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SIGNIFICATION ENTRE INTERPRÉTATION ET TRADUCTION<br />

. معكِ‏ ٳني وحيدةٌ‏ أَتداعى ‏،قد تخل ِّيتُ‏ عن سريري الطر ِّي<br />

Dans l’extrait ci-dessus le pronom « Vous » est traduit en arabe par « Tu :<br />

Toi » alors que dans le texte français ce « vous » qui a un emploi anaphorique<br />

renvoie explicitement à un pluriel puisqu’il désigne les astres auxquels s’adresse La<br />

Parque : « Tout puissants étrangers, inévitables astres / Qui daignez faire luire au<br />

lointain temporel / Je ne sais quoi de pur et de surnaturel » (vv18-20). Ce pluriel est<br />

confirmé par le rappel de l’apostrophe au vers 21 « Vous qui dans les mortels<br />

plongez jusqu’aux larmes » et par l’emploi du possessif « votre » au vers 23 « Et les<br />

élancements de votre éternité, […] ». Qui est ce « Tu » ou ce « vous » singulier ?<br />

PROBLÈME DE L’AMBIGUÏTÉ<br />

Umberto ECO 1 évoque le cas des métaphores et le vécu du lecteur pour<br />

activer des images, il va même jusqu’à proposer le recours à la « désambiguïsation »<br />

pour rendre le texte accessible au lecteur cible. Mais l’ambiguïté est propre au<br />

langage en général et au langage poétique. De même dans la langue d’arrivée, le<br />

texte, dans la mesure où c’est une re-création, engendre ses propres ambiguïtés.<br />

PROBLÉMATIQUE DE L’AMPLIFICATION ET DE LA CLARIFICATION<br />

Antoine BERMAN 2 a émis des critiques aux tentatives de clarification et<br />

d’allongement du texte original et Umberto ECO (op. cit., p. 102) conseille d’éviter<br />

d’enrichir le texte. Valéry en revanche reconnaît que cela est intimement lié au<br />

travail (OE, I, 214) et précise que « le traducteur ne peut aller que vers le plus<br />

clair…ou amplifier- ou quitter-» (CIV, 63). De plus, les mots ne recouvrant pas la<br />

même réalité, les structures ne faisant pas ressortir les mêmes images, la trame<br />

phonique exigeant un allongement, le traducteur est presque forcé d’amplifier ou de<br />

clarifier pour rendre son texte accessible et surtout poétique. Mais ces procédés<br />

altèrent et orientent la signification comme dans les vers ci-dessous où le crime est<br />

lié au « destin » dont il n’est point question dans le texte source :<br />

تحت نِاب األعجوبة البكرِ‏ ، حدّث عن بالٕء بناره تتكوى .<br />

أيّ‏ جرمٍ‏ أتيتُ‏ ، أي ُّ جناح جررته األقدار ‏ُفوق جبيني؟<br />

QUELLE STRATÉGIE ?<br />

Deux cheminements, non sans conséquences, s’offrent au<br />

traducteur/médiateur : le passage du texte source (TS) au texte cible (TC) où<br />

joueront sa sensibilité et sa propre interprétation ou bien la prise en compte de tout<br />

le métalangage critique (MC) au risque de quelques dérives !<br />

∆ █<br />

TS MC TC<br />

1 Cf. Presque la même chose, où il prend pour exemple l’incipit du Cimetière Marin de Paul Valéry et<br />

essaie d’expliciter le référent de « toit » qui devient dans les vers suivant la « mer » :<br />

« Ce toit tranquille, où marchent des colombes, »<br />

« Valéry pensait, dit-il, (à mon avis) en Parisien. Or à Paris, les toits sont en ardoise et, sous le soleil, ils<br />

peuvent prendre des reflets métalliques. Donc midi le juste crée sur la surface marine des reflets argentés<br />

qui suggèrent à Valéry l’étendue des toits parisiens », p. 191.<br />

J’en profite pour ajouter, selon Huguette LAURENTI qui a connu Valéry, qu’il s’agit plutôt des toits de<br />

Montpellier où Valéry a vécu avant de monter à Paris. La traduction arabe par le même traducteur de cet<br />

incipit a respecté à la lettre le texte français qui est très parlant pour un méditerranéen.<br />

2 Cf. La traduction et la lettre, Paris, Seuil, 1999, pp. 54-9.<br />

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