Les réseaux d'acteurs du commerce équitable - la Plate-Forme pour ...

qu’il y ait un peu moins d’argent pour les plus fortunés et un peu plus pour ceux qui sont à la basede, de la production, ça c’est évident. » (Le responsable de communication des magasins F).« Ben, c’est possible mais aujourd’hui le commerce équitable c’est une goutte d’eau dans unocéan, hein, le commerce équitable. » (Le président de la boutique associative).Ces opérateurs accordant moins d’importance aux échanges Nord/Sud, ils n’ont que peu de liens avecdes organisations de solidarité internationale 42 .Les trois représentants interrogés ont une connaissance assez fine des enjeux du commerce équitable.La responsable de la communication qui dit être peu informée sur le commerce équitable est tout demême au fait des « querelles de chapelle » évoquées par le président de l’association au sujet de MaxHavelaar. Et tous trois connaissent bien les débats qui agitent l’univers de l’équitable concernant ladistribution en GMS et la garantie par les pouvoirs publics.La volonté de promouvoir une approche plus engagée du commerce équitable apparaît aussi dans lechoix des fournisseurs de produits commerce équitable : il s’agit souvent de relations directes avec desopérateurs de commerce équitable spécialisés et de marques au positionnement plus « militant » que lesproduits bios labellisés Max Havelaar, tels les produits Solidar’Monde et Andines.Cette perception du commerce équitable avant tout Nord/Nord s’explique certainement par leurappartenance déterminante au champ de l’économie sociale et solidaire, comme nous allons le voir àprésent.2| Le commerce équitable, une pratique liée à un système économique alternatifLe point commun à ces trois acteurs bios engagés dans la diffusion du commerce équitable est d’être liésà l’économie sociale et solidaire et de promouvoir en cela, une autre façon de faire de l’économie : demanière plus juste, plus équitable, plus sociale, plus solidaire mais aussi plus transparente, et qui permetde réfléchir à un autre mode de consommation. Ces structures ne pratiquent pas seulement des activitésmarchandes intégrant des critères correctifs (de l’économie conventionnelle) mais veulent influencerd’autres acteurs commerciaux dans ce sens et la population en général. Ils ont donc une vocationmilitante affichée et une position assumée à la frontière des secteurs marchand et non marchand.Le vocabulaire employé par le gérant du magasin B et le porte-parole des magasins F atteste de cettevision peu orthodoxe de l’économie. Tous deux sont pourtant issus de formations commerciales mais ilsont fait le choix de vivre le commerce autrement. Le gérant maîtrise le lexique entrepreneurial (il parle dela « qualité » des produits, de la « compétitivité-prix », insiste sur la nécessité de mieux informer lesclients sur les produits, connaît le concept de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) maisrelativise les phénomènes de concurrence entre magasins bios (ce qui dénote aussi une vision sansdoute idéalisée de l’ensemble de ce système économique alternatif) :« - Sinon, il y a d’autres épiceries bio ou équitables dans le quartier ?- Oui mais ça ne marche pas en concurrence… je veux dire, par exemple il y a un petit (nom demagasin bio) qui est sur le Boulevard (X) : et il y a des clients qui vont jusqu’à (nom de magasinbio) et puis qui viennent chez nous après… »Leur engagement en faveur de l’économie sociale et solidaire s’explique par un rejet des pratiques del’économie conventionnelle et les amène à prôner de nouvelles relations économiques plus « sensées »,« favorisant le développement local », « replaçant l'homme au centre de l'économie » (pour l’association)et « préservant la survie de la race humaine » (magasin B)Ils justifient leur critique de l’économie conventionnelle par la dénonciation de ces dérives manifestesdans l’agro-alimentaire (d’après le responsable du magasin B) et à l’échelle mondiale (selon le présidentde l’association). Ces deux enquêtés dénoncent plus précisément le « capitalisme » qui profitent de tousles secteurs innovants comme le commerce équitable et les dévoie :« - C’est toujours comme ça : chaque fois qu’il y a une activité qui est…[…] innovante ou qu’il y a…où il y a une solvabilisation qui est possible ben le capitalisme prend le dessus là-dessus et puisaprès, il développe, il fait son affaire, et parfois c’est juteux. Voilà.- Oui puisque actuellement le commerce équitable se vend à 80% en grande distribution.- Donc voilà c’est ça. […] Donc il y a de l’autre côté aussi, des acteurs du commerce équitable, quiont une vision un petit peu restrictive, je pense à … Max Havelaar qui a pris le pari de la grandedistribution à tout va »42Notons cependant que l’association fait exception en raison de la sensibilité exprimée par son président à l’égard de ce thème.Les réseaux d’acteurs du commerce équitable – Exemple de l’Ile-de-France 50