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LA TRADUCTION : ENTRE FIDÉLITÉ ET TRAHISON<br />

représentations générées par le texte source et celles qui seront codifiées dans le<br />

texte cible.<br />

La problématique est certes complexe dans le cas de langues et cultures<br />

éloignées, mais même entre des groupes linguistiques et culturels proches, comme le<br />

français et l’espagnol, cette opération de transfert exige un certain degré<br />

d’intervention de la part du traducteur.<br />

L’INTERVENTION COMME MÉDIATION LINGUISTIQUE ET CULTURELLE<br />

Dans certains cas, l’anisomorphisme des langues, qui apparaît dans un<br />

premier temps sous forme d’écarts lexico-syntaxiques, représente un obstacle quasi<br />

incontournable. On est alors tenté de parler d’intraduisibilité, une notion qui, tout<br />

comme la fidélité et la trahison, a fait couler beaucoup d’encre dans les études<br />

théoriques sur la traduction. Suivant John Catford (1965), Wolfram Wilss (1982 :<br />

49-50) distingue deux catégories d’intraduisibilité : l’intraduisibilité linguistique, qui<br />

se produit lorsque les ressources de la langue d’arrivée sont épuisées sans que<br />

l’équivalence fonctionnelle ne soit atteinte, et l’intraduisibilité culturelle, qui surgit<br />

lorsqu’un élément culturel de la langue source est absent de la langue cible.<br />

Menachem Dagut (1981 : 64) parle de semantic voids (« vides » sémantiques)<br />

et signale lui aussi deux cas de figure : linguistic voids (les « vides » linguistiques) et<br />

referential voids (les « vides » référentiels) qui, à grands traits, correspondent<br />

respectivement à l’intraduisibilité linguistique et l’intraduisibilité culturelle. En fait,<br />

ces deux phénomènes sont étroitement liés, car l’absence de correspondance au<br />

niveau linguistique est la manifestation de processus cognitifs différents dans la<br />

façon de percevoir la réalité et de la représenter. L’intervention du traducteur vise<br />

donc essentiellement à combler ces vides et à rapprocher deux visions du monde,<br />

même si l’équivalence ne peut pas toujours être assurée à tous les niveaux.<br />

Dans le domaine littéraire, les vides sémantiques sont fréquents dans des<br />

textes étroitement liés à la vie quotidienne et aux institutions d’une langue/culture.<br />

Les romans de Daniel Pennac, qui mettent en scène ses expériences dans<br />

l’enseignement secondaire, sont riches en exemples de ce type. Dans Comme un<br />

roman, cet auteur propose au lecteur d’imaginer la situation d’une candidate qui se<br />

présente au concours de l’agrégation :<br />

C’est l’épreuve dite de la leçon, à l’agrégation de Lettres. (Pennac, 1992 : 108)<br />

Par cette phrase, D. Pennac veut amener le lecteur à se représenter la<br />

situation de tension psychologique à laquelle est soumise la candidate au cours des<br />

différentes épreuves de ce concours. De ce point de vue, la traduction en espagnol ne<br />

présente guère de difficultés, car il existe en Espagne un processus semblable,<br />

appelé oposición, pour le recrutement des professeurs de l’enseignement secondaire.<br />

On observe, évidemment, quelques différences entre le système français et le<br />

système espagnol ; par exemple, il y a en France deux concours, l’agrégation et le<br />

CAPES, dont les titulaires ont un statut et éventuellement des perspectives de<br />

carrière différents, alors que, en Espagne, il y a un seul concours qui donne à tous<br />

ses titulaires le même statut. Or, dans ce cas, ces différences ne sont pas vraiment<br />

pertinentes car l’accent est mis sur le concours comme cadre des réactions de la<br />

candidate et, plus particulièrement, sur le déroulement des épreuves qui est similaire<br />

dans ces deux pays. La solution proposée par le traducteur espagnol est donc :Es la<br />

prueba llamada de tema, en la oposición de Literatura. (Pennac, 1993 : 95), une<br />

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