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L’AUTOBIOGRAPHIE LEIRISIENNE :<br />

UNE RECHERCHE CONTINUE DU SENS<br />

La tâche que nous nous assignons dans ce travail est d’examiner quelquesunes<br />

des caractéristiques définitoires des écrits autobiographiques de Michel Leiris<br />

(1901-1990), lesquelles nous autoriseraient à tenir ceux-ci pour un jeu créateur<br />

ininterrompu qui tend à la fois à délivrer le moi de l’emprise du temps et à empêcher<br />

la clôture du texte, en privilégiant une lecture plurielle. Notre réflexion reposera sur<br />

la spécificité de la technique de composition de ces livres, sur leurs jeux intra- et<br />

intertextuels, ainsi que sur l’exercice interprétatif auquel nous y sommes invités.<br />

Pratiquant, au cours de la période surréaliste, la poésie, Leiris annonce, en<br />

1939, par la parution de L'Âge d'homme, sa conversion définitive à l’autobiographie.<br />

Dès lors, il passera sa vie à écrire sur soi : une cinquantaine d’années durant<br />

lesquelles paraissent les quatre tomes de La Règle du jeu - Biffures (1948), Fourbis<br />

(1955), Fibrilles (1966), Frêle bruit (1976) - et d’autres textes à caractère<br />

autobiographiques tels Le Ruban au cou d’Olympia (1981) ou À cor et à cri (1988).<br />

Dans L’Âge d’homme, Leiris ne se propose pas de retracer son existence dans<br />

un récit linéaire, mais tente plutôt de se figer dans un texte soustrait à la dynamique<br />

chronologique, surprendre en une sorte d’image instantanée ses «invariables». Le<br />

livre est un collage ou un «photo-montage», selon les dires de l’écrivain, créé par<br />

simple juxtaposition et visant à saisir les analogies apparentes ou secrètes entre les<br />

événements personnels. Les associations dont l’auteur se sert sont le résultat de deux<br />

démarches opposées. La première consiste à présenter des souvenirs et des scènes<br />

réelles ou imaginaires, pour en dégager à la fin l’élément commun, le thème. La<br />

seconde, employée plus fréquemment, est une démarche inverse, qui part du thème<br />

pour aboutir aux souvenirs proprement dits. La technique du collage a été d’ailleurs<br />

beaucoup expérimentée et exploitée par Leiris dans ses textes poétiques de la<br />

période surréaliste. Pour créer Simulacre ou Glossaire : j’y serre mes gloses, le<br />

poète est parti d’un stock de mots à résonance poétique, lesquels ont été ensuite<br />

groupés pour mettre en lumière des rapports issus de leur seule mise en présence.<br />

Dans L’Âge d’homme, le corpus de mots est remplacé par un corpus de fiches, sur<br />

lesquelles Leiris avait noté quelques-uns de ses rêves et de ses souvenirs.<br />

Dans les quatre tomes de La Règle du Jeu, le point de départ, au moins, est le<br />

même : un groupe de faits, chacun inscrit sur une fiche. Si pour L’Âge d’homme, les<br />

notes utilisées se rapportaient aux rêves et aux souvenirs ayant trait au thème de<br />

l’amour et de la sexualité, Biffures (le premier volume de La Règle) puise sa matière<br />

première dans les faits de langage enfantin. Le narrateur part de la différence qu’il<br />

perçoit entre la signification courante des mots et celle qu’il leur prêtait lorsqu’il<br />

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