10.08.2016 Views

Traiter les traumatismes psychiques

Traiter les traumatismes psychiques

Traiter les traumatismes psychiques

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

108 CLINIQUE<br />

La capacité à s’identifier aux victimes est une caractéristique de<br />

nos sociétés. Les contemporains de la destruction de Pompéi n’exprimaient<br />

que la joie sans mélange d’avoir été épargnés. Au milieu du<br />

XVIII e siècle, quelque chose de nouveau apparaît. De nombreux écrits<br />

de l’époque témoignent d’un besoin de s’identifier aux victimes, de<br />

prendre part à leur tragédie, et cachent à peine qu’il y a une certaine<br />

jouissance à le faire. En 1756, Edmund Burke parle à ce propos de<br />

« sublime terreur » (Brassart, 1992). Depuis cette époque, cette capacité<br />

d’identification a conduit à ce qu’une solidarité de la nation tout entière<br />

avec ceux que le malheur a frappés se traduise dans des lois en leur<br />

faveur. Mais la lucidité des hommes du XVIII e siècle s’est perdue. La<br />

jouissance non reconnue est devenue sentiment de culpabilité, avec<br />

tous ses avatars. Tout est fait, au moins dans un premier temps, quand<br />

l’émotion est encore vive, pour que la victime puisse considérer que<br />

la société a contracté une dette à son égard. Les médias privilégient ce<br />

point de vue, aux dépens de la notion de solidarité qui suppose une faute<br />

originelle également partagée (Lebigot, 1997). L’insistance mise sur la<br />

désignation de coupab<strong>les</strong> entre dans ce canevas et pèse dans le sens de<br />

la résistance à la thérapeutique. Nous avons déjà vu ce phénomène se<br />

produire parfois spontanément chez nos patients traditionnels.<br />

Le tournant de 1995<br />

L’attentat du RER à Saint-Michel le 25 juillet 1995, et la certitude<br />

que d’autres attentats suivraient, a provoqué une réaction du pouvoir<br />

politique concrétisant la solidarité de la nation avec <strong>les</strong> victimes. Une<br />

« cellule médicopsychologique d’urgence » a été créée par le gouvernement<br />

pour apporter l’aide de spécialistes sur <strong>les</strong> lieux mêmes du<br />

drame et en d’autres lieux dans <strong>les</strong> jours qui suivent. Cela répondait<br />

à une demande faite depuis plusieurs années par l’association « SOS<br />

Attentats » (Rudetzki, 1992).<br />

La presse dans son ensemble a fait un très large écho à la création de<br />

cette cellule. Les psychiatres et psychologues ont dès lors disposé dans<br />

<strong>les</strong> médias d’un peu plus de temps ou de lignes pour s’expliquer sur leur<br />

action et ce qui la justifie. L’information est bien passée puisque dès le<br />

17 août, lors du deuxième attentat de cette série, <strong>les</strong> victimes et impliqués<br />

connaissaient souvent l’existence de soins spécialisés en pareil<br />

cas. Depuis trois ans maintenant, à chaque catastrophe survenue sur le<br />

territoire national, ou touchant à l’étranger des ressortissants français,<br />

<strong>les</strong> médias mentionnent simplement la présence de psychiatres et de<br />

psychologues sur le terrain, comme si la chose allait de soi. Un pas a été<br />

franchi. Le public est mieux informé du sérieux éventuel des troub<strong>les</strong>

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!