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TRADUIRE… INTERPRÉTER<br />

L’allemand permet de traduire ce jeu de mots à l’identique, en conservant<br />

l’équivoque : « Als Startzeichen ruft einer der Offiziellen den Namen des Sohns von<br />

Gott Hermes aus. // Pan ! ». Notons qu’une telle traduction isomorphe d’un jeu de<br />

mots est rare dans Astérix aux Jeux olympiques. L’une des raisons de cette rareté est<br />

que le français et l’allemand appartiennent à des familles de langues différentes,<br />

respectivement romane et germanique.<br />

Par ailleurs, dans Astérix aux jeux olympiques, Goscinny recourt à maintes<br />

reprises au calembour à dominante suggestive. Par exemple, la narration du défilé<br />

des athlètes est prétexte à des jeux de mots de ce type : « Cela commence par le<br />

défilé des Thermopyles. Ils sont suivis par ceux de Samothrace, sûrs de la victoire »<br />

(38-5). Dans cette occurrence, le défilé des Thermopyles désigne un cortège<br />

d’athlètes, tout en suggérant le défilé bien connu de la Grèce, situé au pied du mont<br />

Callidrome. De même, la seconde phrase évoque la « Victoire de Samothrace », la<br />

statue célèbre représentant la déesse Nikè et exposée au Louvre. Ces deux phrases<br />

sont traduites comme suit en allemand : « Angeführt wird der Zug von den<br />

Teilnehmern aus den Thermopylen. Dann folgen die siegessicheren Samothraker ».<br />

La traduction ne s’en tient qu’au sens du cortège des athlètes, avec une disparition<br />

des sous-entendus de la version française.<br />

Astérix aux jeux olympiques contient enfin des calembours complexes,<br />

jouant sur le sens et le son, tout en comportant plusieurs niveaux d’implicitation.<br />

C’est le cas dans ce dialogue entre Baba et un autre pirate : « On ti’e à la cou’te<br />

paille, les ga’s ? // Toi, tu ne manques pas d’air » (20-10). On relève ici une<br />

référence voilée à la chanson de marin « Il était un petit navire » composée par<br />

Francis Poulenc. Cette référence s’accompagne d’un calembour homophonique dans<br />

la seconde phrase (d’air/d’R) qui, tout en suggérant la locution « ne pas manquer<br />

d’air » (/avoir de l’aplomb/), renferme elle-même une allusion à la prononciation du<br />

pirate Baba qui n’articule pas les R. Dans la version allemande, on observe une<br />

équivalence dénotative de la première phrase avec également une suppression des R,<br />

mais sans allusion à une chanson de marin : « Sollen wi’ St’ohhälmchen ziehen,<br />

Jungs ? ». Par contre, la seconde phrase est traduite très librement : « Nein, wir<br />

sitzen alle in einem Boot ». Elle constitue plus précisément une création ex nihilo<br />

parodiant une chanson de Dschinghis Khan, un groupe de musique pop allemand :<br />

« Wir sitzen alle im selben Boot ». Si cette seconde phrase ne correspond en rien au<br />

signifiant de l’original, elle reflète parfaitement l’image représentée dans la vignette.<br />

Sur celle-la, après s’être sabordés en croyant que les Gaulois allaient les attaquer, les<br />

pirates se retrouvent en effet tous dans un canot de sauvetage.<br />

Approche stratégique<br />

Si nous élargissons notre analyse typologique précédente pour une<br />

perspective plus énonciative, attentive aux enjeux communicatifs impliqués dans la<br />

traduction des calembours, nous constatons que Penndorf adopte quatre grandes<br />

stratégies.<br />

Suivant une stratégie de déficit, elle renonce quelquefois à traduire le<br />

calembour, le remplaçant par une formulation standard allemande, ce qui engendre<br />

une déperdition à la réception du texte. Entre autres, dans Astérix aux jeux<br />

olympiques, un Romain répond en ces termes à une question du légionnaire Deprus :<br />

« On voit bien que tu es un bleu, Deprus » (5-4). Goscinny joue ici sur

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