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TRADUIRE… INTERPRÉTER<br />

Lorsque nous apprenons les lettres, on nous enseigne d'abord leurs noms, puis<br />

leurs formes et leurs valeurs ; on fait de même pour les syllabes et leurs<br />

propriétés ; puis de même encore pour les mots et leurs accidents, allongements,<br />

abrègements, accents, et autres choses semblables. Une fois tout cela<br />

parfaitement su, nous commençons alors à écrire et à lire, d'abord syllabe par<br />

syllabe et lentement. Lorsque, au bout d'un temps considérable, ces moules se<br />

seront solidement gravés dans notre mémoire, alors tout devient le plus aisé du<br />

monde ; qu'on nous mette sous les yeux n'importe quel livre, nous le parcourons<br />

sans broncher, avec un métier et une vitesse incroyables. C’est à peu près ce qui<br />

se produit, il faut l’admettre, aussi bien pour l’organisation des périodes que pour<br />

la belle venue des membres de phrases chez les athlètes de la littérature (Comp.<br />

25, 41-42 : trad. Aujac mod.).<br />

Denys s’attache à la première étape, l’apprentissage de la lecture, puis<br />

évoque un aboutissement quasi miraculeux. Quintilien, lui, permet de comprendre<br />

dans quel esprit est abordé l’entraînement à l’éloquence proprement dite. Les<br />

Romains aiment les oppositions robustes et concrètes : d’un côté res, « les choses »,<br />

le contenu, que concernent invention et disposition, de l’autre uerba, « les mots »,<br />

domaine de l’élocution. Res et uerba, dit Quintilien, sont bien entendu<br />

indissociables : il ne s’agit pas de faire du « beau » style, mais de convaincre le juge<br />

ou l’assemblée. Mais dans l’infinie variété des situations à propos desquelles on<br />

prend la parole, les res sont chaque fois différentes. En revanche on utilise dans tous<br />

les cas le même vocabulaire : une langue comporte un nombre de uerba (mots et<br />

expressions) important, mais limité. Il est donc possible d’enrichir méthodiquement<br />

son expression en sorte de connaître toutes les ressources du langage et d’avoir<br />

toujours à sa disposition un « trésor » disponible, où il sera possible de puiser les<br />

formules adéquates. Pour reprendre Denys, l’orateur ne doit pas, même quand il<br />

prépare son discours, avoir à chercher ses mots : il serait aussi handicapé que s’il<br />

devait en lisant épeler chaque syllabe. Grâce à l’entraînement, « les mots seront à<br />

notre service pour avoir l’air non de répondre à notre demande, mais de faire corps<br />

avec notre pensée et de la suivre comme l’ombre suit le corps » (Quint. 8, pr. 30).<br />

Comment parvenir à cette assurance souveraine ? Deux moyens avant tout pour le<br />

travail de l’expression : la lecture approfondie des meilleurs auteurs, la paraphrase<br />

(ou la traduction) de textes littéraires. Les exercices pratiqués à l’école sous la<br />

direction d’un maître se poursuivront le temps venu durant les longues veilles près<br />

de la lampe, lucubrationes.<br />

TECHNIQUE DE LA PARAPHRASE : EXERCICES DE STYLE<br />

Les progymasmata proprement dits, exercices préparatoires, fournissent une<br />

première initiation à la pratique de l’éloquence : leur liste se retrouve sans variations<br />

majeures dans 4 manuels dont celui de Théon est le plus ancien et le plus riche. Ils<br />

sont, chez lui, au nombre de 10, soit, dans l’ordre qui est le sien : « chrie », fable,<br />

récit, lieu (c’est-à-dire lieu commun), description... 1 . L’ensemble permet à l’élève de<br />

s’entraîner tour à tour aux divers aspects de l’éloquence. La version arménienne a<br />

permis de mieux saisir l’originalité de Théon : seul, il ajoute cinq « exercices<br />

1 La chrie « est une assertion ou une action brève et avisée, rapportée à un personnage défini »<br />

(« L’orateur Isocrate a dit que les disciples doués étaient des enfants des dieux »). Les suivants sont :<br />

prosopopée, éloge et blâme, parallèle, « thèse » (« Doit-on se marier ? », « Les dieux existent-ils ? »), loi.<br />

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