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Le Conte

Tout sur les contes

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DE L'INFORMATION A LA VALEUR :<br />

L'INSCRIPTION DU RÉEL DANS LE CONTE POPULAIRE 1<br />

Dans son ouvrage, <strong>Le</strong> conte populaire français 2 , Michèle Simonsen opère un<br />

recensement théorique qui montre que peu d'études ont traité des rapports que le<br />

conte entretenait avec le réel. <strong>Le</strong>s ouvrages sur le conte tentent en effet ou bien de<br />

retracer l'origine des contes (en quoi ils se rattachent à l'historicisme du XIXe s.) ; ou<br />

bien d'en faire l'interprétation psychanalytique (à la suite de Freud, de Jung ou de<br />

Bettelheim) ; ou bien d'en faire l'analyse sémiotique (prenant exemple sur les travaux<br />

de Greimas et de Courtés).<br />

Ce sont là les trois grands axes théoriques qui sous-tendent l'analyse des<br />

contes. <strong>Le</strong> rapport à la réalité, pour sa part, semble être laissé aux folkloristes ou aux<br />

ethnologues ; à ceux dont la tâche est moins d'analyser le conte que d'utiliser ce<br />

conte pour connaître les us et coutumes d'un peuple et/ou d'une époque. La visée est<br />

alors sociologique et non plus poétique.<br />

Michèle Simonsen s'insurge d'ailleurs à la fin de son ouvrage sur le peu<br />

d'importance accordée au réel, faisant de celui-ci un élément fondamental quant à<br />

l'interprétation des contes. Il s'agit là d'un effort de réhabilitation du réel qui a<br />

pourtant le défaut majeur de ramener le conte à une information sur le réel, à la<br />

manière des folkloristes et des ethnologues. Michèle Simonsen s'en prend ainsi à<br />

Bruno Bettelheim dont elle dit qu'il a beau jeu d'expliquer que Hansel et Gretel<br />

mangent la maison en pain d'épice de la sorcière par « un complexe de sevrage mal<br />

liquidé ». Pour elle, cet épisode du conte renvoie unilatéralement aux famines de<br />

1816, 1847 et 1868 qui eurent alors lieu en France. <strong>Le</strong> problème qui se pose ici est le<br />

même qui se pose pour toute œuvre littéraire, mais peut-être se pose-t-il de façon<br />

plus aiguë pour le conte dans la mesure où son apparente simplicité prête le flanc aux<br />

interprétations globalisantes.<br />

Que faut-il entendre par « rapport au réel » ? Faut-il y voir un rapport<br />

univoque qui ramène constamment le conte à une information ? Ce serait faire<br />

abstraction d'un autre élément constitutif du conte tout aussi essentiel : le<br />

merveilleux. Qu'on prendrait uniquement comme un ornement. Or le merveilleux fait<br />

1 Ce travail sur le conte populaire s'inscrit dans le cadre d'une recherche qui porte globalement sur<br />

l'oralité, c'est-à-dire sur le rapport au parlé - à ne pas confondre avec la transcription du parlé - qu'il peut<br />

y avoir dans un texte. La tradition littéraire québécoise est, à cet égard, un laboratoire important<br />

puisqu'elle repose sur une tradition orale disparue depuis fort peu longtemps et que sa tradition écrite ne<br />

s'est jamais coupée de ses sources orales.<br />

2 M. SIMONSEN, <strong>Le</strong> conte populaire français, Paris, PUF, Que sais-je, 906, 1986.<br />

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