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LE CONTE<br />
2. SEGMENTATION DU TEXTE<br />
On se contentera ici de proposer une segmentation au niveau le plus haut,<br />
c'est-à-dire le plus général. Il serait en effet possible de découper le texte en un grand<br />
nombre de sous-séquences correspondant, à la limite, à chaque initiative particulière<br />
des différents acteurs : les prises de parole successives, les divers déplacements, qui<br />
en fait correspondent à des divisions typographiques marquées par des retours à la<br />
ligne_ Mais cela ne serait d'aucune utilité, au contraire, pour appréhender la structure<br />
narrative du récit. On va donc rechercher le ou les point(s) du texte où interviennent<br />
le plus grand nombre possible de démarcations (ou disjonctions).<br />
2 - 1 Un nombre important de disjonctions-démarcations apparaissent au<br />
début du paragraphe qui commence à la ligne 9 :<br />
1) Une disjonction spatiale pour le premier voleur qui s'approche de la bique.<br />
2) Une disjonction énonciative marquée par le passage d'un premier niveau<br />
énonciatif, le discours direct au futur (« dépouillerai »), à un second niveau<br />
énonciatif, le récit au passé simple (« s'approcha »).<br />
3) Une disjonction pragmatique consistant dans le passage, pour l'acteur<br />
collectif « voleurs », du dire au faire ; cette troisième disjonction vient amplifier la<br />
première.<br />
4) Une récurrence syntagmatique : « ses vêtements » (l. 8, 31 et 33) ; ce<br />
syntagme marque la fin de la première grande séquence et la fin du texte : il délimite<br />
donc une seconde grande séquence, comprise entre le pari engagé et le pari tenu.<br />
5) Une disjonction actorielle : à l'intervention orale du troisième voleur<br />
succède l'intervention pratique du premier. On pourrait attendre une disjonction dans<br />
la temporalité de l'énoncé, de même qu'il y en a une (cf. 2) dans celle de<br />
l'énonciation ; en fait il n'y en a pas, les promesses sont prises au mot et exécutées<br />
aussitôt.<br />
2 - 2 On appellera la première séquence, correspondant aux neuf premières<br />
lignes du texte, le pari des voleurs, et la seconde séquence, qui s'étend jusqu'à la fin<br />
du récit, la prouesse des voleurs. Trois sous-séquences peuvent être distinguées à<br />
l'intérieur de chaque grande séquence, formant respectivement les trois paris et les<br />
trois prouesses successifs. La première série a pour démarcateurs les trois<br />
occurrences de la formule de prise de parole : « <strong>Le</strong> premier dit_ <strong>Le</strong> second dit_ » ; on<br />
remarque une variante dans le cas du dernier voleur. La seconde série a pour<br />
démarcateurs initiaux les deux occurrences de la formule indiquant l'ordre d'entrée<br />
en action : « 'le premier des voleurs_ le second des voleurs_ » ; on constate ici aussi<br />
par l'absence du syntagme attendu : « le troisième des voleurs », que la dernière<br />
sous-séquence a un traitement textuel particulier. Mais les démarcateurs terminaux<br />
suffisent à assurer la segmentation et l'autonomie des trois sous-ensembles ; chacun<br />
de ceux-ci contient dans sa partie finale une formule signifiant la disparition de<br />
l'élément volé : formule identique dans les deux premiers cas : « avait disparu »<br />
formule sémantiquement équivalente dans le troisième cas : « n'étaient plus là ».<br />
2 - 3 Restent deux phrases en début de texte et une phrase en fin de texte qui<br />
encadrent le récit et se caractérisent par l'emploi exclusif de l'imparfait en<br />
proposition indépendante ; elles contrastent par là avec le corps du récit caractérisé<br />
par le passé simple. Il sera rendu compte de ces fragments au moment de l'analyse<br />
énonciative.