Les murs, médias alternatifsPascal Pragnèreá "Herriak bizi behar du" : Le peuple a besoin de vivrePeintures de guerreIrlande du Nord, Pays basque1. Attrait touristique depuis le développem<strong>en</strong>tdu processus de paix :des Political Tours sont organisés àBelfast, visites guidées des lieuxsymboliques du conflit et tour despeintures murales. Ces PoliticalTours sont possibles <strong>en</strong> plusieurslangues — anglais, français, espagnolet … euskera, langue basque— soulignant ainsi l’intérêt portépar les Basques au conflit <strong>en</strong>Irlande du Nord, intérêt d’ailleursréciproque. On peut trouver lescoordonnées pour ces visites surl’excell<strong>en</strong>t site d’Alain Miossecconsacré aux peintures murales <strong>en</strong>Irlande du Nord : http://muralsirlandedunord.over-blog.com/2. Guillaume d’Orange3. Jacques II1 8 S!l<strong>en</strong>ce n°376 février 2010On trouve une d<strong>en</strong>sité extraordinaire de peintures muralesdans des zones de conflit. Le support est "naturellem<strong>en</strong>tadapté" à ces situations. Il est visible, peu coûteux et solide.RÉSISTANT, LE SUPPORT MURAL PERMETQU’UN MESSAGE SOIT VU LONGTEMPS, COMPRIS,assimilé et mémorisé. L’auteur peut donc investirdavantage dans l’élaboration de la représ<strong>en</strong>tationartistique, ce qui r<strong>en</strong>force d’autant plus l’efficacitédu message. En revanche, la réalisation demandedu temps, ce qui implique qu’elle ait lieu dans un<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t plutôt sécurisé.Les peintures murales les plus connues sontcelles d’Irlande du Nord, mais il <strong>en</strong> existe aussibeaucoup au Pays basque, où un conflit viol<strong>en</strong>tsubsiste <strong>en</strong>core.Généralem<strong>en</strong>t reléguées au rang de curiosités 1ou de mode d’expression spécifique des communautés,ces représ<strong>en</strong>tations sont bi<strong>en</strong> plus que desimples illustrations ou comm<strong>en</strong>taires de l’actualitédu conflit : elles ont un rôle actif dans les processusde conflit. Elles ont aussi une histoire différ<strong>en</strong>teselon les acteurs qui les ont installées.Domination politique etoccupation de l’espace publicEn Irlande du Nord, les peintures murales loyalistesapparur<strong>en</strong>t au début du 20 e siècle avec lemouvem<strong>en</strong>t de résistance unioniste (pour l’unionavec la Grande-Bretagne) au Home Rule (pour l’indép<strong>en</strong>dancede l’Irlande). C’est à cette époquequ’ont surgi des représ<strong>en</strong>tations murales du roiprotestant King Billy 2 , victorieux des armées catholiquesde James II 3 lors de la bataille de la Boyne, le12 juillet 1690 (photo 1), et de symboles d’allégeanceà la couronne britannique. Tout <strong>en</strong> affirmantl’unionisme des protestants, ces peinturesétai<strong>en</strong>t déjà une assertion de propriété sur l’espacepublic physique et symbolique : la domination protestantes’exprimait par l’impossibilité pour lesá 1 : King Billy, victorieux à la bataille de la Boyne.Alain Miossec
Les murs, médias alternatifsá 2 : "You are now <strong>en</strong>tering free Derry" :Vous <strong>en</strong>trez dans le libre DerryAlain MiossecAlain MiossecPascal Pragnèreá 3 : Euskadi a la loupeá 4-1 : "Loyalist Cuchulainn 1" : Cuchulainn loyaliste (UDA)á 4-2 : Cuchulainn républicaincatholiques de rev<strong>en</strong>diquer l’égalité avec lesmêmes outils, et par un balisage du territoire. Lapeinture murale exprimait ost<strong>en</strong>siblem<strong>en</strong>t que telterritoire était un territoire "britannique" ou "protestant",bi<strong>en</strong> plus qu’un territoire "habité <strong>en</strong> majoritépar des britanniques ou protestants". En ces<strong>en</strong>s, elle exprimait déjà des rapports de forces etune rev<strong>en</strong>dication de domination d’une communautésur l’autre. Cette domination fut d’ailleurstraduite, sur le plan législatif, par le Flags andEmblems Act (1954), qui interdisait le déploiem<strong>en</strong>tde drapeaux et symboles irlandais <strong>en</strong> Irlande duNord. Les premières explosions de viol<strong>en</strong>ce précédantles Troubles fur<strong>en</strong>t les émeutes dites "TricolourRiots" (1964), lorsqu’à l’occasion des élections àWestminster, les troupes britanniques intervinr<strong>en</strong>tviolemm<strong>en</strong>t pour faire retirer un drapeau irlandaisdéployé sur un local nationaliste.Jusqu’au développem<strong>en</strong>t du conflit et auxtransformations des rapports de forces dans lesannées 1970-1980, on ne trouve que de très rares"murals" républicains ou nationalistes (irlandais).Un des premiers, le fameux "You are now <strong>en</strong>teringfree Derry" fut peint à l’<strong>en</strong>trée du Bogside, quartierde Derry, p<strong>en</strong>dant les émeutes qui marqu<strong>en</strong>t ledébut du conflit <strong>en</strong> 1969. Cette fresque date symboliquem<strong>en</strong>tle début de la révolte de la communautécatholique irlandaise qui sanctuarisa cequartier et se soustrait symboliquem<strong>en</strong>t à l’autoritéet au système de ségrégation de l’"Etat protestant"(photo 2).Mais la réelle multiplication de murals se situeà la charnière des années 1979-81, au mom<strong>en</strong>t dumouvem<strong>en</strong>t de protestation des prisonniers républicainsirlandais pour le mainti<strong>en</strong> du statut de prisonnierspolitiques, mouvem<strong>en</strong>t qui culmina <strong>en</strong>1981 avec la mort de 10 dét<strong>en</strong>us <strong>en</strong> grève de lafaim, dont Bobby Sands, qui fut élu député avantde mourir, face à l’intransigeance de M. Thatcher.Au Pays basque, les peintures murales se multiplièr<strong>en</strong>taussi à partir des années 1980. Après lamort de Franco <strong>en</strong> 1975, et la période de "transition"qui installa la démocratie <strong>en</strong> 1978 avec statutsd’autonomie (celui de la Communauté autonomebasque fut voté <strong>en</strong> 1979), la répression à l’<strong>en</strong>contredes nationalistes basques ne faiblit pas, etces derniers ne cessèr<strong>en</strong>t pas leur lutte. Elle futconstitutionnelle pour les uns, et l’ETA, groupearmé du mouvem<strong>en</strong>t de libération nationale, nedéposa pas les armes. Mais <strong>en</strong> démocratie, le combatnationaliste radical, toujours confronté àrépressions, tortures et guerres sales (GAL), avaitbesoin d’une nouvelle dynamique qui passaitnécessairem<strong>en</strong>t par le développem<strong>en</strong>t d’un nouvelessor de mobilisation pour changer les rapports deforce <strong>en</strong>tre nationalistes et pouvoir, et justifier lapoursuite de la lutte viol<strong>en</strong>te.Dans les deux pays, les années 1979-81 fur<strong>en</strong>tles plus viol<strong>en</strong>tes ; dans ce contexte, l’émerg<strong>en</strong>cedes peintures murales correspond à une nouvelleAlain MiossecS!l<strong>en</strong>ce n°376 février 20101 9
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