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Le Conte

Tout sur les contes

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CONTE ET NOUVELLE<br />

conceptuel du Dictionnaire de Greimas et Courtés, que je rappelle en deux mots. <strong>Le</strong><br />

contenu figuratif est celui qui a un correspondant exclusif et constant au plan de<br />

l'expression du monde naturel : la bécasse du conte de Maupassant est une figure,<br />

elle relève du plan figuratif. <strong>Le</strong> niveau thématique, au contraire, correspond à un<br />

investissement sémantique abstrait, de nature conceptuelle. <strong>Le</strong> niveau thématique est<br />

« profond », par opposition au contenu figuratif. Il a donc à être figurativé, et cette<br />

opération de figurativisation peut se faire de façon relativement libre. Dans notre<br />

conte, on vient de constater que la bécasse entre en relation, selon les modalités que<br />

nous avons entrevues, avec la mort et, syncrétiquement, avec la folie : elle<br />

figurativise la mort et la folie. Mais il est évident que cette relation bécasse/mortfolie<br />

n'est pas du même type que la relation entre le signifiant et le signifié d'un<br />

morphème dans une langue naturelle : la mort comme la folie peuvent être<br />

figurativées par bien d'autres figures que la bécasse, qui doit même en être une figure<br />

plutôt exceptionnelle. C'est que la bécasse est peu iconique à l'égard tant de la mort<br />

que de la folie : peu de points communs, apparemment, entre la figure et les éléments<br />

thématiques qu'elle manifeste !<br />

Il existe donc, dans tout discours figuratif, un système de correspondance<br />

spécifique entre le niveau thématique, profond, et le niveau figuratif, superficiel.<br />

L'hypothèse que j'avance est que ce système de correspondance entre les deux<br />

niveaux varie entre le conte et la nouvelle. Selon les directions suivantes :<br />

2.1.) Dans le conte, il y a conformité (ou tendance à la conformité) entre le<br />

niveau thématique et le niveau figuratif. J'entends conformité au sens hjelmslévien<br />

du terme : les deux plans sont découpés, de part et d'autre du seuil qui les sépare, par<br />

les mêmes divisions. En termes hjelmsléviens, cette conformité entre les plans d'une<br />

sémiotique caractérise les systèmes de symboles : c'est que le conte tend vers le<br />

symbolique. On aura l'occasion, plus bas, de retrouver ce trait par une autre voie.<br />

2.2.) Dans la nouvelle, il y a non-conformité (ou tendance à la nonconformité)<br />

entre niveau thématique et niveau figuratif : à tous les niveaux de<br />

l'analyse, les mêmes éléments thématiques peuvent recevoir des figurations variées.<br />

On peut même se poser, à propos de la nouvelle, un problème qui a fait l'objet, il y a<br />

quelques années, d'un débat entre Courtés et Rastier : celui de la subordination du<br />

figuratif au thématique. Courtés pose explicitement cette subordination, comme si<br />

elle allait de soi :<br />

« Il est clair que le figuratif est toujours au service du thématique, car il n'est<br />

jamais tourné sur lui-même ; dès qu'il paraît dans le discours, il est nécessairement<br />

thématisé sur le plan pragmatique » 1 .<br />

Chez Rastier, les choses sont plus compliquées. Car il en vient d'abord 2 à<br />

mettre tout bonnement en cause la validité de l'opposition entre figuratif et<br />

thématique, ce qui a évidemment pour effet immédiat d'en dénier la hiérarchisation.<br />

Mais dans des publications ultérieures, il semble revenir sur cette mise en cause de<br />

1 « Contre-note » à l'article de Rastier « <strong>Le</strong> développement du concept d'isotopie », Document du GRSL,<br />

III, 29, 1981, p. 38.<br />

2 Ibid., p. 11.<br />

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