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Traiter les traumatismes psychiques

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88 CLINIQUE<br />

Ainsi, <strong>les</strong> choses se passent très différemment d’avec le patient précédent.<br />

Notre maçon a d’ailleurs à son actif deux tentatives de suicide graves et<br />

une période de plusieurs années d’alcoolisation. Il ne s’agit pas chez lui<br />

du surgissement soudain d’une pulsion destructrice, mais de la montée en<br />

puissance d’une violence qui cherche à s’assouvir. Comme on le voit de<br />

manière spectaculaire dans ce cas, la violence est à la place d’une parole,<br />

qui le conduira dans son déroulement à de surprenantes découvertes sur<br />

lui-même.<br />

Il lui a fallu trois ans pour s’y retrouver dans cette histoire de famille, celleci<br />

ressemblant à une horde primitive avant le meurtre du Père telle que<br />

l’a décrite Freud dans Totem et Tabou. Un autre patient aura moins de<br />

difficultés à établir un lien entre son histoire et sa souffrance. Sa brève<br />

histoire psychopathologique illustre bien la montée irrépressible et lente<br />

de la violence quand elle devient le symptôme le plus préoccupant de la<br />

névrose traumatique.<br />

Le médecin-chef de la gendarmerie téléphone à l’hôpital, demandant que<br />

soit vu en urgence un gendarme de trente ans, rapatrié d’Afrique pour une<br />

faute professionnelle grave. Le commandement veut le mettre le soir même<br />

aux arrêts, et après il sera difficile d’organiser une consultation.<br />

Cet homme, en poste dans une ambassade, est accusé d’avoir volé<br />

3 000 francs à l’un de ses camarades. Ce qu’il a tout de suite reconnu.<br />

L’année précédente, il était au Cambodge, dans la mission des Casques<br />

bleus, dite « APRONUC », et gardait avec un policier algérien un bureau de<br />

vote près d’Angkor. Le jour du vote, le bureau est attaqué par une section<br />

de Khmers rouges. Retranchés dans un local, ils parviennent à mettre en<br />

fuite <strong>les</strong> assaillants mais ils ont bien cru, l’un et l’autre, qu’ils allaient mourir<br />

là.<br />

Traité comme un héros, notre gendarme se voit offrir à la fin de sa mission<br />

un de ces postes très prisés dans la garde d’une ambassade à l’étranger.<br />

Là-bas, apparaissent <strong>les</strong> premiers cauchemars mais il n’y prête pas<br />

attention. Puis des troub<strong>les</strong> du caractère, que sa femme lui reproche, mais<br />

dont il ne se rend absolument pas compte. C’est dans ce contexte que<br />

se développe une haine, qu’il croit motivée, à l’encontre de l’un de ses<br />

collègues. Il projette de le tuer puis se ravise. Il va seulement le « punir »<br />

en lui dérobant l’argent qu’il a dans son casier. Acte insensé de la part d’un<br />

homme jusque-là sain et équilibré (et qui, d’ailleurs, le redeviendra après<br />

une courte psychothérapie).<br />

Dans tous ces cas, plus fréquents que <strong>les</strong> précédents, qui ne sont pas<br />

des effets de la répétition, c’est l’effet « abandon » du trauma (Lebigot,<br />

2000) qui est en cause, abandon par le signifiant. Celui-ci est à l’origine<br />

d’une « rupture communautaire » selon l’expression de C. Barrois<br />

(Barrois, 1998) qui peut donner au sujet le sentiment que <strong>les</strong> autres,<br />

<strong>les</strong> êtres parlants, l’ont rejeté, exclu. Sans qu’ils s’en rendent toujours

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