13 e Enfant« S’interroger sur les réponsespédagogiques et extra pédagogiques»Universitéd’automnedu <strong>SNUipp</strong>Comment expliquer quetous les pays n’aient pas lamême définition desenfants à besoin éducatifparticulier (BEP) ?JP. La définition des BEP recouvredes réalités différentes selon lestraditions culturelles de chaquesystème éducatif. En France, ilexistait depuis plusieurs décenniesune classification traditionnellequi distinguait les élèves endifficulté scolaire (qui relèvent dedispositifs pédagogiques à l’intérieurdu système scolaire) desélèves handicapés. La définitiondes BEP peut faciliter l’actionpédagogique mais le risque estde vouloir faire entrer dans lacatégorie « handicapé » desenfants qui ne présentent pas dedéficiences au risque de les stigmatiser.L’avantage de cettenotion très large est qu’elleoblige les systèmes éducatifs às’interroger d’une façon ouvertesur les réponses pédagogiques etextra pédagogiques à apporter àces besoins, quels qu’ils soient…La loi du 11 février 2005a-t-elle favorisé l’inclusion ?JP. L’inclusion consiste à mobiliserdes modalités d’accompagnementspécifiques pour faire réussirdans leur scolarité les enfantshandicapés et non pas à les intégrerpar une simple participationphysique aux parcours scolairesdes autres élèves. La loi de 2005est bonne car elle accompagneet permet d’accélérer un processusd’évolution des mentalités,des dispositifs et des pratiquesprofessionnelles. Cette loi a permisà l’école de devenir accessibleà tous les élèves, et d’évitertoute discrimination dans l’accèsaux apprentissages. On n’est plusdans la juxtaposition de dispositifsparticuliers qui concerneraientdes catégories identifiéesmais dans une sorte de « lettre demission » ou de feuille de routeglobale pour l’école.José PUIGAprès avoir exercé différents métiers de l’éducation, José Puig a participéà la rédaction du plan Handiscol de 1999 et dirigé l’associationHandidactique i = mc² dont l’activité porte sur la formations aux pratiquesd’accompagnement des personnes en situation de handicap.Actuellement directeur de l’INS HEA (Institut de formation et de recherchepour l’éducation des jeunes handicapés), José Puig a participé à l’ouvrage« Handicap et accompagnement » (Dunod 2009).Que pensez-vous del’accompagnement par desAVS ?JP. Les AVS répondent à un réelbesoin d’accompagnement envenant compléter l’action desenseignants pour permettre à desenfants de suivre leur parcoursscolaire. Cependant, la technicitéprofessionnelle de ces personnelsest faible aujourd’hui, ce qui estpréjudiciable pour les enfants etleurs familles qui n’ont pas degaranties sur la qualité de l’accompagnement,mais aussi pour lesAVS qui peinent à trouver leurplace et à être reconnus. Enfin,situation paradoxale, c’est unmétier très complexe qui s’exercesans qualification. Ce métier d’AVS,encore mal défini, commenceenfin à trouver la reconnaissanceinstitutionnelle souhaitable avecles récentes annonces ministériellessur leur professionnalisation.Comment articuler denouvelles professionnalitésavec celles déjà existantes ?JP. On est dans une constellationd’acteurs dont les cultures professionnellestrès différentes sonttrop cloisonnées. Il faut trouverdes complémentarités entre lesdifférents professionnels : les PE etles AVS mais aussi les ATSEM, lesintervenants des établissementset services médico sociaux (psychologues,orthophonistes, éducateursspécialisés,ergothérapeutes, kinésithérapeutes,etc.), les intervenants libéraux,les équipes de santé (CMP,pédopsychiatres), mais aussi lafamille qui est un acteur fort del’inclusion… La condition à la réussited’un parcours d’inclusionpasse par l’organisation de tempsde formation en commun pour© mira / NAJA« Un enfant ne peut pasêtre citoyen d’uneclasse s’il en est unmembre intermittent…. »professionnaliser la collaborationentre tous ces acteurs.Certains de ces élèves sontscolarisés à temps partiel. Oùsont-ils le reste du temps ?JP. C’est un vrai problème. Danscertains cas la scolarisation àtemps partiel est une manière dedire « on accueille » mais a minimaparce qu’on ne peut pas refuser…Ce n’est pas la logique de l’inclusionet les effets sont pervers. Parexemple en maternelle, c’est lacontinuité de la scolarisation quipermet aux enfants d’entrer dansles apprentissages. Un enfant quiest présent 2 ou 3 demi-journéespar semaine ne peut pas êtrecitoyen d’une classe s’il en est unmembre intermittent… Mais la scolarisationà temps partiel est parfoisinévitable. L’enfant peut avoirbesoin de temps de rééducation,de soins ou d’activités d’accompagnementmédico-social…Quels sont les droits desparents ?JP. Avec la loi de 2005 on est dansune logique de droit des familleset des enfants. La CDAPH (commissiondépartementale) est leprescripteur du temps d’accompagnement(AVSi, AVS-co, etc…)et de la prise en charge (médicosociale,soins à domicile). Maiselle ne peut pas imposer desformes de prise en charge qui neconviendraient pas aux familles.Par contre, des parents à qui onrefuserait une scolarisation, oudont l’enfant ne disposerait pasde l’accompagnement prescritnécessaire, sont en droit d’engagerdes recours. Ils sont de plusen plus nombreux à le faire.Propos recueillis par Vincent Martinez81etsociété
EnfantetsociétéAtelierImmigrationLes enseignantsen porte à fauxGéraldine Bozec a étudié sur les écoles de Nice, de Brest, de Nantes et de la régionparisienne les questions de l’immigration et la diversité ethnoculturelle à l’école, tellesqu’elles sont perçues et vécues au quotidien par les enseignants de l’école primaire.q Quelles couleursdans la rue du monde ?La littérature de jeunesse a elle aussi du mal à mettre enscène les visages et les couleurs de la diversité. PourAlain Serres, directeur de la maison d’édition Rue dumonde, elle a pourtant un rôle à jouer et les enseignantspeuvent l’y aider. Il nous explique son approche.13 e université d’automne du <strong>SNUipp</strong> - 18-19-20 octobre 201382123« La lutte pour faire vivre auprès des enfants les atouts de nos différences,ne peut se priver d’aucune forme éditoriale et nous ytravaillons. La poésie renvoie par essence à notre humanité communeloin de toute forme de frontière. Attention : la négliger n’estpas sans conséquence sur la qualité du « vivre ensemble » d’unpays. Le conte va souvent à l’essentiel des rapports sociaux, etcréée des ponts de papiers entre les cultures, ainsi notre recueil« Les contes de l’olivier » réunit-il dix-huit contes juifs et arabesdans de fraternelles similitudes, qui parlent bien plus que de longsdiscours. « La fiction permet toutes les projections du jeune lecteurdans d’autres possibles. Et l’humour donne des ailes à des récitsqui sans lui pourraient s’avérer lourds et discursifs.Mais je pense que l’on ne peut se passer du documentaire, alliantinformations, culture humaniste et esprit critique. Des documentairesqui apprennent aux enfants à documenter leurs regards ; uneposture citoyenne décisive pour faire reculer l’ignorance et la manipulationdes esprits. Des clés historiques sont en particulier indispensablespour que les enfants puissent poser des balises dans cemonde tumultueux. Pourtant, j’ai le sentiment que nous ne faisonspas assez, en particulier pour une représentation naturelle et spontanéede la diversité des visages, et des modes de vie de notre pays.Il nous faut davantage de livres qui ne montrent pas des souriresafricains que lorsqu’on veut s’exprimer sur le racisme ! Des livresoù des visages asiatiques sont bienvenus pour parler petite enfanceou plaisir du jardinage ! L’enfant moyen, à la peau caramel clairn’existe pas et les livres jeunesse peuvent mieux faire pour refléternotre vivifiant kaléidoscope.Les enseignants peuvent nous aider en cela, dans l’audace de leurschoix de livres ou au travers des souhaits qu’ils expriment. Secouerles clichés demande bien des efforts ! »123Image de Laurent Corvaisier, extraite de Lafamille Totem, Rue du monde, 2002.Image de Lucile Placin, extraite de À l’écolearc-en-ciel, Rue du monde, 2013.Image de Judith Gueyfier, extraite de Je seraitrois milliards d’enfants, Rue du monde, 2009.