée par la rédaction d’Economie Entreprises<br />

Les voies<br />

de la relance<br />

A la veille d’élections décisives, les voix se<br />

lèvent pour une véritable rupture dans les<br />

politiques économiques.<br />

32 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


Enquête<br />

«Voil<strong>à</strong> six ans que tous les<br />

responsables sont au fait<br />

des indicateurs qui sont<br />

au rouge. Rien, ou presque<br />

n’a été entrepris. Le premier<br />

chantier est l’assainissement<br />

du circuit de la décision», résume<br />

sans concession Raymond<br />

Benhaim, économiste<br />

et ancien conseillé de Abderrahmane<br />

El Youssoufi. <strong>Un</strong><br />

constat que personne, aujourd’hui,<br />

n’est en mesure de<br />

contredire. Car les faits sont<br />

bien l<strong>à</strong>. Si l’année <strong>2016</strong> s’annonce<br />

particulièrement catastrophique<br />

pour cause de<br />

sécheresse, il n’en demeure<br />

pas moins que 2015 n’a pas<br />

été un bon cru et ce, malgré<br />

les pluies exceptionnelles<br />

qui l’ont marquée. Et c’est<br />

ce que confirme d’ailleurs<br />

le très orthodoxe rapport<br />

de la banque centrale paru<br />

fin juillet dernier. «L’atonie<br />

des secteurs non agricoles<br />

s’est poursuivie, la progression<br />

annuelle de leur valeur<br />

ajoutée étant restée limitée<br />

<strong>à</strong> 2,1% depuis 2013, contre<br />

une moyenne de 4,7% entre<br />

2003 et 2012», précise Abdellatif<br />

Jouahri dans son discours<br />

de présentation devant<br />

le roi. Cette situation de faiblesse<br />

de la croissance sur<br />

le long terme (autour de 4%<br />

alors qu’elle doit se situer <strong>à</strong><br />

au moins 7% annuellement)<br />

a engendré une baisse du<br />

taux d’activité des populations<br />

atteignant près de 50%.<br />

Ce qui signifie que malgré<br />

le fait que l’économie crée<br />

moins d’emplois (création<br />

de 129.000 postes en<br />

moyenne entre 2003 et 2014,<br />

contre 33.000 en 2015), le<br />

taux de chômage reste aux<br />

alentours de 10%, toujours<br />

selon Jouahri. Et ce n’est pas<br />

la politique de la demande<br />

maintenue systématiquement<br />

par tous les gouvernements<br />

successifs depuis<br />

2007 qui a inversée la tendance.<br />

Au contraire, et selon<br />

les dires même de Mohammed<br />

Boussaid, ministre de<br />

l’Economie et des Finances,<br />

lors d’une conférence <strong>à</strong><br />

la trésorerie générale du<br />

royaume (TGR), le 16 septembre<br />

dernier, qui n’a ainsi<br />

pas hésité <strong>à</strong> déclarer que<br />

«la politique de la demande<br />

a mené <strong>à</strong> l’insoutenabilité<br />

des finances publiques. En<br />

2013 nous allions vers un<br />

déficit budgétaire de 7% ce<br />

qui nous conduisait directement<br />

vers le non respect des<br />

engagements pris devant le<br />

FMI». <strong>Un</strong>e série de bricolage<br />

budgétaire vont s’en suivre<br />

pour limiter la casse et se<br />

maintenir en dessous des<br />

5% et ce, malgré les dons<br />

des pays du Golfe qui, selon<br />

les estimations du ministre<br />

des Finances se sont situés<br />

<strong>à</strong> 37 milliards de dirhams <strong>à</strong><br />

fin <strong>2016</strong> et un endettement<br />

monstre qui est passé de 430<br />

milliards de dirhams fin 2011<br />

<strong>à</strong> 620 milliards fin 2015 (Voir<br />

E|E de juillet <strong>2016</strong>).<br />

Il ressort des avis que le modèle économique est <strong>à</strong> réinventer.<br />

«L’économie<br />

marocaine est <strong>à</strong> 40%<br />

informelle»<br />

Myopie décisionnelle<br />

Ce qui pousse certains<br />

observateurs <strong>à</strong> appeler <strong>à</strong><br />

changer de fusils d’épaule.<br />

Ainsi, pour l’économiste Mohammed<br />

Chiguer, la décision<br />

économique au Maroc<br />

souffre d’un déficit d’analyse.<br />

«Il faut un meilleur diagnostic<br />

de l’économie nationale.<br />

Il faut arrêter de prendre des<br />

décisions économiques sur<br />

la base que le Maroc est une<br />

économie de marché pur.<br />

L’économie marocaine est <strong>à</strong><br />

40% informelle». <strong>Un</strong> chiffre<br />

qui recoupe étrangement celui<br />

du taux de bancarisation<br />

de la population qui ne dépasse<br />

pas les 60%. Se basant<br />

sur les recommandations<br />

standardisées de la Banque<br />

mondiale et du FMI et autres<br />

majors internationales du<br />

conseil, nos dirigeants ontils<br />

pêché par myopie économique?<br />

Alors que les<br />

décideurs marocains s’enorgueillissent<br />

d’être les bons<br />

élèves du FMI et que le Maroc<br />

est le premier client africain<br />

de la Banque mondiale<br />

et de la BAD, tous les plans<br />

stratégiques depuis 2000<br />

sont l’apanage de cabinets<br />

de conseil internationaux.<br />

Ainsi, selon l’économiste<br />

spécialisé en finance publique<br />

Abdelkader Berrada,<br />

«en matière de politique économique,<br />

financière et commerciale,<br />

l’Etat sollicite fréquemment<br />

l’intervention de<br />

multinationales du conseil<br />

dont l’implantation au Maroc<br />

se renforce parallèlement<br />

<strong>à</strong> l’affaiblissement des<br />

capacités publiques d’expertise<br />

(conception, gestion<br />

et évaluation des politiques<br />

publiques). Les organismes<br />

financiers internationaux et<br />

l’<strong>Un</strong>ion européenne, outre<br />

leur rôle en tant que bailleurs<br />

de fonds, demeurent<br />

cependant la principale<br />

usine <strong>à</strong> idées de l’administration<br />

chérifienne. Durant la<br />

période 2005-2009 uniquement,<br />

la Banque mondiale,<br />

plus spécialement, compte<br />

33 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


Enquête<br />

<strong>à</strong> son actif 59 travaux d’analyse,<br />

parmi lesquelles 35<br />

études économiques et<br />

sectorielles, réalisés pour<br />

son client numéro un en<br />

Afrique». Et selon un dossier<br />

préparé par notre confrère<br />

Yabiladi.com, sur un total de<br />

chiffre d’affaires de 700 <strong>à</strong> un<br />

milliards de dirhams annuel<br />

du secteur du conseil en<br />

stratégie et en organisation<br />

au Maroc, les deux tiers sont<br />

l’apanage de l’Etat. Le recours<br />

systématique <strong>à</strong> des organes<br />

externes serait arrivé <strong>à</strong><br />

tel point où dans certains cas<br />

ce sont les représentants de<br />

ces cabinets qui présentent<br />

au public les stratégies nationales<br />

qu’ils élaborent au lieu<br />

et place des responsables<br />

publiques de tutelle qui devraient<br />

être leur porteur et<br />

les responsables de leurs<br />

mise en place en dernier<br />

ressort. Cette externalisation<br />

de la réflexion et de la décision<br />

souvent <strong>à</strong> des étrangers<br />

ferait-elle perdre au Maroc le<br />

sens de ses réalités? C’est du<br />

moins ce qui semble ressortir<br />

de la faiblesse des rendements<br />

relatifs de l’économie<br />

marocaine des 20 dernières<br />

années avec sa multitude de<br />

plans sectoriels et ses 55 Accords<br />

de libres échanges. Ce<br />

qui pousse Raymond Benhaim<br />

<strong>à</strong> souligner: «L’intensité<br />

des choix et des réalisations<br />

économiques des deux dernières<br />

décennies impose une<br />

évaluation concertée des<br />

plans sectoriels. Et optimiser<br />

et élargir les résultats positifs<br />

des évaluations de ces<br />

plans par la diffusion de leur<br />

raccordement». Abdellatif<br />

L’externalisation de<br />

la réflexion <strong>à</strong> des<br />

étrangers ferait perdre<br />

au Maroc le sens des<br />

réalités<br />

Jouahri pousse le bouchon<br />

encore plus loin lors de la<br />

conférence de la TGR en insistant<br />

sur le fait de revenir<br />

<strong>à</strong> «une planification stratégique<br />

de l’économie dans<br />

son ensemble, même les<br />

USA le font…». <strong>Un</strong>e recommandation<br />

réitéré par Mohamed<br />

Bastaoui, président<br />

de la deuxième chambre de<br />

la Cour des comptes pour<br />

qui il faut «une révision<br />

des politiques sectorielles<br />

lancées jusqu’<strong>à</strong> aujourd’hui,<br />

associée <strong>à</strong> une planification<br />

stratégique sur les 10-15 années<br />

<strong>à</strong> venir». Dans le même<br />

sens, Brahim Benjelloune<br />

Touimi, directeur général de<br />

BMCE Bank, propose même<br />

la création d’une instance<br />

d’évaluation dépendant du<br />

Conseil économique, social<br />

et environnemental chargée<br />

de la consolidation et de<br />

l’évaluation des divers plans<br />

sectoriels, une «Instance<br />

d’évaluation des actions et<br />

stratégies de développement<br />

coordonnées pour l’emploi».<br />

Justice et<br />

gouvernance<br />

A cette faiblesse de la planification<br />

stratégique et de<br />

suivi et évaluation des politiques<br />

publiques s’ajoute un<br />

autre point noir de l’économie<br />

qui est en lien avec le<br />

Jouahri insiste sur le retour <strong>à</strong> «une planification stratégique de<br />

l’économie dans son ensemble, <strong>à</strong> l’instar des USA».<br />

cadre de la gouvernance et<br />

l’indépendance et l’efficience<br />

de la justice. «Comment<br />

peut-on investir lorsqu’une<br />

simple autorisation moisit<br />

dans les tiroirs pendant plus<br />

de six mois?» relève Youssef<br />

Douieb, directeur général<br />

adjoint de l’assureur crédit<br />

Euler Hermes. <strong>Un</strong>e question<br />

rhétorique qui revient<br />

souvent dans la bouche de<br />

nos interlocuteurs. «Les lourdeurs<br />

administratives ne<br />

sont pas de nature <strong>à</strong> fluidifier<br />

l’économie et beaucoup<br />

trop d’investisseurs et<br />

de porteurs de projets en<br />

souffrent», résume pour sa<br />

part Khalid Ayouch, directeur<br />

général d’Inforisk. De<br />

dépit ou de rage, nombreux<br />

sont ceux qui ont soulevé le<br />

problème de la bureaucratie<br />

et de la justice pour expliquer<br />

l’atonie économique<br />

ambiante. Des questions<br />

plus largement liées <strong>à</strong> la<br />

gouvernance et <strong>à</strong> la qualité<br />

des institutions qui fait que<br />

l’investissement, l’emploi et<br />

la boucle économique ne<br />

suivent pas des courbes vertueuses.<br />

Fouad Abdelmoumni,<br />

économiste et secrétaire<br />

général de Transparency<br />

Maroc, ne préconise pas<br />

seulement une simplification<br />

et une dématérialisation<br />

croissante des procédures,<br />

comme beaucoup d’autres<br />

l’ont fait, mais surtout «que<br />

le prochain gouvernement<br />

prenne des mesures pour<br />

interdire les interférences<br />

sur les décisions des organes<br />

de contrôle et de justice». La<br />

rente et la prébende constituent<br />

donc encore un des<br />

freins <strong>à</strong> la croissance économique<br />

et se substitue souvent<br />

<strong>à</strong> la création de richesse<br />

et de valeur soutenable sur<br />

le long terme. Cela alors<br />

même que le gouvernement<br />

sortant en a fait une de ses<br />

priorité majeures (sur le papier<br />

du moins) mais qui reste<br />

un phénomène prégnant du<br />

monde des affaires comme<br />

semble l’affirmer Taieb Aisse,<br />

président d’Amal Entreprise.<br />

«Il est crucial de revoir l’architecture<br />

d’un système économique<br />

largement basé sur<br />

la rente et non sur la libre<br />

concurrence. Cette économie<br />

de rente est rendue possible<br />

grâce <strong>à</strong> la complexité<br />

du système administratif qui<br />

détériore sérieusement notre<br />

environnement des affaires»,<br />

34 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


Enquête<br />

affirme Aisse.<br />

Services publics et<br />

équité sociale<br />

L’éducation et la qualité<br />

des ressources humaines<br />

semblent être en haut des<br />

préoccupations et une des<br />

séquelles du mal développement<br />

version marocaine.<br />

Au-del<strong>à</strong> de la traditionnelle<br />

rengaine de l’adéquation<br />

de la formation <strong>à</strong> l’emploi,<br />

nombreux sont aujourd’hui<br />

ceux qui pointent du doigt<br />

la qualité de la formation<br />

de base qui n’a cessé de se<br />

dégrader au Maroc. En cette<br />

période de rentrée scolaire,<br />

les classes de 50 <strong>à</strong> 60 élèves<br />

sont aujourd’hui de plus en<br />

plus nombreuses dans l’enseignement<br />

public et cela<br />

même dans des grandes<br />

villes et malgré les moyens<br />

budgétaires conséquents<br />

dont est doté le ministère<br />

de l’Enseignement avoisinant<br />

les 5% du PIB annuel,<br />

largement au-dessus de la<br />

moyenne mondiale. Mais en<br />

se basant sur les comparatifs<br />

internationaux qui tous sans<br />

exception placent le Maroc<br />

aux dernières ou avant<br />

dernières places. «le pays<br />

régresse si on compare les<br />

scores réalisés par les élèves<br />

marocains en 2007 par rapport<br />

<strong>à</strong> 2011», affirme ainsi<br />

Abdellatif Jouahri et d’ajouter:<br />

«Selon nos estimations,<br />

le pays gaspille entre 8 et 9<br />

milliards de dirhams annuellement<br />

entre redoublement<br />

et déperdition scolaire»,<br />

ce qui implique, selon lui,<br />

«l’urgence de l’optimisation<br />

La rente et la prébende<br />

constituent donc<br />

encore un des freins<br />

<strong>à</strong> la croissance<br />

économique<br />

Radioscopie des 100<br />

25<br />

20<br />

15<br />

10<br />

5<br />

0<br />

Gouvernance<br />

Emploi/employabilité<br />

Innovation/Digital<br />

Fiscalité<br />

Education/Formation<br />

Justice/transparence<br />

Industrie<br />

Consommation<br />

Culture<br />

Sur les 212 propositions reçues par Economie&Entreprises, la gouvernance<br />

et la cohérence des stratégies économiques arrivent en tête<br />

des préoccupations avec 44 occurrences, soit 21% du total. Ce focus<br />

sur la gouvernance est, une fois sur trois, accompagné de recommandations<br />

liées <strong>à</strong> la transparence et <strong>à</strong> la justice (6% des propositions).<br />

Cela démontre <strong>à</strong> quel point le climat des affaires source de blocage<br />

pour les acteurs économiques. L’autre occurrence, qui vient en articulation<br />

avec la bonne gouvernance, couvre la digitalisation et <strong>à</strong> la<br />

dématérialisation des procédures. Ces propositions que nous avons<br />

intégrées arbitrairement dans la colonne innovation arrivent en seconde<br />

position avec 23 propositions, soit près de 11% des opinions.<br />

Suivent quasiment ex-aequo, la réforme de la fiscalité ainsi que l’emploi<br />

et l’employabilité des jeunes qui font partie des préoccupations<br />

majeures des personnes sondées avec 9% de propositions allant dans<br />

ce sens. En quatrième position arrive la question de l’éducation qui<br />

a fait l’objet de 22 propositions, soit près de 10% des occurrences<br />

rassemblées. Au même niveau de préoccupation, soit 10%, vient la<br />

nécessité de l’investissement qu’il soit public ou privé avec son corollaire:<br />

les difficultés de financements. L’investissement est, lui, orienté<br />

principalement vers l’industrie ainsi que les capacités productives et<br />

exportatrices du pays. En queue de peloton, on retrouve des propositions<br />

visant <strong>à</strong> augmenter le pouvoir d’achat des ménages, l’accès <strong>à</strong><br />

la culture et une santé publique de qualité. Cette hiérarchie est sans<br />

aucun doute biaisée par la nature de la population sondée, majoritairement<br />

composée d’entrepreneurs et de grands patrons. Toutefois,<br />

celle-ci résume en une douzaine de thématiques clés les points<br />

d’amélioration de l’économie marocaine.<br />

des ressources de l’Etat et<br />

une révision de l’approche<br />

adoptée pour l’élaboration<br />

et la mise en œuvre des politiques<br />

publiques». Plus largement,<br />

c’est une meilleure<br />

répartition de l’impôt et une<br />

plus grande implication de<br />

Investissement<br />

Entrepreneuriat<br />

Santé<br />

l’Etat dans les services sociaux<br />

de base qui serait la<br />

voie du salut. Transport,<br />

santé publique mais aussi<br />

équité fiscale et égalité devant<br />

les opportunités. <strong>Un</strong>e<br />

voie pour inciter <strong>à</strong> créer<br />

de la richesse et l’investis-<br />

sement dans les secteurs<br />

productifs, notamment l’industrialisation<br />

accélérée et<br />

l’agriculture. <strong>Un</strong> changement<br />

de modèle d’une économie<br />

basée sur la consommation<br />

de produits importés <strong>à</strong> celles<br />

de biens et services produits<br />

localement par les PME et<br />

TPE. Ainsi, pour Abdelkader<br />

Berrada, «la concentration/<br />

centralisation du capital volontairement<br />

encouragée<br />

par l’Etat <strong>à</strong> l’avantage de<br />

groupes minoritaires privés,<br />

qui se recrutent aussi parmi<br />

la haute bureaucratie, gagne<br />

du terrain sans pour autant<br />

mettre le royaume sur les<br />

rails du développement durable».<br />

Il s’agit de la nécessité<br />

d’une refonte des diverses<br />

variantes de la politique économique<br />

«la politique budgétaire<br />

(fiscalité, emprunts,<br />

commandes publiques,<br />

subventions, infrastructure,<br />

etc.), de la politique monétaire<br />

(crédits, etc.), de la<br />

politique des prix et des salaires,<br />

etc.» qui doivent aller<br />

dans le sens d’une égalité<br />

des chances économique et<br />

sociale.<br />

Au-del<strong>à</strong> de mesures cibles,<br />

il ressort de l’ensemble des<br />

propositions et analyses récoltées<br />

que c’est la nécessité<br />

d’un revirement dans le modèle<br />

de croissance adopté<br />

durant les vingt dernières<br />

années qui semble se profiler.<br />

<strong>Un</strong> modèle qui, malgré<br />

une implication forte<br />

de l’Etat via la dépense publique<br />

financée <strong>à</strong> travers les<br />

privatisations (110 milliards<br />

de dirhams de recettes selon<br />

BAM), l’impôt, les dons<br />

et surtout l’endettement, n’a<br />

pas réussi <strong>à</strong> mettre le Maroc<br />

sur la voie de l’émergence,<br />

mais qui, au contraire,<br />

montre un gaspillage de<br />

ressources et d’opportunités<br />

qu’il serait temps de rationaliser.<br />

36 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


EXPRESSO<br />

Encourager l’apprentissage<br />

des langues<br />

Enquête<br />

100 IDÉES POUR<br />

RELANCER LE MAROC<br />

A la veille des législatives <strong>2016</strong>, 100 personnalités<br />

marocaines de tous horizons ont confié <strong>à</strong> E&E une idée<br />

phare <strong>à</strong> même de secouer l’économie nationale. Avec<br />

ce document, le prochain gouvernement dispose d’un<br />

véritable vivier de stratégies couvrant les secteurs vitaux.<br />

Dynamiser la croissance<br />

économique <strong>à</strong> travers l’incitation<br />

<strong>à</strong> l’investissement<br />

Promouvoir la culture de<br />

l’entrepreneuriat chez les<br />

jeunes générations<br />

Consolider et évaluer les<br />

plans sectoriels<br />

<strong>Un</strong> gouvernement avec un<br />

vrai projet et des pouvoirs<br />

pour le réaliser<br />

sure quant <strong>à</strong> l’avenir, en<br />

se consacrant <strong>à</strong> son rôle<br />

de stratège, de régulateur<br />

et d’animateur de l’économie<br />

nationale. Le Gouvernement<br />

doit aussi avoir<br />

comme mission de coordonner<br />

les initiatives du<br />

privé en faveur de projets<br />

structurants et porteurs de<br />

valeur ajoutée pour nos régions.<br />

Rayid El Idrissi<br />

DG CMD<br />

Dans un contexte de ralentissement<br />

économique<br />

global, le nouveau gouvernement,<br />

qui sera issu des<br />

urnes le 7 octobre prochain,<br />

devra dynamiser la croissance<br />

économique <strong>à</strong> travers<br />

l’incitation <strong>à</strong> l’investissement<br />

et <strong>à</strong> l’entrepreneuriat<br />

qui créent des richesses<br />

et des emplois, <strong>à</strong> même<br />

d’améliorer les conditions<br />

sociales et économiques<br />

des citoyens marocains.<br />

C’est ainsi que l’on garantit<br />

l’augmentation du pouvoir<br />

d’achat et la consommation<br />

des ménages. Cela passera<br />

par des mesures fiscales<br />

et incitatives courageuses,<br />

tels que des rabattements<br />

sur les taxes et impôts des<br />

Mohamed Hassan<br />

Bensalah<br />

PDG Groupe<br />

Holmarcom<br />

<strong>Un</strong>e politique gouvernementale<br />

réussie doit être<br />

<strong>à</strong> la fois conjoncturelle et<br />

structurelle, en mesure de<br />

produire rapidement et durablement<br />

ses effets. Sur le<br />

plan économique, le soutien<br />

de la consommation<br />

est <strong>à</strong> mon sens une mesure<br />

prioritaire qui devra<br />

contribuer <strong>à</strong> accélérer la<br />

croissance pourvu que les<br />

agents économiques aient<br />

confiance en l’avenir. Sans<br />

cela, les ménages auront<br />

tendance <strong>à</strong> faire preuve de<br />

prudence pour leurs dépenses<br />

et les entreprises<br />

<strong>à</strong> retarder leurs investissements<br />

censés booster la<br />

consommation et stimuler<br />

l’emploi. Ces investissements<br />

seront d’autant plus<br />

importants si la relance de<br />

la consommation concerne<br />

en priorité les produits issus<br />

du tissu industriel marocain.<br />

Confrontés <strong>à</strong> un<br />

contexte économique complexe,<br />

les consommateurs<br />

et les acteurs économiques<br />

attendent en effet de leur<br />

gouvernement qu’il les rasentreprises<br />

qui créent des<br />

emplois, ainsi que par des<br />

budgets et subventions au<br />

profit des entreprises en<br />

création pour financer leurs<br />

plans de développement.<br />

Mohamed Tozy<br />

Politologue<br />

Il faut mettre le paquet<br />

sur l’apprentissage des langues.<br />

Pour moi, la priorité<br />

est que nos jeunes maîtrisent<br />

une langue, une<br />

seule, en dehors de toute<br />

idéologie. Prenons l’arabe,<br />

il faut réinventer les formes<br />

et les outils pédagogiques<br />

de son mode d’enseignement.<br />

Il s’agit de l’enseigner<br />

en tant que langue<br />

car, <strong>à</strong> l’heure actuelle, on<br />

l’enseigne dès le primaire<br />

en tant que langue véhiculaire.<br />

Prendre de la distance<br />

repenser les mécanismes<br />

de transmission. Cela me<br />

paraît primordial.<br />

Mamoune Bouhdoud<br />

Ministre délégué<br />

auprès du ministre de<br />

l’Industrie<br />

La force de nos capacités<br />

entrepreneuriales est<br />

cruciale pour l’avenir du<br />

pays. <strong>Un</strong> entrepreneur crée<br />

38 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


Enquête<br />

«Le soutien de la consommation<br />

devra contribuer <strong>à</strong> accélérer la<br />

croissance de notre pays»<br />

de l’emploi, des richesses<br />

et devient un modèle <strong>à</strong><br />

suivre. Il est primordial de<br />

promouvoir la culture de<br />

l’entrepreneuriat chez les<br />

jeunes générations d’autant<br />

que les opportunités se<br />

multiplient dans notre pays<br />

et l’environnement préparé<br />

offre plus de visibilité aux<br />

porteurs de projets.<br />

Brahim Benjelloun<br />

Touimi<br />

Président Bank of<br />

Africa<br />

L’exigence de consolidation<br />

et d’évaluation<br />

des divers plans sectoriels<br />

commande que soit entrepris,<br />

en associant la société<br />

civile et des experts, un<br />

bilan national. Il mesurerait<br />

prioritairement les impacts<br />

en termes de création<br />

d’emploi, notamment des<br />

jeunes et des femmes, et<br />

déterminerait un plan global<br />

d’action. Il consignerait<br />

alors, en les priorisant les<br />

chiffrant et les programmant,<br />

des actions innovantes<br />

et nécessairement<br />

coordonnées <strong>à</strong> l’évaluation<br />

desquelles veillerait une<br />

nouvelle instance, placée<br />

éventuellement sous l’égide<br />

du CESE. Ce pourrait être<br />

une instance d’évaluation<br />

des actions et stratégies<br />

de développement coordonnées<br />

pour l’emploi,<br />

en abrégé, «l’Instance Développement<br />

et Emploi»<br />

(I.D.E.).<br />

Hamid Souiri<br />

PDG Tube & Profil<br />

A votre question, je réponds:<br />

l’industrialisation<br />

tous azimuts. Sa Majesté<br />

a d’ailleurs appelé de ses<br />

vœux une véritable révolution<br />

industrielle et le prochain<br />

gouvernement ira<br />

certainement dans ce sens.<br />

Il faut absolument que le<br />

pays s’industrialise, coûte<br />

que coûte, quels que soient<br />

les moyens qu’il sera nécessaire<br />

de mettre en place.<br />

Le Marocain doit reprendre<br />

goût <strong>à</strong> l’industrie. La nouvelle<br />

charte d’investissement<br />

est une excellente<br />

initiative, reste <strong>à</strong> l’activer le<br />

plus rapidement possible<br />

car le modèle économique<br />

actuel est dépassé et notre<br />

pays a, hélas, perdu beaucoup<br />

de temps en choyant<br />

des secteurs qui, aujourd’hui,<br />

ont atteint leurs<br />

limites <strong>à</strong> tous les niveaux.<br />

Jaâfar Heikel<br />

Expert international<br />

en Management<br />

sanitaire<br />

Permettre l’employabilité<br />

des jeunes. Aujourd’hui, le<br />

jeune est soit <strong>à</strong> l’université,<br />

soit <strong>à</strong> la recherche d’un emploi.<br />

Ma première mesure<br />

serait de prioriser l’emploi<br />

des jeunes pendant qu’ils<br />

sont <strong>à</strong> l’université. Il s’agit<br />

d’aménager les horaires<br />

d’étude afin de permettre<br />

aux jeunes d’avoir une<br />

activité rémunératrice en<br />

parallèle. Des contrat-programmes<br />

entre l’entreprise<br />

et l’université permettront<br />

de déboucher sur des emplois<br />

jeunes que l’Etat devrait<br />

défiscaliser pour en<br />

encourager la création. En<br />

second lieu, il faut consacrer<br />

50% du budget de la<br />

santé <strong>à</strong> la prévention des<br />

maladies transmissibles et<br />

non transmissibles, payés<br />

par un impôt supplémentaire<br />

sur l’alcool et la cigarette.<br />

La prévention pèse<br />

moins de 20% du bugdet,<br />

or près de 60% des dépenses<br />

de santé sont financés<br />

directement par les ménages.<br />

Cherchez l’erreur!<br />

Hassan Agueznai<br />

PDG Winxo<br />

La question est simple:<br />

pour quelle raison le Maroc,<br />

après tant d’années<br />

d’ouverture sur le plan politique,<br />

d’amélioration des<br />

libertés, de réalisations économiques<br />

et sociales importantes,<br />

n’arrive-t-il pas <strong>à</strong><br />

moderniser son économie<br />

et piétine avec des taux<br />

de croissance dérisoires<br />

et un chômage des jeunes<br />

considérable? Je pense que<br />

nous manquons d’un gouvernement<br />

disposant d’un<br />

vrai projet de société et des<br />

pouvoirs pour le réaliser.<br />

Or, dans la configuration<br />

politique marocaine traditionnelle,<br />

ce projet ne peut<br />

exister en raison de la balkanisation<br />

du champ partisan.<br />

Aucun parti ne peut<br />

prétendre <strong>à</strong> une majorité<br />

agissante et opérationnelle.<br />

On peut ergoter <strong>à</strong> n’en plus<br />

finir sur des mesures techniques<br />

telle la fiscalité ou<br />

autre. Mais, en l’absence<br />

d’un cap gouvernemental<br />

clair, je ne vois pas comment<br />

nous pourrions sortir<br />

de l’ornière.<br />

39 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


EXPRESSO<br />

Enquête<br />

Développer une politique<br />

industrielle autour des<br />

transports publics<br />

Augmenter le Smic et les<br />

salaires et diminuer l’impôt<br />

sur le revenu<br />

Bien mesurer les enjeux de<br />

la transformation digitale<br />

et en saisir les opportunités<br />

Aménager des dispositifs de<br />

fi nancements d’idées novatrices<br />

de jeunes startuppers<br />

Inventer un nouveau mode<br />

de régulation de l’écosystème<br />

du virtuel<br />

Amina Benkhadra<br />

DG ONHYM<br />

Le Maroc se doit de poursuivre<br />

avec détermination et<br />

efficience son processus de<br />

réformes pour la construction<br />

d’un Maroc prospère,<br />

offrant une meilleure qualité<br />

de vie <strong>à</strong> tous: <strong>Un</strong> Maroc<br />

démocratique, équitable et<br />

prospère. Les cinq actions<br />

majeures <strong>à</strong> mettre en œuvre<br />

pour la relance de l’économie<br />

nationale seraient: <strong>Un</strong>,<br />

la mise en œuvre urgente<br />

de la réforme de l’éducation,<br />

pilier du développement<br />

économique et social. Deux,<br />

la simplification et l’informatisation<br />

des procédures<br />

relatives <strong>à</strong> l’entreprise et aux<br />

actes administratifs. Trois,<br />

l’encouragement de l’investissement<br />

par l’exonération<br />

de la TVA sur les investissements<br />

et la préparation du<br />

processus d’impôts dégressifs.<br />

Quatre, l’accélération du<br />

processus d’industrialisation.<br />

Et enfin, la mise en valeur du<br />

rural avec la mise en place<br />

d’un schéma directeur sur<br />

l’ensemble des régions pour<br />

faire bénéficier les ruraux de<br />

conditions de vie décentes<br />

(routes, écoles, centres de<br />

santé) en s’appuyant sur le<br />

fonds mis en place <strong>à</strong> cet effet<br />

suite aux hautes orientations<br />

royales.<br />

Ezzoubeir Errhaimini<br />

PDG CTM<br />

J’estime que le développement<br />

d’une politique industrielle<br />

autour des transports<br />

publics pourrait participer<br />

<strong>à</strong> la relance économique et<br />

ce, <strong>à</strong> plusieurs titres. Il faut<br />

savoir que l’utilisation des<br />

véhicules particuliers génère<br />

bon nombre de coûts (environnement,<br />

santé, entretien<br />

de l’infrastructure…). Leur<br />

multiplication vient également<br />

aggraver le déficit commercial,<br />

100% de l’énergie<br />

consommée provenant du<br />

pétrole et la majorité des véhicules<br />

commercialisés dans<br />

notre pays étant importée.<br />

<strong>Un</strong> bon système de transport<br />

commun couplé <strong>à</strong> des investissements<br />

en infrastructures<br />

permettrait un transfert modal<br />

qui atténuerait le poids<br />

de la charge lié <strong>à</strong> l’utilisation<br />

des véhicules particuliers. Il<br />

permettrait la création d’emplois,<br />

que ce soit au niveau<br />

des chaînes de montage et<br />

de carrosseries qui offrent<br />

de nombreuses opportunités<br />

d’embauche ou dans les<br />

postes de conducteurs, du<br />

personnel de maintenance<br />

et toutes autres activités annexes.<br />

Enfin, il contribuera<br />

<strong>à</strong> l’amélioration du pouvoir<br />

d’achat par la réduction des<br />

dépenses liées <strong>à</strong> l’utilisation<br />

du véhicule particulier avec<br />

un coût du transport public<br />

au kilomètre carré trois fois<br />

moins important que celui<br />

du véhicule particulier.<br />

Jawad Kerdoudi<br />

Président IMRI<br />

Pour relancer l’économie<br />

marocaine, je recommande<br />

trois mesures. D’abord, augmenter<br />

le Smic et les salaires<br />

et diminuer l’impôt<br />

sur le revenu pour booster<br />

le pouvoir d’achat des ménages.<br />

Ensuite, atténuer la<br />

fiscalité sur les entreprises,<br />

notamment l’IS afin d’améliorer<br />

leur productivité et les<br />

encourager <strong>à</strong> investir. Enfin,<br />

accroître les investissements<br />

publics, promouvoir<br />

le partenariat public-privé et<br />

mettre en œuvre la nouvelle<br />

charte d’investissements<br />

dans le but de doper l’investissement<br />

privé.<br />

Tarik Fadli<br />

CEO Algo Consulting<br />

Group<br />

Dans un premier temps,<br />

il faudrait que les institutions<br />

financières développent<br />

des stratégies et des<br />

programmes spécialement<br />

conçus pour accompagner<br />

les entrepreneurs et les porteurs<br />

de projets innovants<br />

et sociaux. Les banques devraient<br />

être invitées <strong>à</strong> sortir<br />

du mode de financement<br />

standard destiné au secteur<br />

de l’agriculture, l’immobilier<br />

ou encore l’industrie, pour<br />

accompagner les startups<br />

en développant des modèles<br />

de capital risque axés<br />

sur l’innovation, notamment<br />

dans le domaine des TIC.<br />

Ensuite, la législation doit<br />

montrer plus de souplesse financière<br />

et présenter moins<br />

de contraintes pour faciliter<br />

le démarrage des startups<br />

et les encourager <strong>à</strong> investir<br />

dans le recrutement. Ces lois<br />

doivent également être assez<br />

flexibles pour permettre le<br />

partage de capital et de revenus<br />

entre l’entrepreneur<br />

et ses employés, pour leur<br />

faciliter l’accès <strong>à</strong> l’actionnariat.<br />

Enfin, au niveau de l’enseignement<br />

supérieur, l’ajout<br />

d’électifs portant sur l’entrepreneuriat<br />

dans toutes les<br />

branches est impératif pour<br />

inciter nos jeunes <strong>à</strong> penser <strong>à</strong><br />

des alternatives autres que le<br />

salariat.<br />

Abdellatif el Qortobi<br />

Président Ordre des<br />

experts comptables<br />

Pour relancer ou dynamiser<br />

l’économie, il faut bien<br />

entendu avoir une vision<br />

globale et des actions cohérentes<br />

et coordonnées. Il<br />

faut agir sur des leviers qui<br />

ont des effets <strong>à</strong> court terme,<br />

sans négliger les actions<br />

structurantes pour le long<br />

terme. Mais personnellement,<br />

si je devais sélectionner<br />

deux ou trois mesures, je<br />

dirais tout d’abord qu’il faudrait<br />

bien mesurer les enjeux<br />

de la transformation digitale<br />

et en saisir les opportunités.<br />

Ainsi, il faudrait accélérer le<br />

rythme de dématérialisation<br />

40 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


Enquête<br />

de l’ensemble des procédures<br />

administratives, que<br />

ce soit pour l’entreprise ou<br />

le citoyen. Cela permettra<br />

de réduire les délais, faire<br />

des économies et être plus<br />

efficient. La deuxième mesure<br />

est de veiller <strong>à</strong> saisir les<br />

opportunités offertes par la<br />

nouvelle économie, c’est<strong>à</strong>-dire<br />

renforcer les mécanismes<br />

dédiés <strong>à</strong> l’encouragement<br />

de l’éclosion et du<br />

développement de startups<br />

innovantes. Nous avons les<br />

atouts pour réussir dans ce<br />

domaine, qui ne nécessite<br />

par ailleurs que des moyens<br />

financiers très limités. La<br />

troisième mesure pour moi<br />

serait la mise en place d’un<br />

programme de formation<br />

qualifiante pour les jeunes<br />

chômeurs, notamment<br />

ceux titulaires des Bac+3<br />

et Bac+5, pour améliorer<br />

leur employabilité (ou les<br />

outiller pour être auto-entrepreneurs).<br />

Car malgré<br />

l’existence d’un chômage<br />

endémique, il existe des<br />

besoins chez les entreprises<br />

qui ne sont pas satisfaits. Or,<br />

«Le Maroc se doit de poursuivre avec<br />

détermination et efficience son<br />

processus de réformes»<br />

il ne faut pas oublier que la<br />

productivité du capital humain<br />

dans les secteurs publique<br />

et privé est l’un des<br />

principaux facteurs qui handicapent<br />

la compétitivité des<br />

entreprises marocaines.<br />

Mehdi Hadj Khalifa<br />

DG Another Life<br />

Company<br />

D’abord, il s’agit pour les<br />

politiques de tous bords de<br />

se mettre au diapason de<br />

leur temps, des changements<br />

de paradigmes qui sont <strong>à</strong><br />

l’œuvre de façon insidieuse<br />

et de cette déferlante qu’est<br />

la digitalisation dont les effets<br />

bousculent les dogmes<br />

et les modèles de développement<br />

éculés. Il faut que nos<br />

gouvernants sachent que rater<br />

la révolution numérique<br />

condamnerait notre pays <strong>à</strong><br />

une dépendance totale vis<strong>à</strong>-vis<br />

des nations innovantes,<br />

créatives, intelligentes. Cette<br />

prise de conscience étant<br />

hypothétiquement acquise,<br />

il s’agira ensuite de faire<br />

face <strong>à</strong> une problématique<br />

transversale dont les acteurs<br />

sont l’Etat et les banques<br />

qui ne comprennent pas<br />

que l’avenir du pays se joue<br />

aujourd’hui dans les TPE<br />

et les PME. C’est l<strong>à</strong> que se<br />

trouvent les champions de<br />

demain, et c’est l<strong>à</strong> également<br />

que se trouve la solution aux<br />

150.000 nouveaux arrivants<br />

sur le marché du travail. Il<br />

faut qu’<strong>à</strong> la fois le privé et<br />

la puissance publique aménagent<br />

des dispositifs de<br />

financements d’idées novatrices<br />

émanant de jeunes<br />

startuppers dont l’accès au<br />

cash est difficile, voire impossible.<br />

Bastien Moreau<br />

DG Jumia Maroc<br />

A l’instar d’autres pays en<br />

voie de développement (Algérie,<br />

Inde, Nigéria) où des<br />

initiatives ont déj<strong>à</strong> été entamées,<br />

je pense que la régulation<br />

de l’économie collaborative<br />

pourrait gagner <strong>à</strong><br />

figurer dans le calendrier de<br />

ce quinquennat. Ce travail<br />

devrait être conduit main<br />

dans la main avec les acteurs,<br />

auteurs de ce dynamisme,<br />

et aurait pour objectif d’inventer<br />

un nouveau mode de<br />

régulation qui encadrera la<br />

relation entre le commerçant<br />

et le client dans le monde<br />

virtuel en protégeant les<br />

deux parties dans un cadre<br />

légal défini. Bien que celle-ci<br />

représente une part limitée<br />

et difficile <strong>à</strong> chiffrer de l’activité<br />

marocaine, elle permet<br />

aujourd’hui <strong>à</strong> des milliers de<br />

personnes d’augmenter leurs<br />

revenus au Maroc et devient<br />

une source de création de<br />

centaines, voire de milliers<br />

d’emplois. Celle-ci recèle un<br />

potentiel de développement<br />

important car elle repose sur<br />

un indicateur clé: le changement<br />

de fond du comportement<br />

du consommateur<br />

marocain, de plus en plus<br />

avisé et digital-friendly. Ces<br />

évolutions, un acteur comme<br />

Jumia en est constamment<br />

observateur non pas au fil<br />

des ans mais des mois (ex: le<br />

mobile qui détrône l’ordinateur<br />

comme source de trafic<br />

en 6 mois seulement). Il y a<br />

peu de chance que le Maroc<br />

fasse l’exception au bouleversement<br />

que la croissance<br />

exponentielle du e-commerce<br />

a créé dans les pays<br />

industrialisés. Le moment<br />

est opportun pour que l’Etat<br />

fasse le point et entre en discussion<br />

avec l’ensemble des<br />

parties prenantes de cet écosystème.<br />

41 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


EXPRESSO<br />

Enquête<br />

Il faut une révision du code<br />

du travail<br />

Il faut que l’Etat externalise<br />

tous les services qui ne<br />

relèvent pas de sa spécialité<br />

Il faut en fi nir avec les<br />

logiques de rente<br />

Il faut opérer une dévaluation,<br />

même mineure, voire<br />

transitoire, du dirham<br />

Mettre en place des<br />

Agences de développement<br />

du tourisme<br />

Tarik Sijilmassi<br />

PDG Crédit Agricole<br />

Compte tenu de la spécificité<br />

de la banque que je<br />

représente, je parlerai plus<br />

particulièrement de l’économie<br />

rurale. Il me semble que<br />

le plan Maroc Vert donne<br />

un véritable cadre de travail<br />

pour la promotion de l’agriculture<br />

marocaine. Dans la<br />

phase actuelle, l’accent est<br />

mis sur l’encouragement de<br />

la valorisation des produits<br />

et la meilleure création de<br />

valeur ajoutée avec la logique<br />

de filières intégrée.<br />

Cependant, j’estime que ce<br />

programme, et plus largement<br />

l’économie rurale, serait<br />

grandement favorisé par<br />

des mesures d’accompagnement<br />

fondamentales: l’amélioration<br />

du cadre de vie<br />

en milieu rural, la proximité<br />

des services de base, l’accès<br />

<strong>à</strong> l’éducation, <strong>à</strong> la santé,<br />

aux loisirs sont nécessaires.<br />

En effet, le monde rural a<br />

besoin de compétences humaines<br />

pointues, d’experts,<br />

de conseillers en investissement,<br />

de professions libérales...<br />

Il y a aussi besoin de<br />

services valables de loisirs,<br />

de logements... bref, il faut<br />

rétablir les équilibres pour<br />

que le monde rural redevienne<br />

un espace attrayant<br />

pour l’investissement et pour<br />

les jeunes cadres et professionnels<br />

qui seraient amenés<br />

<strong>à</strong> y habiter.<br />

Mohamed Benmira<br />

DGA Medasys<br />

Il faut que l’Etat externalise<br />

tous les services qui ne<br />

relèvent pas de sa spécialité,<br />

comme par exemple les<br />

fonctions IT. Nous vivons<br />

dans l’ère de la spécialisation<br />

et il existe des prestataires<br />

taillés pour des missions<br />

pointues qui ne peuvent être<br />

assurées par la puissance<br />

publique. Fiscalement parlant,<br />

je voudrais relever une<br />

Jalil Benabes Taarji<br />

Président ANIT<br />

Deux mesures me<br />

semblent urgentes: D’abord,<br />

l’augmentation pérenne du<br />

budget de l’ONMT <strong>à</strong> 200<br />

millions de dirhams par an,<br />

sur trois ans cumulés, et sa<br />

stabilisation dans le temps.<br />

Ensuite, la mise en place<br />

urgente des Agences de développement<br />

du tourisme<br />

(ADC), qui étaient prévues<br />

dans la vision 2020 signée<br />

en 2011, et qui n’ont jamais<br />

vu le jour pour différentes<br />

raisons, mauvaises pour la<br />

plupart. Les ADC sont un<br />

outil de gouvernance qui<br />

me paraît indispensable et<br />

qui fait cruellement défaut<br />

<strong>à</strong> l’architecture actuelle du<br />

secteur. Enfin, il s’agit de totalement<br />

exonérer l’acquisianomalie<br />

terrible. Comment<br />

se fait-il, alors que le pays<br />

a un besoin crucial d’argent<br />

frais sous forme d’investissement<br />

productif, qu’en cas<br />

d’augmentation de capital,<br />

les liquidités injectées dans<br />

le capital depuis un compte<br />

courant, par exemple, soient<br />

taxées. Si je veux créer une<br />

holding et y consolider mes<br />

accents, je dois payer. Idem<br />

en cas d’opération d’achat<br />

et de vente d’entreprise. Le<br />

facteur pénalisant de cette<br />

taxation improductive est<br />

immense, il incite l’investisseur<br />

<strong>à</strong> conserver son cash<br />

plutôt que d’en faire profiter<br />

l’économie du pays. Ce problème<br />

revient régulièrement<br />

sur le tapis mais force est de<br />

constater que la volonté politique<br />

d’y remédier n’est pas<br />

au rendez-vous. Hélas!<br />

Adil Bennani<br />

DG Toyota Maroc<br />

Généralement, une révision<br />

du code du travail est<br />

nécessaire pour donner plus<br />

de flexibilité aux entreprises<br />

en matière d’emploi. Plus<br />

de mesures incitant <strong>à</strong> l’investissement<br />

productif sont<br />

les bienvenues. Pour ce qui<br />

concerne l’automobile, dans<br />

un contexte où l’environnement<br />

est au centre de nos<br />

préoccupations, un cadre<br />

réglementaire favorable aux<br />

énergies propres devrait voir<br />

le jour avec un système de<br />

bonus/malus et une TVA réduite<br />

sur les véhicules émettant<br />

moins d’un certain taux<br />

de CO2. Par ailleurs, nous<br />

avons 1,5 million de véhicules<br />

qui ont plus de 20 ans<br />

d’âge; une prime <strong>à</strong> la casse<br />

permettrait le renouvellement<br />

d’un parc vétuste avec<br />

une dynamisation de tout le<br />

secteur. Le gouvernement a<br />

déj<strong>à</strong> reçu une proposition<br />

complète de mesures allant<br />

dans ce sens. Nous avons<br />

grand espoir que 2017 nous<br />

apporte quelques bonnes<br />

surprises.<br />

Ahmed Baroudi<br />

DG SIE (Société<br />

d’Investissements<br />

énergétiques)<br />

Le pays ne peut plus faire<br />

l’économie d’une réforme urgente<br />

de l’enseignement. De<br />

nos jours, le niveau dont font<br />

montre nos jeunes diplômés<br />

est incomparable avec celui<br />

ayant trait pendant les années<br />

80. Le grand échec de<br />

l’école est de ne plus transmettre<br />

le sens du civisme,<br />

du devoir et du patriotisme.<br />

Il s’agit également de se<br />

conformer aux besoins et attentes<br />

du marché du travail<br />

en adaptant les programmes<br />

académiques. Enfin, faisons <strong>à</strong><br />

tout prix s’épanouir la créativité.<br />

Comment? En encourageant<br />

l’incubation de startups<br />

innovantes, tel que cela<br />

est fait sous d’autres cieux. Il<br />

faut en finir avec les logiques<br />

de rente et de situation qui<br />

gangrènent notre pays. La solution<br />

est dans la création de<br />

valeur.<br />

42 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


Enquête<br />

tion de biens d’équipement<br />

touristiques de la TVA. Cette<br />

mesure, me semble-t-il, est<br />

<strong>à</strong> l’étude est pourrait apparaître<br />

dans la prochaine loi<br />

de finances.<br />

Hicham Bensaid<br />

Alaoui<br />

Directeur des Risques -<br />

Euler Hermès ACMAR<br />

S’il devait y avoir une mesure<br />

phare <strong>à</strong> instaurer afin<br />

de créer les conditions d’une<br />

reprise, ce serait celle d’une<br />

dévaluation, même mineure,<br />

voire transitoire, du dirham.<br />

Cette mesure aurait, <strong>à</strong> court<br />

terme, le mérite d’impulser<br />

davantage de compétitivité<br />

aux exportations marocaines,<br />

tout en maintenant<br />

le déficit de la balance commerciale<br />

<strong>à</strong> des niveaux acceptables,<br />

dans un contexte<br />

de prix faibles des commodities,<br />

notamment les hydrocarbures,<br />

qui représentent<br />

l’essentiel de nos importations.<br />

Thami Ghorfi<br />

Président ESCA Ecole<br />

de Management<br />

Il faut rendre l’investissement<br />

efficient au plus vite.<br />

Si, en la matière, la vision est<br />

globalement bonne, il y a un<br />

déphasage trop important<br />

et donc trop coûteux entre<br />

le discours et la mise en<br />

œuvre des stratégies au service<br />

de l’investissement. Les<br />

entrepreneurs souffrent trop<br />

souvent du décalage entre le<br />

discours des décideurs et les<br />

processus pour faire aboutir<br />

les projets. Nous avons<br />

besoin d’ingénieries et de<br />

compétences qui favorisent<br />

la fluidité et l’efficience de<br />

ces processus. L’illustration<br />

a été faite par l’Office des<br />

changes dans sa démarche,<br />

qui engage une ingénierie<br />

innovante qui fait gagner<br />

l’Etat, les banques et les<br />

contribuables, dans l’opération<br />

de contribution libératoire<br />

des avoirs <strong>à</strong> l’étranger.<br />

Le second chantier est celui<br />

de l’export. Nous avons mis<br />

de nombreuses stratégies et<br />

mobilisé des compétences et<br />

des ressources pour faire du<br />

Maroc une plateforme d’exportation<br />

et un hub pour<br />

l’Afrique subsaharienne.<br />

Il faudra <strong>à</strong> mon sens interconnecter<br />

tout cela pour accélérer<br />

le pas et augmenter<br />

très rapidement le nombre<br />

d’entreprises exportatrices.<br />

Avec quelque 6.000 exportateurs,<br />

notre hub n’a pas encore<br />

la taille critique… pour<br />

un réel impact social.<br />

Fouad Abdelmoumni<br />

Economiste,<br />

Transparency Maroc<br />

Il faut d’abord cerner les<br />

principaux handicaps <strong>à</strong> la<br />

croissance qui sont <strong>à</strong> mon<br />

sens de deux ordres. Premièrement,<br />

les dépenses militaires<br />

et le conflit du Sahara<br />

qui nous coûtent annuellement<br />

l’équivalent de 7% de<br />

croissance. L’autre problème<br />

«Le monde rural a besoin<br />

de compétences humaines<br />

pointues»<br />

est la mauvaise gouvernance<br />

qui nous coûte 2% de croissance.<br />

Dans ce sens, les<br />

pistes de relance seraient:<br />

forcer la marche pour la<br />

résolution de l’affaire du<br />

Sahara et le rapprochement<br />

avec l’Algérie pour accélérer<br />

la construction maghrébine.<br />

L’autre piste serait que<br />

le prochain gouvernement<br />

prenne des mesures pour interdire<br />

les interférences sur<br />

les décisions des organes de<br />

contrôle et de justice.<br />

Youssef Aqallal<br />

DG de Catalyst<br />

Business Solutions<br />

Il est demandé aux entreprises,<br />

tout <strong>à</strong> fait <strong>à</strong> juste titre,<br />

de payer leurs impôts, leurs<br />

taxes en temps et en heure,<br />

sachant qu’en cas de retard<br />

celles-ci sont fortement<br />

pénalisées. Dans le même<br />

temps, plusieurs organismes<br />

publics et semi-publics<br />

continuent, pour leur part,<br />

de régler tardivement leurs<br />

fournisseurs. Il faut donc<br />

d’une part, durcir les sanctions<br />

et pénalités contre ces<br />

mauvais payeurs et de l’autre<br />

encourager les bons payeurs<br />

(car heureusement il en<br />

existe...) en leur accordant,<br />

<strong>à</strong> titre d’exemple, des abattements<br />

sur leurs impôts.<br />

C’est une véritable stratégie<br />

de conduite du changement<br />

qu’il faut adopter pour progressivement<br />

contraindre les<br />

opérateurs économiques <strong>à</strong><br />

s’acquitter de leurs factures<br />

dans les temps impartis.<br />

Il en va de la trésorerie de<br />

beaucoup d’entreprises qui<br />

périssent asphyxiées alors<br />

qu’elles ont, sur le papier,<br />

un business modèle viable…<br />

43 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


EXPRESSO<br />

Enquête<br />

Priorité absolue <strong>à</strong> l’emploi<br />

Abolir la TVA sur les<br />

crédits immobiliers<br />

Donner plus de poids au<br />

marché des capitaux<br />

Consolider l’attractivité de<br />

la production nationale<br />

Réserver l’accès <strong>à</strong> certains<br />

marchés publics aux PME<br />

Moulay Hafid Elalamy<br />

Ministre de l’Industrie<br />

Soutenir une croissance<br />

durable et créer de l’emploi<br />

sont les défis majeurs du<br />

moment. Pour les relever et<br />

répondre aux attentes légitimes<br />

du citoyen, l’industrialisation<br />

est la voie <strong>à</strong> emprunter;<br />

c’est un instrument<br />

puissant pour concrétiser<br />

l’émergence économique. La<br />

cadence d’industrialisation<br />

en marche doit être maintenue<br />

et renforcée davantage<br />

pour assurer <strong>à</strong> tous un environnement<br />

de confiance,<br />

de sécurité et de croissance<br />

durable.<br />

Aziz Qadiri<br />

Président Réseau<br />

Entreprendre<br />

Priorité absolue <strong>à</strong> l’emploi.<br />

Le chômage ne cesse de<br />

s’amplifier et c’est la dernière<br />

chose dont a besoin l’économie<br />

marocaine. Qui plus<br />

est, je rencontre souvent des<br />

jeunes qui se lancent dans<br />

l’entrepreneuriat et qui se<br />

retrouvent du jour au lendemain<br />

dans une situation de<br />

cessation de paiement. Ainsi,<br />

ma deuxième recommandation<br />

porte sur les délais<br />

de paiement. C’est en effet<br />

l’une des premières causes<br />

qui pousse les entreprises <strong>à</strong><br />

mettre la clé sous la porte.<br />

Et c’est ce qui plombe, d’autant<br />

plus, par ricochet, l’embauche.<br />

Yassine Lahlou<br />

DG Meilleurtaux.ma<br />

Je milite depuis des années<br />

pour l’abolition de la<br />

TVA sur les mensualités de<br />

crédits immobiliers au point<br />

que j’en ai fait mon cheval<br />

de bataille. Le Maroc fait<br />

partie des rares pays qui facturent<br />

la TVA sur les crédits<br />

immobiliers. En supprimant<br />

cette taxe, qui s’établit actuellement<br />

<strong>à</strong> 10%, du pouvoir<br />

d’achat supplémentaire<br />

sera libéré pour les ménages.<br />

Prenons <strong>à</strong> titre d’exemple<br />

une famille dont la mensualité<br />

de crédit s’élève <strong>à</strong> 6.000<br />

DH/mois. Si la TVA venait <strong>à</strong><br />

disparaître, c’est l’équivalent<br />

de 7.200 DH qui sera libéré<br />

et pourrait éventuellement<br />

dynamiser l’économie.<br />

Mounir Jazouli<br />

Président GAM<br />

La première mesure serait<br />

la mise en place d’un<br />

environnement favorable <strong>à</strong><br />

l’émergence d’un véritable<br />

écosystème d’entrepreneuriat<br />

et de start-ups technologiques.<br />

Nous avons des<br />

atouts <strong>à</strong> travers une jeunesse<br />

dynamique, innovante, entreprenante,<br />

formée et habituée<br />

<strong>à</strong> ce domaine mais<br />

qui manque cruellement<br />

de conditions favorables<br />

pour développer et lancer<br />

des projets intelligents. En<br />

second lieu, il s’agit d’accompagner<br />

de manière plus<br />

agressive nos entreprises<br />

exportatrices. Les initiatives<br />

lancées dans ce sens sont<br />

certes louables, mais elles<br />

manquent de cadence, de<br />

rythme et de puissance. Passons<br />

<strong>à</strong> la vitesse supérieure<br />

au plus vite. En outre, plutôt<br />

que d’exporter de la matière<br />

brute <strong>à</strong> bas prix, autant monter<br />

en gamme, créer de la valeur<br />

ajoutée et consolider la<br />

qualité et l’attractivité de la<br />

production nationale.<br />

Karim Hajji<br />

DG Bourse de<br />

Casablanca<br />

Depuis son indépendance,<br />

le Maroc s’est inscrit dans<br />

une démarche de modernité<br />

et de développement qui<br />

a fait de lui un pays stable,<br />

moderne. Aujourd’hui, notre<br />

pays est bien placé pour devenir<br />

un leader économique<br />

régional. Aussi, notre gouvernement<br />

est appelé <strong>à</strong> donner<br />

plus de poids au marché des<br />

capitaux qui, aujourd’hui,<br />

finance en moyenne moins<br />

de 5% de l’investissement,<br />

contre plus de 40% en Europe<br />

occidentale et plus de<br />

60% en Amérique du Nord.<br />

Ceci en l’inscrivant systématiquement<br />

dans les projets<br />

d’investissement du Maroc,<br />

profitant ainsi de sa capacité<br />

de mobilisation de l’épargne<br />

<strong>à</strong> long terme. Il s’agit aussi<br />

de mettre la politique fiscale<br />

au service du développement<br />

économique et<br />

social du Royaume en encourageant<br />

l’investissement<br />

productif et en canalisant<br />

l’épargne <strong>à</strong> long terme vers<br />

l’investissement.<br />

Mustapha Sabik<br />

Avocat<br />

Bien appliquer la nouvelle<br />

charte des régions, parce<br />

que, l’expérience le montre,<br />

les villes et la région sont<br />

porteuses d’outils concrets<br />

de développement local,<br />

par opposition <strong>à</strong> un gouvernement<br />

central qui, lui,<br />

planche sur des dossiers plus<br />

macroéconomiques. Si on<br />

arrive <strong>à</strong> décentraliser, <strong>à</strong> donner<br />

davantage de moyens<br />

aux régions, avec un personnel<br />

qualifié, performant, qui<br />

puisse <strong>à</strong> la fois posséder une<br />

vision réelle de la situation<br />

et développer des idées en<br />

mesure de relever le défi<br />

de la décentralisation, notre<br />

pays pourrait accélérer sa<br />

trajectoire vers l’émergence.<br />

La catalogne est un exemple<br />

parfait de cette dynamique<br />

locale. Les länder en Allemagne<br />

sont également un<br />

modèle <strong>à</strong> méditer.<br />

Adam Bouhadma<br />

Fondateur de 9rayti.<br />

com<br />

IL ne peut y avoir de relance<br />

de l’économie sans un<br />

secteur industriel fort. Il est<br />

donc primordial que l’Etat<br />

mette la main <strong>à</strong> la pâte et<br />

44 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


Enquête<br />

«L’industrialisation est la voie<br />

<strong>à</strong> emprunter pour concrétiser<br />

l’émergence économique»<br />

soutienne l’investissement<br />

dans l’industrie. Les ressources<br />

nécessaires <strong>à</strong> l’investissement<br />

peuvent provenir<br />

de l’arrêt des dépenses fiscales<br />

dans des secteurs non<br />

productifs comme l’immobilier<br />

qui ne profitent pas<br />

aux citoyens de condition<br />

modeste.<br />

Jamal Benhamou<br />

DG Soft Center<br />

Le développement de l’industrie<br />

marocaine du logiciel<br />

ne peut être soutenu que par<br />

l’établissement d’un «Small<br />

Business Act», <strong>à</strong> l’image de<br />

ce qu’ont initié nos confrères<br />

européens et anglo-saxons<br />

depuis plus d’une décennie.<br />

Il faudrait réserver l’accès<br />

<strong>à</strong> certains marchés publics<br />

aux petites et moyennes entreprises,<br />

particulièrement<br />

celles exerçant dans le secteur<br />

des Technologies de<br />

l’Information et de la Communication.<br />

Cette démarche<br />

a pour mérite d’encourager<br />

<strong>à</strong> l’émergence d’un processus<br />

d’innovation locale tout<br />

en permettant aux petits acteurs<br />

locaux de concurrencer<br />

les grandes entreprises<br />

étrangères pour atteindre<br />

eux aussi des tailles régionales,<br />

voire internationales<br />

et, de ce fait, en faire des<br />

champions nationaux capables<br />

d’exporter, <strong>à</strong> terme,<br />

leur savoir-faire au sein de<br />

la région MENA, l’objectif<br />

étant de faire émerger des<br />

solutions logicielles innovantes<br />

<strong>à</strong> même de répondre<br />

aux besoins fondamentaux<br />

d’entreprises utilisatrices<br />

opérant au sein de secteurs<br />

d’activités clé de l’économie<br />

marocaine. Tout en assurant<br />

le développement d’un<br />

know-how logiciel «Made in<br />

Morocco».<br />

Mohamed Bastaoui<br />

Président, deuxième<br />

chambre de la Cour des<br />

comptes<br />

<strong>Un</strong>e révision des politiques<br />

sectorielles lancées jusqu’<strong>à</strong><br />

aujourd’hui, associée <strong>à</strong> une<br />

planification stratégique sur<br />

les 10-15 années <strong>à</strong> venir. Il<br />

faut surtout de la cohérence<br />

et de la convergence dans la<br />

vision de l’Etat en matière<br />

de développement économique.<br />

Aujourd’hui, chaque<br />

ministère travaille en silo,<br />

avec un manque éminent de<br />

synergie et de coordination.<br />

C’est pour moi la priorité<br />

pour redonner un second<br />

souffle <strong>à</strong> l’économie.<br />

Abdellah Sabri<br />

DGA Vinci Energies<br />

Il faut accentuer la forte<br />

dynamique royale vers les<br />

pays d’Afrique en mettant <strong>à</strong><br />

disposition des exportateurs<br />

le maximum d’incitation de<br />

toutes natures. On pourrait<br />

commencer par mettre en<br />

application les conventions<br />

de non-double imposition<br />

signées avec un certain<br />

nombre de pays africains,<br />

la Côte d’Ivoire notamment.<br />

Autre mesure, prolonger le<br />

délai (six mois seulement)<br />

pendant lequel un jeune diplômé<br />

africain d’une école<br />

supérieure marocaine, d’ingénieurs<br />

ou autres, est habilité<br />

<strong>à</strong> travailler dans une<br />

entreprise nationale. Nous<br />

avons comme politique de<br />

recruter ces étudiants-l<strong>à</strong> afin<br />

de les former localement<br />

avant de les envoyer dans<br />

une de nos filiales continentales.<br />

Or, nous avons un mal<br />

fou <strong>à</strong> obtenir des autorisations<br />

de travail du ministère<br />

concerné. Cela doit cesser.<br />

Nawal Zine<br />

Country Manager<br />

Vocalcom<br />

Accentuer la dématérialisation<br />

de la relation au<br />

contribuable, réduire la bureaucratie,<br />

accélérer la numérisation,<br />

tels devront être<br />

les leviers de la digitalisation<br />

de la relation entre l’administration<br />

et les citoyens marocains.<br />

A l’échelle opérationnelle,<br />

les processus peuvent<br />

être modélisés et optimisés.<br />

Dès lors, la corruption devient<br />

maîtrisée. Ensuite, il<br />

s’agit de renforcer le climat<br />

des affaires et ce, dans la relation<br />

entre public et privé<br />

pour garantir un développement<br />

durable de ce dernier<br />

et favoriser la médiation.<br />

L’administration doit mettre<br />

en point d’orgue de ce processus,<br />

l’institutionnalisation<br />

des délais de paiement et<br />

des intérêts de retard dans<br />

les transactions public-privé.<br />

45 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


EXPRESSO<br />

Enquête<br />

Investir dans le capital<br />

humain<br />

Généraliser la couverture<br />

médicale<br />

Créer des locomotives africaines<br />

et tirer les PME vers<br />

l’internationalisation.<br />

Donner la chance au génie<br />

féminin d’éclore<br />

Combiner l’initiative privée<br />

et l’esprit de créativité<br />

Miriem Bensalah<br />

Présidente CGEM<br />

Il ne s’agit pas seulement<br />

de relancer la croissance,<br />

mais également de faire en<br />

sorte qu’elle soit durable.<br />

Pour cela, il est urgent de<br />

rétablir la confiance, de renforcer<br />

concrètement la part<br />

de l’industrie dans notre<br />

économie et d’avoir une vision<br />

locale. Sur le plan des<br />

mesures, il est grand temps<br />

d’en finir avec la problématique<br />

des arriérés de paiement.<br />

Ils ont sclérosé les<br />

entreprises et notamment<br />

les TPE et PME qui sont<br />

devenues les banquiers de<br />

l’Etat. Ce dernier doit honorer<br />

ses engagements et<br />

soulager les trésoreries des<br />

entreprises, ce qui relancera<br />

mécaniquement la production<br />

industrielle et le crédit.<br />

Il faut penser également <strong>à</strong><br />

une nouvelle génération de<br />

métiers industriels, notamment<br />

ceux liés <strong>à</strong> l’économie<br />

verte. Nous disposons<br />

de plans sectoriels et des<br />

entreprises locomotives. Il<br />

faut encourager les TPME<br />

locales <strong>à</strong> devenir des fournisseurs<br />

de cette chaîne de<br />

valeur dont une bonne partie<br />

est aujourd’hui captée<br />

par les importations.<br />

Enfin, certains secteurs,<br />

comme le tourisme et le<br />

BTP, ne doivent plus être<br />

négligés sous des prétextes<br />

démagogiques, ou livrés <strong>à</strong><br />

la concurrence déloyale des<br />

entreprises étrangères. Ce<br />

sont des industries <strong>à</strong> part<br />

entière, <strong>à</strong> forte intensité de<br />

main-d’œuvre et pour lesquelles<br />

le Maroc dispose<br />

d’atouts certains.<br />

Dr Rochdi Talbi<br />

DG Clinique Jerrada<br />

Je préconise une généralisation<br />

immédiate de la<br />

couverture médicale. Seuls<br />

33% de Marocains en bénéficient.<br />

Réactiver au plus<br />

vite le RAMED (Régime<br />

d’Assistance Médicale), le<br />

rendre plus efficace, plus<br />

adapté aux besoins de la<br />

population serait ma deuxième<br />

mesure. Il faudra<br />

créer des PPP (partenariats<br />

publics-privés) car l’Etat,<br />

seul, est incapable de faire<br />

face aux problématiques de<br />

santé publique. Sur le plan<br />

fiscal, je préconise d’exonérer<br />

les cliniques de la TVA et<br />

revoir les taux d’IS et d’IGR.<br />

En outre, le secteur souffre<br />

d’une pénurie de personnel<br />

paramédical. Les cycles<br />

de formation menant <strong>à</strong> ces<br />

métiers doivent impérativement<br />

être adaptés. Le besoin<br />

existe et les cliniques<br />

peuvent s’avérer être de<br />

gros employeurs. Par conséquent,<br />

j’exhorte le nouveau<br />

gouvernement <strong>à</strong> nous donner<br />

un coup de pouce en<br />

tant qu’investisseurs.<br />

Noureddine<br />

Bensouda<br />

Trésorier Général du<br />

Royaume du Maroc<br />

Il faut miser sur les ressources<br />

humaines. Dans<br />

un métier aussi pointu que<br />

les finances publiques, c’est<br />

l’investissement dans la formation<br />

des gestionnaires <strong>à</strong><br />

l’échelle nationale, régionale<br />

et locale qui contribuera<br />

<strong>à</strong> l’amélioration de la gestion<br />

des finances publiques.<br />

Tout investissement dans le<br />

capital humain reste <strong>à</strong> mon<br />

avis fondamental pour l’avenir<br />

du pays. Et ce, au regard<br />

de la dynamique que cela<br />

pourrait engendrer en terme<br />

de maitrise du domaine des<br />

finances publiques et qui, in<br />

fine, engendrera des points<br />

de croissance en plus. Capitaliser<br />

sur l’investissement<br />

dans les systèmes d’information<br />

et la dématérialisation,<br />

me semble également<br />

d’une importance majeure.<br />

Les ministères sont outillés<br />

de systèmes d’information<br />

performants notamment<br />

ceux dédiés <strong>à</strong> la gestion des<br />

ressources humaines, au<br />

reporting, dette, recouvrement….<br />

Les vertus de la<br />

dématérialisation sont innombrables.<br />

Notre société,<br />

comme vous le savez, est en<br />

pleine mutation et la gestion<br />

des finances publiques doit<br />

intégrer cette évolution du<br />

numérique. Pour ce qui est<br />

de la Trésorerie Générale<br />

du Royaume, notre système<br />

intégré des dépenses a pris<br />

du temps pour son développement<br />

et son déploiement<br />

afin de tenir compte de<br />

l’ensemble des contraintes.<br />

D’ailleurs le même système<br />

a été déployé au profit des<br />

collectivités territoriales, lequel<br />

système nous a permis<br />

de mettre <strong>à</strong> leur disposition<br />

un système intégré ayant fait<br />

ses preuves afin de mieux<br />

accompagner le processus<br />

de régionalisation avancée.<br />

Leila Mamou<br />

PDG Wafasalaf<br />

Partenariat public-privé-associations:<br />

Je crois<br />

énormément en ce triptyque<br />

car nous disposons au Maroc<br />

de 90.000 associations<br />

et, pour avoir travaillé étroitement<br />

avec quelques-unes<br />

d’entre elles, j’ai pu mesurer<br />

toute la fibre citoyenne qui<br />

les anime. Renforcer leur<br />

action dans le cadre d’un<br />

partenariat tripartite pour<br />

booster la création d’incubateurs<br />

de PME/TPE portées<br />

par de jeunes talents, me<br />

semble être une initiative<br />

vitale. D’ailleurs, je me désole<br />

que le plan numérique<br />

2020 ne touche pas assez<br />

<strong>à</strong> cette notion d’incubation<br />

qui a fait ses preuves de<br />

par le monde. Deuxièmement,<br />

il s’agit de s’attarder<br />

sur la question de la femme<br />

<strong>à</strong> laquelle il faut fournir les<br />

moyens et les facilités néces-<br />

46 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


Enquête<br />

«Il est grand temps d’en finir avec<br />

la problématique des arriérés de<br />

paiement»<br />

saires <strong>à</strong> la création de valeur<br />

et, ainsi, doper les initiatives<br />

personnelles. L’Etat a émis le<br />

souhait d’emboîter le pas <strong>à</strong><br />

cette numérisation globale<br />

<strong>à</strong> laquelle le Maroc ne peut<br />

échapper, mais le passage <strong>à</strong><br />

l’acte se fera via la conjugaison<br />

d’une vraie volonté du<br />

public, de fonds provenant<br />

du privé, et de la maîtrise<br />

du terrain des associations.<br />

Les incubateurs ainsi créés<br />

pourront opérer en commun<br />

avec des incubateurs étrangers<br />

plus établis, afin de<br />

promouvoir le transfert de<br />

savoir-faire au profit de nos<br />

acteurs locaux. Je ne vois pas<br />

d’autres manières de donner<br />

du sens et un avenir <strong>à</strong> une<br />

jeunesse mitée par un chômage<br />

structurel (30 %). Pour<br />

finir, je voudrais que l’on favorise<br />

l’accès des femmes <strong>à</strong><br />

ce type de dispositifs; le génie<br />

féminin est illimité, donnons<br />

lui la chance d’éclore,<br />

et surtout, n’hésitons pas<br />

<strong>à</strong> médiatiser massivement<br />

l’exemple d’entrepreneuses,<br />

de battantes, ayant réussi<br />

<strong>à</strong> s’élever socialement <strong>à</strong> la<br />

sueur de leur front. Croyezmoi,<br />

l’effet émulatoire est<br />

immédiat.<br />

Nawal Houti<br />

DG Brand Factory<br />

Il serait urgent de prendre<br />

des mesures draconiennes<br />

qui relanceraient l’économie<br />

et redonneraient le<br />

sourire aux acteurs économiques,<br />

notamment les<br />

TPME. Il faudrait:<br />

1 - Mettre en place une<br />

amnistie fiscale pour toutes<br />

les entreprises qui réalisent<br />

un chiffre d’affaires en deça<br />

de 5 millions de dirhams.<br />

Ce qui donnerait une véritable<br />

bouffée d’oxygène <strong>à</strong><br />

leur trésorerie et favoriserait<br />

l’investissement matériel et<br />

humain.<br />

2- Le taux de TVA devrait<br />

être réaménagé selon l’activité,<br />

le chiffre d’affaires<br />

(CA) et l’âge de l’entrepise.<br />

Il est illogique que,<br />

quel que soit le CA réalisé,<br />

toutes les entreprises de<br />

tailles confondues soient<br />

soumises au même taux de<br />

TVA; peut-être procéder par<br />

pallier de CA.<br />

3- Enfin, mettre de vraies<br />

mesures incitatives (la fiscalité,<br />

les PPP…) pour doper<br />

la croissance des entreprises<br />

dans les secteurs <strong>à</strong> forte valeur<br />

ajoutée, notamment<br />

la logistique, l’audit et le<br />

conseil, l’ingenierie et la<br />

construction, le marketing<br />

et la communication, les<br />

services informatiques…<br />

4- Plus que cela, il faudrait<br />

mettre en place une stratégie<br />

d’intégration régionale<br />

efficace avec des mesures<br />

incitatives régionales spécifiques<br />

et courageuses pour<br />

développer la croissance,<br />

créer de l’emploi et de la<br />

richesse in situ. Cela donnerait<br />

des régions fortes, pouvant<br />

même attirer des investissements<br />

étrangers.<br />

Driss Ksikes<br />

Ecrivain, directeur du<br />

CESEM<br />

Il faut libérer l’initiative<br />

privée et l’esprit d’entreprise<br />

des jeunes, surtout dans le<br />

domaine culturel. Il s’agit de<br />

multiplier les lieux et les initiatives<br />

qui sont susceptibles<br />

d’engendrer une réelle dynamique<br />

créative. Car, sans<br />

un véritable élan d’inventivité<br />

qui traverserait de nombreux<br />

territoires, l’école, les<br />

arts en passant par les médias,<br />

et qui soit bel et bien<br />

visible dans l’espace public,<br />

on ne peut pas changer la<br />

donne. Le problème du Maroc<br />

réside dans le fait que<br />

nous avons trop investi dans<br />

l’infrastructure et très peu<br />

dans la superstructure. Il faut<br />

combiner l’initiative privée<br />

et l’esprit de créativité. Le<br />

salut viendra de l’école.<br />

Mohamed Ben Ouda<br />

DG SNTL<br />

Aujourd’hui, il est nécessaire<br />

pour le Royaume<br />

d’enclencher un cycle économique<br />

orienté industrie<br />

4.0, intégrant notamment<br />

les enjeux de l’énergie et<br />

de la croissance verte, le<br />

capital immatériel et la<br />

technologie, les hubs logistiques<br />

et les marketplaces,<br />

les joint-ventures<br />

et l’écosystème PME ainsi<br />

que l’internationalisation.<br />

Pour ce faire, trois mesures<br />

phares doivent être mises<br />

en œuvre. En premier lieu,<br />

constituer un consortium<br />

de locomotives africaines<br />

et tirer avec elles les PME<br />

vers l’internationalisation.<br />

Investir, en parallèle, dans<br />

l’innovation et la technologie<br />

et favoriser l’émergence<br />

des PME <strong>à</strong> forte croissance.<br />

Enfin, investir dans le capital<br />

humain de manière <strong>à</strong><br />

faire émerger des leaders<br />

orientés durabilité.<br />

47 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


EXPRESSO<br />

Enquête<br />

Restaurer la confi ance<br />

auprès des investisseurs<br />

Offrir davantage de fl exibilité<br />

<strong>à</strong> l’entreprise<br />

Mettre en place des transferts<br />

monétaires conditionnels<br />

au profi t des plus démunis<br />

Maintenir la dynamique<br />

privée/public de lutte<br />

contre la corruption<br />

Le e-commerce pour lutter<br />

contre l’informel<br />

Touhami Rabii<br />

PDG Gemadec<br />

Je propose de cofinancer<br />

l’effort de prospection <strong>à</strong> l’international<br />

des entreprises exportatrices,<br />

<strong>à</strong> travers un crédit d’impôt<br />

sur les bénéfices provenant<br />

de l’export. Cette réforme apporterait<br />

un financement public<br />

supporté directement par<br />

la valeur ajoutée créée par les<br />

entreprises. Cette valeur ajoutée<br />

est matérialisée par l’impôt<br />

que ces entreprises sont amenées<br />

<strong>à</strong> payer. Il s’agit de tout<br />

mettre en œuvre pour faciliter<br />

le financement des entreprises<br />

exportatrices. Cela est d’autant<br />

plus important que l’évolution<br />

des régulations financières,<br />

dans le cadre des réformes<br />

de Bâle III, va potentiellement<br />

contraindre les banques <strong>à</strong> augmenter<br />

le coût de financement<br />

des entreprises exportatrices.<br />

Les institutions bancaires pourraient<br />

décider de recentrer<br />

leurs activités vers des secteurs<br />

moins risqués que le financement<br />

des exportations. L’Etat<br />

pourrait ainsi supporter directement<br />

ces financements en<br />

facilitant les mécanismes de<br />

garantie et d’assurance.<br />

Moncef Belkhayat<br />

Ex-ministre de la<br />

Jeunesse et des Sports<br />

Ma première mesure serait de<br />

dynamiser l’emploi <strong>à</strong> travers la<br />

relance des secteurs productifs<br />

par une baisse drastique des<br />

taux d’intérêts. Je pense notamment<br />

au secteur de l’immobilier<br />

qui profiterait largement d’une<br />

diminution des taux d’intérêts<br />

tout en rallongeant les durées<br />

de crédit <strong>à</strong> 40 ans. Secundo, je<br />

restaurerais la confiance auprès<br />

des investisseurs marocains et<br />

étrangers en instaurant une véritable<br />

indépendance de la justice<br />

et surtout en éliminant du code<br />

pénal toutes les lois qui donnent<br />

<strong>à</strong> notre pays une image rétrograde<br />

et décalée par rapport<br />

aux valeurs et principes universels<br />

des droits de l’Homme.<br />

Mustapha Maazouzi<br />

Docteur en Sciences<br />

Economiques<br />

La politique économique<br />

d’un pays obéit <strong>à</strong> un processus<br />

d’une extrême complexité.<br />

Pour favoriser un bond de<br />

l’économie marocaine qui doit<br />

s’inscrire dans la performance,<br />

l’innovation, la croissance inclusive<br />

et le développement<br />

durable, les politiques publiques<br />

économiques mises<br />

en place doivent être évaluées<br />

pour permettre la prise de mesures<br />

appropriées pour plus<br />

d’efficience et d’efficacité. En<br />

me limitant aux relations de<br />

collaboration et au rapprochement<br />

plus efficace entre les entreprises<br />

et les universités, sans<br />

aucune exhaustivité de ma part,<br />

je suggère que les pouvoirs<br />

publics mettent en oeuvre les<br />

moyens nécessaire pour quantifier<br />

les actions de collaboration<br />

entre l’université et l’entreprise,<br />

et les rendre plus fluides.<br />

Et ce, notamment <strong>à</strong> travers la<br />

définition des priorités, la mise<br />

en place d’un arsenal juridique<br />

et des ressources, financières<br />

appropriées. Le renforcement<br />

des moyens de la stratégie<br />

marocaine de la recherche appliquée,<br />

dans l’optique d’un<br />

maillage du territoire national<br />

et d’une assistance ciblée aux<br />

entreprises pour les rendre<br />

plus compétitives et plus innovantes.<br />

Enfin, le décloisonnement<br />

et l’extension des attributions<br />

des centres de recherche<br />

et des laboratoires existants,<br />

en vue de la mutualisation des<br />

moyens, le développement de<br />

la transversalité et le fonctionnement<br />

en réseau. Ceci permettra<br />

l’accompagnement des<br />

entreprises industrielles et de<br />

services par une capitalisation<br />

des résultats de la recherche et<br />

contribuera in fine <strong>à</strong> la création<br />

d’une valeur ajoutée nationale.<br />

Hamid Raji<br />

PDG Groupe Damandis<br />

La première mesure <strong>à</strong> entre-<br />

prendre en urgence serait de<br />

mettre fin <strong>à</strong> l’informel. L’informel<br />

est ce qui gangrène nos<br />

activités au quotidien. A tel<br />

point que les investisseurs ont<br />

perdu confiance dans le système.<br />

Monter une usine alors<br />

qu’en parallèle tout le monde<br />

importe le même produit et<br />

dans des conditions plus avantageuses<br />

(sous-facturations,<br />

contrebande, détournements..).<br />

<strong>Un</strong>e fois que nos industries seront<br />

protégées, que notre pays<br />

sera plus hermétique, les investissements<br />

reprendront. C’est<br />

un droit que de réclamer que<br />

l’on mette fin <strong>à</strong> l’informel. Deuxième<br />

mesure <strong>à</strong> entreprendre<br />

serait d’insuffler le reflexe industriel<br />

dans l’esprit des gens.<br />

Aujourd’hui, tout le monde a<br />

un instinct de spéculateur et<br />

personne n’a envie de se lancer<br />

dans l’industrie pour différentes<br />

raisons. <strong>Un</strong>e fois que<br />

tout le monde sera logé <strong>à</strong> la<br />

même enseigne et que tous<br />

les acteurs auront les mêmes<br />

règles du jeu, la confiance reprendra<br />

et les investissements<br />

aussi.<br />

Omar Chaâbi<br />

VP Exécutif YNNA<br />

Holding<br />

Aujourd’hui, si l’on devait<br />

avoir une priorité névralgique,<br />

elle serait de tout mettre en<br />

œuvre pour améliorer l’attractivité<br />

du Maroc. Force est<br />

de constater malheureusement<br />

qu’<strong>à</strong> l’heure actuelle,<br />

notre pays n’est pas considéré<br />

comme étant «investor friendly».<br />

Afin de remédier au plus vite<br />

<strong>à</strong> cela, il faut impérativement<br />

offrir davantage de flexibilité<br />

et de transparence <strong>à</strong> l’entreprise<br />

en réduisant les lourdeurs<br />

administratives et notamment<br />

les délais de traitement des<br />

dossiers. C’est comme cela et<br />

comme cela seulement que<br />

le Maroc pourra dynamiser le<br />

secteur privé et favoriser les<br />

investissements d’une part et<br />

la création d’emplois de l’autre.<br />

48 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


ll faut cofinancer l’effort de<br />

»<br />

prospection <strong>à</strong> l’international des<br />

entreprises exportatrices»<br />

Enquête<br />

Larbi Alaoui Belrhiti<br />

CEO Avito<br />

Le problème principal se<br />

trouve être l’économie informelle<br />

qui entrave le développement<br />

de l’économie formelle<br />

ainsi que les recettes de l’Etat<br />

prélevées sur les ventes et sur<br />

l’emploi. D’un autre côté, le<br />

commerce informel inflige une<br />

concurrence inéquitable au<br />

commerce formel et ne permet<br />

pas, par conséquent, aux entreprises<br />

de se développer en<br />

investissant davantage en développant<br />

leurs industries respectives.<br />

Dans cette perspective, le<br />

e-commerce où le commerce<br />

électronique est une alternative<br />

qui permettra de résoudre le<br />

problème du marché noir.<br />

Khalid Sbia<br />

Député<br />

<strong>Un</strong> point qui me parait crucial<br />

est l’appui <strong>à</strong> l’économie sociale<br />

et solidaire. Il est primordial<br />

de continuer <strong>à</strong> soutenir les<br />

coopératives car elles sont le<br />

relais de croissance de demain.<br />

Encourager davantage les Partenariat<br />

Public-Privé dans le<br />

cadre des mises <strong>à</strong> niveau et<br />

création de grandes infrastructures,<br />

notamment dans le transport,<br />

les barrages…<br />

Noel Albertus<br />

Managing partner PWC<br />

Le gouvernement sortant a<br />

adopté la première Stratégie<br />

nationale de lutte contre la corruption<br />

réalisée par une équipe<br />

désignée composée d’institutions<br />

publiques (Ministère des<br />

Finances – IGF, ministère de<br />

l’Intérieur – IGAT, ministère de<br />

la Justice, ministère de la Modernisation,<br />

Instance centrale<br />

de prévention de la corruption)<br />

de la CGEM et de Transparency<br />

Maroc accompagnée<br />

de PwC. Cette stratégie articulée<br />

autour de 11 programmes<br />

pour un budget de 1,7 milliard<br />

de dirhams a défini les principales<br />

réformes <strong>à</strong> mener d’ici<br />

2025 pour lutter efficacement<br />

contre la corruption dans le<br />

but d’améliorer la confiance<br />

du citoyen d’une part et de<br />

maintenir l’attractivité des IDE<br />

d’autre part. La dynamique privée/public<br />

enclenchée sur ce<br />

sujet doit être maintenue par<br />

le prochain gouvernement qui<br />

devra assurer la mise en œuvre<br />

effective de la stratégie.<br />

Abderrahim Saher<br />

DG Arab Bank<br />

La création d’emploi doit être<br />

la pierre angulaire de toute politique<br />

économique digne de<br />

ce nom. Pour remporter ce défi<br />

et devenir un pays attractif <strong>à</strong> la<br />

fois pour les opérateurs locaux<br />

et étrangers, il est nécessaire de<br />

mener une politique favorable<br />

<strong>à</strong> l’investissement, <strong>à</strong> travers,<br />

entre autres instruments, une<br />

refonte du code des investissements,<br />

un assouplissement des<br />

procédures administratives, des<br />

délais de règlement raccourcis<br />

et une justice plus efficace.<br />

Saâd Bendidi<br />

Directeur général<br />

délégué Saham Group<br />

Les vrais sujets <strong>à</strong> résoudre<br />

pour le Maroc en priorité sur<br />

le plan économique sont dans<br />

l’ordre: la croissance économique,<br />

le chômage et la réduction<br />

des inégalités. Les mesures<br />

ayant un impact <strong>à</strong> court terme<br />

sont les suivantes: D’abord, la<br />

mise en place des transferts<br />

monétaires conditionnels au<br />

profit des plus démunis et suppression<br />

de la Caisse de compensation<br />

qui serait remplacée<br />

par l’Agence de d éveloppement<br />

social. Ensuite, la baisse<br />

de l’IS par pallier sur cinq ans<br />

pour le ramener <strong>à</strong> 20%, l’export<br />

imposé <strong>à</strong> 50%, ainsi que les résultats<br />

non distribués (taux de<br />

10%, et réintégration aux taux<br />

de 20% en cas de distribution<br />

ultérieure). En parallèle, relever<br />

les cotisations patronales maladie,<br />

chômage et retraite sur<br />

cinq ans. De même, il s’agit de<br />

ramener l’IGR au maximum<br />

sur 5 ans, <strong>à</strong> 25%. En parallèle,<br />

relever les cotisations salariales<br />

maladie, chômage et retraite.<br />

Concomitamment, il faudrait<br />

supprimer les abattements et<br />

diverses exonérations pour<br />

simplifier le système fiscal.<br />

Deuxième grande mesure<br />

<strong>à</strong> mettre en application: la réforme<br />

des retraites pour le<br />

privé, l’âge de la retraite légale<br />

étant révisé tous les cinq<br />

ans pour l’ajuster sur les deux<br />

tiers de l’espérance de vie. Afin<br />

d’obtenir des résultats sur le<br />

moyen terme, il faut également<br />

mettre en place une politique<br />

de transfert de compétence<br />

vers les régions avec transfert<br />

de budget et de patrimoine, sur<br />

un calendrier précis de 10 ans.<br />

Ensuite, il s’agira de restreindre<br />

le statut de fonctionnaire aux<br />

seuls agents remplissant des<br />

fonctions régaliennes, sécurité,<br />

justice. Les fonctionnaires actuels<br />

gardent leur statut. Toute<br />

nouvelle embauche de l’Etat<br />

ou des collectivités serait régie<br />

par le droit du travail commun,<br />

y compris pour la couverture<br />

sociale. Enfin, il est impératif<br />

d’opérer une refonte de l’Education<br />

nationale et de la Santé<br />

publique par un transfert aux<br />

régions, des PPP et un système<br />

de paiement des frais de scolarité<br />

ou de santé par le citoyen,<br />

les plus démunis bénéficiant<br />

de subventions directes, selon<br />

leur libre choix, vers le public<br />

ou le privé.<br />

49 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


EXPRESSO<br />

Enquête<br />

Priorité <strong>à</strong> la réforme de<br />

l’éducation<br />

Renforcer l’infrastructure<br />

numérique<br />

Mettre en place un nouveau<br />

modèle d’éducation<br />

Exonérer la TVA sur les<br />

investissements<br />

Fluidifi er les procédures<br />

administratives<br />

Meryem Belkziz<br />

DG Uber Maroc<br />

La vision royale de transformer<br />

le Maroc en véritable<br />

puissance régionale, l’éveil<br />

des consciences consuméristes<br />

et citoyennes et la nécessité<br />

de lutter, en urgence,<br />

contre les inégalités sociales,<br />

font que beaucoup de secteurs<br />

sont voués <strong>à</strong> se moderniser,<br />

et notamment celui de<br />

la mobilité urbaine. Dans ce<br />

contexte, le Maroc ne peut<br />

faire abstraction de la nouvelle<br />

économie qui gagne<br />

progressivement du terrain<br />

dans l’ensemble des pays<br />

du Nord et du Sud. L’économie<br />

collaborative en est un<br />

des piliers et représente de<br />

fait, le futur levier de croissance<br />

et de performance des<br />

pays émergents. A cet effet,<br />

les partis politiques doivent<br />

dès maintenant penser <strong>à</strong><br />

des alternatives réglementaires<br />

pour adapter l’environnement<br />

des affaires <strong>à</strong> de<br />

nouveaux métiers, en phase<br />

avec les besoins des populations<br />

et dont les ressorts sont<br />

incontestablement inclusifs<br />

et porteurs d’opportunités<br />

économiques.<br />

Noureddine Ayouch<br />

Publicitaire et acteur<br />

associatif<br />

Je peux vous citer plusieurs<br />

mesures entremêlées<br />

les unes aux autres, liées par<br />

des logiques communes et<br />

qui, prises <strong>à</strong> part, peuvent<br />

apporter des améliorations<br />

ici et l<strong>à</strong>. Or, si on persiste<br />

<strong>à</strong> ignorer le vrai problème,<br />

celui qui préside <strong>à</strong> la résolution<br />

de tous les autres, <strong>à</strong> savoir<br />

l’éducation, nous continuerons<br />

<strong>à</strong> donner des coups<br />

d’épée dans l’eau, <strong>à</strong> enquiller<br />

les rustines stériles. Aujourd’hui,<br />

la détérioration de<br />

l’enseignement est telle que<br />

nos écoles préparent des citoyens<br />

inaptes <strong>à</strong> l’insertion<br />

professionnelle. Quel gâchis<br />

ma foi et quelle déperdition<br />

d’énergies et de moyens. La<br />

réforme de l’Education doit<br />

impérativement s’affranchir<br />

des idéologies afin de s’articuler<br />

uniquement autour<br />

d’un projet logique et rationnel.<br />

Seul l’avenir des jeunes,<br />

synonyme de celui du pays,<br />

doit animer les esprits de<br />

ceux qui ont la charge de<br />

proposer des pistes de réformes<br />

pour ce secteur moribond.<br />

Le voil<strong>à</strong> le nœud gordien<br />

du problème. Que l’on<br />

améliore l’enseignement et<br />

on créera un cercle vertueux<br />

duquel découleront toutes<br />

les autres mesures. Je le répète<br />

au risque de rabâcher<br />

une évidence: EDUCATION.<br />

Mohammed Chiguer<br />

Economiste, président<br />

du Cerab<br />

D’abord, établir un meilleur<br />

diagnostic de l’économie<br />

nationale. Arrêtons de<br />

prendre des décisions économiques<br />

basées sur l’hypothèse<br />

que le Maroc est une<br />

économie de marché. Cela<br />

n’est pas le cas. La perception<br />

erronée de la nature de<br />

notre système économique<br />

engendre des stratégies stériles<br />

ou en tous cas très peu<br />

efficientes. Au Maroc, 40%,<br />

de l’économie est dite non<br />

observée, c’est-<strong>à</strong>-dire que<br />

les prémices de toute analyse<br />

et de toute prospective<br />

sont fausses, biaisées dès le<br />

départ. Comment, dans ces<br />

conditions, peut-on statuer<br />

que telle ou telle décision<br />

est la bonne? Sinon, je suis<br />

d’avis, comme beaucoup de<br />

vos intervenants, je l’imagine,<br />

de faire de l’emploi<br />

une question de vie ou de<br />

mort. La priorité des priorités.<br />

Mohammed Fikrat<br />

PDG Cosumar<br />

Le secteur des industries<br />

agroalimentaires (IAA)<br />

constitue l’un des piliers de<br />

l’industrie nationale avec<br />

un chiffre d’affaires de 116<br />

milliards de dirhams, 30 milliards<br />

de dirhams de valeur<br />

ajoutée et 143.000 emplois.<br />

La faiblesse de la valeur<br />

ajoutée par rapport <strong>à</strong> la production<br />

du secteur reflète le<br />

potentiel existant en matière<br />

de valorisation des produits<br />

agricoles essentiellement<br />

commercialisés sous forme<br />

de produits de première<br />

transformation. L’industrie<br />

agroalimentaire devra<br />

s’orienter vers la production<br />

de produits <strong>à</strong> forte valeur<br />

ajoutée. L’IAA devrait bénéficier<br />

de programmes d’aide<br />

<strong>à</strong> l’innovation et R&D ainsi<br />

que d’un système de formation<br />

adapté, de partenariat<br />

scientifique et technique répondant<br />

aux besoins spécifiques<br />

des différentes filières.<br />

Deuxième mesure: renforcer<br />

l’e-gov. Depuis l’adoption<br />

de la stratégie numérique,<br />

le Maroc a vu se réaliser<br />

plusieurs chantiers structurants<br />

en matière de e-gov<br />

qui ont vu l’amélioration de<br />

l’efficience et la réduction<br />

des coûts de l’administration,<br />

la simplification des<br />

procédures administratives<br />

des entreprises mais aussi<br />

la mise en place de certains<br />

services de l’administration<br />

au profit du citoyen. Au vu<br />

de l’expérience accumulée<br />

par notre pays, la cadence<br />

de réalisation devrait être<br />

accélérée et les expériences<br />

restées au stade de pilote<br />

pourraient être généralisées.<br />

Il y a lieu aussi de renforcer<br />

l’infrastructure numérique<br />

en vue de rendre accessible<br />

<strong>à</strong> chaque citoyen l’Internet<br />

haut débit et bien évidemment<br />

lutter contre l’analphabétisme<br />

numérique.<br />

Yasmine Benamour<br />

ADG HEM<br />

Lorsqu’un nouveau gou-<br />

50 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


Enquête<br />

vernement arrive au pouvoir<br />

dans un pays comme<br />

le Maroc, comment ne pas<br />

mettre l’Education dans ses<br />

priorités? Ce n’est un secret<br />

pour personne, l’enseignement<br />

public dans notre<br />

pays connaît de graves difficultés<br />

depuis des décennies.<br />

Et comme disait Einstein:<br />

«La folie, c’est de faire<br />

toujours la même chose et<br />

de s’attendre <strong>à</strong> un résultat<br />

différent». Il ne s’agit donc<br />

plus de tenter de trouver<br />

des petites solutions ou<br />

de réformer par ci par<br />

l<strong>à</strong>. Il s’agit désormais<br />

de changer de paradigme<br />

et de mettre<br />

en place un nouveau<br />

modèle d’éducation<br />

pour le Maroc. Cela<br />

passerait notamment<br />

par un véritable partenariat<br />

public-privé où<br />

il serait possible d’arriver,<br />

ensemble, <strong>à</strong> produire,<br />

<strong>à</strong> très grande échelle, un<br />

enseignement de qualité<br />

et extrêmement abordable<br />

pour tous. Cela désengorgerait<br />

alors le public qui<br />

se porterait, du coup, luimême<br />

mieux. Et la boucle<br />

est bouclée…<br />

Brahim El Jai<br />

PDG Maroc Invest<br />

Je pense qu’une loi de<br />

Finance ne peut pas apporter<br />

toutes les réponses aux<br />

problématiques de relance<br />

de l’économie. Cela dit, elle<br />

en est un levier nécessaire.<br />

Ce que je vois de concret,<br />

c’est l’exonération de la<br />

TVA sur les investissements,<br />

un IR réduit pour toute nouvelle<br />

recrue dans le secteur<br />

industriel et un IS dégressif<br />

en fonction des résultats de<br />

l’entreprise. <strong>Un</strong>e autre option<br />

serait de relancer l’investissement<br />

par un accès<br />

au crédit plus facile pour<br />

les entreprises (en imposant<br />

un ratio aux banques) ou<br />

en mettant en place un système<br />

de bonus sur les taux<br />

pour les crédits d’investissements.<br />

Je pense aussi qu’il<br />

faut activer des financements<br />

appropriés pour des<br />

opérations de LBO,<br />

MBO et en<br />

faciliter<br />

l’accès,<br />

défiscaliser<br />

les bénéfices<br />

réinvestis (comme<br />

en Turquie), instaurer un<br />

système de subvention<br />

simple pour les investissements<br />

en R&D et les défiscaliser<br />

totalement. Concernant<br />

les charges des entreprises,<br />

il faudrait exonérer d’IR<br />

toute embauche d’ingénieur<br />

ayant moins de deux ans<br />

d’expérience ou sans expérience<br />

et réduire la tranche<br />

supérieure de l’IR pour faciliter<br />

l’embauche des cadres<br />

et la structuration des PME.<br />

Quant <strong>à</strong> la promotion de<br />

l’Export, je propose de<br />

subventionner le transport<br />

<strong>à</strong> l’export et de financer la<br />

prospection et la communication.<br />

Pour ce qui est de<br />

l’industrie locale, je suggère<br />

d’imposer le concept du<br />

«L’économie collaborative est le futur<br />

levier de croissance et de performance<br />

des pays émergents»<br />

«Moroccan<br />

product»<br />

pour toutes les administrations,<br />

entreprises<br />

publiques et assimilées.<br />

Enfin, il s’agit d’établir des<br />

mécanismes de financements<br />

avantageux pour les<br />

Start-up.<br />

Farid Bensaid<br />

PDG Ténor Groupe<br />

<strong>Un</strong>e des principales entraves<br />

<strong>à</strong> l’investissement,<br />

demeure le coût prohibitif<br />

du foncier et de l’immobilier.<br />

Si on ne s’attèle pas <strong>à</strong><br />

régler cette problématique,<br />

il devient impossible de<br />

rentabiliser un investissement<br />

dans ce secteur. Autre<br />

point d’urgence: la lourdeur<br />

des procédures administratives<br />

qui agissent comme<br />

un frein rédhibitoire <strong>à</strong> l’investissement.<br />

Que ce soit<br />

sur le plan fiscal ou administratif,<br />

l’investisseur<br />

bute sur un écueil de taille<br />

qui, dans bien des cas,<br />

s’avère décourageant. Il<br />

sera impératif pour le<br />

prochain gouvernement<br />

de trouver des<br />

systèmes de fluidités<br />

afin que tous types<br />

d’autorisations (de<br />

construction, de démarrage<br />

d’un projet)<br />

s’obtiennent de façon<br />

plus rapide. Ce handicap<br />

majeur <strong>à</strong> l’investissement<br />

doit sauter de<br />

toute urgence. Ensuite,<br />

on retrouve la sempiternelle<br />

pierre d’achoppement<br />

que sont les délais de paiement.<br />

Certes, des règles ont<br />

été mises en place pour<br />

parer <strong>à</strong> ce fléau, mais les<br />

stratégies de contournement<br />

sont élémentaires, <strong>à</strong><br />

savoir la non-réception des<br />

livraisons, où des pièces<br />

manquantes aux dossiers.<br />

Du coup, le démarrage du<br />

compte <strong>à</strong> rebours est biaisé.<br />

De plus, il faudrait que<br />

des recours faciles et expéditifs<br />

puissent être engagés<br />

contre les mauvais payeurs.<br />

De nombreuses entreprises<br />

prometteuses mettent la clé<br />

sous la porte <strong>à</strong> cause d’une<br />

trésorerie prise en otage<br />

par des donneurs d’ordre<br />

qui refusent de régler selon<br />

les échéances convenues.<br />

Les problématiques précitées<br />

peuvent être solutionnées,<br />

il n’y aucune fatalité,<br />

encore faut-il avoir le courage<br />

politique de passer <strong>à</strong><br />

l’action.<br />

51 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


EXPRESSO<br />

Enquête<br />

Externalisation massive<br />

des services administratifs<br />

Focaliser sur le volet<br />

industriel<br />

Améliorer le rapport entreprise-administration<br />

Créer une industrie de la<br />

culture<br />

Relancer l’investissement<br />

national<br />

Chakib Belkhadir<br />

ADG Stokvis Nord<br />

Afrique<br />

Si demain j’en avais l’opportunité,<br />

il y a deux points<br />

que je mettrai en place. Le<br />

premier concerne le recouvrement,<br />

en mettant<br />

notamment en place le système<br />

de scoring pour empêcher<br />

que les entreprises<br />

qui paient mal puissent<br />

participer <strong>à</strong> des appels<br />

d’offres publiques. Car en<br />

ne payant pas leurs fournisseurs,<br />

ces entreprises<br />

mettent <strong>à</strong> mal le tissu de<br />

PME autour. Le deuxième<br />

point concerne l’emploi<br />

des jeunes diplômés en imposant<br />

notamment un quota<br />

obligatoire sur le total<br />

des emplois et ce, sur une<br />

période déterminée.<br />

Younes Lamarti<br />

DG Bolloré<br />

L’importance de la logistique<br />

dans notre économie<br />

tient non seulement <strong>à</strong> son<br />

coût direct (entre 15 et 20%<br />

du PIB) mais également <strong>à</strong> la<br />

souplesse qu’elle pourrait<br />

apporter au fonctionnement<br />

de l’ensemble des circuits<br />

économiques. Le Maroc a<br />

réalisé des avancées respectables<br />

en matière d’amélioration<br />

des procédures<br />

douanières, en termes de<br />

qualité des infrastructures et<br />

de formation des ressources<br />

humaines. Néanmoins, les<br />

indicateurs demeurent en<br />

dessous des objectifs. Parmi<br />

les mesures urgentes <strong>à</strong> entreprendre<br />

pour accroitre la<br />

performance logistique, figure<br />

la réorganisation de la<br />

concurrence dans les différents<br />

métiers de la logistique.<br />

Cela permettra in fine une<br />

optimisation des ressources,<br />

plus de création d’emplois<br />

et une réduction significative<br />

de l’impact d’une logistique<br />

non fluide sur notre PIB.<br />

Redouane Bayed<br />

PDG M2M<br />

Mon premier reflexe serait<br />

de procéder <strong>à</strong> une externalisation<br />

rapide et massive des<br />

services administratifs. Les<br />

lourdeurs dans ce domaine<br />

nous coûtent énormément<br />

en termes de compétitivité.<br />

Le Maroc aurait beaucoup <strong>à</strong> y<br />

gagner. Ensuite, accélérer la<br />

digitalisation de ces mêmes<br />

services en conservant, bien<br />

entendu, le rôle régulateur<br />

et régalien de l’Etat. Enfin, il<br />

faut enclencher un véritable<br />

plan Marshall en faveur de<br />

la culture. Notre pays en a<br />

grandement besoin.<br />

Youssef Douieb<br />

DGA, Euler Hermes<br />

Je n’oserai pas citer l’éducation<br />

même si celle-ci est et<br />

demeurera la clé de voûte<br />

de toute construction socioéconomique<br />

car les maux<br />

sont profonds et nécessitent<br />

des années de travail pour<br />

rectifier le tir. C’est donc<br />

toute une génération, voire<br />

plusieurs qui sont sacrifiées<br />

ainsi que plusieurs points de<br />

PIB. Je ne peux pas non plus<br />

passer sous silence le volet<br />

justice qui, <strong>à</strong> lui seul, décourage<br />

plus d’un investisseur<br />

potentiel. Le plus urgent<br />

<strong>à</strong> mon sens et qui pourrait<br />

faire sortir notre économie<br />

de sa léthargie serait de focaliser<br />

sur le volet industriel<br />

en agissant non sur le plan<br />

fiscal mais d’abord administratif.<br />

Comment peut-on<br />

investir lorsqu’une simple<br />

autorisation moisit dans les<br />

tiroirs pendant plus de six<br />

mois?<br />

Khalid Ayouch<br />

DG Inforisk groupe<br />

Finaccess<br />

Je n’insisterai jamais assez<br />

sur la nécessité vitale<br />

d’améliorer le rapport entre<br />

l’entreprise et l’administration,<br />

notamment au niveau<br />

des tribunaux de commerce,<br />

des autorités fiscales, etc. Les<br />

lourdeurs administratives ne<br />

sont pas de nature <strong>à</strong> fluidifier<br />

l’économie et beaucoup<br />

trop d’investisseurs, de porteurs<br />

de projets en souffrent.<br />

Secundo, il faut faire un effort<br />

significatif sur l’adéquation<br />

des formations académiques<br />

avec les besoins du<br />

marché du travail. Disposer<br />

d’un système d’éducation<br />

fournisseur de lauréats de<br />

qualité est un must. Tout<br />

doit être entrepris pour favoriser<br />

l’emploi des jeunes et<br />

notamment dans l’économie<br />

du savoir qui recèle un gisement<br />

latent d’opportunités.<br />

Mohamed Horani<br />

PDG HPS<br />

Il s’agit de mettre en place<br />

une approche systémique<br />

qui nécessite une cohérence<br />

d’ensemble entre les différentes<br />

réformes et stratégies.<br />

A titre d’exemple, comment<br />

faire une réforme du système<br />

éducatif en excluant la<br />

culture? Comment promouvoir<br />

la bonne gouvernance<br />

et la transparence avec une<br />

administration électronique<br />

très limitée dont l’implémentation<br />

souffre parfois<br />

de barrières juridiques?<br />

D’où la nécessité d’instaurer<br />

une culture de projet et<br />

de mettre en valeur le capital<br />

humain qui est au cœur<br />

de toute implémentation.<br />

Evidemment la réforme de<br />

notre système éducatif vient<br />

en tête des priorités et ses<br />

effets ne seront visibles que<br />

sur le long terme. Le Maroc<br />

ne peut pas attendre et doit<br />

en parallèle mettre en place<br />

en urgence un plan de mise<br />

<strong>à</strong> niveau des ressources humaines<br />

existantes, en termes<br />

de connaissances, de compétences<br />

et surtout de valeurs,<br />

en incitant toutes<br />

les forces vives du pays <strong>à</strong><br />

y contribuer dans le cadre<br />

52 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


Enquête<br />

«Il faut mettre en place une approche<br />

systémique qui nécessite une<br />

cohérence d’ensemble entre les<br />

différentes réformes et stratégies»<br />

d’un programme national<br />

d’apprentissage tout au long<br />

de la vie. Pour terminer, je<br />

dois insister sur la nécessité<br />

pour notre pays de renforcer<br />

ses stratégies sectorielles<br />

par une franche adhésion <strong>à</strong><br />

l’économie du savoir et de<br />

l’innovation. Aussi, il doit<br />

absolument saisir les nombreuses<br />

opportunités offertes<br />

par la transformation<br />

digitale qui constitue une<br />

formidable occasion pour<br />

accélérer la croissance et<br />

dynamiser l’économie. C’est<br />

l’unique voie pour permettre<br />

<strong>à</strong> notre pays de bien se positionner<br />

dans la nouvelle<br />

configuration de l’économie<br />

mondiale.<br />

Mohcine Jazouli<br />

PDG Valyans<br />

Ma première mesure<br />

consisterait <strong>à</strong> endetter le<br />

pays davantage car nous disposons<br />

encore d’une marge<br />

confortable pour ce faire.<br />

Le but: accélérer les grands<br />

chantiers productifs de la<br />

commande publique et les<br />

orientant vers des domaines<br />

comme le solaire et les<br />

grand projets de connectivité<br />

du territoire <strong>à</strong> l’instar du<br />

TGV. En second lieu, je propose<br />

que l’on réserve une<br />

bourse d’études aux 10.000<br />

meilleurs bacheliers du<br />

royaume pour les disséminer<br />

aux quatre coins du monde,<br />

US, Australie, Europe, etc.<br />

pendant quatre ans, le temps<br />

qu’ils ou elles obtiennent<br />

leur Bachelor (équivalent<br />

d’une licence). Leur diplôme<br />

en poche, ceux-ci reviendraient<br />

au pays pour rejoindre<br />

la fonction publique<br />

qui a désespérément besoin<br />

de cadres hautement qualifiés.<br />

La mesure coûterait 2<br />

milliards de dirhams par an,<br />

une goutte comparés aux 65<br />

milliards du plan d’urgence.<br />

Enfin, il s’agit de créer une<br />

industrie de la culture en<br />

dopant les budgets alloués <strong>à</strong><br />

ce département. En France,<br />

<strong>à</strong> titre d’exemple, le PIB généré<br />

par la culture est sept<br />

fois celui de l’automobile.<br />

Seule la culture est <strong>à</strong> même<br />

de barrer la route au radicalisme<br />

de toutes sortes.<br />

Mohamed Alami<br />

Berrada<br />

Co-fondateur TIZI<br />

Pour réussir des réformes<br />

volontaristes permettant un<br />

décollage économique, il<br />

semble indispensable d’enrichir<br />

la gouvernance publique<br />

(locale, régionale,<br />

centrale) par l’arrivée de milliers<br />

de cadres expérimentés<br />

(30-45 ans), notamment<br />

dans les départements de<br />

l’Economie et des Finances.<br />

Il faudrait créer un nouveau<br />

statut juridique permettant <strong>à</strong><br />

des jeunes cadres supérieurs<br />

patriotes qui souhaitent<br />

servir, de rejoindre la gouvernance<br />

publique, en leur<br />

accordant des garanties, <strong>à</strong><br />

moyen terme. Par exemple,<br />

ce statut de «Détachement<br />

<strong>à</strong> la Gouvernance Publique<br />

» (qui existe ailleurs) faciliterait<br />

le passage de cadres<br />

supérieurs des grandes entreprises<br />

(banques, assurances,<br />

multinationales) <strong>à</strong><br />

la fonction publique, pour<br />

une durée allant jusqu’<strong>à</strong> cinq<br />

ans, tout en leur garantissant<br />

le même revenu et surtout<br />

la possibilité de retour dans<br />

leur entreprise <strong>à</strong> fonction et<br />

rémunération équivalentes.<br />

Aujourd’hui, beaucoup de<br />

femmes et d’hommes dans<br />

l’écosystème TIZI souhaitent<br />

rejoindre la gouvernance<br />

publique, mais cela représente<br />

trop de risque pour<br />

leur carrière et leur avenir…<br />

Amine Benkirane<br />

PDG Kitea<br />

Il faut impérativement relancer<br />

l’investissement national.<br />

Or, je ne peux m’empêcher<br />

de constater que la<br />

priorité dans ce domaine<br />

est réservée aux IDE. Ainsi,<br />

de nombreuses mesures<br />

incitatives visent exclusivement<br />

les entreprises multinationales<br />

qui souhaitent<br />

s’implanter au Maroc. Tout<br />

cela est bel est bon, je ne<br />

dis pas le contraire. Néanmoins,<br />

il y a un grand gisement<br />

d’investisseurs au<br />

Maroc qui, depuis quelques<br />

années, ont été asphyxiés<br />

par la pression continue du<br />

fisc mais également celle des<br />

banques. Résultat: de nombreux<br />

opérateurs locaux<br />

ont baissé les bras. Si un<br />

pays souhaite progresser, il<br />

doit pouvoir le faire grâce <strong>à</strong><br />

ses investisseurs nationaux.<br />

C’est cette confiance qu’il va<br />

falloir rétablir <strong>à</strong> travers un<br />

certain nombre de mesures.<br />

Il y a dix ans de cela, l’on<br />

pouvait récupérer une partie<br />

de l’IS acquitté <strong>à</strong> l’Etat afin<br />

de booster l’investissement.<br />

Cette mesure a hélas été<br />

supprimée alors qu’elle avait<br />

porté ses fruits. Commençons<br />

donc par la rétablir au<br />

plus vite.<br />

53 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


EXPRESSO<br />

Enquête<br />

Simplifi er l’entrepreneuriat<br />

par le e-gouvernement<br />

Mettre en place un «Small<br />

Business Act»<br />

Injecter plus d’argent dans<br />

notre économie<br />

Accélérer la mise en place<br />

de la fi bre optique<br />

Donner vie <strong>à</strong> l’union économique<br />

maghrébine<br />

Ahmed Kabbaj<br />

Président fondateur<br />

SGTM<br />

Par où commencer? Tant<br />

de choses, hélas, sont <strong>à</strong> réformer<br />

dans notre pays. Il<br />

me semble que parmi tous<br />

les maux qui minent notre<br />

cheminement vers le développement,<br />

on retrouve<br />

d’abord et avant tout, la déshérence<br />

de l’enseignement.<br />

Les forces vives de cette nation<br />

doivent s’unir pour venir<br />

<strong>à</strong> bout de ce fléau. Il faut<br />

former des jeunes capables<br />

de participer <strong>à</strong> la prospérité<br />

de leur pays. Quand je<br />

pense que nombre d’orphelinats<br />

jettent des enfants <strong>à</strong><br />

la rue dès leur majorité…<br />

Quel scandale! Pourquoi<br />

ne pas leur proposer des<br />

formations professionnelles<br />

qui les destineraient <strong>à</strong> des<br />

carrières dans la plomberie,<br />

l’électronique de base ou la<br />

maçonnerie… Les possibilités<br />

sont infinies mais un<br />

grand effort doit être concédé<br />

en matière de formation<br />

professionnelle. Sur un<br />

autre registre, des améliorations<br />

sont <strong>à</strong> apporter en<br />

matière de santé publique<br />

et de sécurité. Les chantiers<br />

sont trop nombreux et<br />

convergent autour d’un dénominateur<br />

commun: la citoyenneté.<br />

Comment former<br />

un citoyen civique, patriote,<br />

soucieux, de par son travail,<br />

son excellence et son engagement<br />

continu, de contribuer<br />

<strong>à</strong> l’essor de son pays?<br />

Telle est la question…<br />

Khalid Baddou<br />

Président AMMC<br />

Il est temps d’accélérer<br />

la dynamique de convergence<br />

des stratégies sectorielles<br />

en vue d’optimiser<br />

les ressources humaines<br />

et financières, d’une part,<br />

et de donner un nouveau<br />

souffle <strong>à</strong> des visions et des<br />

organismes en perte de vitesse.<br />

Le gouvernement actuel,<br />

en fin de mandat, tente<br />

de regrouper des structures<br />

existantes sous la tutelle du<br />

ministère de de l’Industrie<br />

et du Commerce, ce qui est<br />

un premier pas important.<br />

Maintenant, nous avons<br />

besoin d’un gouvernement<br />

homogène et efficace capable<br />

de créer une harmonie<br />

entre les différentes<br />

stratégies quelle que soit<br />

leur tutelle. Si aujourd’hui<br />

le Royaume vise la promotion<br />

d’une «marque Maroc»<br />

forte et cohérente, nous<br />

devons accompagner cela<br />

par un changement de paradigme<br />

et de mentalités,<br />

en abandonnant les calculs<br />

politiciens au profit d’une<br />

orientation résultats.<br />

Abderrahim Msaidi<br />

DG BDP International<br />

Maroc<br />

Il faut aller vers un réel<br />

partenariat Public/Privé<br />

porteur d’une vision claire<br />

pour relancer la croissance<br />

du PIB. Cinq ans après le<br />

lancement de la stratégie<br />

nationale de développement<br />

de la logistique, d’importants<br />

acquis peuvent être<br />

constatés mais l’impact sur<br />

nos entreprises et leurs indices<br />

de performance reste<br />

mitigé. Certes, le Maroc<br />

est plus attractif grâce <strong>à</strong> ses<br />

infrastructures logistiques,<br />

mais les entreprises opérant<br />

<strong>à</strong> l’export rencontrent toujours<br />

des difficultés pour<br />

conquérir de nouvelles<br />

parts de marché. J’appelle<br />

<strong>à</strong> une réelle implication<br />

des PME/PMI dans le plan<br />

d’action de développement<br />

logistique ainsi qu’<strong>à</strong> la création<br />

d’une synergie entre<br />

l’Etat et le secteur privé.<br />

Cette stratégie se traduirait<br />

par la réduction du coût<br />

logistique global de 15% et<br />

par une accélération de la<br />

croissance économique de<br />

0,5 de PIB par an.<br />

Bachir Rachdi<br />

PDG Involys<br />

Il faut simplifier le fait<br />

d’entreprendre en optant<br />

pour le e-gouvernement en<br />

dématérialisant autant que<br />

faire se peut les démarches<br />

administratives. L’entrepreneur<br />

doit s’occuper de ses<br />

affaires plutôt que de paperasse.<br />

L’autre proposition<br />

est d’assainir les relations<br />

sociales au sein de l’entreprise.<br />

Le droit du travail doit<br />

être réformé afin qu’il devienne<br />

objectif, applicable<br />

et appliqué. Il s’agit de dépouiller<br />

ce code de tous les<br />

articles qui prêtent <strong>à</strong> interprétation<br />

et qui bloquent<br />

l’entreprise.<br />

Omar Balafrej<br />

DG Technopark<br />

S’il n’y a qu’une mesure<br />

<strong>à</strong> proposer, celle-ci serait<br />

de mettre en place un<br />

«Small Business Act» pour<br />

qu’aussi bien le secteur<br />

privé que l’Etat procurent<br />

du business au TPME. Aux<br />

USA, cette mesure est en<br />

vigueur depuis des années<br />

et elle permet aux grands<br />

groupes ainsi qu’<strong>à</strong> l’Etat de<br />

garantir au moins 20% de<br />

leurs marchés au TPME. Je<br />

comprends que les grandes<br />

entreprises ou même l’Etat<br />

veulent faire appel aux<br />

meilleurs pour la réalisation<br />

de leurs projets, ce qui est<br />

légitime car ils recherchent<br />

la fiabilité, il n’empêche,<br />

avec des incitations fiscales,<br />

que les grandes entreprises<br />

peuvent de plus en plus<br />

faire confiance aux TPME<br />

qui proposent souvent des<br />

solutions innovantes et <strong>à</strong><br />

bas coûts.<br />

Youssef Belal<br />

Politologue et<br />

économiste<br />

La mesure phare que le<br />

54 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


Enquête<br />

prochain gouvernement devrait<br />

prendre pour relancer<br />

l’économie consiste <strong>à</strong> donner<br />

vie au projet maghrébin<br />

d’union économique<br />

en prenant appui sur un<br />

premier noyau comprenant<br />

l’Algérie et la Tunisie<br />

avant d’inclure les autres<br />

pays d’Afrique du Nord. Il<br />

s’agit donc non seulement<br />

d’ancrer l’économie nationale<br />

dans un nouveau sentier<br />

de croissance supranationale,<br />

mais aussi d’offrir<br />

aux peuples de la région<br />

un projet politique qui permettra<br />

d’unir plutôt que de<br />

diviser et qui serait une solution<br />

au conflit du Sahara.<br />

Guillaume Vigier<br />

Consultant senior,<br />

Mazars.<br />

Dans un monde en pleine<br />

mutation, l’entreprise doit se<br />

transformer pour s’adapter.<br />

Si la transformation digitale<br />

est une nécessité, elle n’est<br />

qu’un des outils au service<br />

d’une transformation plus<br />

vaste qui doit être portée<br />

par une stratégie d’innovation.<br />

Les entreprises marocaines,<br />

grands groupes<br />

comme PME, doivent inscrire<br />

l’innovation comme<br />

LA priorité stratégique pour<br />

contribuer au développement<br />

du Royaume. L’écosystème<br />

startup marocain a<br />

besoin d’un second souffle.<br />

Certains espoirs nés lors du<br />

GES 2014 se sont concrétisés,<br />

et des acteurs de qualité<br />

ont émergé : startups<br />

prometteuses, incubateurs<br />

et accélérateurs volontaires,<br />

etc. Ces acteurs ont besoin<br />

d’être catalysés pour passer<br />

<strong>à</strong> la vitesse supérieure, et<br />

prendre une dimension africaine.<br />

Le Maroc ne peut pas<br />

ne pas être le hub startup<br />

d’Afrique du Nord, voire de<br />

l’Ouest. Ainsi, le Royaume<br />

doit se doter d’un plan de<br />

propulsion de l’écosystème<br />

startup porté par un secteur<br />

public agissant en tant que<br />

catalyseur, ouvrant au passage<br />

les portes des marchés<br />

africains aux startups marocaines.<br />

Hassan Bahaj<br />

PDG IBM Maroc<br />

D’abord, il faut généraliser<br />

les autoroutes de<br />

l’information, renforcer la<br />

stratégie haut débit et accélérer<br />

la mise en place de<br />

la fibre optique. Le coût de<br />

l’Internet reste très cher au<br />

Maroc, ce qui nous prive<br />

de gains de productivité en<br />

matière d’offres de services<br />

<strong>à</strong> valeur ajoutée. Le réseau<br />

actuel n’a pas les capacités<br />

nécessaires pour absorber<br />

une consommation grandissante<br />

de la data. Deuxièmement,<br />

nous devons pousser<br />

vers une plus grande digitalisation<br />

de l’entreprise<br />

marocaine, l’emmener vers<br />

une utilisation plus accrue<br />

de l’IT dans ses process internes.<br />

Il en va de la compétitivité<br />

de notre pays. Enfin,<br />

il faut se doter de nos<br />

propres data centers. Jamais<br />

les données n’ont été aussi<br />

massives et aussi globalement<br />

échangées, or, la<br />

plupart des ministères, des<br />

banques et autres grands<br />

organismes hébergent leurs<br />

données sur des serveurs<br />

étrangers. Si l’on prend la<br />

vision Maroc Numérique<br />

2020, celle-ci comprend une<br />

série d’idées intéressantes.<br />

Or, l’on constate qu’entre<br />

les déclarations d’intention,<br />

toujours positives et le passage<br />

<strong>à</strong> l’acte, il existe un<br />

gouffre. Le Maroc renferme<br />

un savoir-faire important<br />

sur le plan des nouvelles<br />

technologies, reste <strong>à</strong> capitaliser<br />

sur ces «skills» dans<br />

une démarche pragmatique<br />

et rationnelle. Pourquoi ne<br />

pas dissocier le ministère<br />

de l’Economie numérique<br />

de celui de l’Industrie et le<br />

doter d’une agence sérieuse<br />

pouvant concevoir, encadrer<br />

et corriger une stratégie<br />

sur le long cours? <strong>Un</strong>e<br />

révolution mondiale prend<br />

forme <strong>à</strong> laquelle, si rien ne<br />

change, le Maroc ne prendra<br />

pas part. Malheureusement,<br />

il me semble qu’<strong>à</strong><br />

l’heure actuelle, les priorités<br />

sont ailleurs. Hélas!<br />

Rachid Hadni<br />

DG Label’Vie<br />

Il faut s’attaquer d’urgence<br />

<strong>à</strong> l’informel qui domine<br />

une large part de notre<br />

économie. Il faut que l’on<br />

arrive <strong>à</strong> recadrer cette population,<br />

constituée principalement<br />

d’entrepreneurs en<br />

les intégrant dans le circuit<br />

classique. Et c’est certainement<br />

un travail qui exigera<br />

des différentes parties prenantes<br />

beaucoup d’efforts et<br />

énormément de temps. Ensuite,<br />

il faudrait injecter plus<br />

d’argent dans notre économie,<br />

notamment par l’amélioration<br />

des salaires, ce qui,<br />

<strong>à</strong> mon sens, générera une<br />

dynamique <strong>à</strong> même de tirer<br />

vers le haut notre économie.<br />

«Il faut former des jeunes capables<br />

de participer <strong>à</strong> la prospérité de leur<br />

pays»<br />

55 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


EXPRESSO<br />

Enquête<br />

Réformer la justice et le<br />

code du travail pour rendre<br />

le pays plus attractif<br />

Relancer l’investissement,<br />

seul moyen de booster<br />

l’emploi<br />

Instaurer un contrôle rigoureux<br />

des plans d’investissements<br />

Former aux «soft skills»<br />

et <strong>à</strong> l’apprentissage des<br />

langues<br />

Revoir l’architecture d’un<br />

système économique largement<br />

basé sur la rente<br />

Neila Tazi<br />

Vice-présidente CGEM<br />

Notre économie décollera<br />

lorsqu’on parviendra <strong>à</strong><br />

se transformer en modèle<br />

de société mobilisée, engagée,<br />

basée sur l’optimisme,<br />

la solidarité, le patriotisme<br />

économique, la méritocratie,<br />

le pragmatisme et l’honnêteté.<br />

La société marocaine a<br />

besoin de plus d’initiatives<br />

individuelles, de créations<br />

d’entreprises et de modèles<br />

de réussite inspirants pour<br />

la jeunesse. Il faudrait une<br />

loi programme pour accompagner<br />

et développer l’entrepreneuriat<br />

et ouvrir les<br />

voies de l’excellence dans<br />

la formation professionnelle<br />

en créant dans les régions<br />

de véritables campus des<br />

métiers.<br />

Saloua K. Belkeziz<br />

PDG GFI et présidente<br />

APEBI<br />

Les mesures habituelles<br />

pour la relance sont d’ordre<br />

budgétaire, réglementaire<br />

ou monétaire. En voici<br />

quelques propositions: Les<br />

lois de finances prévoient<br />

un budget d’investissement<br />

convenable qui n’est<br />

souvent réalisé qu’<strong>à</strong> 60%.<br />

Ne faut-il pas instaurer un<br />

contrôle rigoureux et permanent<br />

(trimestriel) des<br />

plans d’investissements. Et<br />

pour les projets engagés,<br />

instaurer un délai de dépassement<br />

maximum, par<br />

rapport au délai prévu sur<br />

les marchés, faute de quoi<br />

des sanctions sont <strong>à</strong> prévoir<br />

de part et d’autre selon la<br />

responsabilité. Cela améliorerait<br />

substantiellement la<br />

compétitivité des entreprises<br />

et l’efficacité des dministrations.<br />

Quelques mesures<br />

fiscales comme la baisse du<br />

taux de TVA pour les produits<br />

fabriqués localement<br />

ou l’harmonisation de l’IS<br />

avec le niveau européen<br />

(28%) concomitante avec le<br />

renforcement du niveau de<br />

sécurité peut augmenter les<br />

IDE et la production intérieure.<br />

<strong>Un</strong>e série de mesures<br />

tangibles pour améliorer le<br />

taux d’activité des femmes<br />

améliorerait l’offre en ressources<br />

humaines compétentes<br />

et donc la productivité<br />

du pays. L’effort de<br />

digitalisation continu structurerait<br />

l’environnement<br />

économique, ce qui contribuerait<br />

<strong>à</strong> rationaliser les dépenses<br />

publics, réduire la<br />

corruption, etc.<br />

Youssef Chraibi<br />

Président Outsourcia<br />

Tout le monde semble<br />

partager le constat sur la faillite<br />

du système de l’éducation<br />

nationale. On sait aussi<br />

que la refonte qui a été initiée<br />

sous ce gouvernement,<br />

si elle fonctionne, ne sera de<br />

toute façon perceptible que<br />

sur du très long terme. Que<br />

fait-on entre temps pour<br />

améliorer l’employabilité de<br />

tous les jeunes qui arrivent<br />

sur le marché du travail<br />

avec souvent de bonnes capacités<br />

techniques mais un<br />

niveau de communication<br />

chaotique? A l’instar du modèle<br />

indien, par exemple, il<br />

me paraît urgent de mettre<br />

en place, de nouvelles formations<br />

gratuites dans<br />

toutes les régions, spécialisées<br />

uniquement dans les<br />

«soft skills» et l’apprentissage<br />

des langues, destinées exclusivement<br />

aux diplômés<br />

chômeurs. On arriverait ainsi<br />

<strong>à</strong> créer de nombreux emplois<br />

dans tous les secteurs<br />

qui ont besoin de ressources<br />

qualifiées, notamment en<br />

termes de savoir-faire.<br />

Omar Belmamoun<br />

PDG Platinum Power<br />

Je pense qu’il faudrait<br />

de toute urgence établir<br />

une interconnexion électrique<br />

entre le Maroc et la<br />

Mauritanie. C’est le jalon<br />

qui manque afin que le<br />

royaume devienne exportateur<br />

d’énergie électrique<br />

vers l’Afrique de l’Ouest. Il<br />

faut savoir que la Mauritanie<br />

est connectée au WAPT<br />

(West Africa Power Tool),<br />

un système d’échange qui<br />

couvre 14 des 15 pays de<br />

la CEDEAO. Il est constitué<br />

de sociétés privées et<br />

publiques de transport et<br />

de distribution d’électricité.<br />

Faire partie de ce réseau<br />

nous permettrait de diversifier<br />

nos marchés dans une<br />

logique de développement<br />

sud-sud. L’interconnexion<br />

avec la Mauritanie n’exige<br />

pas beaucoup de moyens.<br />

Le réseau arrivera <strong>à</strong> Dakhla<br />

en 2018 grâce <strong>à</strong> une décision<br />

royale. Dix-huit kilomètres<br />

seulement séparent<br />

Dakhla <strong>à</strong> Nouadhibou.<br />

L’extension du réseau ne<br />

nécessiterait par conséquent<br />

que quelques millions de<br />

dirhams. Qu’attendons-nous<br />

pour le faire?<br />

Ali Serhani<br />

Directeur associé<br />

Gesper Services<br />

La première des mesures<br />

phares reste l’emploi. Le<br />

gouvernement doit trouver<br />

des solutions très incitatives<br />

pour permettre aux entreprises<br />

d’embaucher, telles<br />

qu’offrir des facilités fiscales<br />

extraordinaires, rendre le<br />

CDD renouvelable plus de<br />

deux fois, accorder une exonération<br />

totale d’impôts en<br />

cas de recrutement de personnes<br />

handicapées, mise<br />

en application de la loi sur<br />

la grève et enfin veiller <strong>à</strong><br />

avoir une excellente sécurité<br />

juridique des investissements,<br />

etc. La deuxième<br />

mesure phare consiste dans<br />

le contrôle de la masse salariale<br />

de l’Etat. Oui pour<br />

embaucher mais <strong>à</strong> la condi-<br />

56 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>


Enquête<br />

tion qu’il faut recruter les<br />

personnes adéquates aux<br />

postes adéquats et avec les<br />

salaires adéquats.<br />

Taïb Aisse<br />

Président Amal<br />

Entreprise<br />

Je vois plusieurs problématiques<br />

<strong>à</strong> cerner.<br />

Néanmoins, il faut<br />

tout axer sur la<br />

création d’emplois.<br />

Pour cela,<br />

il est crucial de<br />

revoir l’architecture<br />

d’un<br />

système économique<br />

largement<br />

basé<br />

sur la rente<br />

et non sur la<br />

libre concurrence.<br />

Cette<br />

économie de<br />

rente est rendue<br />

possible<br />

grâce <strong>à</strong> la complexité<br />

du système<br />

administratif qui détériore<br />

sérieusement<br />

notre environnement.<br />

Tout ou presque est subordonné<br />

<strong>à</strong> des procédures, des<br />

autorisations et j’en passe.<br />

Cela confère un pouvoir<br />

énorme <strong>à</strong> la bureaucratie et<br />

ce, au détriment des entreprises.<br />

Il faut donc moderniser<br />

l’administration, la sortir<br />

de sa démarche sécuritaire<br />

actuelle et l’orienter vers<br />

l’essor économique. La décentralisation<br />

et la révision<br />

des procédures au niveau<br />

des communes sont, dans<br />

ce sens, un point déterminant.<br />

Encore faut-il qu’une<br />

réelle volonté politique soit<br />

au rendez-vous !<br />

Mohammed Hdid<br />

Président Comission<br />

fiscale CGEM<br />

Ma priorité serait de relancer<br />

l’investissement, seul<br />

moyen de booster l’emploi.<br />

Les opérateurs doivent se<br />

sentir en confiance. Pourquoi<br />

ne pas s’inspirer de ce<br />

qui a été fait sous le mandat<br />

Jettou, période où l’Etat<br />

s’engageait<br />

dans des projets<br />

d’investissement substantiels<br />

créant une dynamique<br />

positive <strong>à</strong> laquelle les acteurs<br />

du privé avaient aussitôt<br />

emboîté le pas. Mais<br />

rien de cela ne sera possible<br />

sans l’allègement du mammouth<br />

administratif, véritable<br />

entrave <strong>à</strong> la croissance<br />

et <strong>à</strong> la libération des énergies<br />

productives. Dire cela<br />

peut paraître une banalité,<br />

mais c’est une banalité dont<br />

on ne peut passer outre.<br />

«Il faudrait une loi programme<br />

pour accompagner et développer<br />

l’entrepreneuriat»<br />

Kamil Benjelloun<br />

PDG de CBI<br />

C’est une proposition que<br />

j’avais déj<strong>à</strong> faite <strong>à</strong> la CGEM il<br />

y a de cela quelques années<br />

et qui est la suivante: Il faudrait,<br />

<strong>à</strong> mon<br />

sens, scinder<br />

le code du travail<br />

actuel en deux codes<br />

distincts. Le premier serait<br />

destiné aux petits salaires,<br />

allant du SMIC jusqu’<strong>à</strong> une<br />

rémunération de 9.000 dhs/<br />

mois et reprendrait le code<br />

actuel dans ses grandes<br />

lignes, avec pour objectif<br />

essentiel de protéger fortement<br />

l’employé en cas de<br />

rupture de contrat. La deuxième<br />

mouture serait, elle,<br />

réservée aux gros salaires.<br />

Car il n’est pas concevable<br />

qu’un responsable touchant<br />

dans les 30.000 dirhams par<br />

mois, se démobilise au bout<br />

de quatre ans de travail, déséquilibre<br />

le bon fonctionnement<br />

d’une entreprise, et<br />

croise les bras en attendant<br />

qu’on le licencie moyennant<br />

des indemnités de 4 millions<br />

de dirhams. Débourser<br />

ce genre de montant peut<br />

s’avérer suicidaire pour l’entreprise.<br />

Il est grand temps<br />

de remédier <strong>à</strong> cette aberration.<br />

Tarafa Marouane<br />

PDG SOMED<br />

L’économie marocaine<br />

souffre de faiblesses<br />

structurelles connues<br />

de tous et qui vont s’accentuer<br />

compte tenu des<br />

incertitudes économiques<br />

mondiales. La politique<br />

monétaire, <strong>à</strong> elle seule, ne<br />

peut engendrer de reprise.<br />

Il est nécessaire de réformer<br />

la justice et le code du<br />

travail pour rendre le pays<br />

attractif aux investisseurs de<br />

premier plan. L’éducation<br />

doit être érigée en priorité<br />

nationale avec des mesures<br />

effectives. L’administration<br />

doit se contenir uniquement<br />

<strong>à</strong> son rôle de régulateur et<br />

bien veiller <strong>à</strong> la répartition<br />

des richesses. La politique<br />

budgétaire doit soutenir la<br />

consommation des ménages<br />

et l’investissement, la fiscalité<br />

doit être optimisée pour<br />

les entreprises industrielles,<br />

car l’avantage donné <strong>à</strong> l’immobilier<br />

a fini par détruire<br />

le peu d’industrie qui existait.<br />

Les PME doivent être<br />

soutenues et accompagnées<br />

pour maîtriser les innovations<br />

technologiques, car<br />

elles sont le véritable moteur<br />

de croissance.<br />

57 EconomieEntreprises <strong>Octobre</strong> <strong>2016</strong>

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