Les réseaux d'acteurs du commerce équitable - la Plate-Forme pour ...

« Ce n’est pas juste des échanges, parfois on fait un pas de plus et effectivement c’est plus de lasolidarité, enfin ce que ferait une ONG. Mais avec la petite différence que c’est du gagnantgagnant.» (Importateur grossiste D, textile, PFCE)Cette dernière précision cherchant à distinguer le commerce équitable de la solidarité internationalemontre que la nuance reste difficile à expliquer pour chacun.E - LES PRODUITS DE COMMERCE EQUITABLE DANS LA GRANDE DISTRIBUTION, LE DEBAT QUIPERDURELa question de la stratégie de distribution est la plus tranchée, un seul opérateur se déclarant neutre faceà cette interrogation, la moitié des personnes interrogées s’exprimant pour et l’autre moitié clairementcontre la présence de produits de commerce équitable dans la grande distribution.Les opérateurs « pour » sont pour la plupart de profil entrepreneur. Ils regroupent entre autres lesstructures au chiffre d’affaires important qui partagent un consensus sur la distribution en GMS, maisaussi la responsabilité sociétale de l’entreprise, comme nous l’avons vu plus haut, témoignant ainsi à lafois d’une volonté de faire de gros volumes et d’être des entreprises responsables.« Les produits de commerce équitable ont leur place partout » (Boutique rés/franch C, multiproduit,PFCE)Pour cela, ils cherchent des partenaires commerciaux « solides », comme ceux de la grande distribution,favorisant ainsi l’ouverture du marché par l’accroissement du volume des ventes. Plusieurs parmi euxreprochent plus fortement à certains acteurs de s’être fermés obstinément à toute collaboration car sepriver de la grande distribution, c’est se priver d’autant de débouchés pour les petits producteurs du Sud :« On doit s’asseoir sur nos petites idéologies à deux balles, c’est bien gentil d’avoir de grandesidées, mais si on est là pour soutenir les producteurs, il faut le faire ! » (Boutique rés/franch L,multiproduit, FADM)Enfin pour certains opérateurs, comme certaines boutiques, c’est « un moindre mal ». Ce n’est pas qu’ilssoient pour ce type de distribution, mais pas contre :« Plutôt que de critiquer ce type de démarche, critiquons ceux qui ne l’ont pas dutout » (Distributeur VPC P, textile, indépendant)Ainsi, beaucoup des opérateurs certes favorables à ce type de distribution soulignent avec force lesrisques et les dangers d’une telle démarche qui se doit de rester « un cheval de Troie », se prévenant detoutes les manipulations et détournements possibles.A l’opposé, les responsables de profil militant de boutiques et d’associations qui prônent des relations deproximité avec le consommateur portent des propos fermes, vindicatifs et sans nuance envers la grandedistribution :« Moi je pense que c’est se tirer une balle dans le pied à moyen terme que de travailler avec lesGMS » (Boutique individuelle A, textile, indépendant)« Les GMS sont en train de casser le commerce équitable comme ils l’ont fait pour le commerce deproximité il y a 20 ans […] Je ne crois pas que les GMS diminuent leur marge, mais franchement jen’y crois pas un seul instant ! » (Boutique individuelle J, artisanat/textile, indépendant)Elles soulignent que ces enseignes pratiquent des économies d’échelle au Sud et au Nord, principeincompatible avec ceux du commerce équitable. Il est alors question de la cohérence globale de ladémarche, si elle s’inscrit dans un système de distribution globalement jugé inéquitable.Enfin certains font remarquer que distribuer des produits équitables, c’est également donner uneinformation précise sur leur provenance, leur cadre de production, le type de retombées qu’ils permettentetc., or tout ceci ne semble pas possible en grandes surfaces.Ainsi, l’introduction de la labellisation dans le commerce équitable a provoqué des dissensions entre deuxunivers idéologiques qui continuent d’exister :« (…) deux perspectives s’affrontent : celle du modèle révolutionnaire de la sphère de laspécialisation, et celle du modèle réformiste, représenté par la sphère de la labellisation. » « (...) les‘’révolutionnaires’‘ soutiennent le commerce équitable en tant qu’initiateur d’un autrecommerce,(…), alors que les ‘’réformateurs’‘ considèrent le commerce équitable comme un moyend’introduire certains changements dans le commerce conventionnel. » « Tous s’accordent pourfaire ‘’changer le système’‘… . Mais contrairement aux adeptes du mouvement révolutionnaire, lespartisans du modèle réformiste sont persuadés qu’il est plus facile de changer le systèmeLes réseaux d’acteurs du commerce équitable – Exemple de l’Ile-de-France 22