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Traduire

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LA TRADUCTION : ENTRE FIDÉLITÉ ET TRAHISON<br />

Fidélité ou trahison... Pendant des siècles le débat sur la traduction s’est<br />

organisé autour de cette dichotomie, la fidélité étant généralement entendue comme<br />

la traduction littérale du texte original et la trahison comme toute tentative d’adapter<br />

le texte à un nouveau lecteur, parfois fort différent du destinataire de l’original. Mais<br />

les critères sur lesquels se fondait un tel jugement étaient souvent vagues et très<br />

subjectifs.<br />

Depuis près d’un demi-siècle, la traductologie a développé des concepts et<br />

des outils théoriques qui permettent de dépasser une telle vision dichotomique de<br />

l’activité traduisante. Les études portant sur la traduction, tant comme processus que<br />

comme produit, ont mis en évidence la nécessité de prendre en compte sa dimension<br />

communicative et, notamment, le contexte culturel dans lequel elle s’inscrit.<br />

<strong>Traduire</strong> est considéré de nos jours comme un acte de médiation non seulement<br />

entre deux langues mais, surtout, entre deux cultures. C’est un acte de ré-écriture<br />

d’un texte destiné à s’insérer dans un contexte social, politique et économique<br />

déterminé, et ce contexte de réception du texte traduit exerce une forte influence sur<br />

les stratégies adoptées par les traducteurs. Mais la traduction est aussi un vecteur de<br />

circulation d’idées, de systèmes de valeurs, d’expressions culturelles. C’est le lieu de<br />

la différence, du questionnement. Or, les sociétés se montrent généralement<br />

réticentes à accepter la différence. Elles se sentent menacées par tout ce qui est<br />

nouveau, inconnu, et elles tendent à rejeter ce qui semble remettre en question<br />

l’ordre établi. Certains auteurs ont dénoncé la visée réductrice des traductions<br />

ethnocentriques, qu’Antoine Berman (1984 : 17) appelle la mauvaise traduction qui<br />

« sous couvert de transmissibilité opère une négation systématique de l’étrangeté de<br />

l’œuvre étrangère ». Pour A. Berman (1984 : 16), « l’essence même de la traduction<br />

est d’être ouverture, dialogue, métissage, décentrement. Elle est mise en rapport ou<br />

elle n’est rien ».<br />

« L’épreuve de l’étranger » permet en effet à une communauté linguistique et<br />

culturelle de s’oxygéner, d’intégrer des éléments nouveaux, d’éviter la stagnation<br />

intellectuelle et artistique. Comme le souligne la traductrice Sylvie Durastanti<br />

(2002 : 132) dans son livre Éloge de la trahison, « un pays, une civilisation, une<br />

culture, une littérature, une langue ne concédant aucune place à l’Autre se trouvent<br />

voués à ressasser, à se répéter, à s’atrophier, à s’éteindre ».<br />

La traduction est donc soumise à deux forces contradictoires au sein d’une<br />

même culture, d’une part une tendance naturellement ethnocentrique et, d’autre part,<br />

un besoin vital de renouveau. Pour satisfaire à cette double nécessité, le traducteur<br />

tente, d’une part, d’établir des équivalences qui permettent au nouveau lecteur de<br />

conserver certains repères et, d’autre part, de rendre visible la différence conçue<br />

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