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Décroissance, côté femmesest de l’alimentation, de l’habillage, desjouets et des soins. Pour ce qui lesconcerne, les femmes ont toujours vécudepuis le 19 e siècle dans un climat permanentd’injonctions publicitaires quantà leur physique et leur comportement,autant que pour leurs vêtements ou lesproduits utiles au foyer ; injonctionsd’autant plus efficaces qu’elle s’adressentà une fraction symboliquement subalternede l’humanité, toujours en quête de reconnaissanceet de valorisation par rapportau masculin, et pas seulement dansle domaine sexuel.Par rapport aux hommes, les femmessont donc plus souvent des consommatricescompulsives et peu regardantes,mais c’est aussi ce qui les place au cœurde la problématique : consommer rend-ilplus heureux ? N’en résulte-t-il pas unbonheur précaire, au prix de l’asservissementà des normes qui, en fin de compte,empoisonnent l’existence en empêchantd’en penser la trajectoire ?Pour se libérerde la peste publicitaire,les femmes ont besoindes femmesDRDe même, le partage d’expérienceavec nos anciens est un moyen décisifd’acquérir de la sagesse, entre autres laconscience que la vie est une trajectoiredouée de forme et nourrie de mémoire, etnon une éternité compulsive qui seramalencontreusement interrompue…La tradition étant ce qu’elle est encore,penser et valoriser les soins aux enfantset la relation avec les personnesâgées ne se fera pas sans la participationdes femmes ni une présence féminine accruedans l’espace public.Les tâches“féminines” sontprises d’assautpar la publicitéMême si depuis quelques années d’offensivepublicitaire, les enfants deviennentles prescripteurs d’un très grandnombre d’achats des familles, c’est encorele plus souvent par les femmes que passela décision ultime, en tout cas pour ce quiQui mieux que d’autres femmes pourraientleur démontrer combien il estagréable de se libérer des injonctions publicitairesen faisant le choix de la décroissance?Une telle démonstration ne peut êtreseulement argumentative. L’exemple estdécisif. Il s’agit de donner envie de diminuersa collaboration aux dégâts humainset écologiques, donner envie de travaillerautrement, de vivre à partir de moinsd’injustice et de moins d’énergie et de matériaux.La décroissance a donc besoin, duseul point de vue de la consommation etde la résistance à la publicité, qu’aumoins autant de femmes que d’hommess’impliquent dans ses activités publiques.Valoriser les pratiquesdomestiquesde non-collaborationIl nous faut parvenir, dans nos foyers,à renoncer aux productions du capitalismeindustriel qui sont coûteuses du pointSILENCE N°350 Octobre 20076

de vue de la justice humaine (pillage desressources du Sud, mépris des travailleurs)comme du point de vue écologique(transports, déchets…). La fameuse“grève de la consommation” exige un travailplus important à la maison. Moi quijardine dans un grand jardin partagé, jevois chaque année des personnes renoncerà leur panier de légumes bio hebdomadaireen raison de la préparation nécessairepour les cuisiner…Il faut masculiniserle domestiquepour le valoriserPas question de charger les femmesau nom d’une prétendue revalorisationdu domestique qui resterait subalternedans le contexte symbolique actuel.Valoriser les problématiques domestiquespour en faire un terrain d’alternative efficaceexige de “masculiniser” les tâchesconcernées. Des hommes, nombreux,doivent participer avec les femmes à lanon collaboration aux dégâts de la croissancecomme s’approvisionner localement,renoncer aux produits polluants,utiliser des denrées moins transforméeset recycler au maximum ; et plus précisément: cultiver et cueillir ou aller faire lemarché, éplucher et cuisiner, récupérer,raccommoder et réparer.Encore une fois, la plupart de cestâches sont prises en charge habituellementpar les femmes et le risque existequ’elles continuent à leur incomber alorsque leur part demande de plus en plus detemps, parce que le choix de non collaborationest minoritaire et qu’il n’y a doncpas ou peu de solutions collectives. Or,ces choix encore minoritaires sont ceuxque nous voulons voir se répandre et êtreadoptés largement, et le plus vite sera lemieux, vu l’urgence humaine et écologique! Il nous faut donc éviter la connotation“féminine”, pas assez enviable, despratiques de non-collaboration.La mixité sera aussi un moyen derendre ces choix efficaces immédiatement,dans un contexte où beaucoup defemmes tiennent à leur “indépendance”salariale.Elle aura un autre avantage : bien desfemmes devront réévaluer leurs exigencesquant au ménage, à l’hygiène ou aux repas.Pour les couples, la négociation peutêtre libératrice autant qu’instructive, etsortir du cadre duel en débattant collectivementdes enjeux écologiques et politiquesdes comportements et des produitspeut être un moyen d’éviter l’investissementémotionnel qui la rend si souventdifficile...L’égalité est un atoutdans l’imaginairepour l’objectionde croissanceDe fait, on constate que la participationdes hommes aux tâches habituellement“féminines” est déjà plus importantedans les milieux de la décroissancequ’ailleurs, preuve que l’enjeu est ressenti,sinon explicité, alors même que la représentationque les Français se font ducouple est désormais égalitaire bien que,dans les faits, on soit loin du compte.La décroissance a ici un atout dansl’imaginaire qu’il serait important de valoriserdans l’espace public, simplement eny existant résolument, avec nos travaux,nos échanges, nos fêtes, nos débats, maisaussi en mettant culturellement en scènece qui nous mobilise et nous interroge(paroles et écrits, chant, théâtre, installations,vidéos…), ce qui reviendrait à s’opposerenfin à l’influence de la pub sur sonterrain même, celui du désir de sens etd’expérience. Car on entend souvent qu’ils’agit de privilégier l’être sur l’avoir, maisc’est sous-entendre à tort que l’avoir seraitce qui motive aujourd’hui la consommationeffrénée. Dans les propositions dela pub, c’est de l’imaginaire, du sens, del’expérience qui nous font avant tout envie,les objets n’en sont que le support !L’accession desfemmes au politiquepeut socialiser lestâches domestiquesD’un point de vue plus stratégiqueque tactique, il faut aussi permettre auxfemmes de participer en nombre à l’activitépolitique pour stimuler des réponsescollectives à l’objectif de moindre empreinteécologique. Les femmes sont lesmieux placées pour porter cette exigencecar les efforts de masculinisation préconisésci-dessus risquent d’être imparfaits etelles ressentiront plus que les hommesl’augmentation des tâches domestiques,tout en ne trouvant pas leur compte devalorisation égalitaire.L’inventivité des femmes et deshommes est requise car ce sont, non pasdes productions domestiques, mais desalternatives industrielles non capitalistesqui seront la plupart du temps les pluséconomes en temps et en énergie pourque nous puissions nous approvisionnerle plus localement possible et recycler aumaximum. Elles devraient s’avérer plusproductives par une division choisie degestes et de techniques, mais aussi décentraliséeset coopérativement gérées. Nousautres citoyens, hommes et femmes à égalité,avons à conquérir les moyens d’exercerun droit d’inventaire sur ce qui estrendu possible par les sciences et les techniqueset, à terme, sur leurs objectifs derecherche.On peut ainsi concevoir que, dansplusieurs cas, des productions industrialisées,non rentables du point de vue capitalistequi sévit aujourd’hui, seront demeilleurs choix que des productions domestiquesdu point de vue humain commeécologique. L’autonomie chère à beaucoupd’objecteurs de croissance n’est sansdoute pas la revendication qu’il nous faudraitmettre en avant. Plutôt que d’unimaginaire inspiré par l’individualismequi sied au capitalisme, nous avons besoinde mettre en œuvre (en actes !) etde cultiver dans nos représentations etnos rêves, une hétéronomie enfin assumée,réfléchie, bref démocratique et écologiquepuisqu’il s’agit de faire sociétéautrement qu’aujourd’hui mais à partird’aujourd’hui, en nous demandant : àquoi sommes-nous attachés ? à quoivoulons-nous l’être ?Il y a là une “spirale vertueuse”, desboucles de rétro-actions : dès maintenant,le choix de consacrer moins detemps aux tâches d’un quotidien pourtantplus prenant car plus soutenable doit êtrepossible pour toutes les femmes, donc ona besoin de tous les hommes, et c’est lacondition sine qua non pour une participationefficace des femmes au politiquequi est décisive vers une société plus justeet plus durable, avec une économie enfinassignée au service de cet objectif.SILENCE N°350 Octobre 20077

Décroissance, côté femmesest de l’alim<strong>en</strong>tation, de l’habillage, desjouets et des soins. Pour ce qui lesconcerne, les femmes ont toujours vécudepuis le 19 e siècle dans un climat perman<strong>en</strong>td’injonctions publ<strong>ici</strong>taires quantà leur physique et leur comportem<strong>en</strong>t,autant que pour leurs vêtem<strong>en</strong>ts ou lesproduits utiles au foyer ; injonctionsd’autant plus efficaces qu’elle s’adress<strong>en</strong>tà une fraction symboliquem<strong>en</strong>t subalternede l’humanité, toujours <strong>en</strong> quête de reconnaissanceet de valorisation par rapportau masculin, et pas seulem<strong>en</strong>t dansle domaine sexuel.Par rapport aux hommes, les femmessont donc plus souv<strong>en</strong>t des consommatricescompulsives et peu regardantes,mais c’est aussi ce qui les place au cœurde la problématique : consommer r<strong>en</strong>d-ilplus heureux ? N’<strong>en</strong> résulte-t-il pas unbonheur précaire, au prix de l’asservissem<strong>en</strong>tà des normes qui, <strong>en</strong> fin de compte,empoisonn<strong>en</strong>t l’exist<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> empêchantd’<strong>en</strong> p<strong>en</strong>ser la trajectoire ?Pour se libérerde la peste publ<strong>ici</strong>taire,les femmes ont besoindes femmesDRDe même, le partage d’expéri<strong>en</strong>ceavec nos anci<strong>en</strong>s est un moy<strong>en</strong> décisifd’acquérir de la sagesse, <strong>en</strong>tre autres laconsci<strong>en</strong>ce que la vie est une trajectoiredouée de forme et nourrie de mémoire, etnon une éternité compulsive qui seramal<strong>en</strong>contreusem<strong>en</strong>t interrompue…La tradition étant ce qu’elle est <strong>en</strong>core,p<strong>en</strong>ser et valoriser les soins aux <strong>en</strong>fantset la relation avec les personnesâgées ne se fera pas sans la part<strong>ici</strong>pationdes femmes ni une prés<strong>en</strong>ce féminine accruedans l’espace public.Les tâches“féminines” sontprises d’assautpar la publ<strong>ici</strong>téMême si depuis quelques années d’off<strong>en</strong>sivepubl<strong>ici</strong>taire, les <strong>en</strong>fants devi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>tles prescripteurs d’un très grandnombre d’achats des familles, c’est <strong>en</strong>corele plus souv<strong>en</strong>t par les femmes que passela décision ultime, <strong>en</strong> tout cas pour ce quiQui mieux que d’autres femmes pourrai<strong>en</strong>tleur démontrer combi<strong>en</strong> il estagréable de se libérer des injonctions publ<strong>ici</strong>taires<strong>en</strong> faisant le choix de la décroissance?Une telle démonstration ne peut êtreseulem<strong>en</strong>t argum<strong>en</strong>tative. L’exemple estdécisif. Il s’agit de donner <strong>en</strong>vie de diminuersa collaboration aux dégâts humainset écologiques, donner <strong>en</strong>vie de travaillerautrem<strong>en</strong>t, de vivre à partir de moinsd’injustice et de moins d’énergie et de matériaux.La décroissance a donc besoin, duseul point de vue de la consommation etde la résistance à la publ<strong>ici</strong>té, qu’aumoins autant de femmes que d’hommess’impliqu<strong>en</strong>t dans ses activités publiques.Valoriser les pratiquesdomestiquesde non-collaborationIl nous faut parv<strong>en</strong>ir, dans nos foyers,à r<strong>en</strong>oncer aux productions du capitalismeindustriel qui sont coûteuses du pointSILENCE N°350 Octobre 20076

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