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Elu/es et question de genrede l'égalité des genres ne mobilise encore qu'uneminorité, appartenant essentiellement à desgroupes de gauche. On constate néanmoins uneprogression de l'exigence de parité et d'égalité àdroite, en particulier grâce au lobbying d'associationsde femmes entrepreneurs 2 . Mais les créditsvotés pour l'égalité des genres sont faibles, comparésà d'autres postes, et on peut s'inquiéter pourleur progression, jusque-là lente et dispersée maisréelle, dans le contexte de crise d'aujourd'hui.Ü Manifestation lors de la Journéede la Femme (2004)aubertolivier.org2. Par exemple, Femmes d'entreprisesd'Europe."Pas en notre nom !" 1T" ous les candidats de droite et d’extrême droiteà l’élection présidentielle semblent tout particulièrementpréoccupés par la liberté des femmeset développent une sensibilité et une attentionquasi obsessionnelles à l’égalité des sexes. Tout sepasse comme si la condition des femmes étaitdevenue (...) une priorité nationale" 2 . En matièrede justice sociale, pensez-vous ? Non, d’"immigration".Ainsi peut-on imaginer que "désormais, l’unedes conditions d’admission sur 'notre' territoiredes populations immigrées sera le respect inconditionnelde ce qui relève, à les entendre, de l’essencede l’Occident : l’égalité des sexes. A l’imagedes Pays-Bas, on leur diffusera des vidéos defemmes, seins nus sur les plages de la côte d’Azur,ou encore de deux hommes s’embrassant tendrementsur la bouche, pour tester leur tolérance à lamodernité."Ainsi, les droits des femmes sont devenus le"cache-sexe d’une croisade impérialiste" quiocculte "la réalité des inégalités, des discriminationset des violences dont font toujours l’objet lesfemmes, mais aussi toutes les autres minoritéssexuelles (gays, lesbiennes, transsexuelles)" enFrance, et plus largement en Europe.Il faut sans fin le rappeler : la violence faite auxfemmes est partout, elle n'est pas liée à une classesociale, et pas même à une culture car la hiérarchiehomme>femme s'exprime dans toutes.Aussi, "les effets politiques de ces discours dehaine sont catastrophiques pour le féminisme luimême,car, comme on l’a vu récemment sur "l’affairedu voile", ils hypothèquent les coalitions,tant internationales que nationales, entre lesdivers mouvements des femmes, en insufflantdans ses rangs le soupçon d’ethnocentrisme – lesféministes 'françaises' n’auraient pas à donner desleçons d’émancipation si celle-ci se résume audroit de porter une minijupe ; inversement, lesféministes 'voilées' ne seraient pas des 'vraies'féministes – ni même de 'vraies' françaises, selonleurs détracteurs, car elles exhibent une imagesoumise des femmes.""Il s’agit donc de refuser de penser la libérationdes femmes dans les termes même que nousimpose l’extrême droite, et qu’elle impose à lascène publique, en dénonçant ce qui de fait estcontradictoire avec tout projet féministe : l’"identiténationale" et en luttant contre "les atermoiementsde la gauche majoritaire" qui ne sont paspour rien dans cette confusion car c'est "la mise enminorité d’un engagement féministe radical àgauche qui a permis qu’un féminisme de mascaradeémerge à droite". Et Elsa Dorlin de rappelerl'enterrement de la loi Roudy sur l'égalité dessalaires, l'absence de contraintes imposées auxpublicitaires et au commerce en général, et autresdébandades (la liste est longue)...1. Ce titre reprend celui du manifeste "Pas en notre nom !", lancéle 8 mars 2005 par le réseau féministe NextGenderation à l’occasionde la journée internationale des femmes au moment de lacampagne pour la constitution européenne. Texte disponible enligne sur le site de NextGenderation.2. J'utilise ici des extraits d'un texte de même titre écrit sur le sitede L'autre campagne par Elsa Dorlin, philosophe maître deconférences à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, membredu réseau féministe NextGenderation.6 S!lence n°377 mars 2010

Elu/es et question de genreaubertolivier.orgLes actions plébiscitées par les communes sontsurtout des initiatives médiatiques et des animations: campagnes d'affichage, interventions dansles écoles et auprès des personnels sociaux, permanenceset groupes de paroles. Les associations sontévidemment très sollicitées, mais avec des subventionsrarement à la hauteur des enjeux. Aussi, laplupart de ces actions restent-elles pointillistes(quinzaine d'affichage, "journée" ou stage sur ceciou cela, dans l'éducation ou l'entreprise) et, quandelles s'inscrivent dans la durée, leur puissance estfaible quoique jamais négligeable.Dans des associations débordées, la routinetend à l'emporter en dépit des efforts méritoires deleurs professionnels et de leurs bénévoles.L'imagination n'a guère le temps de s'exercer.Pourtant, certaines mesures peu coûteuses pourraientêtre résolument promues : par exemple, toutjournal municipal ne devrait-il pas avoir unerubrique anti-sexiste explicite, systématiquementalimentée ?De même, ne pourrait-on attendre de nos collectivitéslocales, proclamant leurs ambitions égalitairesen matière de genre, un encadrement sévèrede la publicité dont le rôle est patent dans la promotiondu sexisme et de la compétition généralisée? On se heurte sans doute ici aux limites de ladélégation politique par élections, sur fond deconsensus médiatico-économique. Comment nosélu/es, qui doivent contenter leur majorité, pourraient-ilsopter en nombre pour des positionsencore minoritaires, voire avant-gardistes, enmatière de justice et d'éthique ?En France, les soucis domestiques sont encoremassivement dévolus aux femmes, en particulierles soins aux enfants. Mais on peut observer, dansles collectivités locales, des efforts réels pour soulagercette responsabilité en augmentant le nombrede places d'accueil pour la petite enfance, avec laréalisation de crèches ou de micro-crèches (commeà Leers, 9350 habitants). On est cependant loin ducompte : le gouvernement lui-même évalue à322 000 le nombre de places à créer, et à 500 000si aucun enfant de deux ans n'était plus scolariséen maternelle... Le projet de "droit opposable"concernant la garde d'enfant, concrètement trèsflou, a été abandonné. Demeure la menace d'unedéqualification des petites et moyennes sections dela maternelle, transférées dans des jardins d'enfantsoffrant davantage de places mais avec une moindreambition éducative.Au-delà des institutions,la créativité sociale et politiqueNous connaissons une période de désinvestissementdes valeurs de libération, de fraternité etd'égalité, d'abord et avant tout sur les lieux d'éducationet de travail, mais aussi dans l'espace publicet médiatique, et dans la culture la plus répandue.Nous sommes canalisés, comme jamais auparavant,par la boucle rythmique "imitation/désir puissatisfaction/frustration", qui est stimulée sanstemps mort par les médias numériques et une pressionaggravée de la publicité.D'autres valeurs sont délibérément encouragéespar imitation des "riches" abondammentmédiatisés : égoïsme m'as-tu-vu, triche et agressivité(surtout, être plus malin que les autres etniquer les lois).Dans cette foire d'empoigne, beaucoup d'appelé/eset peu d'élu/es. Le ressentiment de celles etceux qui "tiennent les murs" 3 tournerait facilementà l'émeute s'il n'y avaient la surveillance, la répressionet "l'animation sociale". Comment espérer quenos institutions politiques actuelles, qui reflètentcet état des lieux, apportent des contributions décisivesà un changement de société ? Il y règne surtoutles discours d'experts et la volonté d'étouffertout conflit.á Manifestation lors de la Journéede la Femme (2004)Ö Affiche incitant les femmes à seprésenter aux élection municipalesquébecoises3. Les désœuvré/es, majoritairementmasculins...S!lence n°377 mars 20107

Elu/es et question de g<strong>en</strong>rede l'égalité des g<strong>en</strong>res ne mobilise <strong>en</strong>core qu'uneminorité, appart<strong>en</strong>ant ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t à desgroupes de gauche. On constate néanmoins uneprogression de l'exig<strong>en</strong>ce de parité et d'égalité àdroite, <strong>en</strong> particulier grâce au lobbying d'associationsde femmes <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>eurs 2 . Mais les créditsvotés pour l'égalité des g<strong>en</strong>res sont faibles, comparésà d'autres postes, et on peut s'inquiéter pourleur progression, jusque-là l<strong>en</strong>te et dispersée maisréelle, dans le contexte de crise d'aujourd'hui.Ü Manifestation lors de la Journéede la Femme (2004)aubertolivier.org2. Par exemple, Femmes d'<strong>en</strong>treprisesd'Europe."Pas <strong>en</strong> notre nom !" 1T" ous les candidats de droite et d’extrême droiteà l’élection présid<strong>en</strong>tielle sembl<strong>en</strong>t tout particulièrem<strong>en</strong>tpréoccupés par la liberté des femmeset développ<strong>en</strong>t une s<strong>en</strong>sibilité et une att<strong>en</strong>tionquasi obsessionnelles à l’égalité des sexes. Tout sepasse comme si la condition des femmes étaitdev<strong>en</strong>ue (...) une priorité nationale" 2 . En matièrede justice sociale, p<strong>en</strong>sez-vous ? Non, d’"immigration".Ainsi peut-on imaginer que "désormais, l’unedes conditions d’admission sur 'notre' territoiredes populations immigrées sera le respect inconditionnelde ce qui relève, à les <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre, de l’ess<strong>en</strong>cede l’Occid<strong>en</strong>t : l’égalité des sexes. A l’imagedes Pays-Bas, on leur diffusera des vidéos defemmes, seins nus sur les plages de la côte d’Azur,ou <strong>en</strong>core de deux hommes s’embrassant t<strong>en</strong>drem<strong>en</strong>tsur la bouche, pour tester leur tolérance à lamodernité."Ainsi, les droits des femmes sont dev<strong>en</strong>us le"cache-sexe d’une croisade impérialiste" quiocculte "la réalité des inégalités, des discriminationset des viol<strong>en</strong>ces dont font toujours l’objet lesfemmes, mais aussi toutes les autres minoritéssexuelles (gays, lesbi<strong>en</strong>nes, transsexuelles)" <strong>en</strong>France, et plus largem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> Europe.Il faut sans fin le rappeler : la viol<strong>en</strong>ce faite auxfemmes est partout, elle n'est pas liée à une classesociale, et pas même à une culture car la hiérarchiehomme>femme s'exprime dans toutes.Aussi, "les effets politiques de ces discours dehaine sont catastrophiques pour le féminisme luimême,car, comme on l’a vu récemm<strong>en</strong>t sur "l’affairedu voile", ils hypothèqu<strong>en</strong>t les coalitions,tant internationales que nationales, <strong>en</strong>tre lesdivers mouvem<strong>en</strong>ts des femmes, <strong>en</strong> insufflantdans ses rangs le soupçon d’ethnoc<strong>en</strong>trisme – lesféministes 'françaises' n’aurai<strong>en</strong>t pas à donner desleçons d’émancipation si celle-ci se résume audroit de porter une minijupe ; inversem<strong>en</strong>t, lesféministes 'voilées' ne serai<strong>en</strong>t pas des 'vraies'féministes – ni même de 'vraies' françaises, selonleurs détracteurs, car elles exhib<strong>en</strong>t une imagesoumise des femmes.""Il s’agit donc de refuser de p<strong>en</strong>ser la libérationdes femmes dans les termes même que nousimpose l’extrême droite, et qu’elle impose à lascène publique, <strong>en</strong> dénonçant ce qui de fait estcontradictoire avec tout projet féministe : l’"id<strong>en</strong>titénationale" et <strong>en</strong> luttant contre "les atermoiem<strong>en</strong>tsde la gauche majoritaire" qui ne sont paspour ri<strong>en</strong> dans cette confusion car c'est "la mise <strong>en</strong>minorité d’un <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t féministe radical àgauche qui a permis qu’un féminisme de mascaradeémerge à droite". Et Elsa Dorlin de rappelerl'<strong>en</strong>terrem<strong>en</strong>t de la loi Roudy sur l'égalité dessalaires, l'abs<strong>en</strong>ce de contraintes imposées auxpubl<strong>ici</strong>taires et au commerce <strong>en</strong> général, et autresdébandades (la liste est longue)...1. Ce titre repr<strong>en</strong>d celui du manifeste "Pas <strong>en</strong> notre nom !", lancéle 8 mars 2005 par le réseau féministe NextG<strong>en</strong>deration à l’occasionde la journée internationale des femmes au mom<strong>en</strong>t de lacampagne pour la constitution europé<strong>en</strong>ne. Texte disponible <strong>en</strong>ligne sur le site de NextG<strong>en</strong>deration.2. J'utilise <strong>ici</strong> des extraits d'un texte de même titre écrit sur le sitede L'autre campagne par Elsa Dorlin, philosophe maître deconfér<strong>en</strong>ces à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, membredu réseau féministe NextG<strong>en</strong>deration.6 S!l<strong>en</strong>ce n°377 mars 2010

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