31.07.2015 Views

Impacts du sel de déneigement sur les arbres - Caue 77

Impacts du sel de déneigement sur les arbres - Caue 77

Impacts du sel de déneigement sur les arbres - Caue 77

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Devenir <strong>du</strong> <strong>sel</strong> dans <strong>les</strong> <strong>arbres</strong>Les ions absorbés par le biais <strong>du</strong> système racinaire vont migrer dans la plante par le système vasculaire <strong>de</strong> la sèvebrute. Le sodium a tendance à rester dans <strong>les</strong> racines ou la base <strong>du</strong> tronc et le chlore migre vers <strong>les</strong> extrémités <strong>de</strong>branches et <strong>les</strong> feuil<strong>les</strong>.En présence <strong>de</strong> chlore, le fonctionnement <strong>de</strong>s feuil<strong>les</strong> est perturbé : <strong>les</strong> stomates (systèmes présents principalement <strong>sur</strong>la face inférieure <strong>de</strong>s feuil<strong>les</strong> et permettant <strong>les</strong> échanges gazeux entre la plante et l’atmosphère) restent ouverts auxheures <strong>les</strong> plus chau<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la journée, au lieu <strong>de</strong> se refermer pour limiter la transpiration et <strong>les</strong> pertes en eau.Lorsque la pollution saline est liée aux embruns, ces <strong>de</strong>rniers vont avoir un effet direct <strong>sur</strong> le feuillage et toute la partieaérienne <strong>de</strong> l’arbre. Car ces embruns sont non seulement constitués <strong>de</strong> fines particu<strong>les</strong> d’eau salée, mais contiennentégalement <strong>de</strong>s microparticu<strong>les</strong> qui peuvent avoir un fort pouvoir abrasif. La cuticule, fine couche imperméable quiprotège la <strong>sur</strong>face <strong>de</strong>s feuil<strong>les</strong> et limite leur transpiration, peut être altérée et <strong>les</strong> ions toxiques pénètrent aussi par lefeuillage.En présence d’une pollution par <strong>les</strong> <strong>sel</strong>s <strong>de</strong> déneigement, l’action toxique passe essentiellement par le sol, lorsque laneige associée au <strong>sel</strong> fond et que l’eau salée pénètre dans le sol. Mais le <strong>sel</strong> peut aussi s’associer à <strong>de</strong>s particu<strong>les</strong>(sab<strong>les</strong>, poussières présentes <strong>sur</strong> la chaussée). Dans ce cas, on peut également avoir <strong>de</strong>s phénomènes <strong>de</strong>contamination <strong>de</strong> la partie aérienne, similaires à cel<strong>les</strong> rencontrées en bord <strong>de</strong> mer, notamment <strong>sur</strong> <strong>les</strong> <strong>arbres</strong> situés enbord <strong>de</strong> routes circulantes. Le passage <strong>de</strong>s véhicu<strong>les</strong> <strong>sur</strong> la neige fon<strong>du</strong>e, est à l’origine <strong>de</strong> la création <strong>de</strong> brouillardssalés qui peuvent être projetés à plusieurs mètres <strong>de</strong> hauteur.Lorsque <strong>les</strong> feuil<strong>les</strong> sont altérées partiellement, leur fonction photosynthétique l’est également et la quantité <strong>de</strong> sucresfabriquée par la plante, est moindre, alors qu’ils sont indispensab<strong>les</strong> pour le développement <strong>de</strong>s végétaux. De plus, auniveau cellulaire, pour lutter contre la présence d’une forte concentration en <strong>sel</strong> qui « tire » l’eau à l’extérieur <strong>de</strong>scellu<strong>les</strong>, la plante va avoir tendance à mobiliser <strong>de</strong>s substances <strong>de</strong> réserves à l’intérieur <strong>de</strong>s cellu<strong>les</strong>, pour augmenter laconcentration intra-cellulaire. Enfin, l’arbre qui a per<strong>du</strong> en avance une partie <strong>de</strong> son feuillage (<strong>de</strong>sséché) aura tendanceà fabriquer un nouveau feuillage pour compenser <strong>les</strong> pertes, si <strong>les</strong> conditions climatiques et la saison le permettent.Cette reconstitution, consommatrice d’énergie, va se faire au détriment <strong>du</strong> stockage <strong>de</strong> réserves, nécessaire notammentà la reprise <strong>de</strong> la végétation au printemps. Si <strong>les</strong> repousses se succè<strong>de</strong>nt dans la saison, le sujet atteint va s’affaiblirrapi<strong>de</strong>ment et l’on peut observer <strong>de</strong>s phénomènes <strong>de</strong> nanification <strong>de</strong>s rameaux et <strong>de</strong>s feuil<strong>les</strong>.Les étu<strong>de</strong>s bibliographiques semblent montrer que seu<strong>les</strong> certaines espèces, comme l'érable à sucre (espèce NordAméricaine utilisée pour la fabrication <strong>du</strong> sirop d’érable) ont la capacité d’éliminer <strong>les</strong> ions toxiques par le biais <strong>de</strong> leursfeuil<strong>les</strong>, qui se « chargent » en <strong>sel</strong> juste avant leur chute. Pour plusieurs espèces ornementa<strong>les</strong> (dont le marronnier et leplatane) <strong>les</strong> travaux <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> Gérard Bory (Laboratoire <strong>de</strong> Physiologie <strong>de</strong> l’Arbre <strong>de</strong> l’université Paris 7 DenisDi<strong>de</strong>rot) ont montré que <strong>les</strong> ions qui ont pénétré dans le végétal ont tendance s’accumuler dans <strong>les</strong> tissus. Leurs effetspeuvent ainsi se faire sentir longtemps après la pollution. Et si elle se répète <strong>sur</strong> plusieurs années, l’accumulation peutentraîner au bout <strong>de</strong> plusieurs années la présence <strong>de</strong> teneurs léta<strong>les</strong> pour le végétal, qui peut alors mourir en quelquesmois, sans que l’on soupçonne immédiatement un problème d’intoxication saline.2


La sensibilité au <strong>sel</strong> est variable <strong>sel</strong>on <strong>les</strong> espècesLes teneurs en chlore à partir <strong>de</strong>squel<strong>les</strong> <strong>les</strong> symptômes apparaissent sont très variab<strong>les</strong> d’une espèce à l’autre etmême au sein d’un genre. Ainsi le marronnier blanc (Aesculus hippocastanum) est bien plus sensible que le marronnierà fleurs roses (Aesculus x Carnea).On peut considérer qu’une espèce est tolérante d’un point <strong>de</strong> vue physiologique, si elle présente simultanément unniveau <strong>de</strong> dégradation faible et <strong>de</strong>s teneurs en chlore foliaire élevées, comme par exemple l’ailante (Ailanthus altissima),le frêne commun (Fraxinus excelsior), le févier (Gleditsia triacanthos), le pin pignon (Pinus pinea) ou le cerisier àgrappes (Prunus pa<strong>du</strong>s). D’autres espèces sont peu sensib<strong>les</strong>, car el<strong>les</strong> présentent peu <strong>de</strong> symptômes et <strong>de</strong>s teneursen chlore faib<strong>les</strong>, même pour une forte exposition, comme le chêne vert (Quercus ilex) : la cuticule épaisse et cireuse<strong>de</strong>s feuil<strong>les</strong> limite leur dégradation et la pénétration <strong>de</strong> chlore supplémentaire par cette voie. Au contraire, si pour <strong>de</strong>steneurs faib<strong>les</strong> <strong>les</strong> symptômes <strong>de</strong> brûlures sont importants, l’espèce peut être considérée comme sensible, ce qui est lecas par exemple, <strong>du</strong> hêtre (Fagus sylvatica), <strong>de</strong> l’érable sycomore (Acer pseudoplatanus), <strong>du</strong> marronnier blanc(Aesculus hippocastanum), <strong>du</strong> noisetier <strong>de</strong> Byzance (Corylus colurna) ou <strong>du</strong> peuplier blanc (Populus alba).Sensibilité <strong>de</strong> quelques <strong>arbres</strong> d'alignement à la pollution saline : évolution <strong>de</strong>s symptômes, teneur en chlorefoliaire (mg/g <strong>de</strong> matière sèche), et niveau <strong>de</strong> sensibilité.essence avril mai jui juillet août septembr octobre conclusion <strong>sur</strong> la sensibilitéhêtre I n III IV, 15 e plus <strong>de</strong> très sensiblepin I, 27 fe peu sensibleorme I, 12 tolérantailante pasI, 50 tolérantchêne vert fe 15 I, 9 tolérantérable III, 45 sensiblefrênepasI, 50,peu sensiblefévierfe18I, 30,I plus fe tolérantnoisetier <strong>de</strong>III, 30sensibleByzancepeuplier blanc I III, IV,plus fetrès sensible‘Raket’peuplier blanc55 6010 plus fe toléranttypecerisier àII,35peu sensiblegrappes grille <strong>de</strong> notationI Le houppier apparaît visuellement entièrement vert. Les feuil<strong>les</strong> sont, en général, saines, sans brûlures importantes,même si parfois <strong>de</strong>s nécroses margina<strong>les</strong> sont décelab<strong>les</strong> en fin <strong>de</strong> pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> végétation. Mais, globalement cesbrûlures représentent toujours moins <strong>de</strong> 10 % <strong>du</strong> houppier.II Le feuillage montre souvent un jaunissement plus ou moins généralisé accompagné <strong>de</strong> zones <strong>de</strong> roussissement. Ils'agit d'une phase initiale localisée à certaines branches. Les "brûlures" s'éten<strong>de</strong>nt <strong>sur</strong> moins d'un quart <strong>du</strong> houppier.III Le phénomène <strong>de</strong> brûlure - roussissement s'étend <strong>sur</strong> 50 à 75 % <strong>du</strong> houppier.3


IV Le roussissement est presque général avec une défoliation qui représente environ au moins la moitié <strong>du</strong> houppier.Ces résultats qualitatifs et quantitatifs proviennent d’une étu<strong>de</strong> réalisée au milieu <strong>de</strong>s années 1995 par lelaboratoire <strong>de</strong> Physiologie <strong>de</strong> l’Arbre <strong>de</strong> l’Université Paris 7 Denis Di<strong>de</strong>rot, dirigé à l’époque par Gérard BoryDans la littérature, il est parfois difficile <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s valeurs quantitatives et <strong>de</strong> connaître l’origine <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> qui acon<strong>du</strong>it à la classification (étu<strong>de</strong> scientifique, observation <strong>de</strong> terrain).Les métho<strong>de</strong>s curatives sont peu efficaces, la prévention reste la meilleure <strong>de</strong>s démarches.Dans le cas d’une pollution « artificielle » par le chlorure <strong>de</strong> sodium, liée aux <strong>sel</strong>s <strong>de</strong> déneigement ou aux saumures <strong>sur</strong><strong>les</strong> marchés, elle peut a priori être jugulée par l’application d’une réglementation interdisant leur épandage <strong>sur</strong> <strong>les</strong> zonesplantées ou la mise en place <strong>de</strong> protection physiques. Mais il est parfois difficile <strong>de</strong> <strong>sur</strong>veiller <strong>les</strong> contrevenants quiutilisent <strong>du</strong> <strong>sel</strong> au premier coup <strong>de</strong> froid. En ce qui concerne la question <strong>de</strong>s embruns <strong>de</strong> bord <strong>de</strong> mer, la pollution serépète d’années en années. L’état sanitaire <strong>de</strong>s <strong>arbres</strong> sensib<strong>les</strong> ne pourra aller que vers une dégradation inéluctable,car <strong>les</strong> métho<strong>de</strong>s curatives sont diffici<strong>les</strong> à mettre en œuvre. Le <strong>les</strong>sivage <strong>de</strong>s zones urbaines n’est pas vraimentenvisageable, d’autant que <strong>les</strong> sols sont souvent peu perméab<strong>les</strong> et <strong>les</strong> risques d’asphyxie <strong>du</strong> système racinaireimportants.L’équipe <strong>de</strong> Gérard Bory a travaillé <strong>sur</strong> <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> taille curative <strong>sur</strong> <strong>de</strong>s platanes « salés » à Paris. Cette pratiquedoit être préconisée avec précaution, car il faut impérativement procé<strong>de</strong>r aux travaux <strong>de</strong> taille <strong>du</strong>rant une pério<strong>de</strong> trèsprécise (lorsque <strong>les</strong> brindil<strong>les</strong> ou <strong>les</strong> feuil<strong>les</strong> contiennent un maximum d’ions toxiques). Pour cela, plusieurs dosages <strong>sur</strong>la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> végétation doivent être effectués au préalable, pour connaître l’évolution saisonnière et spatiale <strong>de</strong>s ionspour l’espèce étudiée.Face à cette situation, la prévention reste la meilleure <strong>de</strong>s solutions. Il s’agit tout d’abord <strong>de</strong> prêter la plus gran<strong>de</strong>attention au choix <strong>de</strong>s espèces, en retenant cel<strong>les</strong> réputées tolérantes. Pour cela, si la littérature scientifique est peuabondante <strong>sur</strong> le sujet, il est toutefois recommandé <strong>de</strong> la consulter car elle renferme <strong>de</strong>s informations fiab<strong>les</strong>, basée <strong>sur</strong><strong>de</strong>s expérimentations. Il est aussi intéressant <strong>de</strong> se rapprocher <strong>de</strong> pépiniéristes spécialisés <strong>sur</strong> <strong>les</strong> végétaux <strong>de</strong> bord <strong>de</strong>mer, dont l’expérience <strong>de</strong> terrain est à prendre en considération. Attention, si <strong>les</strong> espèces sont choisies pour leurtolérance au <strong>sel</strong>, mais pour <strong>de</strong>s régions où le risque d’intoxication par <strong>de</strong>s <strong>sel</strong>s <strong>de</strong> déneigement est élevé, cela signifieque l’on se trouve dans un environnement où il risque <strong>de</strong> faire froid. Il faut donc s’as<strong>sur</strong>er que ces espèces le tolèrentbien aussi …Il pourrait être également intéressant pour le gestionnaire <strong>de</strong> chercher à développer, par la voie <strong>de</strong> la multiplicationvégétative, la conservation <strong>de</strong>s indivi<strong>du</strong>s présents dans leur patrimoine et reconnus pour leur tolérance.Bien sûr, un soin particulier doit être apporté au choix d’espèces adaptées aux conditions <strong>de</strong> sol et <strong>de</strong> climat, car unarbre qui ne se développe pas dans <strong>de</strong>s conditions optima<strong>les</strong>, sera fragilisé dès le départ. Lors <strong>de</strong> la conception <strong>du</strong>projet, il faut envisager <strong>de</strong>s modalités <strong>de</strong> plantation qui permettent <strong>de</strong> protéger le sol, sans pour autant imperméabiliserla <strong>sur</strong>face.4

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!