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Traiter les traumatismes psychiques

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180 THÉRAPEUTIQUE<br />

sa sinistre histoire, il a pris partie pour ses futurs meurtriers, leur a proposé<br />

qu’ils lui donnent un fusil et qu’il monte la garde avec eux. Il n’a pas su <strong>les</strong><br />

convaincre, « mais j’étais de tout cœur avec eux, leur cause me semblait<br />

juste... c’est incroyable, j’y croyais vraiment, tout ça pour sauver ma peau<br />

alors que je savais que je ne la sauverais pas de toute façon... C’est la<br />

honte qui m’a fait boire comme ça pendant des années ! » Le débriefing<br />

se termine là-dessus. Farid est très mal, et ce n’est pas sans angoisse<br />

que nous le laissons repartir dans cet état. La semaine suivante il revient<br />

dans le même état d’angoisse et de dépression coléreuse : tout ce qu’il<br />

a dit la fois précédente n’est pas vrai, à cause de nous il a passé une<br />

semaine terrible, etc. Il ne reviendra plus pendant trois ou quatre mois,<br />

puis téléphonera pour un rendez-vous. Nous retrouvons le Farid d’avant<br />

dans ses bons jours, détendu et enclin à plaisanter, mais cette fois pas<br />

pour nous séduire : pour que nous l’épargnions. Il a trouvé la raison pour<br />

laquelle il a embrassé la cause des terroristes : « Je crois que j’ai voulu<br />

que ma mort ait un sens. » Il a raison. Pendant ces mois, il n’est pas resté<br />

inactif : Il est allé voir des organismes d’aide aux victimes qui lui ont indiqué<br />

la marche à suivre pour obtenir un stage de reconversion. Il a maintenant<br />

le pied à l’étrier et continuera jusqu’à retrouver le niveau universitaire qu’il<br />

avait lorsqu’il a quitté l’Algérie. Nous le voyons peu pendant ces deux<br />

ans, il vient faire renouveler sa petite ordonnance d’antidépresseur. La<br />

psychothérapie a été interrompue, mais il est d’accord pour la reprendre<br />

dès que ses études seront terminées et qu’il aura un emploi correspondant<br />

à ses compétences actuel<strong>les</strong>. Il le sait, il n’est pas complètement guéri de sa<br />

névrose traumatique. Le moment venu, il a changé d’avis : « Ca fait partie<br />

de moi maintenant, c’est ma vie. »<br />

Nous avons longuement développé cette observation pour montrer<br />

l’importance qu’il pouvait y avoir à faire ou à refaire un débriefing en<br />

cours de psychothérapie. Mais aussi parce qu’elle nous a appris que la<br />

honte pouvait bloquer le cours d’un travail d’élaboration. En repensant<br />

à d’autres patients, l’importance de ce point qui nous avait échappé<br />

alors, et qui avait retardé leur progression, nous est apparu. La difficulté,<br />

c’est que <strong>les</strong> patients parlent peu de leur honte, et qu’il faut être très<br />

attentif à en retrouver la trace dans leur discours. Et savoir que la honte<br />

provient plus souvent d’un acte commis par un autre : par exemple le<br />

père qui, par lâcheté, ne fait pas ce qu’il faut pour secourir son fils<br />

pendant l’événement, ou assister à des atrocités commises par <strong>les</strong> siens.<br />

LA FAUTE ET L’ORIGINAIRE<br />

Le fœtus, on peut le supposer, vit dans un état de jouissance permanente<br />

où ses besoins sont satisfaits avant même d’être ressentis.

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