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MONDOMIX AIME

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SommaireMagazine Mondomix — n°42 Septembre / Octobre 2010Mondomix est imprimé sur papier recyclé.03Le Sommaire des musiques et cultures dans le monde04 - EDITO // Roborative rentrée06/12 - ACTUALITEL’actualité des musiques et cultures dans le monde06 - ACTU-Monde07 - Moussu T. E Lei Jovents // Invité08 - ACTU-Musiques10 - Emel Mathlouthi // Bonne Nouvelle11 - INSOLITE12 - ACTU-voir13 - ACTU-Web14/25 - MUSIQUES14 - waro La magie du miraculé16 - Chango spasiuk La conjuration du chamamé17 - Chucho valdes À pas de géant18 - Tiken jah fakoly La voix du savoir19 - Axel Krygier Folklore sublimé20 - Antonio zambujo Sensuelle mélancolie21 - Seu jorge Diamant psyché22 - Baloji Sorcier équatorial25/41 - À TABLE !28 - ApÉRITIF Le sens du repas30 - Hors d'oeuvre Fooding31 - Entrée Vite fait, bien fait32 - Plat principal Le Yin et le Yang à la baguette34 - SaÚde ! Ordre, progrès et cachaça35 - Santé ! Le retour de la fée verte36/37 - Dessert La punaise, avenir de l'homme ?Des fleurs au déjeuner ?38 - boisson chaude Un bol de zen39 - ivresse Soufisme, la faim de Dieu40 - Cocktail dansant Funky kitchen42/44 - voyages42 - Mustang Le royaume oublié44 - Argentine Argentina delights46/65 - Sélections46 - cinéma47 - DVD50 - Livres52 - Dis-moi ce que tu écoutes ? Natacha Atlas53/60 - Chroniques disques53 - AFRIQUE55 - Amériques57 - Asie58 - europe60 - 6 eme continent61 - Collection // African Dope62/65 - Dehors // Les événements à ne pas manquer22EN COUVERTURE / Baloji18Tiken Jah Fakoly20Antonio Zambujo36La punaise, avenir de l'homme ?38Un bol de zen42Mustang, le royaume oublié52Natacha Atlasn°42 Sept/OCt 2010


04 éDITO Mondomix.com>Roborative rentrée par Marc BenaïcheRoboratif : (adj. masculin) Qui redonne des forces, de l'énergie.Après les déclarations estivales désespérantes du Thénardier de l’Elysée sur les Roms et les délinquants« d’origines étrangères » qui font remonter à la surface le fond de bouillon du Front National,après le navrant feuilleton politico-financier Woerth-Bettencourt, il s'agit de reprendre des forces et del’énergie en vue d'une rentrée 2010 qui nous réserve sans doute encore d'autres surprises.Alors à Mondomix, nous vous avons concocté un théma roboratif à travers un parcours éclectiqueautour de l’art de manger dans le monde. Face à toute cette bêtise qui menace la démocratie et lesvaleurs républicaines, il est urgent de se renforcer tant au niveau du corps - en moins de huit ans, lesgardes à vue ont augmenté de plus de 70% - que de l’esprit, en développant une pensée critique etlibre qui sait ne pas se laisser manipuler par un discours sécuritaire démagogique.Et comme le dit notre cher Gargantua, personnage bien français mais au nom d’origine incertaine :« Vous convient être sages, pour fleurer sentir et estimer ces beaux livres de haute graisse, légers aupourchas et hardis à la rencontre. Puis, par curieuse leçon et méditation fréquente, rompre l’os et sucerla substantifique moelle ».>Notre édito ou l'un de nos articles vous fait réagir? écrivez-nous !Édito Mondomix, 144 - 146 Rue des poissonniers, 75018 Paris,ou directement dans la section édito de www.mondomix.comn°42 Sept/Oct 2010


06 06Mondomix.com / ACTUMondeACTU - Monden artistes - solidaritéHervé TELEMAQUE,Quel tableau(Baby Doc !),Sérigraphie sur toile25/37, 1975Dimensions :100 x 81 cmEstimation3 000/4 000 eurosn écotour - festivalLe développementdurable en tournéeDepuis 4 ans, des artistes, conférencierset journalistes partent ensemble sillonnerles routes de France et d’Europe. Intitulée« Bouge pour ta planète », l’opérationest l’œuvre d’Aarti Show, une associationrécente très active dans la promotiondu développement durable. Partant duconstat que cette notion demeurait unmystère aux yeux du public, son présidentXavier Grandjean a imaginé cet écotouraussi festif qu’informatif. À chaqueescale, le badaud découvre en journéeun éco-village de plus de 120 exposants,des animations, débats sur la protectionde l’environnement, l’équité sociale oul’économie solidaire. Le soir, l’éco-tour semue en festival de musique, avec cetteannée Idir, Kamini, Ange et bien d’autres.Une organisation astucieuse, puisque labilletterie des concerts permet de financerl’éco-village, ouvert à tous.J.P.n « Bouge pour ta planète », du 23juillet (Correns, Var) au 26 septembre(Zénith, Paris).bougepourtaplanete.fr/Enchères haïtiennesEn janvier dernier, au lendemain du séisme terriblement meurtrier qui afrappé Haïti, une vague d'émotion a submergé la Maison des Artistes.Peintres et sculpteurs appelaient pour savoir comment venir en aide à cepeuple que Malraux qualifiait de « seul peuple de peintres ». En peu detemps, l'idée d'une vente aux enchères commune est née. Elle aura finalementlieu le 23 septembre 2010 au siège de l'association, l'Hôtel Salomonde Rotschild. Mais, dès le premier septembre, les centaines de toiles, dedessins ou de photographies offertes par les artistes français (Jean Rustin,Hervé Di Rosa, ...) ou étrangers (l'Ivoirien Ernest Dükü, le Chinois Fan Zhe,…) seront exposées au Ministère de la Culture. Cette vente exceptionnellepourrait être l'occasion d'aider Haïti sans vous fâcher avec votre banquier,certaines créations étant mises à prix à dix euros. François Maugern www.haitiactionartistes.orgn ONG - ludiquePomper l’eau, un jeu d’enfantsUne ONG innove pour l’accès à l’eau potable en AfriqueDans le monde, un enfant meurt toutes les 15 secondes de maladies liéesà l’eau. Un chiffre terrible publié par l’UNICEF, et pourtant les solutionsexistent. L’ONG PlayPumps International, par exemple, a récemment misau point une pompe à eau plutôt originale. Baptisée PlayPump, elle secompose d’un carrousel pour enfants relié à une véritable pompe et à unréservoir de stockage. En tournant dessus, les bambins pompent ainsi del’eau fraîche… Tout en s’amusant ! Ce système ingénieux permet, l’air derien, de pomper près de 1400 litres d’eau à l’heure au rythme de 16 tourspar minutes. Il est aussi d’une rare utilité sociale : dans de nombreux paysd’Afrique subsaharienne, la tâche quotidienne et fastidieuse de puiser l’eauest assurée essentiellement par les femmes et les filles. À ce jour, plus de900 systèmes de pompage ont été installés en Afrique. Jerôme Pichonn Toutes les infos sur Playpumps International :www.waterforpeople.orgn patrimoine - expositionLe tour du mondeen une semaineProposée à Parispar le Forumdes institutsculturels étrangers(FICEP),La semaine descultures étrangèresa pourthème centralle patrimoineculturel matérielet immatériel.Une notion trèslarge, qui désigne toute forme d’art oud’expression, du graphisme aux traditionspopulaires, en passant par la langueet les paysages. Une multitude dedisciplines artistiques et culturelles dontles subtiles variations s’accroissent àl’infini, à mesure que l’on parcourt leglobe. C’est pourtant cette myriade departicularismes culturels que proposed’apprivoiser cette semaine pas commeles autres. Articulé autour d’expositions,de concerts ou de projections, l’événementa choisi de laisser les clés de saprogrammation aux 46 centres culturelsétrangers participants. L’institut hongroisde Paris nous fait ainsi découvrir leland-art, à travers le regard des artistesdu studio Pécsi. Le centre culturel coréeninitie, lui, aux secrets du rituel chamanique.Tout au long de la semaine,les visiteurs pourront de plus apprendreles bases de 50 langues étrangères.Mathieu Jouenn Du 24 septembre au 3 octobrewww.ficep.info/n°42 Sept/Oct 2010


invité07invitén Moussu T. e lei JoventsPutan de cançon sortie le 23 septembre(Le Chant du Monde/Harmonia Mundi)n http://moussut.ohaime.coml Sur Mondomix.comla recette de l’aïoli de Moussu Tl Chronique sur mondomix.commoussu t. / Travail de proximitéMoussu T. e lei Joventssortent leur quatrièmealbum, Putan de Cançon,au fil duquel Tatou, l’ancientchatcheur de MassiliaSound System, son collègueguitariste Blu et leurcompagnon percussionnisteZerbino distillentleur blues méridional deproximité. Tatou saisitl’opportunité pour précisersa philosophie du mondesimple et pointue(avé l’accent).Vous défendez depuis desannées l'idée d'une musiquede lien social et revendiquezun rôle d'artiste de proximité.Cette position reste-elletoujours pour vous la pluspertinente ?Tatou : On revendique la posture demusiciens fonctionnels traditionnels.Cette fonction nous oblige à être en priseavec une réalité, à illustrer ce qu’il ya sous nos yeux. Je ne pense pas quel’on puisse faire les genres musicauxque j’ai toujours pratiqués avec Massiliaou aujourd’hui, sans « représenter » untout petit peu, comme disent les rappeurs.C’est inhérent à cette musiqued’être totalement liée à son univers, àson endroit de naissance.Comment ce positionnements'adapte-t-il avec l'évolutiond'une carrière ?Tatou : Dans la musique, tu choisis tavoie, ce que tu veux être. Tu ne peuxpas être à la fois un musicien de proximitéet vouloir être une star brillante,c’est contradictoire. Effectivement çanous gène, parce qu’il y a toujours cerapport malsain entre le « centre » etnous. Plein de gens sont incapablesde comprendre que travailler sur le localn’est pas quelque chose qui enferme.Bizarrement, on ne dit jamais d’ungroupe jamaïcain, qui est pourtant trèscentré sur son truc, qu’il s’enferme,alors que nous, on nous le reproche.C’est toujours la même histoire demépris des trucs régionaux, mais jene vois pas comment on pourrait faireautrement. Faire de la musique commeça oblige à avoir une certaine vérité, sinonça ne passe pas, ça se sent toutde suite. Personnellement, je n'auraispas voulu faire autre chose.Quelles causes, grandes oupetites, à l'échelle du payset du monde, vous semblentaujourd'hui méritées d'êtredéfendues ?Tatou : La libération des femmes, çaoblige vraiment à se remettre en question,c’est donc une revendication trèsrévolutionnaire. Et planétaire. Le statutde la femme est un bon thermomètrede l’état des sociétés. Tu peuxsouvent juger les sociétés à l'aune dece qu’elles font aux femmes, ou auxprisonniers. Si tu regardes sur uneéchelle historique, c’est hallucinant devoir que les femmes aient eu accès àla contraception il y a seulement 40ans et obtenu le droit de vote en 1945.C’est un sujet qui traverse la société etla totalité de nos comportements.Benjamin MiNiMuMn°42 Sept/Oct 2010


08Mondomix.com / ACTUACTU - Musiquen salon pro - copenhagueYemen BluesRendez-vous au WomexGrande messe annuelle de la planète World Music, le Womexva se dérouler pour la deuxième année consécutive à Copenhague,du 27 au 31 octobre. Ces rencontres professionnelles sontl’occasion de faire le point sur un métier de plus en plus difficile, maisaussi de découvrir de nouveaux talents. La liste des artistes présentantdes showcases est ci-dessous dévoilée.Afrique : Dobet Gnahoré (Côte d’Ivoire), Cheny Wa Gune Quarteto(Mozambique), Damily (Madagascar), Malick Pathé Sow & Maoba(Sénégal), Oudaden (Maroc), Fatoumata Diawara (Mali) Kamel elHarrachi (Algérie) et Papa Wemba (République Démocratique duCongo).Amériques : Karina Buhr, Samba Chula de São Braz et DJ Criolina(Brésil), Bomba Estéreo et Sexteto Tabalá de Palenque (Colombie),Tremor (Argentine), Chicha Libre et Yemen Blues (Etats- Unis), KoboTown (Trinidad & Tobago) et Líber Terán (Mexique).Asie : Baba Zula (Turquie), Mamer et Wang Li (Chine) et Desert Slidedirigé par Vishwa Mohan Bhatt (Inde)Europe : António Zambujo et Danças Ocultas (Portugal),LaBrassBanda (Allemagne), Lelo Nika & Friends (Suède et Danemark),Matthias Loibner (Autriche), Mercedes Peón (Espagne), Nidi D´Arac(Italie), OMFO (Ukraine), Svetlana Spajic Group (Serbie), Yom (France)et Nathalie Natiembé (La Réunion).Cette édition du Womex se clôturera par un concert du RéunionaisDanyel Waro, à qui sera remis le Womex Award Artist 2010.Benjamin MiNiMuM• www.womex.coml Evènement en direct sur : www.mondomix.com© B.M.n ANNIVERSAIREFela lives !© B.M.Music is the Weapon... Depuis samort en 1997, le mythe Fela ne cessede prendre de l'ampleur. Mis en scènepar Bill T. Jones à Broadway, dansune comédie musicale reproduite auNational Theater de Londres en novembreprochain, le destin extraordinairedu « black president » sera prochainementporté à l'écran par SteveMcQueen, caméra d'or à Cannespour Hunger, en 2008. Les premiersrepérages ont eu lieu en août à Lagos,qui accueillera du 11 au 17 octobrela traditionnelle Felabration, oùse produiront ses fils Femi et Seun.Egalement annoncés : AngéliqueKidjo, Awilo Longomba, BrandfordMarsalis et les ténors de la scènenigériane, King Sunny Adé en tête.Comme chaque année, les hommagesfleuriront autour du 15 octobre,jour de naissance de Fela, notammentau Jazz Café à Londres, autourde Dele Sosimi, qui rejoindra le lendemainTony Allen, Keziah Jones etCheikh Tidiane Seck, entre autres,pour le Fela Day d'Afrobeat No Limità la Machine du Moulin Rouge.Quant à la biographie signée FrançoisBensignor, Fela Kuti, héros insoumisde l'afrobeat, ellle paraîtra à la fin del'année (coll. Voix du Monde, éd. Demi-Lune).Jean Berryl Après le Petit Atlas des Musiquesdu Monde, paru en 2006, retrouvez enlibrairie dès le 8 octobre Le Petit Atlasdes Musiques Urbaines. Edité parMondomix et l’Œuvre, en partenariatavec la Cité de la Musique, ce guidevous invite à découvrir le son des grandesvilles du monde.• www.mondomix.com/petitatlasn°42 Sept/Oct 2010


Musique09n Corse - JaponLa possibilité des ilesDepuis toujours, les polyphonistes corses d'A Filettaquestionnent les affinités naturelles entre leur culture ancestraleet celles d'autres peuples. Les liens les plus évidentsse révèlent ceux noués avec d’autres civilisationsinsulaires, Sardes ou Malgaches partageant notammentdes traditions de chants à plusieurs voix. Plus surprenantefut leur rencontre avec le maloya du Réunionnais DanyelWaro. Leurs quelques concerts en commun ont marquéles esprits et on retrouve trace de cette association dansle nouvel album de Waro (voir page 14). Cet été, A Filetta rejointl’île de Sado au Japon pour retrouver la troupe Kodo,célèbre pour sa maîtrise des impressionnants tambourstaiko. Après une série de concerts sur l’archipel nippon,ils présentent leur travail commun à Calvi lors des XXII èmeRencontres de Chants Polyphoniques (14 au 18 septembre),en attendant une future tournée de cette créationà l’horizon 2012-2013. B.M.• www.afiletta.com• www.kodo.or.jp• www.myspace.com/rencontrescalviBruit de paliersMais commentun musicien vit-il sa viede voisin ?Axel Krygier,Buenos Aires© B.M.« Un soir CharlyGarcia (le dieu durock argentin) débarquechez moi vers minuit pour répéter en vued'un concert auquel je participais. Il s’assoitau piano et me montre ses morceaux. Aprèsquelques whiskies, on jouait de plus en plusfort... Mais à 4 heures du matin, une voisinetrès énervée vient se plaindre. Charly criaitdepuis la salle “Dis-lui que c'est moi ! Dis-luique c'est moi !”. La voisine l’a si bien comprisque les jours suivants, tout le quartier était aucourant…»n°41 Juillet/Août 2010


10Mondomix.comBonne NouvelleIl y a toujours des artistes à découvrir.Ils n’ont pas toujours de maison de disquesou de structures d’accompagnement.Ce n’est pas une raison pour passer à côté !© B.M.Emel MathlouthiFragile et décidéeJeune chanteuse tunisienne, Emel Mathlouthi avanceà pas de géant, redonnant depuis Paris force et vigueur àla chanson tunisienne.Dans l’amphore qui recèlerait toutes les émotions de la vie d’EmelMathlouthi, on trouve pelle mêle l’écoute de D’Eux, l’album de CélineDion composé par JJ Goldman, la musique de Joan Baez, les chansonsdes révoltés Marcel Khalife et Cheikh Imam, son propre concertà Tunis au côté de CharlElie Couture, sa participation en 2006 à lafinale du Prix RMC Moyen Orient ou le coup de pouce de la SACEMà l’écriture de son premier album (en cours de réalisation) par le biaisdu dispositif Visa pour la Création. Un catalogue d’émotions qui en ditlong sur l’univers de cette chanteuse au répertoire empreint de rockpsychédélique, d’électronique et de chants arabes.Ambiances « strange »Emel a grandi bercée par les vinyles latino de son père et entourée demusique classique, de negro-spirituals. « Le rock est venu plus tard,dans les années 90. J’ai été ensuite fouiller celui des années 60 et 70avant de me passionner pour la chanson arabe engagée et l’électronoise-expérimental» détaille cette auteur-compositeur-interprète quiaime les mots qui font sens. Guitariste qui taquine volontiers le piano etla batterie, Emel affectionne surtout le chant. « C’est un moyen d’évasionqui m’offre le loisir de faire remonter ma mélancolie à la surface,explique-t-elle. Mon chant est au service du mot. Je ne me préoccupejamais de savoir si je suis dans la bonne tonalité mais plutôt si mesmélodies et mes notes habillent au mieux mon texte, servent l’histoireque je raconte ». Cette démarche la conduit naturellement à s’intéresseraux musiques électroniques. « J’aime les sons, les atmosphères,les ambiances qu’elles permettent de faire naître, même dans ce qu’ellesont de plus troubles, de plus “strange” ». Comme une rosace auxcontours affirmés et aux arcs de cercle entremêlés laissant apparaîtredes zones plus nuancées, la musique d’Emel est avant tout fragile, unefragilité qui, sur scène, touche et émeut le public qui la découvre.Squaalywww.myspace.com/amelmathlouthil Sur Mondomix : http://mondomix.com/blogs/suds-a-arles-2010.php/n°42 Sept/Oct 2010


Insolite11insoliteChourmo de la Ciotat compte pas moinsde 60 adhérents qui se retrouvent toutesl’année pour des cours hebdomadairede provençal, des déplacements sur desconcerts, des férias ou pour des balladesdans la colline voisine. « Nos deux grosévènements sont le concours de pêcheen avril et la course de baignoires durantl’été. Des collègues viennent de tout lesud-est pour y participer. »© AkunamatataTout BaigneMoins médiatisée que la Coupedu monde de football, la coursede baignoire organisée dans leVieux Port de La Ciotat a réuniune quinzaine d’équipages motivés.Bonne nouvelle : aucunen’a fait la grève de la rame,même si certaines, à l’imagedes Bleus, n’ont pas franchi laligne d’arrivée !Il faisait chaud ce 4 juillet à La Ciotat.Un temps à passer son temps dans unebaignoire. Il faisait si chaud ce 4 juillet àla Ciotat qu’une quinzaine d’équipagesa jeté à la mer une baignoire, bien souventcustomisée. Au coup de sifflet, lesprotagonistes se sont lancés dans unecourse effrénée, un aller-retour de quelquescentaines de mètres sous le regardenvieux de supporters juchés sur lesquais ou arrimés au comptoir des barsenvironnants.La fête pour tous« La course de baignoires à la Ciotat, c’estune vieille histoire », rappelle Nicolas Tourly,le responsable de la Ciotat Chourma,l’antenne ciotadine de l’association laChourmo (prononcez chourm’) du MassiliaSound-System. Pour la petite histoire,une première édition avait eu lieu en 95. Al’époque Blu et Zerbino, deux membresdes Jovents qui accompagnent depuisMoussu T, avaient fini troisième. « Ce n’estque l’année dernière que nous avons décidéde la relancer, explique le chourmoen chef. Parce que c’est festif, que ça necoûte pas grand-chose et surtout queça réunit un “moulon” de monde ! ». LaPremière sortiepour Putan de CançonCe 4 juillet, c’est le team Christophepour Ois’Eau Net (une entreprise de nettoyage)et Olivier pour Home Games (uneboutique de jeux vidéos) qui ont franchien tête la ligne d’arrivée. « La CiotatChourmo participait pour la première foisà la compétition avec une équipe 100%féminine » ajoute Moussu T visiblementravi de leur performance. « Elles ontloupé le podium d’une place seulement.L’an prochain, on fera mieux. On attendles subventions de Jeunesse et Sport etJacob Delafon » lâche-t-il dans un grandéclat de rire, avant de rejoindre la terrassedu Central Bar où il allait donneravec ses Jovents, pour la centaine depersonnes présentes, un concert émailléévidemment de quelques “cançons” deson nouvel opus (Putan de Cançon à paraîtrele 23 septembre).Squaaly


12Mondomix.com / ACTUACTU - VOIRn Expo - Art Brut© SUZUKI Marie - Tromperie à toute l'humanité - 2007Japon sans fardsLes images fortes qui composent la très belle exposition Art BrutJaponais risquent de faire bouger nos lignes de lecture de la sociétéjaponaise.La Halle Saint Pierre, au pied de la Butte Montmartre, lieucréatif en marge des parcours institutionnels, empruntele sentier de l’étrangeté, sillonnant à l’écart de tout mouvement,effets de mode ou d’ambition, en exposant 63artistes pour la plupart pensionnaires d'institutions pourhandicapés mentaux.Ces créateurs, visiblement rétifs aux codes exigus de leursociété, présentent d'étranges totems, sculptures hérisséesmi-plante mi-animal, des dessins incisifs de femmesou de villes jaillissant d’un quotidien saturé de signes,des pyjamas illustrés, des séquences de motifs abstraitscaptivants comme des idéogrammes, et autres graphismesobsessionnels qui réjouissent l’œil. Une part du Japontraditionnel peut également émerger, tel ce yakuzatatoué stylisé à l’extrême,cet écolier enuniforme la tête au© KIBUSHI Daisuke - Sans titre carré, ces écrituresqui ne veulent plusrien dire. Autant detrames visuelles qui nous montrent un autreJapon, riche d’un inconscient rarement effleuré,parfois intense, toujours conducteurd’émotions.Bruno Charentonn Art Brut JaponaisHalle saint Pierre, Métro Anvers,jusqu’en janvier 2011© HIRANO Shinji - Ken Shimura(enfant)n Expo - photojournalismeVisa pour l'image© Olivier Laban-Mattei / Gaza #6.Avec Visa pour l'Image, Perpignan devientchaque fin d'été la Mecque du photojournalisme.A découvrir cette année :une rétrospective de 50 ans de travauxde William Albert Allard pour NationalGeographic ; New York, Rome, Moscouet Tokyo vus par William Klein ; le fleuveCongo par Cédric Gerbehaye ; les Pélerinagesde Kazuyoshi Nomachi... Etdes sujets choc comme les migrantsde Calais par Carsten Snejbjerg, Haïti etBangkok par Corentin Fohlen, Tchernobylpar Guillaume Herbaut ou l'Afghanistanpar Stephen Dupont. Et toujours lesprojections nocturnes mises en musique,au Campo Santo. Cette 32 ème édition estaussi marquée par la publication du premierouvrage photographique co-éditépar Visa pour l'Image : War is Personal,très beau travail en noir et blanc d'EugeneRichards (Getty) sur les traumatismesliés à la guerre en Irak, exposé l'an dernierau festival. Jean BerryDu 28 août au 12 septembre à Perpignan.Gratuit.www.visapourlimage.comn festival - LimogesLes Francophoniesprennent la paroleVoilà un festival qui ne mâche ses mots.Il a même plutôt tendance à les crier trèsfort, en français le plus souvent, maisavec tous les accents du monde. Lesmots, le verbe et les formes d’expressionthéâtrales, poétiques ou musicalessont les filtres au travers desquels l’événementrelate, expose ou transformele réel. Engagées et conscientes, résolumenttournées vers l’avenir, c’est enparticulier vers le continent africain queles Francophonies portent logiquementleur regard. Un continent en pleine croissance,mais portant sur lui les innombrablescicatrices de l’Histoire, et des plaiesencore bien ouvertes. Sur les planches,en photographie, littérature, musique,en débats ou par la danse, des artistesracontent leur pays, leurs problèmes, etsurtout leurs espoirs. Du Congo au Vietnam,en passant par le Canada ou Haïti,le festival ouvre une grande fenêtre sur lemonde. Il n’y a plus qu’à jeter un œil.M.J.www.lesfrancophonies.comn°42 Sept/Oct 2010


WEB13ACTU - WEBn Philanthropie - vidéosLe YouTube des humanitairesUne plateforme vidéo entièrement consacréeaux « bonnes nouvelles ».L’idée ne révolutionnera pas le monde de la solidarité,mais il fallait y penser. Goodness TV (EspoirTV pour la version française) vient d’être lancéeen début d’année à Montréal. Son fondateur, leCanadien Laurent Imbault, est un acteur retraitéde 61 ans à l’optimisme débordant. Lassé desimages catastrophistes des médias traditionnels,ce véritable philanthrope a eu l’idée d’une WebTVdédiée exclusivement aux « bonnes nouvelles » etaux œuvres positives des ONG. Concrètement, laplateforme ressemble à s’y méprendre à YouTube.Petite particularité : un onglet plutôt pratique pouraccéder aux dernières vidéos des principales organisations.Si la pérennité de cette Goodness TVreste à prouver, elle illustre l’explosion actuelle dessites Web consacrés à la philanthropie et à l’économiesolidaire. J.P.n Pour accéder à Goodness TV :www.goodnesstv.orgn Concours - jeunes talentsSautez sur le tremplinMusiciens, il vous reste quelques jours pour soumettre vosprojets musicaux au Tremplin des Musiques qui mixentle monde. Organisé par Music and You et Mondomix,le concours permettra de se produire au prochain salonMusic & You (19-22 novembre 2010) et de se faire offrir undossier de presse multimédia (vidéo, photos, biographie)réalisé par des professionnels. La clôture des inscriptionssur mymondomix est fixée au 20 septembre. Le concoursest ouvert aux jeunes talents résidant en France, non liésà une compagnie discographique, et interprètant une musiqueoriginale mixant le monde et ses cultures, quels quesoient les styles musicaux pratiqués (rock, jazz, chanson,hip-hop, électro, reggae, folk, funk…). Il vous faut déposer3 compositions originales en Mp3, une photo et une présentationbiographique. Les candidatures seront soumisesau vote des internautes (jusqu’au 15 octobre) et la décisionfinale du jury de professionnels sera dévoilée le 25 octobre.B.M.• www.mymondomix.com


14Mondomix.comMusiquesVoile mystiqueComment ce fils de petit paysan est-il devenuLA voix de la Réunion ? Il y a là unmystère… Et justement, Danyel Waro lèveun voile mystique sur un événement déterminantde sa vie : « Quand j’étais petit, j’aieu la diphtérie (une maladie caractériséepar la formation de membranes sur les muqueusesdu larynx et du pharynx, NDR). Àl’époque, cette maladie était fatale : j’étaiscondamné ! Ma mère a fait le vœu - à laVierge Marie - de m’habiller en bleu et enblanc pendant cinq ans. Par leur foi, leuramour et leurs soins, ma mère et ma marraine,qui me nettoyaient la gorge, m’ontsauvé. Je suis donc un peu un miraculé.Aujourd’hui, cette gorge dirige mon existence.C’est ça le miracle ! Je me dis qu’ily a là quelque chose de spirituel, un don,une étoile… »La magie dumiraculé« J’étais dans une démarcheexclusivement militante,pas de carrière. Je voulaisdire les choses face à ce murd’une société qui refusaitde nous reconnaître »Danyel WaroTexte François Bensignor Photographie D.R.Le chef de file du maloya réunionnais va recevoir leWomex Artist Award 2010. Une consécration dignede la splendeur de son nouvel album, Aou Amwin.Au-delà de son talent, c’est la passion d’une vie,l’énergie positive et le don de soi qui sont saluéschez cet humain d’exception.Danyel Waro est un poète de la terre. Avec ses quatre frères, il cultivait leschamps en rentrant de l’école. Il n’a pas son pareil pour raconter la case familiale,l’unique vache et le papa qui boit. Il vous fait partager le délice réunionnaisdes nids de guêpes, dont on déguste les larves, et sait dire la saveur des grainsde maïs mûrs. « J’aime dire les mots. Pour moi, c’est comme de la matière. Ilsont un goût. On les croque, on les mange, on les goûte, on les donne à manger.C’est une nourriture et un plaisir. J’aime faire sonner les mots, jouer avec eux,les faire danser. »Les premières chansons qui le marquentsont celles de Brassens. Leur côté anarchisteplaît à l’esprit rebelle du garçon de15 ans. Mais c’est dans les fêtes du PartiCommuniste Réunionnais (PCR), auquelmilite son père, qu’il façonne son désirde révolte. Il crie « vive l’autonomie ! » etdanse au son du maloya, la musique desn°42 Sept/Oct 2010


Musiques15Cafres (les Noirs), alors méprisée par la« bonne société » et réprimée par lesautorités. Avec Firmin Viry, un grand dugenre affilié au PCR, le maloya devientalors un ferment politique et subversif àla Réunion. Ce qui lui vaut d’être encoreplus réprimé. Danyel se joint à la troupede Firmin, apprend les airs traditionnels,danse, fabrique les instruments. « Lemaloya m’a permis de dépasser l’espritcartésien, le matérialisme communistequi me faisaient rejeter toute dimensionspirituelle. Il m’apportait vraiment ce dontj’avais besoin. »22 mois en prisonViré du lycée après avoir raté son bac,Danyel ne peut échapper au service militaire,qu’il part effectuer en métropole,début 1976. Il va en fait passer près de22 mois en prison pour insoumission...Afin de conjurer le désespoir, il se lanceà corps perdu dans l’écriture, la poésie,la revendication de la langue créole. DegazAnou Vitman, enregistré pour sonnouvel album, est un de ses appels à laliberté jeté sur le papier en tôle. De retourà La Réunion, sa vocation de chanteurest devenue inébranlable. Il va se forgerune réputation auprès de ses pairs.Elle rayonne bientôt parmi les amoureuxdu maloya et des musiques qui ont dusens.Pourtant en 1990, alors qu’on l’invite àjouer au Japon, seule une cassette sousson nom circule dans l’île. « J’étais dansune démarche exclusivement militante,pas de carrière. Artistique, certainement,mais sans me rendre compte de l’impactémotionnel qui pouvait en résulter. Jevoulais dire les choses face à ce mur[d’une société] qui refusait de nous reconnaître.J’étais rebelle à tout ce queje ne maîtrisais pas. » Philippe Conrath,qui le programme au festival Africolor93, saura établir un compagnonnagefructueux avec l’artiste écorché. Disqueset tournées révèleront progressivementtoutes les facettes de l’insondable talentde Danyel Waro. En 2005, seul en scène,il parvient à transporter le public ferventd’une salle comble, armé de son kayambet de son charisme.Dès lors, toutes les ouvertures lui sontpermises. Après une rencontre avec TitiRobin, son quintet se frotte aux chanteurscorses d’A Filetta. Trois titres sur le nouvelalbum témoignent de ces momentssublimes. On en perçoit également leseffets positifs dans l’harmonisation desvoix, due à son fils Sami et à ses musiciensDamien Mandrin et Vincent Philéas.Le rappeur sud-africain Tumi vient égalementposer le flow de son commentairesur Mandela, chanson écrite au momentde la libération du grand homme. À nouveaucet été sur la scène du festival Errobiko,au pays basque, la voix de BeñatAchiary improvisait dans la tourmentemaloya. Danyel Waro usait une fois encorede sa magie à faire bouger les corpspour ouvrir les âmes.n Danyel Waro Aou Amwin (Cobalt)ECOUTEZ sur Mondomix.com avecl La chronique de Aou Amwinsur Mondomix.coml Sur Mondomix.comsa recette du Cari volaillel En concert :le 30 septembre à Matoury enGuyane, le 15 octobre aux NuitsEuropéennes de Schiltigheim, le 16à la Fiesta des Suds de Marseille,le 25 à Brest et le 31 octobre auWomex de CopenhagueNi Putes, Ni PokerRésidant à La Réunion, CamilleBazbaz est un admirateur ferventde Danyel Waro. Mais lorsqu'ilévoque le sorcier du maloya avecun journaliste de Rock & Folk, sespropos prennent un tour inattendu.Explications ci-dessous.Dans son interview de Camille Bazbazdans le Rock & Folk du mois de mai dernier,le Géant Vert (critique et parolier derock français) a fait une faute de transcriptionqui fait de Danyel Waro un type qui«passe son temps à jouer au poker et baiser des putes ». « Enfait il y a un tas de bourdes dans cet article, explique Bazbaz.Au début ça m’a fait penser à Lester Bangs, le célèbre critiquede rock américain qui pouvait délirer avec une plume acerbe.Sauf qu’il ne créait pas de malentendus entre amis. Tout çapart d’une mauvaise interprétation. En essayant de décrire àGéant Vert ce qu’étaient le maloya et la musique réunionnaise,j’ai évoqué Waro, qui est l’un des maîtres de ce mouvement, etpour le faire marrer, j’ai dit : "ce n’est vraiment pas le genre demec à trainer avec des putes en jouant au poker". Et lui a écritl’inverse en virant la négation. Cette erreur m’a gêné vis-à-visde Waro pour lequel j’ai beaucoup d’estime et que je connaisun peu. On s’était rencontrés quelques fois au festival Sakifo àSaint-Pierre, on s’était bien marrés, sans putes ni poker, rienqu’en refaisant le monde. Il n’est pas Mickael Jackson et je nesuis pas Bruce Springsteen, donc je savais que cet incidentn’aurait pas de grande retombée médiatique. Mais il est toutl’inverse du personnage décrit, donc j’ai voulu lui téléphonerpour justifier l’erreur. Il a ri et m’a dit que ça lui était souventarrivé. Vu qu’il aime parler en créole pendant les interviews,malgré son français sans accent, il arrive que les journalistesretranscrivent mal ses propos. Donc il a très bien compris. Etfranchement, il est au-dessus de tout ça. C’est un musicien, ila d’autres combats. »Nadia Aci© Dimitri COSTEn°42 Sept/Oct 2010


16Mondomix.comMusiquesla conjuration du chamaméChango SpasiukTexte et Photographie Yannis RuelConsacrée à l’Argentine, l’ouverture du Festival d’Ile de France s’attache à faire découvrirla diversité musicale d’un pays qui ne se réduit pas au tango. Parmi ses traditions les plussingulières, le chamamé, la musique de la terre du maté.Le chamamé, dit le poète, est un serpentqui s’enlace aux jambes des danseurs. Lamorsure de ses mélodies envoûtantes seraiten effet susceptible de provoquer desréactions incontrôlées. « Certains thèmessont exclus du répertoire des bals parcequ’ils sont réputés déclencher des bagarresdans l’assistance », glisse avec un sourirel’accordéoniste Chango Spasiuk. Plus couramment,l’enthousiasme associé au chamamés’exprime au travers du « sapukái »,le « cri » en guarani. Une acclamation perçantequi ponctue les moments forts d’unmorceau et témoigne, à l’instar du « olé »flamenco, de la densité émotionnelle liée àcette musique de danse rurale du nord estde l’Argentine, aux frontières du Paraguay etdu Brésil.La mélancoliede la terre rougeSous sa crinière de sorcier et son énergiepassionnée, Chango Spasiuk incarne àmerveille la dimension mystique du chamamé.« Le chamamé mijote depuis 300ans, souligne ce natif de la province de Misiones,descendant d’immigrés ukrainiens.C’est une marmite dans laquelle se fondentla culture indigène guarani, des influencesharmoniques introduites par les Jésuites etun rythme ternaire d’origine africaine. Mais« Le chamamé est unemarmite dans laquelle sefondent la culture indigèneguarani, des influencesharmoniques introduites parles Jésuites et un rythmeternaire d’origine africaine »la forme qu’on lui connaît s’est cristalliséeà la fin du 19 ème siècle, sous l’effet d’uneimmigration européenne qui a apporté avecelle l’accordéon et la polka. » Extrêmementpopulaire dans sa région d’origine, le chamamén’en reste pas moins l’un des parentspauvres du paysage musical argentin, étrangerau mouvement de rénovation du folklorequ’a connu le pays à partir des années1950. « Peut-être parce que sa popularitérepose sur son expression la plus festive,parce qu’il est en partie chanté en guaraniet également cultivé dans les pays voisins,le chamamé n’a jamais eu les faveurs desélites et reste souvent perçu à Buenos Airescomme une musique de femmes de ménage», déplore Spasiuk.Prolongeant la voie ouverte par Raúl Barboza,Chango Spasiuk milite depuis vingt ans pourintroduire la richesse du chamamé à de nouveauxpublics. Entre tradition et innovation, lescompositions cet instrumentiste virtuose rendentun hommage viscéral à l’univers culturelde la terre rouge qui l’a vu naître. Les titres deses deux derniers albums font respectivementréférence aux « pynandí », les « va-nu-pieds »en guarani, et aux « tareferos », ces paysansqui récoltent l’herbe du maté à la main. « Tousles Argentins boivent du maté et toute la productionde maté provient du nord est du pays.Or, la plupart des gens ignorent tout de la manièredont vivent et s’expriment les travailleursqui le récoltent, dans laquelle le chamamé occupeun rôle essentiel. » Aussi inséparable deson kit à maté que de son accordéon, ChangoSpasiuk délivre une musique inspirée, jusquedans ses cadences les plus enjouées, par uneprofonde mélancolie intérieure. Comme si sonchamamé visait à faire partager aux oreillescette douce amertume qui caractérise la saveurdu maté.n Le 5 septembre dès 12H30 le Festival d’Ile de Francepropose ¡Viva Argentina! au Château de Villarceaux avec denombreux musiciens argentins et dégustation de grilladesfaçon gaucho.n Détail sur festival-idf.frl Sur Mondomix.comdégustez le maté avec Chango Spasiukn°42 Sept/Oct 2010


MUSIQUESMusiques17À Pasde Géant« Valdés latinise cette épopée du jazz,trempe ses thèmes dans un verre demojito, marie blue note, danzónet cha cha cha »Chucho ValdèsTexte Anne-Laure Lemancel Photographie Alejandro PerezAvec Chucho’s Steps, le pianiste Chucho Valdés, maître du jazz cubain,emboîte le pas à Coltrane pour révolutionner les règles musicales. En toute latinité.Presque deux mètres de musicalité, et desmains colossales qui renferment tous les secretsde la virtuosité pianistique... Sur sondernier album, Chucho’s Steps, le prodigieuxCubain Chucho Valdés, fils de Bebo (pianisteet compositeur, pionnier du jazz afro-cubain,NDLR), adresse la prolixité géniale de son discoursà un autre géant : Coltrane. Ici, la référenceexplicite à Giant Steps, standard mythiquedu Maître John, qui en son temps brisa lescarcans vers de nouveaux horizons harmoniqueset rythmiques, sonne comme un désirde révolution, pas en avant, quête régénérée.Mais là où le légendaire saxophoniste tissaitson casse-tête formel, tremplin hypnotiquevers toutes les improvisations, en 16 mesures,le fondateur d’Irakere l’élabore en 50. Undéfi, une audace nécessaire, qui parcourt lessillons de ce disque, nourri au sol d’une traditionfertile. Car pour s’émanciper du déjà-entendu,Chucho puise dans l’Histoire, ainsi quedans ses amitiés : un clin d’œil à Cole Porteret Georges Gershwin (Begin To Be Good), unhommage swingué à la famille Marsalis (NewOrleans), un autre à feu Joe Zawinul (Zawinul’sMambo), dont Chucho salue les apports, enforme d’ouvertures géographiques et mathématiques: « Il a repoussé mes frontières, m’arévélé comment mêler les polyrythmies afrocubainesaux structures occidentales, élaborerde savantes architectures rythmiques... ».Et dans cette relecture quasi-orchestrale del’épopée du jazz, Valdés latinise tout, trempeses thèmes dans un verre de mojito, marieblue note, danzón et cha cha cha... Une signaturequi ne saurait le résumer : malgré son titreLas Dos Caras, le pianiste offre bien plus dedeux visages. Plutôt une multiplicité déclinéeà l’infinie, dans ses boucles enrichies, ses jeuxde construction-jeux de piste, patterns rythmiques– toute une tempête, incarnée par l’orixaféminin Yansá (Yansá), dont l’artiste santerotransmet le souffle spirituel et dévastateur.La force,l’intellect, l’émotionDeux faces qui restent pourtant celles del’extrême contrainte, et d’une sublime liberté.Car Chucho bosse. Ecrit. Construit. Travailleses thèmes, invente leurs couleurs, leur organisationrythmique, leur noyau, pour ensuitelaisser libre court à l’improvisation, à l’espritsans entrave, aux chemins de traverse, à lasophistication d’une communication complexemais décomplexée, dépendante de sonseul biorythme, et de l’alchimie d’une musiquenée de l’instant. Une seule formule : « Tune penses pas, tu joues ». Mais pour jouer, ilfaut avoir pensé, dans l’idéal de ce triptyqueénoncé par le pianiste Horace Silver : la force,l’intellect et l’émotion. Car là, seulement, tut’envoles – un grand pas, un bond, qui symboliseà lui seul l’esprit du jazz, art toujoursneuf car anthropophage, qui selon ChuchoValdès, reste « la liberté faite musique ».n Chucho ValdèsChucho’s Steps (World Village/Harmonia Mundi)n Concert à Jazz à La Villettele 7 septembre avec Archie Sheppl La chronique de Chucho's Stepssur Mondomix.coml Sur Mondomix.combuvez un mojito avec Chucho Valdesn°42 Sept/Oct 2010


18Mondomix.comMusiquesn Les commémorations desIndépendances vous paraissentellesdéplacées ?TJK : J'ai toujours été opposé aux fêtes desIndépendances des pays africains, car nousne sommes indépendants ni économiquementni politiquement. Les chefs d'Etats sudaméricainssont indépendants. Morales ouChavez peuvent dire à Barack Obama ou Sarkozyd'aller se faire foutre. Aucun chef d'Etatafricain depuis Thomas Sankara ou PatriceLumumba ne s'est levé pour dire « Laisseznoustranquille, désormais les choses vont sepasser ainsi ». Derrière tout ça, il y a l'anciencolon qui a vu une concurrence venir de laChine et, pour marquer sa présence, met beaucoupde budget pour que les Nègres aillentdanser.« Aucun chef d'Etat africaindepuis Thomas Sankara ouPatrice Lumumba ne s'estlevé pour dire “Laissez-noustranquille, désormais leschoses vont se passer ainsi” »La Voixdu savoirTiken Jah FakolyTexte : Jean-Sébastien Josset Photographie D.R.Un nouvel album innovant, African Revolution, et unesignature controversée avec le géant américain duspectacle, Live Nation. Le lion ivoirien du reggae réfutetoute contradiction et lance quelques coups de griffe.n African Revolution marque-t-il untournant dans votre carrière ?Tiken Jah Fakoly : Après dix albums enquinze ans de carrière, il était important quej'arrive à surprendre mes fans. Je me suisdit qu'en tant qu'Africains, nous avons unatout : nos instruments traditionnels. Enles ajoutant au reggae, on peut trouver uneoriginalité propre à L'Afrique. J'ai eu envieque les gens soient surpris, notamment parl'absence de cuivres...n Votre message est très universel.Peut-on dire qu'il se résume ainsi :la vraie révolution, c'est l'éducation ?TJK : Exactement ! La majorité des Africainsne sont pas alphabétisés et les politiquesen profitent. Avant d'aller à l'école et devoyager, quand j'étais au village, je pensaisqu'il fallait voter pour celui qui avait leplus d'argent. Aujourd'hui, il y a des millionsd'Africains dans la même situation et si lamajorité d'entre eux étaient alphabétisés,cela changerait. Les familles doivent prendreconscience que l'éducation peut changernotre société, que les enfants doivent aller àl'école quelles que soient les difficultés. Unjour, cela aura des répercussions positivessur notre société. C'est pourquoi je dis dansune chanson : « Personne ne viendra changerl'Afrique à la place des Africains ».n Vous avez signé avec Live Nation,une grosse machine américainequi fait tourner les artistes tout enrachetant de nombreuses salles etdes festivals. Ne voyez-vous pasdans ce monopole une menaced'uniformisation de la culture ?TJK : Franchement, je n'ai pas fait ce calcul.J'étais en fin de contrat chez Garance et je recherchaisun tourneur. La proposition de LiveNation était la meilleure pour ma carrière. J'aitourné à peu près partout sauf aux Etats-Uniset Live Nation a surement beaucoup de planslà-bas. J'ai envie d’y faire passer mon message,de même qu'en Allemagne ou en Angleterreoù les Français n'ont pas forcémentles contacts qu'il faut. Live Nation ne doit paseffrayer les gens, une telle structure ouvre denouvelles opportunités et améliore les conditionsde travail des artistes. Aujourd'hui, lesdisques ne se vendent plus et c'est le live quipermet de vivre. Donc, tant mieux s'il y a beaucoupd' « usines à live » qui s'installent enFrance. Ils viennent d’arriver, je suis l'un deleurs premiers artistes et j'espère qu'ils vontêtre à la hauteur parce que s'ils ne le sontpas, cela ne sera pas bon pour eux.n Tiken Jah Fakoly African Revolution(Barclay)ECOUTEZ sur Mondomix.com avecl Sur Mondomix.comDécouvrez le restaurant africain favoride Tiken Jahn°42 Sept/Oct 2010


Musiques33 19FOLKLORESUBLIMÉAXEL KRYGIERTexte Emmanuelle Piganiol Photographie Benjamin MiNiMuMAu cœur d’une scène alternative argentine passionnante, le multi-instrumentisteAxel Krygier fait figure d’électron libre. À 41 ans, il livre son quatrième album, Pesebre,subtile fusion de folklores sud-américains et d’héritage électronique.Au moment de sa prestation parisienne surla terrasse de Petit Bain (équipement culturelflottant qui sera achevé en 2011, NDLR),Axel Krygier arbore la moustache de CharlieChaplin et le même regard malicieux et pétillant.Né à Buenos Aires en 1969, l'hommeentretient avec la France un lien fort. Ungrand-oncle travaillant dans l’édition à Parisscelle son destin musical en lui envoyant,après la chute du régime militaire argentin,au début des années 80, des cassettes deLaurie Anderson ou des Talking Heads, quise mêlent aux influences folkloriques d’Axel.« Mon oncle nous a offert le premier disquedes Rita Mitsouko, et ma mère nous ramenaitde Paris ceux de Tuxedomoon ou BrianEno, raconte Axel. C’était un privilège, maisj’étais un peu déçu, parce que c’était exactementce que je voulais faire ! »Autodidacte forcenéÀ l’âge tendre, Axel Krygier suit des coursde flûte traversière. Il intègre un groupe entant que saxophoniste, investit dans unebasse, dépoussière le piano du salon familialet constate qu’écrire des partitionsne lui convient pas. Le multipiste s’avèrel’outil idéal, qui lui permet d’enregistrer sespremiers morceaux et de répondre à unecommande pour une troupe de théâtre.« À ce moment-là, mes influences étaientun mélange de musiques très folkloriquesd’Amazonie et de disques bizarres et raresde musiques du monde. On pourrait parler de"folklore extrême" ! » Les années techno s’ysuperposent et Axel s’intéresse aux recoinsles plus puristes du genre. Il utilise toujourscertains éléments électroniques « quand ilsont la rusticité du folklore ».« Les musiquesà l'esthétique très définieme posent un problèmed’expression »Cet autodidacte forcené se situe au croisementde deux scènes en Argentine, entrecumbia digitale et musique expérimentale.« Il y a une scène underground très forte,et je bouge entre le club et le cabaret. Lesmusiques très définies esthétiquement sonttrop étriquées, ça me pose un problèmed’expression... ». Jamais mieux servi que parlui-même, Axel passe de Pro Tools à FinalCut, dessine et expose ses créations, réaliseses pochettes et ses clips avec une patte folleet humoristique, qu’il tire de son goût pour lacaricature. Après la création du combo expérimentalSexteto Irreal et le succès de ses premiersalbums, il cale son set AxelK Soundsystementre deux B.O. et une création musicalesensible pour Trois Tangos, le succès parisiendu dramaturge argentin Alfredo Arias.Éminence grise inclassable, Axel Krygier a signéPesebre sur le label belge Crammed. Unenouvelle occasion de se rapprocher de la terrede Brassens, grâce à qui il a appris le français,« en traduisant ses chansons pour les comprendre.» Après avoir monté un quartet avecdes musiciens français, il rêve de se consacrerexclusivement à faire vivre son disque sur scène.Un album épanoui, dont l’imagerie poétiqueest une ode à la famille.n Axel Krygier Pesebre (Crammed)sortie le 27 septembrel La chronique de Pesebresur Mondomix.coml Sur Mondomix vidéoVidéos à Babel Med et aux Suds à Arlesl Sur Mondomix.comsa recette du sandwich à l’avocatn Concert : Le 08 octobre à laMaroquinerie de Paris et le 22 au VIPde Saint Nazairen°42 Sept/Oct 2010


20Mondomix.comSensuellemélancolieAntonio ZambujoTexte Benjamin MiNiMuM Photographie Rita CarmoSi le fado portugais a beaucoup changé, il émeut toujours autant. Illustration avec la sensualitépiquante d’Antonio Zambujo, fadiste ouvert sur le monde.Le fado n'est plus ce qu'il était. Si les touristesse pressent toujours dans les traditionnellesmaisons de fado du quartier de l'Alfama àLisbonne, un vent nouveau souffle sur la saudadeportugaise. Les concerts de musiquesportugaises ne sont plus fréquentés par lesseuls fans vieillissants d'Amália Rodrigues,disparue il y a plus de 10 ans. Les jeunes Portugaisviennent en nombre. La très glamourMozambicaine Mariza rassemble jusqu'à 30000 personnes sur son seul nom, Ana Mourachante avec Prince, après avoir joué avec lesStones, et le groupe Deolinda cartonne encollant des textes modernes et humoristiquessur du fado.Crooners américainsAntonio Zambujo est plus discret, mais séduitdurablement. S’il s'est fait connaître en chantant,six années durant, dans la comédie musicaleAmalia qui retraçait la vie de la diva, cene sont pas les seules influences qu’il avoue.« Au tout début, il y avait la musique traditionnellede ma région au sud du Portugal,le Cante Alentejano, un genre vocal polyphoniquechanté par les hommes, auquel m’ainitié ma grand-mère. A trois ou quatre ans,j’ai commencé à chanter et à jouer avec lesinstruments qui traînaient dans la maison familiale: piano, harmonica, percussions ». Sapratique, forgée dès son plus jeune âge, serenforce de l’écoute de disques : « Dans chaquefamille portugaise, on trouve des disquesde fado classique. Chez moi, il y avait aussides vinyles de la vague de chanteurs desannées 60 influencés par les crooners américains,comme Tonique Mateus, Francis Suze,Tristan da Silva et Max, mon favori.»« Chet Baker est un modèle.Je crois qu’il a été trèsimportant pour des chanteurscomme João Gilberto,Caetano Veloso ou moi.»Susurrer à l'oreilleSans renier ses racines, il trouve son style enécoutant les grandes voix transatlantiques, lesgrands Brésiliens, mais aussi des charmeursaméricains. « Chet Baker est un modèle, précise-t-il.Je crois qu’il a été très important pour deschanteurs comme João Gilberto ou CaetanoVeloso. Je n’essaye pas de chanter comme lui,mais avec l’esprit qu’il donnait à son chant. »Guia (« guide »), quatrième album produit passon complice et contrebassiste Ricardo Cruz,porte les traces de ses passions musicales. Descuivres et trompettes veloutées comme chezChet, des textes du Brésilien Vinicius de Moraes(« le plus grand auteur de chansons en Portugais») ou une composition faite sur mesure parle praticien éclairé de la bossa, Marcio Faraco.On y entend aussi son amour pour l’Afrique.Pour Barroco Tropical, le joueur de cavaquinhocapverdien Jon Luz a composé sur les vers dupoète angolais José Eduardo Agualusa. Ondécouvre aussi son sens du défi : « Pour arrangerla chanson A Tua Frieza Gela, on a travaillé avecJoão Ricardo de Barros de Oliveira qui fabriquedes instruments poétiques à partir d’objets récupérésdans la rue (assemblage de ressorts, demanche de guitare installé au-dessus d’un soclede pèse personne, NDR). »Mais ce qui frappe d’abord et se confirme àchaque écoute de Guia, c’est la douceur de sonchant, tout en retenue sensuelle mais qui dégageune force inouïe. Longtemps, les chanteurs defado forçaient leurs expressions pour émouvoirle public. Aujourd’hui, Antonio Zambujo lui susurreà l’oreille. Le fado n’est décidemment plus cequ’il était.n www.antoniozambujo.comn Antonio Zambujo Guia(Word Village/ Harmonia Mundi) sortie le 05 octobrel La chronique de Guiasur Mondomix.coml Découvrez le repas favori d'AntonioZambujosur Mondomix.comn Concert : les 23 et 24 octobre auCafé de la danse et le 28 au Womex àCopenhaguen°42 Sept/Oct 2010


Musiques21DiamantpsychéSeu Jorge & AlmazTexte Isadora Dartial Photographie D.R.Prendre la voix du renouveau samba-carioca, mélanger aux sons d’un groupe-phare duMangue Beat et ajouter le talent protéiforme d'un compositeur de B.O. Joint par téléphone,Seu Jorge nous raconte l'aventure Almaz (« diamant » en russe), « super groupe » brésilienqui publie Self Titled, un premier album de reprises... inventives !n Comment s’est passée larencontre avec Almaz et qu’estcequi vous a donné l'envie de cedisque de reprises ?Seu Jorge : On s’est rencontrés en 2008.Lucio Maia et Pupillo (guitariste et batteurde Naçaõ Zumbi), et Antonio Pinto (bassisteet compositeur de La Cité de Dieu) composaientla B.O. d'Une Famille Brésilienne, deWalter Salles et Daniela Thomas. Ils m’ontcontacté pour faire une reprise de JuizoFinal de Nelson Cavaquinho. On a décidéde poursuivre l’expérience. En moins d’unesemaine, on avait enregistré près de 18 reprises...On en a gardé 12 pour l’album.n L’éventail de reprises est trèslarge, avec des standards dela musique black américaine(Michael Jackson, Roy Ayers),des classiques brésiliens, sansoublier un saut à Düsseldorf avecKraftwerk. Qui a choisi les titres ?SJ : C’est un choix collégial. On avait nosvinyles, on les écoutait en buvant pas malde bières... Et on s’y mettait ! C’était simple,facile.n Toi qui es plus proche de lasamba, qu’est-ce que ça te fait dejouer avec des membres du groupedu regretté Chico Science ?SJ : Naçaõ Zumbi est vraiment la meilleurechose qui soit arrivée musicalement auBrésil ces vingt dernières années. Ils nousont offert une musique plus psychédélique.A l’inverse de la samba qui est spontanée,celle du groupe offre des images, des couleurs,quelque chose de plus cinématographique.Ils ont permis à la nouvelle scènedu Nordeste de se faire connaître.« Almaz, c'est l’occasionde rompre avec les clichésbrésiliens »n Et toi, qu’est-ce que ça t’asapporté ?SJ : Au Brésil, les gens me voient commeun artiste populaire de samba. Almaz medonne l’opportunité d’aller vers des chosesplus sombres, plus rock et psychédéliques.C’est l’occasion de rompre avec les clichésbrésiliens, d’être en résistance face à ce cirque.Et puis, c’est une nouvelle expérienceavec un groupe, ça faisait quelque tempsque je faisais de la musique en solo et ceping-pong d’inspirations me fait du bien !n Self-Titled est un disque dereprises, et l'on en trouve d'autres(Bowie, Gainsbourg, Presley) danspresque tous tes disques. Es-tuplus à l’aise pour interpréter quecomposer ?SJ : J’adore composer, je le fais pour MarisaMonte ou Carlinhos Brown, mais c’estvrai qu’interpréter rejoint mon travail de comédien.J’adore revisiter des classiques,me fondre dans des chansons immortelles,y insérer une nouvelle lecture. (Seu Jorgelaisse sa phrase en suspens. Son attentionest retenue par des images de fusillades aujournal télévisé pauliste. Il est révolté par lamise en scène télévisuelle de l’info. Il se calme,s’excuse et reprend). C’était vraimentparfait de commencer à travailler avec Almazpar des reprises !n Seu Jorge & AlmazSelf Titled (Discograph) sortie le 24 septembrel Sur Mondomix.comla recette de Seu Jorge duarroz & feijãon En concert : le 15 octobre auNancy Jazz Pulsation et le 22 à LaCigale, à Parisn°42 Sept/Oct 2010


22Mondomix.comen couverture« Je ne serai jamais belge.Et en même tempsje ne serai jamais congolais »n°42 Sept/Oct 2010


Musique / en couverture23SORCIEREQUATORIALBalojiTexte Eglantine Chabasseur Photographies Youri LenquetteQuelques mois après la sortie d’Hôtel Impala, premier album solo qui adressait sadouble culture belgo-congolaise, le sorcier hip-hop Baloji s’envole à Kinshasa.En six jours, dans la fièvre de l’urgence, entouré de musiciens du crû, il rappe l’énergiede Kin la Belle. Le résultat, formidable, a pour nom Kinshasa Succursale, un album àl’esthétique sixties et au groove novateur.Qu’avais-tu en tête en débarquant à Kinshasa pourenregistrer ton deuxième album ?Baloji : La première fois que j'ai découvert Kinshasa, j’ai euun choc équivalent à New York. N’importe qui peut exister,monter un business : tout est possible à Kinshasa. Je voulaisenregistrer une relecture africaine d’Hôtel Impala. Nous sommespartis avec un budget limité, à trois et avec un studiomobile. J’avais préparé quinze titres et on en a enregistréseize, en six jours. A chaque fois qu’on proposait une idée,on travaillait dessus et on enregistrait une heure après. Généralement,le titre n’avait plus rien à voir avec l’idée initiale etc’était bien mieux.Beaucoup de musiciens t’accompagnent sur l’album,comment les as-tu rencontrés ?Baloji : Je suis venu plusieurs fois à Kinshasa avant, pourrencontrer des artistes. La formation de base qui devait nousaccompagner n’était pas bonne, donc au deuxième jour destudio, il a fallu trouver des musiciens. On est sortis dansdes clubs pour expatriés où jouent tous les artistes, et on afixé des rendez-vous pour le lendemain. On a fait des rencontresincroyables, comme Rodrigue, un guitariste qui trouvaitchaque riff en moins de cinq minutes, ou la fanfare de laConfiance, avec ses trombones fendus par le soleil, qui jouesur six titres. Konono N°1 a joué sur un titre, il y a eu troiscoupures de courant pendant la prise, on n’a gardé que lelikembe de Mingiedi. C’était compliqué, mais c’est du groovede la brousse, mon titre préféré. Kinshasa c’est une ville baséesur du temporaire. Dans Kinshasa Succursale, tout a étéprovisoire et tout le monde s’est adapté.L’esthétique de l’album est très sixties. Tu asjoué là-dessus parce que c’est une époque qui tefascine ou pour coller à l’anniversaire des « 50 ansd’indépendance» des colonies francophones ?Baloji : J’ai enregistré en 2008, on était loin de ce calendrieret à vrai dire, j’espérais que le disque sorte plus tôt. Les sixtiesme fascinent en tant que rappeur, puisque dans le rap, onsample majoritairement la black music de 1968 à 1974, queje considère comme l’âge d’or des musiques noires américaines.Je suis d’accord avec The Blacks Keys, un groupe deblues, qui a une théorie : le blues, la soul, le funk ont cesséd’être des musiques intéressantes à partir de 1974, le momentoù on a commencé à faire des overdubs, c’est à direréenregistrer un instrument à part pour que tout soit parfait.Avant ça, tout le monde jouait ensemble et c’est vraimentcette vibe que je voulais : jouer tout en une prise, sans retouches,un truc très organique. Et c’est cette approche du sonqui implique une esthétique d’avant 1974.Pourquoi avoir repris le morceau IndépendanceCha Cha de Joseph Kabasele, le symbole de lavague d’indépendances de 1960 en RépubliqueDémocratique du Congo ?Baloji : La mélodie est incroyable et c’était un challenge intéressant.Je suis arrivé avec les textes écrits, il fallait justequ’on trouve les interprètes… Mais ni l’arrangeur ni les musiciensne voulaient mettre ces paroles sur ce titre parce quec’est un monument, qui fait partie du patrimoine musical. Jedis qu’après l’indépendance, le temps s’est arrêté au Congo.On a vraiment cette impression à Kin, parce qu’il y a trèsn°42 Sept/Oct 2010


24 Mondomix.com« La première fois que j'ai découvertKinshasa, j’ai eu un choc équivalentà New York. N’importe qui peutexister, monter un business :tout est possible à Kinshasa »peu de constructions modernes. Toutdate de l’époque coloniale : du cheminde fer aux institutions, c’est incroyable.Les musiciens étaient d’accordavec mon texte, mais ils avaient peurdes représailles. Les services secrets,c’est certainement le truc qui marchele mieux au Congo. Ce sont les seulsà être « aware » comme on dit là bas.Finalement, à force de quatre heures dediscussion, on les a convaincus de jouer.On est tous fiers du résultat.Dans un morceau, tu dis «parler de toi pour mieux parlerles autres ». Les textes de tonalbum sont très intimistes, maisabordent aussi des thématiquescomplètement universelles.Baloji : Ce que j’adore dans le cinémaou dans la littérature, c’est quand tusuis un ou deux protagonistes. C’esttrès intime mais, par la force des choses,tu t’identifies et cela t’apporte uneréflexion sur ce que tu es. Hôtel Impalaétait une « autobiophonie » destinée àma mère que je n’avais pas vu pendantvingt-cinq ans, car je vivais en Belgique,elle en RDC. L’année où je suis arrivé enBelgique, en 1981, Marvin Gaye vivaità Ostende. Mon père a dit à ma mèreen m’emmenant qu’on partait au paysde Marvin Gaye. Je me suis intéresséà l’histoire de Marvin Gaye et je suistombé sur un inédit, dont les parolesdisaient I’m going home to see my motherand my dear old dad. Et là, j’ai eule déclic : en racontant des choses personnelles,on pouvait raconter quelquechose d’universel. Je suis allé au payspour voir ma mère, et je lui amené ledisque.Tu es toujours belge ?Baloji : J’ai été sans papier pendanttrois ans, de 1999 à 2001. Je me suisretrouvé au centre fermé, à l’aéroportde Zaventem, à 48 heures de quitter laBelgique et de ne plus jamais y revenir,donc… je ne serai jamais belge. Et enmême temps, je ne serai jamais congolais.Mais je ne suis pas dans une rechercheidentitaire et j’assume être métissede culture. Pendant dix ans, avecle rap, je me suis intéressé à l’identiténoire américaine de la musique puis j'aipensé : pourquoi ne pas sampler desmusiques congolaises, des guitaresdans le rap ? Quand j’entends Ali FarkaTouré, je me dis il faudrait le sampler etfaire des beat de rap avec sa musique.C’est juste une démarche artistique,pas du tout une démarche identitaire oucommunautaire. Tu vois, j’adore aussiles vieux Brel. Ce qui me fascine chezlui, c’est son second degré permanent,en musique et en mots. Avant qu’onparte à Kin, j’ai envoyé à l’équipe unephrase de Joseph d’Anvers qui pourmoi résume tout : « Une chanson, ony rentre par la musique, on y reste pourles paroles et on en garde une image ».Le seul moyen d’amener les gens versle texte, c’est une musique, un universtrès défini, qui amène de l’espace pourautre chose : une rencontre.n Baloji Kinshasa Succursale(Kraked / Discograph) sortie le 04 octobreECOUTEZ sur Mondomix.com avecn sites web : www.baloji.comn°42 Sept/Oct 2010


Musique / en couverture25La recette de BalojiSans hésiter, le poulet à la mwambé, le poulet le plus gras du monde ! Il estpréparé à l’huile de palme, avec du sucre de canne congolais, et j’ai mangé çadans ma prime enfance, vers 7, 8 ans. On l’accompagne de pondu, des feuillesde manioc pilé, l’épinard congolais, de haricots myangué et surtout beaucoupde riz ! La cuisine congolaise est conçue pour te faire tenir sans manger toute lajournée. Délicieux !J’adore manger, j’adore cuisiner, prendre le temps de manger, etc... Pendantl’enregistrement de Kinshasa Succursale, on a fait venir une cuisinière quitravaillait dans un hôtel qu’on connaissait bien, et elle nous préparait du foufoupour une quinzaine de personnes. Au début, c’était le moment de pause, aprèstrois jours, c’est devenu l’heure du rendez-vous. En plus, la cuisine congolaiseest tellement grasse qu’on peut partager autour une bonne bière : la Primuset la Skol, brassées localement, qui sont d’ailleurs les plus gros sponsors despectacles en RDC.Baloji"Kinshasa Succursale"(Kraked/Discograph)« J'ai du mal à accepter mon nom, sa signification/Baloji signifie sorcier ». Tout au long d'un deuxièmealbum solo enregistré dans la bouillonnante Kinshasa,Baloji multiplie pourtant les tours de magie. Lepremier ? S'approprier l'historique IndépendanceCha Cha et en détourner l'imparable mélodie pouren renverser la portée symbolique : « J'ai repris cettechanson fédératrice, symbole de la crédulité desprémices/Pour que les démocraties progressent, ilfaut qu'elles apprennent de leurs erreurs de jeunesse».Né au Congo en 1978 mais venu en Belgique avecson père à l'âge de 3 ans, Baloji réussit un albumdont la force doit beaucoup à la singularité de sonregard, équidistant de deux mondes. Cette luciditéimplacable se retrouve notamment en clôture du disque,pour confronter l'Afrique à ses responsabilités(« Même si la Chine a bon dos/Reproduire les schémascoloniaux/Ca ne vous rendra pas le Congo »),tout en fustigeant le néocolonialisme humanitaire decertaines ONG : « Les nouveaux missionnaires fontde leurs Emmaus des petites et moyennes entreprisesqui ne connaissent pas la crise ».Entre ces deux pôles, Baloji aura excellé dansl'adéquation de la forme et du fond, multiplié les genresen fonction des thèmes et joint ses forces à unepléiade d'invités de Kinshasa. Le mutuashi, musiquedouce et ondulante, lui permet d'évoquer, avec leconcours du Chœur de la Grâce, la séparation si jeunede sa mère (De L'autre Côté de la Mère) ; questionnementidentitaire (« Ceux qui m'appellent frères sontdes étrangers ») sur Tshena Ndekela, avec le renfortde la fanfare la Confiance ; afro-funk pour transcenderl'ennui du quotidien (« C'est la folie des glandeurs »sur La Petite Espèce) ; déboires administratifs et skaafricanisé pour A L'Heure d'Eté-Saison Sèche. Véritabletour de force, Nazongi Ndako se divise en deuxparties, l'une soul anticipant le retour au pays, avecla voix d'Amp Fiddler, autour d'un thème de MarvinGaye ; l'autre confrontant cette vision à la réalité,avec tempo frénétique emportant un tourbillon deguitares, balafons et likembés (signés Konono N°1).Baloji imprime son identité dans chacun des universqu'il traverse, les réinvente et lui avec. En authentiquesorcier.Bertrand Bouardn°42 Sept/Oct 2010


26ThÉMAPhoto tirée du livre Le manuel pratique du Bentô © Patrick Aufauvren°42 Sept/Oct 2010


Théma / à table !27À table !Qu'est-ce qu'on mange aujourd'hui ?Ni la même chose qu'hier, ni de la même façon que demain.Pas non plus pour les mêmes raisons ici que là-bas.Suivant les époques et les cultures, le contenu de nos écuelles, assiettes, bols ougamelles change. Pour des raisons de goûts, de croyances, de modes ou de besoins,les hommes ont rarement les mêmes manières de se mettre à table. Mais, quand ellene manque pas, la nourriture peut rapprocher, permettre un moment de partage et dedécouverte mutuelle. Art, langage, source d'équilibre physique et spirituel ou nécessitéabsolue, la nourriture, c’est tout cela à la fois.Mis en appétit par la copieuse programmation Ivresse du Festival d'Ile de France (voirpage 62), nous vous avons concocté le roboratif menu suivant.l En apéritif tour d'horizon des différents sens du repas au fil des époques, des lieux, des cultures- page 28.l Hors d’œuvre et entrée suivent. La société moderne se cherche de nouvelles saveurs, ce à quoitente de répondre la mode du Fooding (page 30). Pour pallier à la malbouffe, des chefs démontrentavec la Speed Food que l’on peut concocter de bons plats en deux temps trois mouvements, oupresque (page 31).l Le plat principal est chinois et illustre l’idée selon laquelle se nourrir, c’est aussi se soigner.Reportage au pays du Milieu - page 32.l Nous levons ensuite deux toasts, l’un à base de cachaça, l’alcool national brésilien (page 33), lesecond de la mythique absinthe, récemment sortie du purgatoire où les ligues de vertus et certainslobbies l’avaient enfermée - page 33.l En dessert, de la fantaisie : préparations à bases d’insectes et de fleurs, avec recettes - pages34 et 35.l Pour la digestion, rien de tel qu’une cérémonie du thé avec tout le raffinement de la préparationjaponaise - page 36.l Pour ceux tentés par plus d’ivresse, présentation de celle, subtilement spirituelle, des Soufis -page 37.l Lors du cocktail dansant qui suit, musiciens et cuisiniers se mettent en quatre sur leurs fourneauxet leurs platines pour faire danser les saveurs - page 38.l Après pareille bacchanale, une phase de repos s’impose, histoire de déguster quelques bonsouvrages ou visiter de bonnes adresses internet - page 39.Bon appétit !n°42 Sept/Oct 2010


Théma / à table !Apéritif33 29Pourtant, on ne se met pas « à table » partout et cette conceptiontrès française du partage est une hérésie pour d’autrescultures, pour lesquelles il est bien mesquin de se retrouveravec chacun son assiette, ses couverts et son verre. En Afriquede l’Ouest, par exemple, on partage un plat commun etcopieux, à même le sol, en mangeant de la main droite. Lemaître de maison dispose les morceaux de viande ou de légumesdans la part de l’invité, quitte à en priver son entourage.Le repas symbolise avant tout l’hospitalité de la famille. Ainsi,quand le président Abdoulaye Wade a expliqué qu’il voulaitponctionner trois jours de salaire aux Sénégalais du secteurpublic et privé, pour aider les « frères » d’Haïti après le séismede janvier dernier, il a simplement argumenté : « Au Sénégal, ilest fréquent de voir des familles donner leur repas ou leur lit àdes visiteurs ».Nourrir le corps et l’espritEn Asie, les aliments renferment aussi des vertus symboliquesfortes pour le corps et l’esprit, et l’art culinaire y recèleavec finesse les codes de la société. Au pays du soleil levant,la multiplicité de mets résume tout le raffinement de la cultureet du rapport à l’autre. La relation entre fonctionnalitéet beauté au quotidien est une thématique récurrente danstous les aspects de la culture japonaise. Ainsi, le repas nipponse déguste d’abord avec les yeux. Chaque récipient estchoisi en fonction de son contenant : couleur, forme, matièredoivent contraster avec le mets présenté et le mettre envaleur. En 1985, le réalisateur Juzo Itami ose ironiser sur larelation intime que les Japonais entretiennent avec leur nourriture.Premier « western-nouilles », (en référence au westernspaghetti),Tampopo (« Fleur de Pissenlit »), raconte l’histoired’une jeune femme qui tient une échoppe de nouilles dans unquartier populaire de Tokyo. Un beau jour, l’avis d’un visiteurde passage est sans appel : ses nouilles sont sans saveur.Elle part alors en quête de la soupe absolue et les histoiress’enchaînent, toutes plus incroyables les unes que les autres.Le film, bourré de références au film muet, érotique ou à la comédiemusicale a été un énorme succès au Japon et est devenuBentô pour les enfants / Poisson-chat © Patrick Aufauvreun film culte pour les « japonisants »… Une scène d’anthologieparmi d’autres : un vieux maître de l’art de déguster des nouillesapprend à son élève comment s’y prendre : il faut d’abord caresserle bouillon du regard, puis avec ses baguettes, déplacerle porc sur la gauche en lui disant « à bientôt », chérir les champignons,puis enfin attaquer les nouilles, en fixant le porc avectendresse. Savoureux !SacréDans toutes les cultures du monde, le repas a la vertu derassembler les individus autour d’aliments, de codes et desymboles, mais la nourriture est aussi fondamentalement spirituelle.Au cœur des religions, l’alimentation rythme la pratiquede la foi : le plaisir de la cuisine partagée mais aussi lesinterdits alimentaires fondent la culture juive. Dans l’Islam, leRamadan, période de jeûne et d’abstinence, constitue l’undes cinq piliers de la religion musulmane. Au coucher du soleil,les fidèles peuvent rompre le jeûne et éveiller leurs papilles,avec des mets exceptionnels et riches, gras et sucrés.Dans la religion catholique, le rituel de la communion, où l’onboit et mange « le sang et le corps du Christ », scelle la foientre les croyants.Mais si la nourriture réunit les vivants, elle fait aussi le lienentre le visible et l’invisible. Dans de nombreuses sociétés,elle est un cadeau des vivants aux ancêtres ou aux divinités.A la Réunion, une tradition héritée de Madagascar persiste.Les enfants de Granmoun Lélé, le grand maître du maloyaréunionnais, déposent dans le boucan, le temple dédié auxancêtres, les plats et les boissons que leur père aimait deson vivant, pour son bien-être dans l’au-delà. Une traditiond’offrande partagée par le vodun béninois, le vaudou haïtien,le candomblé brésilien et les religions hindoues d’Asie dusud-est, où l’on offre des mets aux divinités, le plus souventen musique.* Tiré de « De la parole comme d'une molécule »Entretiens avec Emile Noël de Boris Cyrulnik (Seuil)Sens à emporterEn Occident les gamelles chauffantes, lunch boxes et autres paniersde pique nique sont utilisés pour leurs performances thermiqueset/ou leur côté pratique. Il en va tout autrement de leur équivalentjaponais, le bentô.A sa création au 12 ème siècle, le bentô (« panier repas ») estavant tout un objet usuel. Au fil du temps, il rencontre le souciconstant des Japonais d’harmonisation des éléments de leur viequotidienne. Aujourd’hui, cette petite boîte compartimentée quechaque matin la majorité des ouvriers et écoliers emporte aveceux contient un déjeuner varié, complet et méticuleusement étudiépour combler l’équilibre alimentaire et le plaisir des yeux. Par lafinesse d’assemblage des formes et de couleurs des élémentsqui le composent, certains bentôs s’apparentent à de véritablesœuvres d’art et peuvent aussi délivrer un message personnel à leurdestinataire. L’engouement occidental pour le bentô se ressent aussibien dans les rayons des librairies, où les ouvrages se multiplient,que sur la toile avec pléthore de sites et de forums sur le sujet.Itadakimasu (« bon appétit ») ! B.M.Le Manuel pratique du Bentô paru en début d’année aux éditionsAgnès Viénot est un point de départ simple et ludique illustré par desrecettes du jeune chef Hissa Takeuchi et des photographies de PatrickAufauvre.www.obento.fr/n°42 Sept/Oct 2010


32 Mondomix.comPlat principalCuistots au repos dans un « centre culturel » à PékinLe Yin et le Yangà la baguette« Tout ce qui a quatre pattes se mange, sauf les tables », énonce un dicton chinois.Reportage dans l’Empire du Milieu, baguettes en main, pour vérifier l’adage et tester lestrésors d’une gastronomie en harmonie avec le corps et l’esprit.Texte et Photographies Anne-Laure Lemancel« De la rate au foie,de la tête aux poumons,l’alimentation prévient les maux »Dans le dédale grouillant du marché nocturne Donghuamen, àdeux pas des néons bigarrés de l’énorme artère commercialeWangfujing, à Pékin, des colonies de scorpions éventrés gigotenten enfilade sur des bâtons. A leurs côtés, des brochettesd’hippocampes, mille-pattes, scarabées, étoiles de mer, araignéeset autres aliens comestibles charment esprits téméraireset estomacs audacieux. Nous autres, pauvres touristes, reculonsd’horreur, au diapason du commun des Chinois, plus alertesde l’objectif que des papilles.Manger du chien ?Dans le Sud du pays, se consomment pourtant ces bestioles,dont des serpents, selon un rituel précis : un verrerouge (le cœur et le sang) puis un vert (sa bile), avant de dégusterl’animal. Mais à Pékin, l’idée effraie. Comme celle demanger du chien. Au gré des tables, nous tentons de nousrepaître du « meilleur ami de l’homme ». En vain : un platd’hiver, plus coréen et mongol que chinois, dont l’évocationsuscite des haut-le-cœur indignés. Début 2010, le gouvernementa même esquissé une loi pour empêcher l’ingestiond’un met devenu « de compagnie ». Autre spécialité culinaireatypique de Beijing : dans une rue cossue du districtDongcheng, l’alerte Zheng Wang dirige de père en fils len°42 Sept/Oct 2010


Théma / à table !Plat principal33restaurant Guo-li-zhuang. Au menu ? Des pénis (de chien, deyak, de cheval, d’âne, de serpent, de mouton, de cerf, de phoque)concoctés dans le plus grand secret, gourmandises auxprix coquets réservées à une élite fortunée, et gâtée : cure dejouvence pour madame, gain de virilité pour monsieur. Pour autant,ces babioles, « griffes de tigre et bile d’ours... relèvent dufolklore », selon Lokmane Benaicha, étudiant français en médecinechinoise à Pékin. Car en Chine, nourriture et gastronomieconstituent des affaires sérieuses, au cœur des conversations,sur les écrans de télévision... Et malgré une escapade glacéevanille/cœur petits pois pour le plaisir, j’ai moi-même considérémes baguettes avec la plus grande solennité. Car pour le gourmanden déroute, la Chine constitue un paradis. Une manne.Une expérience intense.Santé et symbolesPékin regorge ainsi de plus de 50 000 restaurants, du troquetà l’établissement étoilé, aux riches spécialités de canard laqué.Pour des prix souvent extrêmement modiques, la sortieculinaire remplace, en Chine, nos traditionnels rendez-vousdans les bars. A table, les nombreux mets se partagent, triéssur le volet au fil de tentations interminables. Pas une seulefois en trois semaines, il nous a été donné de savourer lemême plat. Et puis, à Pékin, on mange « régional » : un tourde Chine sensuel, des épinards/cacahuètes du Sichuan auxpetits « hamburgers farcis » du Shanxi, des légumes marinésdu Hunan au kebab-nan de la province musulmane Xinjiang...Dans les ruelles vétustes du paisible Hutong Nanmencang,vieux quartier préservé, le chef Guo Shèng Jiang dirige ainsiun établissement du Yunnan. Carte en main, il explique les 26saveurs de sa région, relatives à chacune de ses minoritésethniques. Ici, tous les produits, organiques, naturels, sauvages,résultent de la cueillette, et de l’observation avisée de lanature. De chacune de ses fleurs, racines, il connaît l’histoireet les vertus thérapeutiques : ainsi de ce champignon SongRong, remède contre le cancer, célèbre dans le monde entier,et seul rescapé de la bombe nucléaire d’Hiroshima ; ou encorecette plante, apanage des seigneurs, connue pour sesbienfaits sur la peau et les muscles. De la rate au foie, dela tête aux poumons, l’alimentation prévient les maux : despréoccupations sanitaires au cœur de l’assiette partagées parle quidam, malgré la prolifération de la malbouffe mondialisée.Car depuis plus de 3000 ans, la médecine chinoise se fondesur l’expérience pour établir un code symbolique – et poétique– de son alimentation. A chaque élément (métal, eau,feu, bois, terre) correspond une couleur (blanc, noir, rouge,vert, jaune), un organe (poumons, rein, cœur, foie, rate), untempérament, une saveur, une saison, une direction... Par ailleurs,les aliments Yin (froids) et Yang (chauds), sans rapportavec leur température réelle, mais en relation avec l’énergiePréparation de serpent au marché nocturne de Donghuamen (Pékin)qu’ils produisent dans le corps, permettent de rééquilibrer lesnatures en fonction de leur métabolisme, de leur caractère oudu climat. Les bases d’une nourriture saine reposent doncsur un savant équilibre entre couleurs, saveurs, Yin et Yang, àréajuster en fonction d’éventuels dysfonctionnements. Enfin,le symbolisme se niche aussi dans ses superstitions : les raviolis,comme le poisson, apporteraient richesse et prospérité.Testé. Reste à approuver...Le riz, la vieRiz cuit dans du bambouElément indispensable de la cuisine chinoise, le riz (dont le vocable« fane » signifie aussi « manger ») reste l’élément principal de lanutrition. Plus qu’un aliment, il représente la « vie » même. Ainsi,en Chine, le caractère Qi, l’énergie, le souffle, précepte fondateurprésent dans « Tai Chi Chuan », « Qi Gong », et autres arts martiaux,désigne à l’origine la vapeur qui s’exhale du bol de riz pendant lacuisson. Ciel, terre, partie éthérée et nourriture matérielle, conjuguentainsi le Yin et le Yang dans l’harmonie suprême. Tel le riz, le « Qi »chinois s’assimile ainsi au « pain quotidien ».Alln°42 Sept/Oct 2010


34Mondomix.comSaúde !ordre, progrèset cachaça« Venir ici sans boire un coup,c’est comme aller au Vaticansans voir le pape ! »José Sergio, propriétaire de la Boa VistaLa route de la cachaça, breuvage national, invite à découvrirun Brésil en version originale, avec paysages magnifiques,villes historiques et personnalités emblématiques.Un parcours qui débute au sud de l’Etat de Rio de Janeiropour se terminer au nord du Minas Gerais.Texte Jacques Denis Photographie Pierre Mérimée« Tout peut manquer : riz, haricot…même l’amour. Mais la seule chosedont je ne peux me défaire, c’est lamaudite cachaça ! », prédit une marchinhade carnaval. Et c’est vrai que pourtout Brésilien, la cachaça reste l’un desemblèmes nationaux, un élément structurantet permanent comme « le sucrefut la colonne vertébrale du pays », selonle sociologue Gilberto Freyre. Despremières heures de la colonisation àl’indépendance du pays au début du18 ème siècle, cette boisson fut présenteà toutes les étapes de la constructionde l’identité du pays-continent.Eau-de-vie artisanaleLe berceau de la cachaça, c’est Paraty,petite cité coloniale sur la côte Atlantique.Il y aurait eu jusque 360 alambicsdans cette région bien « arrosée ». Iln’en reste plus qu’une dizaine… officiellement.C’est en tout cas le point dedépart d’une route, parallèle à l’ancienChemin royal, qui mène, après 2 000kilomètres, à la « capitale mondiale» de la cachaça, Salinas. Entre cesdeux bornes, un même goût pour cetteeau-de-vie artisanale, qu’elle soit pure,c’est à dire blanche, ou vieillie dans desfûts de bois : balsamo, amburana, ipeamarelo, garapa… Entre-temps, c’estun autre Brésil qui défile, de la MataAtlantica, l’immense zone forestière quilonge la côte, aux vallons verdoyantset chemins escarpés du sud du MinasGerais. Et puis plus au nord, non loindu sertão, le Brésil des montagnes depierre, entrecoupées de vastes plainesséchées par le soleil. Plus on monte,plus les propriétés grandissent, plus lacachaça monte en degré, sans perdresa saveur originale.Loin des cartes postalesLa route de la cachaça croise cellesde simples coupeurs de cannes ou degrands propriétaires terriens. Tous racontentce savoir-faire qui a fait du MinasGerais le sanctuaire de la cachaça« de qualité ». Une activité qui reste unhobby, voire un revenu d’appoint, pourla plupart. Un peu comme dans le Calvadosil y a cinquante ans. Cet état plusvaste que la France compterait jusqu’à10 000 alambics et autant de secretsde distillation ! Des clandestins, des officiels,des appellations contrôlées, deslabels de qualité… A chaque fois, il fautprendre des routes de traverse pour yaccéder, et chemin faisant pénétrer aucœur de l’âme de ce Brésil si loin descartes postales de Bahia. Ce Brésil-là,c’est celui du far-west, des gauchoset des chevaux, des baroques égliseset des chavariz, ces fontaines dans leplus pur style colonial… La plupart desproducteurs se font un plaisir de vousrecevoir. « Venir ici sans boire un coup,c’est comme aller au Vatican sans voirle pape ! », ose José Sergio, propriétairede la Boa Vista, la cachaça tirée duplus vieil alambique du terroir, à CoronelXavier-Chaves. Nul doute que la routede la cachaça invite à un voyage inédit,à consommer sans modération.n°42 Sept/Oct 2010


Théma / à table !Santé !35« Ils buvaient de l'absinthecomme l'on boit de l'eau,l'un c'était Verlaine, l'autrec'était Rimbaud » Barbara« Dans le Doubs, absinthe-toi »proverbe franc-comtoisInterdite pendant desdécennies, l'absinthe a étéde nouveau autorisée à laconsommation en Europeen 1988. Retour sur l'histoirede la « fée verte », boissonmythique et sulfureuse,compagne des écrivainscomme des bougnatsou des rockers.Texte Jean Pierre Bruneau Photographie D.R.Le retourde la fée verteBannie au début de la Grande Guerre,l'absinthe a été de nouveau autorisée dansl'Union européenne en 1988. Hypocrisiebien française, cette boisson diabolisée etmythifiée à l'extrême n'a droit chez nousqu'à l'appellation « spiritueux aux plantesd'absinthe », mais il s'agit bel et bien del'absinthe, un alcool titrant de 60 à 90 °,très cher (entre 70 et 100 euros le litre)donc forcément élitiste et faisant l'objetd'un véritable culte, limite sectaire, chezses thuriféraires, appelés absintheurs ouartémisophiles.Le rituel de l'heure verteLa « fée verte » est distillée à partir de plantesaromatiques qui poussent dans le Jura(dont l'anis, le fenouil, l'armoise, la mélisseet bien sûr l'artemisia absinthium). Ellefut inventée dans le Val-de-Travers suisseà la fin du 18 eme siècle et industrialisée àquelques kilomètres de là, à Pontarlierdans le Doubs, en particulier chez PernodFils dont l'usine en produisait 30 000 litrespar jour vers 1900. A cette époque, la vogueest aux boissons apéritives amères.L'absinthe fait fureur, les terrasses de cafécélèbrent de 5 à 7 « l'heure verte » et sonfascinant rituel : sur les rebords du verrecontenant l'absinthe, on pose une cuillèreplate perforée contenant un carré de sucresur lequel on verse de l'eau très fraîche,goutte à goutte.Versions frelatéesLes artistes lui attribuent la vertu d'améliorerla circulation du sang, donc l'imagination.« A la fin du 19 eme siècle,des études médicales(aujourd'hui controversées)estiment quel'absinthe attaque lesystème nerveux »Oscar Wilde décrit ainsi ses effets : « Aprèsun premier verre on perçoit la réalité commeon souhaite qu'elle devienne, au deuxièmecette réalité s'estompe mais après elle vousretombe dessus, et là c'est horrible. » Dansles quartiers populaires, l'engouement pourcette boisson est tel que bougnats et bouilleursde cru en proposent des versionsfrelatées, moins chères que le vin, infâmesconcoctions colorées avec du sulfate dezinc, de cuivre ou de chlorure d'antimoine.C'est l'Assommoir de Zola. Des étudesmédicales (aujourd'hui controversées) estimentque la thuyone, une molécule contenuedans l'artemisia absinthium attaque lesystème nerveux. L'absinthe rend fou clamentles ligues de tempérance et « fait del'homme une bête féroce, de la femme unemartyre, de l'enfant un dégénéré, elle ruinela famille et l'avenir du pays. » Les pinardierss'en mêlent, manifestent, scandent «l'absinthe perd nos fils, la mère Picon nousles rendra ». L'interdiction gagne la plupartdes pays d'Europe et les Etats-Unis.Aujourd'hui absoute, l'absinthe produitesous une forme moins agressive entameune nouvelle carrière. Quelques dizainesde distilleurs artisanaux (en France et enSuisse essentiellement) la confectionnent.La moitié de la production part sur le marchénord-américain qui l'a de nouveau autoriséeen 2004, en partie grâce aux effortsdu chimiste louisianais Ted Breaux qui sesouvient que la Nouvelle-Orléans, cité detous les plaisirs, fut, jusqu'à la prohibition,un lieu particulièrement accueillant pour lafée verte. Autre Américain artémisophile,le rocker Marilyn Manson a découvert lebreuvage dans le sud de la France et depuiscréé sa propre marque, Mansinthe,qu'il fait distiller dans le canton de Berne.n Recommandépar les absintheurs :en boire :• Bar Cantada II, 13 rue Moret, Paris 11 eme ,bar gothique du quartier Oberkampf,meilleurs choix et conseils à Paris.• Absinthe Bar, 25 cours Masséna, Antibes.Ambiance années folles dans le sous-sol du marchéprovençal de la vieille ville.• Old Absinthe House, 240 rue Bourbon,la Nouvelle Orléans. Lieu historique où complotaJean Lafitte, au cœur du Vieux Carré.en acheter :(et toute la paraphernalie qui va avec)www.vertdabsinthe.coms'informer :www.l'heureverte.comn°42 Sept/Oct 2010


Théma / à table !Dessert37Touches de couleurs sur unetable, les fleurs agrémententaussi les plats qu’ellesponctuent de mille saveurs.Texte Squaaly Photographie D.R.Producteur à Aubagne, Philippe Makeefcultive ses fleurs avec un soin tout particulier(« sans pesticides, ni engrais chimiques») et les ramasse à la main une à une.Il faut dire que ce fleuriste des marchés nese contente pas de réaliser de magnifiquesbouquets champêtres, il propose aussicertaines variétés à la vente en barquette(plastique, hélas) pour venir agrémenter nosassiettes. « Ce n’est pas que de la décoration,ça parfume, agrémente un plat » expliquePhilippe Makeef. « C’est plus évident àMarseille qu’à Aubagne, ajoute-t-il. Histoirede mentalité ! ».Tagètes et pétalesde capucinesLes fleurs font pourtant bien partie de notrealimentation, à commencer par les chouxfleurs,cardes et autres artichauts. Alors,pourquoi ne pas consommer des tagètesagrumes ou anisées en accompagnementde salades de fruits ou de tomates,de l’hémérocalle en beignets, de l’achilléepour parfumer une viande ou un gibier, desfeuilles de stevia pour remplacer le sucre oudes pétales de capucines ou de cosmosen salade ? « Tout est bon dans le cosmos,explique ce fils et petit-fils de producteurs.On peut écraser le cœur de cette fleur de lafamille des marguerites pour rehausser unevinaigrette. Certaines variétés ont mêmel’odeur du cacao. Le tournesol, quand il estencore en bouton, peut être cuit à la vapeuret mangé comme un artichaut. »Le Mille FleursC’est sa grand-mère ukrainienne qui lui adonné le goût des roses. « J’utilise sa recettepour mon confit de pétales de rose deDamas. Elles fleurissent 15 jours seulementdans l’année. Il faut les ramasser le matin etles préparer avec un jus de citron. » confiet-ildu bout des lèvres. Parmi ces clients,on compte quelques restaurateurs dontLionel Villaron, le « toqué » en chef du MilleFleurs, un traiteur marseillais qui a pignonsur rue dans les environs du Vieux Port etune carte particulièrement osée. On peuty déguster brochettes de Saint-Jacquesau safran et tagètes fraiches, moussesde fromage de chèvre et cosmos sur paind’épices, cakes au kumkat et mousse deDes fleursau déjeuner ?framboise à la violette, mousses de manguesà la rose sur meringue au curcuma…« Philippe Makeef est un cultivateur passionnéet passionnant, estime Lionel Villaron,« Tout est bon dansle cosmos »Philippe Makeefun véritable agriculteur qui préserve la qualitéde ses fleurs plutôt que de succomberaux sirènes de la grosse production. »n Plus d’infos• Retrouvez Philippe Makeef tous les samedi etdimanche matin à Aubagne et le mercredi matin surle Cours Julien à Marseille. Tel : 04 42 32 00 71• Le Mille Fleurs – 3, rue de Breteuil –13001 Marseille. Tel : 04 91 54 34 87www.lemillefleurs.comBrochette de Saint-Jacquesau safranet tagètes fraichesselon Lionel VillaronCompter trois belles noixde Saint-Jacques parbrochette.Faire mariner pendant24 heures les noix deSaint-Jacques dans unlitre d’eau additionné d’1gramme de safran (2 litresd’eau pour 2 grammes desafran, si besoin).Enfiler les noix de St-Jacques sur des pics enbois et piquer chaque noix d’une fleur de tagèteagrume « pour faire parler les bavards » etembaumer vos papilles gustatives.Servir accompagné d’un mesclun de saladearrosé d’une sauce citron, huile d’olive, sel,poivre dans laquelle vous avez ajouté unegousse de vanille fendue en deux que vous avezpréalablement raclée pour en exciter les aromes.n°42 Sept/Oct 2010


38Mondomix.comBoisson chaudeUn bolde ZenAu Japon, la cérémonie du thé est au cœur de la vie sociale, artistique et spirituelle.Le « Cha no yu » agit comme un marqueur culturel fondamental et une expression dubouddhisme Zen. Texte Pierre Cuny Photographie D.R.Quoi de mieux pour prendre ses distancesavec une vie stressante et agitéequ'une réunion entre amis pourboire du thé ? Certaines demeurespossèdent à cet effet une maison duthé, petit bâtiment conçu avec un soinextrême, où l'on prépare le matcha, unthé vert en poudre mélangé à de l'eauchaude. Même le monde de l'entrepriseaccueille dans des espaces dédiés lesemployés désireux de participer à cettecérémonie centrale dans la sociétéjaponaise.DépouillementLe déroulement d'une cérémonie est lesuivant. Une personne accueille ses invitésen silence. Ceux-ci s'assoient surles tatamis et dégustent une collationlégère tandis que leur hôte prépare lebrasier sur lequel va chauffer l'eau. Lapetite assemblée contemple les bols defacture simple et dépouillée, le vase enbambou et la composition florale délicatedisposée par l'hôte à cette occasion.Celui-ci va accomplir une gestuelle extrêmementprécise pour utiliser les ustensilesindispensables à la préparationdu thé. Il verse trois cuillères de matchadans un bol, y ajoute une louche d'eauchaude et fouette le tout à l'aide d'unobjet en osier jusqu'à obtenir la consistanced'une purée de poix plus oumoins diluée. Jamais totalement rempli,le bol est alors prêt. Offert à un premierconvive, ce dernier s'incline, boit une« Au cours de ce temps privilégié de partage,les uns et les autres cherchent la beautéqui se cache dans les choses modestes et austères »gorgée, glisse un petit compliment, essuiele bol, puis le tourne avant de leprésenter à son voisin. Au cours de cetemps privilégié de partage, les uns etles autres dégustent l'instant même, etcherchent la beauté qui se cache dansles choses modestes et austères.De la Chine au JaponCette approche spirituelle inspirée parle Zen a été formalisée au 16 ème sièclepar le moine Sen Rikyû qui l'a nomméeChado, la voie du thé. Celle-ci comportequatre caractères : Wa, l'harmonie,Kei, le respect et la gratitude, Sei, lapureté, l'honnêteté du cœur, et Jaku,la tranquillité, la paix du cœur en esprit.Originellement, le thé vert en poudre,son mode de préparation et deconsommation provenaient de Chine.Lu Yu, au 8 ème siècle, est l'auteur del'ouvrage fondateur, le Cha Jing, danslequel il a formulé le code du thé. « LuYu fut le premier chantre du thé, écritOkakura Kakuzô dans son précieux Lelivre du thé (1906). Le symbolisme panthéisted'alors invitait l'homme à saisirdans le particulier le reflet de l'universel.En vrai poète, Lu Yu perçut dans le serviceà thé l'ordre et l'harmonie qui résidenten toutes choses ». Cette visiontaoïste chinoise a été mise en pratiquepar le Zen au Japon où la cérémoniedu thé marque son empreinte surl'architecture, la céramique, la peinture,l'art paysager et floral, la calligraphie, ladanse et le théâtre. Une culture majeurenée du calme d'un bol de thé.n Le Festival d’Ile de France organise le 26septembre à 11h à Sèvres, une cérémonie du Théà l’issue d’un Salon de Musique intitulé Le Maîtrede Thé de Yasushi Inouewww.festival-idf.frn Des cérémonies du thé sont organisées à laMaison de la Culture du Japon à Paris.www.mcjp.fr/n Bibliographie:Le livre du thé Okakura Kakuzô(Philippe Picquier)Le livre de l'amateur de thé Sabine Yi, JacquesJumeau-Lafond, Michel Walsh (Robert Laffont)n°42 Sept/Oct 2010


Théma / à table !Ivresse39Courant mystique de l’Islamvieux de douze siècles,le soufisme aspire à assouvirla faim et la soif spirituelledu croyant. Jusqu'à lui faireatteindre l'ivresse ultime.Texte Jean Louis Mingalon Photographie B.M.Soufisme,la faim de DieuDans l'Islam, certains croyants espèrentrencontrer Dieu au Paradis grâce à une pratiquescrupuleuse des préceptes religieux.D’autres, les mystiques, qui dans l’Histoireont vite pris le nom de soufis, tentent dèsl’ici-bas de vivre une expérience d’unionavec Dieu. Une sorte de connaissance directedu divin, immédiate, qui serait du domainedu sensible et non du mental, moinsde l’esprit que du cœur auquel les soufisattribuent d’ailleurs un « œil ».Voyage intérieurProgressant par étapes et passant par diversesformes de dévotion, les soufis, initiéspar un maître spirituel, le shaykh, découvrentméditation, invocation répétitive (zikr)individuelle ou collective, à voix haute ouen silence, audition spirituelle conduisantsouvent à la danse comme chez les dervichesturcs (samâ), retraite, pèlerinagesur le tombeau des saints soufis. Ce voyageintérieur entrepris par le disciple soufiappartient naturellement au domaine del’indicible, là où le regard occidental y voitun peu schématiquement de la transe oude l’extase.« l’annihilation de l’egoest la conditionnécessaire à« l’ingestion » du divin »ingestion du divinPour autant, la poésie mystique, avec lesecours de la métaphore, a pu, depuisdes siècles, rendre compte à sa manièrede cette « faim » et de cette « soif » du divin,pouvant conduire à la fameuse ivresse,qu’elle soit glorifiée ou au contraire écartéeau profit du calme et de la sobriété. Le parallèleentre le vocabulaire des nourrituresterrestres et spirituelles parcourt ainsi toutle champ du possible, laissant entendreen permanence que l’annihilation de l’egoest la condition nécessaire et suffisantepermettant « l’ingestion » du divin. Demême, c’est à la « taverne » que l’amourdivin est servi par le maître à l’initié commeune boisson au milieu d’autres breuvagesplus profanes, sans que l’on sacheavec certitude si le plus important dans lamontée de l’ivresse est le degré d’alcoolou la force des regards. « Quelqu’un m’afait boire au gobelet de son regard », ditun ghazal (chant d'amour mystique), tandisqu’ailleurs il est écrit que « l’alcool del’Unité divine ne se boit pas dans un verre,il se boit dans les yeux de l’Aimé ».n Plus d’infos• Le Soufisme, de Thierry Zarcone (DécouvertesGallimard, 2009).Le Soufisme, d’Eric Geoffroy (Fayard, 2003)n Pour ÉCOUTERPakistan :• Nusrat Fateh Ali Khan(Ocora, Network, Realworld, Long Distance)Turquie :• Kudsi Erguner Ney (Arion, Al Sur)• Musiques de confréries(Arion, Ocora, Inédit, AIMP-VDE Gallo)Syrie :• Sheikh Hamza Shakkur, Sheikh Habboush,les deux avec l’ensemble Al Kindi(Chant du monde)Iran :• Ali Reza Ghorbani Les Chants Brûlés(Accords Croisés/Harmonia Mundi)• Ostad Elahi, Chant et Tanbur (Chant du monde)Tunisie :• Chants Soufis (IMA)Maroc :• Festival Gnawa (Nocturne).n En concert• "Ivresses" - Poésies chantées d'Omar Khayyamavec Ali Reza Ghorbani et Dorsaf Hamdanile 4 octobre Théâtre de l'Atelier, Paris 18 e


40Mondomix.comCocktail dansantFunkyKitchenParce que batterie de cuisine, mandoline, piano, opéra, mix aux petits oignons, parceque tous les grands toqués ne sont pas en cuisine mais aussi sur scène ou en studio,focus sur ce qui rapproche, au delà du vocabulaire, gastronomie et musique, et sur ceuxqui ravissent nos palais et oreilles en assaisonnant, cuisinant, mixant ces deux arts.Texte Squaaly Photographie D.R.« Quand on parle de bouffe, tout le mondeest content, explique Yvan Cadiou,chef en cuisine et sur le petit écran (1) ,arrangeur de cuisine populaire. Avec lamusique, la cuisine est un des rares artsuniversels et essentiels au quotidien detous ». Avec Antoine Germain, un producteuret batteur phocéen, il mitonneun Cake à la Banane Groove (à entendresur son site). « C’est une recette miseen musique, une production électroniqueoriginale pour laquelle nous avonsaussi samplé les sons de la préparation,avoue ce prêcheur du goût qui affectionneautant les Doors que Mory Kanté, MilesDavis que Ravi Shankar. Nous avonsquatorze titres/recettes sur le feu, avisaux amateurs ».CooksoundConstat identique et même goût pourles plaisirs de la vie chez le marseillaisLaurent Kouby. Ce musicien, producteur,gastronome passionné et créateurd’évènements a eu l’idée de réunir auprintemps 2008, 13 recettes provençaleset 13 morceaux de musique réaliséspar la fine fleur de la création électroniquelocale (David Walters, David Carretta…).« Quand on cuisine, on cherche lamusique qui va avec » explique celui quia poussé le bouchon encore plus loinen déclinant ce concept en soirées thématiquesqu’il pimente de cinéma. Il aainsi réuni au Variétés,le dernier cinéma dela Canebière, ChristianErnst, un chef marseillais,et une poignéede DJ's autourd'une projection de LaGrande Bouffe de Marco Ferreri, puis amitonné des soirées consacrées au Japon,à la mal’bouffe ou à Bollywood…Sa sixième Cooksound Party, la premièreen plein-air, aura lieu le 4 septembre àForcalquier en clôture de la semaine dessaveurs et senteurs (2) . Un deuxième livre/CD est attendu courant 2011.GastronomixC’est encore au Sud de la France qu’estné un projet liant musique et gastronomie.« C’était à La Chassagnette, un restaurantdes environs d’Arles » se souvientRémy Kolpa-Kopoul. Le célèbre connexionneurjournaliste et DJ (3) , y sonorisaitun repas pour une soixantaine de VIP's(MC Solaar, Jacques Higelin, Henry Chapier…).« C’est un autre boulot que defaire danser une salle. Là, tu cherches àaccompagner ce que mangent les convives,à exciter leur oreilles sans jamaistomber dans la carte postale façon musiqueprovençale sur pistou et tarentellepour tagliatelles, explique-t-il. D’ailleurs sije parle avec le chef, c’est juste pour savoirce qu’il écoute ». Durant l’été, RKK a« Quand on cuisine,on cherche la musique qui va avec »Laurent Couby, musicien et gastronomelevé le pied sur le mix, mais s’est tout demême réservé deux Gastronomix (à Arleset à Sète). En décembre, il devrait partirà la Réunion pour relever de ses mixesquelque rougail boucané et autre carispoulet. « C’est actuellement en discussionavec l’équipe du fooding », lâche-tilavant d’ajouter, « au moins là, tu ne tecouches pas à 4 du mat’ ! ».(1) Retrouvez Yvan Cadiou et sa Marseille CuisineConnection tous les vendredis après-midi sur France 2pour Comment ça va bien, l’émission présentée par StéphaneBern et au fil de Cuisine Nomade (Ed Gramond) sondernier livre de recettes.(2) Cooksound Party 6 : Hautes Provence/PiemontSaveurs et Senteurs, le 04/09/2010 de 18h à 1h du mat’au Couvent des Cordeliers à Forcalquier.Projection de Pain, Tulipes et Comédie (2000) de SilvioSoldini. Aux platines : Big Buddha.25 euros disponible sur réservation (www.laurentkouby.com/boutique ou à infos@cooksound.com)(3) Sa dernière compilation Elektropik#1 (Naïve)n www.yvancadiou.comn°42 Sept/Oct 2010


Théma / à table !Sieste41/ La fabuleusecuisine de laroute des épicesde Alain Serreset Vanessa Hié(Rue du Monde)La route des épices résonnecomme une promesse devoyage et d’aventure, deconvois cheminant entre deuxcaravansérails, sur les sentiersincertains de l’Orient. Des milliersde kilomètres parcouruspour faire parvenir jusqu’enEurope ces trésors gastronomiques épicés. Aujourd’hui encore,le voyage continue, dans nos assiettes et sur le boutde nos papilles, avec une impressionnante palette de recetteset de saveurs. Un panel d’alchimies gustatives que présente,de façon simple, La cuisine de la route des épices. Illustré degrands dessins colorés, le livre aborde, de manière ludiqueet historique, une foule de recettes de cuisine. Chaque pageest consacrée à une épice et présente une ou deux façonsde la cuisiner : la muscade, le safran, le poivre de Sichuan,le paprika ou le curry, à travers des plats comme le tatin demangue et cardamome, la crème brûlée de pamplemousse ausafran ou le sablé au parmesan et piment d’Espelette. Cerisesur le gâteau, l’histoire de chaque épice nous est contée autravers de personnages illustres et de légendes, dans ce livrequi émerveillera les enfants et leurs parents. Mathieu Jouenwww.saveurdumonde.netBien fichu et complet, saveurdumonde.net recense un nombreimpressionnant de recettes du monde entier. Classée par paysou région, chaque culture culinaire est présentée de manièreinstructive à l’aide de photos et d’une petite introduction. Lesite offre également la possibilité de sélectionner une recettenon plus par pays mais par produit, ce qui facilite les découvertes.Une ressource inépuisable pour les cuisiniers curieux.www.manger-insectes.frPour apprendre à cuire, assaisonner et manger un florilège depetites bestioles pleines de pattes. Art culinaire peu populaire,l’entomophagie est une pratique pourtant largement répandueet appréciée de par le monde. Un site original, qui fourmille derecettes très croquantes : sauté de coléoptères, scorpions auchocolat ou criquets cuits.www.cuisinedujapon.comDédié à l’art culinaire japonais, cuisinedujapon.com est unbon guide pour qui souhaite exporter ses papilles gustativesau Japon. Au menu : présentation des grands chefs nippons,guide des restaurants en vogue ou recettes détaillées. Quelquesfiches de présentation de produits typiques agrémententce tour d’horizon gastronomique du pays du soleil levant. Onapprend tout sur le kaki, le kuzu ou encore le bœuf de Kobé.M.J./ TEABOX - RITUELS ET MUSIQUES AUTOUR DU THEde Lydia Gautier(éditions La Martinière Styles ) Parution en octobreDe l'Inde au Brésil, de la Chine au Maroc et jusqu'au Mali... La spécialiste Lydia Gauthier nous emmèneprendre le thé dans dix pays avec un coffret regroupant dix livrets illustrés abordant l’histoire, les modesde préparation et le rôle social de ce rituel ancestral dans chacune des destinations. Une invitation auvoyage mise en musique sur un CD par son compagnon Olivier Kaba, l'un des propriétaires du studioBogolan à Bamako, qui s’est attelé à élaborer une bande son faite de prises acoustiques, regroupantdes musiciens des dix pays traversés. On retrouve pour l'escale malienne le griot Nampé Sadio auchant et le jeune fils de Toumani Diabaté, Sidiki (17 ans), à la kora, et plus loin le joueur de oud marocainMoulay Aït Si Ahmed ou la chanteuse brésilienne Christina Violle… Un voyage planant et apaisant endix étapes. J.B.


42Mondomix.comVoyage / Mustangvoyagele royaume oubliéEn mai 2010, le musicien Alain Arsac effectue un trek de douze jours dansles paysages lunaires du Mustang, un royaume tibétain oublié, rattaché au Népalet coincé contre la Chine. Récit en haute altitude.Texte et photographies Alain ArsacAprès un court vol depuis Katmandoudans un petit avion de Yéti Airlines, nousatterrissons à Jomsom, première « ville» du Mustang, située à 2300 mètresd’altitude. Accompagnés de Pasang,guide tibétain, et d'Asok, porteur népalais,nous rejoignons le village de Kagbeni.Aride, grise, désertique, la régionest d'une beauté saisissante. Sensationd’infini : rien, sauf des tonnes de caillouxet les Annapurnas dans notre dos !Monastères orangésA ce jour, seulement deux mille touristesont été autorisés à pénétrer dansce royaume de culture tibétaine, appartenantau Népal, mais vivant en totaleautarcie, coincé entre la Chine au nord,à l’est et à l’ouest, et le Népal au sud.Pas ou très peu d’électricité, une seuleroute empruntée par de rares camionsralliant la capitale Lo-Mantang, et certainschemins où seuls des hommes àpied peuvent passer. Parmi les singularités,de nombreux stupas (1) en pierre,terre ou briques, ainsi que des monastèresornés de rayures verticales noires,rouges, vertes, blanches et orangées.Au coucher du soleil, les villages donnentleur concert quotidien. Celui descloches portées par les chèvres qui rentrentaprès une journée passée dans lesrares pâturages environnants.Beurre de Yak ranceNous marchons des heures entrechaque étape dans cet infini lunaire.En contrebas, la Kali Gandaki,rivière sacrée venant du Tibet,serpente dans la vallée aux grottescreusées dans la terre ocre.C’est ici que la population venaitse réfugier, mais surtout que lesmoines cachaient les écritureset statuettes sacrées. A Samar,nous dormons dans une famillepeu commune : la femme est mariée àtoute une fratrie, selon la tradition locale.En guise de bienvenue, un concerthallucinant mêlant bruits de bouches,crissements de dents, superbes chantset danses locales !Elément surprenant : nous découvronsdans certains villages des statues imposantesd’hommes et de femmes auxsexes démesurés. Etranges totems dereligion animiste interdits au regard féminin.Il existe donc d’autres pratiques auMustang que le seul culte bouddhiste.« D’énormes trompettesjouées par les moines surla terrasse d’un templerésonnent dans cettehaute vallée multicolore,perdue et solitaire »Point le plus haut du trek, une passe à4400 mètres. Pasang se recueille et remercieles dieux de nous avoir amenéssans encombre jusqu’ici. Chaque matin,après le thé salé au beurre de Yak rance(aussi célèbre qu’imbuvable), nousprions avec lui pour tous les insectes dela journée que nous allons écraser sansn°42 Sept/Oct 2010


Voyage au Mustang43le savoir ! Passage par les mystiquesgrottes de Chungse, vieilles de plus dedeux mille ans et principal lieu de pèlerinagebouddhiste du royaume. Superbesstatues taillées dans la pierre, peinturesmulticolores, source d’eau sacrée, etvieil homme étrange gardant ce lieu historiquedepuis des décennies.Après Samar, les paysages changentradicalement. Les montagnes se parentde magnifique teintes grises, bleues,jaunes, orangées, rouges, vertes,noires… Les vallées ont laissé placeà d’immenses plateaux désertiques,peuplés de quelques ânes, mules etchèvres, mais aussi de petits chevaux,seul moyen de locomotion dans cetterégion. Des aigles royaux dansent audessus de nos têtes, un renard sauvagedes montagnes courre sur les rochers.Spectacle unique, stupéfiant et terriblementdéroutant, où se mêlent neige etsécheresse, pics vertigineux et hautsdéserts. Et ce vent, toujours violent,agressif et cassant, soufflant violemmentchaque jour à partir de midi.Couple royalEtape à Tsarang, ancienne capitale duroyaume. Nous visitons l’ancien palaisroyal, carré, d’une blancheur spectaculaire,surplombant la vallée commepour mieux veiller sur celle-ci. Aprèssept jours de montée, avec des dénivelésde plus de mille mètres et desprécipices dépassant parfois les deuxmille mètres, nous rejoignons l'actuellecapitale du peuple Lo. La mythique Lo-Manthang ne compte que 140 maisons,cernées d’une muraille qui ne laissententrer les habitants qu’à un seul endroit.Les rues sont étroites et bordéesde petites maisons à l’architecture im-muable : animaux au rez-de-chaussée,habitations au premier et bois séchésur les terrasses ornées des célèbresguirlandes de prières Tibétaines. C’estici que perdurent d’étranges coutumes,comme celle, pour éviter les crémations(le bois est très rare et donc cher), dedécouper les cadavres et d’en faire dévorerla chair par les vautours... Les osensuite brisés sont réduits en poudre etglissés dans de petits stupas en terrecuite que l’on dépose dans les murs àprière. Dans leur palais délabré, gardépar d’énormes cerbères au poil long,nous sommes reçus avec beaucoupde respect et d’hospitalité par le coupleroyal, descendant de la dynastie fondéepar Ame Pal en 1380.En attendant la mortLa nuit tombe. D’énormes trompettesjouées par les moines sur la terrassed’un temple résonnent dans cette hautevallée multicolore, perdue, solitaire,accueillante et angoissante. Une famillenous accueille. L’homme est vieux,fatigué. Son visage est creusé par desannées passées à descendre le sel duTibet vers la riche Pokhara. Récitantdes mantras (2) , les jambes en tailleur, ilnous dit attendre la mort sereinement,car ce n’est de toute façon pas lui quidécide…(1) Structure architecturale commémorant la mort deBouddha.(2) Mots ou phrases utilisés comme objet de méditation,prononcés à voix haute ou intériorisés et répétés plusieursfois suivant un certain rythme.n°42 Sept/Oct 2010


44Mondomix.comVoyage / ArgentineArgentinaDelightsSi gastronomie argentinerime toujours avec viandebovine, une escapadeà Buenos Aires réserveégalement d’autresplaisirs gustatifs.Texte Yannis RuelLes Argentins n’ont pas fini d’en rire jaune.Pour faire passer l’addition de plus enplus salée à laquelle sont confrontés cesgrands consommateurs de bœuf, dont leprix a doublé depuis le début de l’année,la présidente Cristina Kirchner recommandaitil y a quelques mois à ses concitoyensde se tourner vers le porc qui,selon elle, « améliore l’activité sexuelle ».Cause de cette inflation, l’expansion deschamps de soja, d’autant plus rentableque massivement transgénique, remplacepeu à peu les surfaces jusqu’alorsconsacrées à l’élevage. Un choix auxconséquences traumatisantes dans unpays où le steak fait figure de symbolenational.© D.R.EmpanadaAu cœur de l’identité argentine,l’importance de la viande rouges’exprime lors du traditionnel barbecueentre amis, l’asado. Ce rituel de sociabilité,orchestré autour d’une grille poséesur des braises et couverte de bidoche,est l’occasion de deviser, jouer aux cartesou chanter. Si les saveurs de la carneargentine reposent sur cet art de la cuisson,doux et patient, elles tiennent aussiassurément de la qualité de la pièce quifinit dans votre assiette. Laquelle variebien sûr selon le budget. Dans un restaurantde Buenos Aires spécialisé en« Orchestré autourd’une grille poséesur des braises etcouverte de bidoche,l'asado est l’occasionde deviser, jouer auxcartes ou chanter »viande grillée, le menu maison se présenteainsi en deux plats : une généreusepyramide de morceaux pas toujourstendres d’un côté, un seul filet noble,lomo ou churrasco, fondant sous le palet,de l’autre.Les empanadas,fierté d'une nationLa gastronomie argentine ne se résumepour autant pas aux seuls plaisirs de laviande bovine. S’il visite le pays en hiver,le gourmet a tout intérêt à prêterses papilles aux plaisirs d’une cassolettede locro. D’origine préhispanique, cetépais ragoût à base de maïs, d’haricots,de potiron et de viandes variées, est unplat emblématique du terroir, particulièrementassocié aux fêtes nationales, le25 mai et le 9 juillet. Autre spécialité duNord Ouest faisant la fierté du patrimoineargentin, bien qu’en réalité commune àtoute l’Amérique du Sud, les empanadasconstituent la meilleure alternativepour manger léger et bon marché. Servisen entrée ou en guise de collation, ceschaussons dont la farce varie selon les© Ilaria Quintasrégions - viande hachée et oignon, fromage,épinards, épicées au paprika ouau cumin - se distinguent les uns des autrespar le motif dessiné sur leurs bords.On ne saurait que trop recommander lesempanadas de la province de Tucumán,parfumées aux olives et aux raisins secs.Enfin, difficile de se promener sur l’avenueCorrientes, la principale artère de BuenosAires aux allures de Broadway, sanssuccomber aux odeurs émanant de cesgrandes pizzerias, dont les enseignesrevendiquent pour certaines jusqu’à 80ans d’ancienneté. Ouvertes jusqu’aupetit matin, elles constituent une étapeincontournable dans le parcours desnoctambules. Avec sa pâte épaisse etsa garniture généreuse, la pizza argentinen’en est que plus appréciable qu’il sefait tard dans la nuit. Y goûter offre aussil’occasion de méditer sur la faculté àl’autodérision des Argentins, dont l’unedes blagues est de soutenir qu’ils ont inventéla pizza.n°42 Sept/Oct 2010


46Sélection / cinémacinema© D.R./ Mielde Semih Kaplanoğluavec Bora Atlaş, Erdal BeşikçioğluSortie le 22 Septembre 2010.Lait, Œuf, Miel, telle est la recette de la trilogie du réalisateur turc Semih Kaplanoglu dont le dernier volet vient d’êtrerécompensé par l’Ours d’Or au Festival International du Film de Berlin. Yusuf, le personnage principal de Miel, quel’on retrouve adulte et poète dans les deux autres films du triptyque, est un très jeune garçon qui, tout en faisantl’apprentissage des mots, découvre l’intense beauté, mêlée de cruauté, de la nature. Le film s’ouvre justement surune vertigineuse scène de récolte de miel à la cime des arbres qui définit immédiatement le style du cinéaste : tournéesans musique, avec lenteur, celle-ci laisse le temps à chaque chose de manifester sa valeur symbolique. Pourtant, sice parti pris de « réalisme spirituel » subjugue, difficile de se laisser captiver par une narration plutôt obscure. D’uneesthétique sublime, Miel vaut donc surtout pour l’expérience d’un cinéma la fois visuel, sensuel et presque tactile qu’ilpropose. Florence Thireau© Florent de la Tullaye/ Benda Bilili !Un film de Renaud Barretet Florent de la Tullaye(Bac Vidéo)Sortie le 8 septembre.Réalisé dès 2004 avec de petites caméras, puis en 35mmoptique avec l’arrivée des premiers financements, Benda Bilili !commence au cœur du ghetto de Kinshasa, capitale déglinguéede la République Démocratique du Congo, sur des images dontle grain permet de plonger immédiatement dans une ambiancesaisissante. Ce film documentaire permet de vivre de l’intérieurl’extraordinaire ascension d’un groupe de musiciens handicapés,grâce à leur rencontre inespérée avec les réalisateurs,passionnés de musique et d’expériences humaines. Au fil decinq rocambolesques années de tournage, on voit le jeune RogerLandu, prodige d’un instrument monocorde de sa fabrication,s’épanouir au sein du Staff Benda Bilili, dont il est destiné àassurer la relève. Entre survie, transmission et foi profonde dansles pouvoirs de la musique, ce film bouleversant présente despersonnages charismatiques et une réalité qui surpasse toutefiction. Benda Bilili ! - « Au-delà des apparences » en lingala - estun ovni d'une force tellurique, à voir de toute urgence.Emmanuelle Piganioln°42 Sept/Oct 2010


Sorties / cinéma47/ Un Homme qui crieDe Mahamat-Saleh Harounavec Youssouf Djaoro et Diouc KomaSortie le 29 Septembre.N’Djaména, capitale du Tchad, de nos jours. Adam, lasoixantaine, est maître nageur de la piscine d’un hôtel. Fier deson travail, heureux de cette stabilité, il est pourtant rattrapépar une série de malheurs qui tourne bientôt à la tragédie.Le drame d’Un homme qui crie, c’est d'abord celui dutemps qui passe. Le vieillissement d’Adam s’accompagned’un brutal déclassement social, conséquence d’unemondialisation qui frappe aussi au cœur de l’Afrique, avecson lot d’injustices et de droits foulés au pied : l’hôtel estracheté par des entrepreneurs chinois et Adam perd sonposte au profit de son propre fils. A partir de ce moment, lefilm prend habilement une dimension universelle : alors quele spectre de la guerre civile menace le pays, Adam envoieson fils à l’armée, autrement dit, à la mort... Multipliantles références mythologiques - la culpabilité d’Adam,Abraham sacrifiant son fils à Dieu, l’impuissance de Davidface à Goliath comme métaphore de l’individu face à touteforme de dictature - le réalisateur tchadien Mahamat-Saleh Haroun parvient, grâce à une mise en scène prochedu documentaire, à conférer à ces récits fondateurs unerésonance actuelle et fascinante. F.T.n°42 Sept/Oct 2010


48 DVDs/ coffret Fatih AkinSoul Kitchen - L'Engrenage - Solino -Julie en Juillet(Pyramide Vidéo) Coffret Dvd Sortie le 8 septembre.A l'occasion dela sortie en Dvdde Soul Kitchende Fatih Akin,un coffret luiassocie les troispremiers filmsdu réalisateurallemand d'origineturque, préoccupéde déracinementet du meilleurmoyen d'en sortir :la réinvention.« En Turquie, tu n'es jamaisseul. Tout le monde se connaît. Il fait chaud, ça vit. » Prononcésà Hambourg par Gabriel (Mehmet Kurtulus), Allemand d'origineturque, dans L'Engrenage, le premier film de Fatih Akin (1998),ces mots traduisent l'une des récurrences du cinéma du réalisateur: l'espoir d'un ailleurs meilleur. Mais s'il aime baigner sespersonnages dans un entre-deux géographique et identitaire,Akin n'a pas le déracinement malheureux. Il en explore toutesles humeurs, toutes les esthétiques, en parvenant à se réinventerà chaque étape d'une filmographie assumant allègrementsa double culture.Humanisme résoluNé en 1973 à Hambourg de parents turcs, Fatih Akin réaliseL'Engrenage à 24 ans. Sous influence Mean Streets (MartinScorsese), le film raconte la désintégration de l'amitié de troisamis d'enfance d'origines différentes (turque, grecque et serbe),happés par l'attirance de l'un d'eux pour le Milieu. Bifurcationradicale avec Julie en Juillet (2000), road movie amoureuxentre l'Allemagne et la Turquie, via la Hongrie, la Roumanie...Akin y confirme son goût pour les scénarios complexes maisvifs, tout en contrepieds, ainsi qu'une tendresse pour des personnagesqui cherchent à des kilomètres un bonheur assisjuste à côté d'eux. Nouvelle réinvention avec Solino (2002), àl'image léchée, qui narre les tribulations d'une famille italiennevenue à Duisbourg dans les années 60, sur fond de conflit fratricide.Là encore, Akin tempère la noirceur par la rédemption,la trahison par le pardon, et affiche un humanisme résolu.C'est avec ses deux films suivants, Head On, Ours d'Or à Berlinen 2004, puis De l'autre coté, Prix du scénario à Cannes en2007, qu'Akin connaît la consécration internationale. Soul Kitchen(2009) est une nouvelle métamorphose, qui le voit traitersur fond de comédie tonique ses thèmes fétiches : fratrie soustension, le restaurant comme métaphore de la famille choisieet de la nation recomposée. La musique, enfin, passant sanscesse d'une rive à l'autre, du rock allemand à la musique turque,est au diapason de ce cinéma en mouvement perpétuel.Bertrand Bouardn°42 Sept/Oct 2010


Sélection / DVDs49/ Fleur du désertUn film deSherry Hormann(Bac Vidéo)Ce film réussit le tour de forcede rendre non crédible unehistoire vraie. Fleur du désertraconte la vie de Waris Dirie,Somalienne échappée de sonpays pour éviter un mariage forcé,devenue clandestine à Londres,où un heureux concoursde circonstances la fit accéderau statut de top model internationalpuis d'ambassadrice militante contre la pratique de l'excision.A force de raccourcis scénaristiques, de simplificationspsychologiques des personnages, le film enfile des situationsau bord de la caricature qui lui donnent des allures de sérietélé tournée à la va vite.Choisie pour le rôle titre parce que la fille de Waris Dirie croyaitvoir sa mère sur les essais vidéos, la comédienne Liya Kebedesemble avoir été abandonnée au milieu du plateau sans autresindications de jeu que de continuer à ressembler à son modèle.Plus dérangeant, par manque de nuances, Fleur du désertfinit par ressembler à une démonstration de la supériorité de lasociété occidentale face à la barbarie africaine. B.M./ A Banjo Frolic(Frémeaux & Associés/Socadisc)En 2003, afin d'accompagnerune exposition sur le banjo aumusée des instruments de musiquede Bruxelles, l'ambassadedes Etats-Unis finançale voyage du banjoïste belgeGérard de Smaele d'Atlanta àWashington via le massif desAppalaches et les Blue Ridgeet les Smoky Mountains, lieude naissance des musiquesold time et bluegrass. Il en aramené ce très original documentairesous forme de roadmovie qui part à la rencontred'un nombre impressionnantde musiciens, néo-ruraux aussi bien qu'old timers pittoresques,avec pas moins de trois représentants de la famille Seeger,le monument Pete, sa demi-soeur Peggy et son demi-frèreMike, disparu en 2009. Gérard de Smaele a également filméde nombreux luthiers qui racontent l'histoire de l'instrumentd'origine africaine, « reconstitué » par les premiers esclaveset ensuite adopté par la population blanche des Appalaches.A noter : ce documentaire a été tourné avant le récent phénomènede réappropriation du banjo par quelques musiciensafro-américains tels les Carolina Chocolate Drops ou le bluesmanOtisTaylor (dont on ne saurait trop recommander le biennommé Recapturing the Banjo).Jean Pierre Bruneaun°42 Sept/Oct 2010


50Mondomix.comLivresMaître des CimesHariprasad Chaurasia et l'art de l'improvisationTexte Jacques DenisFlûtiste formé au classique et tourné depuis longtemps vers lamusique hindoustanie, Henri Tournier publie un recueil autour del’art de l’improvisation, tel qu’enseigné par Hariprasad Chaurasia,l’Himalaya des flûtistes dont il est le disciple et l’assistant au conservatoirede Rotterdam. Accompagnée des peintures abstraitesde Sujata Bajaj, ce livre-disque permet de dévoiler les secretsde fabrication des ragas et de faire le point sur les enjeuxde cette musique. A méditer.n Quelle est la genèse de ce livre-disque ?Henri Tournier : Le conservatoire de Rotterdam dans lequelHariprasad Chaurasia enseigne depuis dix-sept ans a fait unappel d’offre pour que les professeurs réalisent des ouvragesautour de leur travail pédagogique. Mon projet a été retenu.J’avais l’idée de faire une méthode de bansurî (la flûte traversièreindienne, NDLR), mais très vite j’ai souhaité réaliserquelque chose de plus large : l’improvisation dans la musiqueindienne, et comment ce discours se construit dans cette tradition.Ce livre décrit et décode l’enseignement de ce grandmaître indien dans une telle institution européenne. Et encomplément, il a enregistré un disque sur mesure avec cinqragas : trois avec simplement des variations, deux avec desimprovisations plus développées. Et ce dans l’idée d’avoirune palette de tous les éléments en jeu : du prélude très lentà la composition rapide, avec une grande variété de cyclesrythmiques. Nous y avons ajouté un concert, où Chaurasiadéveloppe un long raga et une courte pièce semi-classique.Henri Tournier © Jean-Christophe Bonnafous« Un raga n’est pas unecomposition : c’est un ensemblede règles du jeu, qui crée uneesthétique sur laquelle on peutimproviser » Henri TournierHariprasad Chaurasia © Atul K.n Ce livre répond aussi à un manque de telsouvrages en France…HT : Effectivement, si les concerts de ragas en France nemanquent pas de spectateurs, il existe peu de livres sur laquestion. Je voulais parler au néophyte comme à l’amateurplus confirmé, au lecteur de partitions qui a à sa dispositiondes explications détaillées à la fin de chaque paragraphe :en vis-à-vis de l’écriture indienne, j’ai tout retranscrit selonl’écriture occidentale, en m’inspirant entre autres de la notationcontemporaine où la durée proportionnelle des notes estconsignée. Ce qui permet de visualiser la longueur des notes.Dans ce livre, je reprends également les fondamentaux de lamusique indienne, évoqués et clarifiés au fil du texte, maisje souhaitais aussi que l’auditeur comprenne comment celas’organise : où se trouve, ou non, l’improvisation.n Improviser autour d’un raga, c’est commeimproviser autour d’un standard de jazz ?HT : Tout d’abord un raga n’est pas une composition : c’estun ensemble de règles du jeu, qui crée une esthétique surlaquelle on peut improviser. Si l’on fait le parallèle avec le jazz,cela s’apparenterait à une suite d’accords. A partir de là,on peut composer différents thèmes ou jouer une multituded’improvisations. La direction est donc tout autre, mais avecquelques similitudes, comme l’improvisation des musicienslorsque les tablas rentrent : la composition est exposée commeun standard, et les musiciens s’amusent à broder autour,avant d’y revenir.n°42 Sept/Oct 2010


sélections / Livres 51n Tout est improvisé dans la musique hindoustanie ?HT : Cela dépend ce que l’on met dans le mot improvisation.Mais c’est une musique où l’on apprend tellement de chosespar cœur que certains musiciens restent sur ces conventions- comme des patterns en jazz - dont ils sont de brillants interprètes.D’autres maîtres en revanche ont transcendé cet apprentissagede mémoire, pour créer en direct. Comme dansune certaine école du jazz.n Comme Chaurasia ?HT : Outre les qualités de pédagogue de ce musicien, saforce est qu’il est à la fois le plus improvisateur et, par sonpassé dans les musiques de film, le plus compositeur. Sa façond’improviser est très construite. Commesous contrôle. Mais en même temps, ilprend toujours beaucoup de risques, ne serépète jamais. Et d’ailleurs, comme il est unexcellent rythmicien, il est considéré en Indecomme un musicien avec une approche «jazzistique ». Il peut jouer à la fois classiqueet ouvert. Voilà pourquoi il me semblait leplus amène à illustrer mon propos.l Hariprasad Chaurasia et l’art de l’improvisation(Accords Croisés/Harmonia Mundi)/ The rest is noiseAlex Ross(Actes Sud)Ce copieux et passionnant essai dujournaliste américain Alex Ross, relèvele pari fou de brosser l'histoire dela musique du 20 eme siècle pour en faireressortir le concept de modernité.Faisant voler en éclat tabous et préjugés,il remet en perspective les vieset œuvres des grands compositeursdans leurs contextes sociaux, politiques,philosophiques et historiques. Ildécrypte les jeux d'influences ou de rejets entre les différentscréateurs et les apports, nombreux et réciproques, entre musiquessavantes et populaires. De l'amitié/rivalité de RichardStrauss et Gustav Mahler aux parties de ping-pong esthétiquesentre les minimalistes américains (Glass, Riley, Reich, LaMonte Young) et certaines stars du rock (Velvet Undergound,Bowie, Eno), il prouve que les frontières entre ces deux mondes,supposés opposés, se sont faites de plus en plus poreuses.Il démontre que l'interdiction faite aux descendantsd'esclaves noirs américains d'accéder aux études musicales alargement contribué à la richesse du jazz et que, de façon volontaireou non, la musique savante n’a cessé de se régénérerà l'écoute des formes traditionnelles des cinq continents.De Richard Wagner jetant les bases de la musique aryenneà l'ouverture sur le monde d'Anton Dvorak, qui décelait lestraces d'une mélodie africaine dans une œuvre de Beethoven,toutes les problématiques du siècle écoulé trouvent ici unerésonance musicale. Par une superposition habile des angleset une écriture limpide, le livre de Ross devrait captiver toutautant les simples amateurs que les passionnés de musiqueet d'histoire. B.Mn°42 Sept/Oct 2010


52PlaylistNatachaatlasPropos recueillis par Benjamin MiNiMuM©D.R.n Dis-moice que tu écoutes ?Après le somptueux Ana Hina, quivoyait la diva égyptienne s’entourerd’un luxueux orchestre oriental etrenouer avec ses racines, NatachaAtlas revient avec Mounqaliba, undisque encore plus abouti. Pianoromantique et cordes arabesquess’y entremêlent avec grâce autourde sa voix toujours plus envoûtante.Un prétexte idéal pour évoquer sesamours musicaux pluriels, entre Orientet Occident.Quelle musique écoutez-vousle matin ?Natacha Atlas : Fairuz et Debussy.Quels sont les trois premiers artistes à avoir fait naître votre amour de lamusique ?NA : Abdel Halim Hafez, Fairuz, Tchaikovsky.Quels étaient les disques favoris de votre jeunesse ?NA : Lorsque j’étais jeune, j’aimais beaucoup écouter Station To Station de David Bowie,Shérazade de Rimsky-Korsakov et Mishwar de Fairuz.Quelles sont pour vous les trois chansons clés de la musique orientale ?NA : Baadak Ala Bali, Mawoud, Salouni Ennas, trois chansons de Fairuz.Quels sont les disques labellisés « Asian underground » qui ont le mieux passél’épreuve du temps ?NA : London Undersound et Prophesy de Nitin Sawhney, Anokha de Talvin Singh.Vous avez brillamment chanté Mon Amie la Rose de Françoise Hardy etRiverman de Nick Drake, quelles autres chansons de ces artistes auriez-vouspu reprendre ?NA : J’ai repris La Nuit est sur la Ville de Françoise Hardy sur Mounqaliba.Quels autres artistes auriez-vous aimé reprendre ?NA : Ce serait intéressant de faire une chanson de M et j’aimerais aussi essayer de faire unechanson de Francis Cabrel.Quels styles musicaux éloignés du vôtre seriez-vous tenté de revisiter ?NA : Bossa Nova, Dubstep, Electronica.Sur Mounqaliba, la présence du piano est primordiale, quelles sont vos troispièces pianistiques favorites ?NA : Last Note de Zoe Rahman, Badrou Hosnen de Zad Moultaka et Claire de Lune deClaude Debussy.Quel est le disque le plus étrange de votre discothèque ?NA : Double Dares Are Sometimes Different par Ben Davis.Quels disques récents avez-vous particulièrement apprécié ?NA : Zarani de Zad Moultaka, Diachronism d’Ibrahim Maalouf et Where Rivers Meet de ZoeRahman.Quel est votre son favori la nuit ?NA : Kind of Blue de Miles Davis.n Mounqualiba est chroniqué page 60l Sur Mondomix.comChroniques, vidéos et interviews http://natacha_atlas.mondomix.com/fr/artiste.htmn www.myspace.com/natachaatlasofficialn°42 Sept/Oct 2010


AFRIQUE 53CHRONIQUESCarlou D"Muzikr"(World Village/Harmonia Mundi)res dans le monde<strong>MONDOMIX</strong>M'aimeAu Sénégal, on connaît Carlou D depuislongtemps. Breaker, rappeurun temps dans Positive Black Soul,l'homme évolue en solo depuis six ans,non sans succès puisqu’il a été nomméMeilleur artiste de l’année 2009 au Sénégal. Il s'est produit à quelquesreprises en Europe, notamment aux côtés de Youssou NDour,qui l’a pris sous son aile et chante avec lui un morceau de Muzikr,son premier album international. En 2008, il a aussi participé àl’Opéra du Sahel dirigé par Wasis Diop, en tant que chanteur ténor.D.R.TELECHARGEZ surMP3.<strong>MONDOMIX</strong>.COMMondomix vous offre la possibilitéd’acheter en MP3 les musiqueschroniquées dans le magazinePour cela, il vous suffitd’aller sur http://mp3.mondomix.com/ et desaisir le numéro qui termine certains articlesdu magazine dans le moteur de recherche,en ayant sélectionné l’option« Code magazine ».ECOUTEZ sur<strong>MONDOMIX</strong>.COM avecVous pourrez retrouver toutes leschroniques de ce magazine surnotre site ainsi que sur Deezer.comet écouter les albums grâce à notrepartenaire.Avec sa voix limpide, ses compositions sensibles et son sens dela mélodie, Carlou D a voulu chanter live au pays du playback etfilouter les rappeurs, en critiquant leur étroitesse d’esprit. Depuis, ilnavigue à vue entre les genres : folk, rap mbalax, variété, chant religieux.Abandonné par son père, devenu chef de famille très tôt, ildéclare régulièrement dans la presse sénégalaise que la religion l’asauvé – autant que la chanson. Muzikr est d’ailleurs un jeu de motsentre musique et le « zikr », la répétition incessante du nom de Dieu,faite après la prière. Adepte de Cheikh Amadou Bamba, le guidespirituel des Mourides, une branche soufie de l’islam très répandueau Sénégal, Carlou D est aussi Baye Fall, une autre branche dumouridisme plus libertaire, qui prône le travail et la foi. Chantée parun autre artiste sénégalais international, Cheikh Lô, cette philosophiese mâtine de funk et de salsa ; Carlou D l'inscrit lui dans lesgrooves de sa génération : folk, très en vogue au Sénégal, mbalax,soul et blues. Sen Regal, morceau de variété à la folk très percussive,fait d'ailleurs un carton au Sénégal. Sur Youtube, son clip aété vu plus de 200 000 fois ! Carlou D ficèle de belles mélodies,notamment à la guitare sèche, et ce sont finalement ses morceauxfolk qui touchent le plus. Emaillé d’arrangements discrets, Muzikrmet en avant cette incroyable voix, à l’aise dans tous les registres.Pas étonnant qu’il ait du mal à choisir !Eglantine ChabasseurCheikh Lô"Jamm"(World Circuit / Harmonia Mundi)Cinq ans après l’excellent Lamp Fall,Cheikh Lô est de retour. A l’imagedes vêtements de sa confrérie desBaye Fall, le chanteur sénégalaisoffre ici une musique « njaxas »,TELECHARGEZ sur MP3.mondomix.com / 31918c'est à dire multicolore. Né desessions acoustiques avec sonbassiste dans un studio de Dakar,Jamm est un album résolumentpanafricain. S’il jongle entre leslangues et les styles (rumba,high-life, reggae funk), Cheikh Lôremonte aussi les années. Retourau temps des indépendances avecune reprise du célèbre Doni Donide l’orchestre guinéen BembeyaJazz ou encore hommage délicatau révolutionnaire burkinabéThomas Sankara. Pour compléter cepatchwork musical des plus réussis,on distingue la touche de vieux amis :Tony Allen et Pee Wee Ellis (ex-JB’s).Isadora DartialDiogal"Urban Spirit"(Playasound / Harmonia Mundi)Arrivé seul du Sénégal après un trèsséduisant premier album produit parLoy Ehrlich (Hadouk Trio), Diogal sefraye un chemin tranquille sur les scèneseuropéennes. Doué d’une voix tour à tourcaressante et envoutante, il est aussi uncompositeur capable de toucher en pleincœur, comme sur le morceau d’ouverture :autour du souffle émouvant de sa voix etdes arpèges de sa guitare, un violoncelleinstruit de la magie tonale de l’Afriqueenrobe la chanson dans un équilibreparfait entre le Nord et le Sud. On pensealors tenir le grand album qui pourraitinonder de lumière le parcours du chanteur.Le second titre et ses accents folks-rock debon goût se dégustent d’abord avec plaisir.Le groupe de musiciens le laisse cheminerdevant, accompagne la mélodie avec tact,mais au troisième tiers de la chanson lebatteur troque ses ballets élégants contrede lourdes baguettes et laboure le chemin àcoup d’effets appuyés et convenus. La suitereste malheureusement sur cette trajectoire,celle d’un groupe folk rock banal et un peudépassé. On comprend la camaraderie quipeut les lier, on imagine le plaisir qu’ils ont àjouer ensemble, mais on attend bien plus dela part de Diogal.B.M.TELECHARGEZ sur MP3.mondomix.com / 32748n°42 Sept/Oct 2010


Publi-rédactionnelLe coup de cœur de laFnac Forum...54AFRIQUEres dans le monde<strong>MONDOMIX</strong>M'aimeJuan Luis GuerraAsonde Guerra(Rythmo disc)Auteur, compositeur et interprète né le 7 juin 1957 à SaintDomingue, Juan Luis Guerra est la référence incontestée dela musique latino dans les Caraïbes. La sienne est fortementinfluencée par le mérengue et la bachata, deux rythmes latinosréputés en République Dominicaine, dont il se fait le porte-paroledans le monde entier. En 1990, son album BachataRosa lui apporta ainsi une reconnaissance internationale avecl'obtention d'un Grammy Award. Juan marque son grand retouravec ce nouvel opus, savant mélange teinté de bachata,balade, d'afro-pop et surtout de salsa. Des titres comme LaGuagua, La Calle, en duo avec Juanes, Lola’s Mambo avecChris Botti et le bonus Caribbean Blues viennent sublimerAsonde Guerra et nous transportent vers des horizons ensoleillés.Beatrice ThongLa Fnac Forum et Mondomix aiment...340ml"Sorry For The Delay"(Bi-Pole)Leur seul nom aurait dûnous alerter sur le caractèreéminemment surprenant dela musique de ce combo sudafricain,au sein duquel onretrouve Paulo et Tiago deTumi & The Volume. 340ml,c’est la contenance des canettesde bières ou de sodas dans lapointe australe de l’Afrique. Unecontenance qui peut s’avérerinsuffisante pour contenir lesdébordements dus à une agitationde son contenu. Gazeuse, lamusique de 340ml est expansiveet généreuse. Légère comme lamousse, elle épouse les formeset les genres, qu’elle lie avecgrâce. Cinq ans après leur premieralbum, les 340ml semblent «désolés du retard ». On ne sauraitleur en vouloir. Au contraire : ils ontsu prendre leur temps pour ne pasnous faire perdre le notre !SquaalyTELECHARGEZ sur MP3.mondomix.com / 30995ECOUTEZ sur Mondomix.com avecres dans le mondeVarious Artists"The World Ends : Afro Rock &Pschydelia in 1970’s Nigeria"(Soundway)Voici deux ans, le label Soundwaynous offrait un bel aperçu de lavague rock psyché qui déferlasur le Nigeria des années 70.L’exploration s’approfondit aveccette double compilation. En1970, le pays sort de trois annéesd’une terrible guerre civile, celledu Biafra. Alors que le flowerpower embaume le monde depuis1967, la jeunesse nigérianeentend rattraper les annéesperdues et trouve dans cessonorités électriques le symboled'une renaissance. Les groupesse multiplient. Jefferson Airplane,Jimi Hendrix et l'incontournableJames Brown deviennent lesmodèles. La pédale wah wahest reine et les envolées psychéde rigueur. Les musicienspassent d’un groupe à l’autre,la plupart inconnus du publicoccidental, à l'exception deOfege, The Hyfgrades ou TheElcados. Le reste, c’est uneexploration pop qui rétablit unpan de l’histoire musicale duNigéria qu’il eut été dommage depasser sous silence. Une nouvellefois, merci Soundway ! I.D.<strong>MONDOMIX</strong>M'aimeres dans le mondeAxel KrygierPesebre(Crammed)Natacha AtlasMounqaliba(World Village)et aussi :n Bumba Massa Apostolo (Rue Stendhal)n Africa 50 years of music (Discograph)n Quantic Dog With A Rope (Thru-Thoughts/La Baleine)Danyel WaroAou Awmin(Cobalt)Antonio ZambujoGuia(World Village)Nibs van der Spuy"A House Across The River"(2 feet music/Sheergroup)Un soleil clair darde ses rayonsà travers la fenêtre de la maisonque nous entrouvre Nibs vander Spuy. La parole douce et laguitare folk, le songwriter sudafricaincondense dans sondernier album les influencesqui l’ont fait s’épanouir au fildes ans : la guitare des sixties(avec au passage une reprise deTim Buckley, Cripples Cry) et lembaqanga pour les mélodies, lecaractère spirituel du monde et dela nature pour les textes. A l’aidede collaborations inédites, dontcelle avec le prodige Piers Faccinisur Homeward Bound, l’ensembleest empreint d’un phrasé délicatet rêveur. Tel un Cat Stevens auxracines africaines, le troubadourNibs van der Spuy prêche l’amourdes siens à travers des balladessensibles et apaisantes.Nadia AciTELECHARGEZ sur MP3.mondomix.com / 30995ECOUTEZ sur Mondomix.com avecGhali Benali"Sings Om Kalthoum"(Crépuscule Productions)<strong>MONDOMIX</strong>M'aimeReprendre Al Atlal de l’immenseOm Kalthoum était un rêve de petitefille pour Ghalia Benali. Chanteuse,danseuse, plasticienne, comédienne,la belle Tunisienne n’a pas eupeur du challenge. Pour aérer lerépertoire de la diva, elle a choiside délaisser le grand orchestreclassique et de s’entourer d’unsimple trio. Le virtuose MoufadhelAdhoum au oud, la contrebasse deVincent Noiret et les percussions deAzzedine Jazouli font briller la voixde Ghalia Benali de ses plus beauxatours : sensualité, ambiguïté, désiret poésie. Si Om Kalthoum pouvaitimproviser pendant une heure surun poème, Ghalia Benali privilégiedes morceaux courts, à l’intensitédramatique. Une délicate sobriétéqui fait de ce disque un voyagemagnifique. E.C.


Mondomix.com55Roots of OK Jazzres dans le monde<strong>MONDOMIX</strong>M'aime"Congo Classics 1955-1956"(Crammed Discs)Spécialiste du Congo au sein dulabel Crammed, producteur deKonono N°1 et de Staff BendaBilili, Vincent Kenis a rééditépour la série Congo Classics unevingtaine de perles issues despremiers enregistrements de l'OKJazz en 1955. Lancé en juin 1956par François Luambo Makiadi, ditFranco, le Tout-Puissant orchestrede Kinshasa a laissé plus de centalbums et un bon millier de titres,imposant la capitale congolaisecomme un temple des musiquesurbaines. Tirant son nom del'OK Bar, lieu de ses premiersconcerts, l'OK Jazz enflammaitles jeunes aficionados avec unerumba moderne, à la manière dela fièvre rock’n’roll qui sévissaitoutre-Atlantique. Cette précieusecollection fleure bon le microsillonet offre les pièces manquantesd’une discographie majeure.Emmanuelle PiganiolECOUTEZ sur Mondomix.com avecAmériques© D.R.res dans le monde<strong>MONDOMIX</strong>M'aimeDR. JOHN &THE LOWER 911"TRIBAL"(Proper Records / Harmonia Mundi)Sur la photo de famille de la greatblack music made in la Nouvelle-Orléans, Malcolm John Rebennacka.k.a. Dr John est ce barbu du 1 errang bardé de gris-gris et d’amulettesqui pose fièrement entre les Meters,Allen Toussaint, Eddie Bo et ProfessorLonghair. Canne au pommeau rutilant,sourcil froncé et air faussement menaçant,Dr John peaufine depuis plus de 40 ans son personnagedu Night Tripper, croisement entre un marabout africain et unsorcier vaudou, grand pourvoyeur d’un mélange musical composéde funk, de rock, de jazz, de blues et de psychédélisme.Largement arrosé de sauce créole et orné de plumes d’Indiens,le tout est connu des locaux sous le nom de Gumbo.A près de 70 ans, calé derrière ses claviers, sa voix gouailleusetrainant sur la rythmique comme un serpent attiré par la chaleurd’une paire de bottes laissée sur le pas de la porte, le Docproduit toujours son élixir miracle que les camelots-escrocsen roulotte n’ont jamais pu copier. Un breuvage pur concentréde Louisiane, de ses marécages crasseux et de son immensepatrimoine musical qui, une fois la fiole vidée cul-sec, occasionnefoultitude de sentiments voire d’hallucinations visuelles.Certains ont vu l’aube virginale du gospel s’ouvrir pour révélerdes Indiens en tenue d’apparat parés pour la transe, d’autresrapportent la liesse communicative d’un brass band les ayantguidés tout droit dans un bayou moite et hostile où les percussionscausent d’énormes piqûres de moustiques. Fréquentesaussi sont les visions de ce club de jazz pour gens biens dontles murs tombent pour laisser place à un rade mal famé où lestessons parleront dès que la guitare aura fini de cracher sonblues rocailleux. On raconte que certains ont même vu des alligatorssortir du disque.Euphorisante, énergisante, mélancolique, et parfois gravequand elle se fait plus politique, la potion du Dr John cuvéeTribal s’impose comme un grand cru. Ne pas hésiter à doublerles doses. Franck CochonECOUTEZ sur Mondomix.com avecn°42 Sept/Oct 2010


56res dans le monde<strong>MONDOMIX</strong>M'aimePAMA INTERNATIONAL"OUTERNATIONAL"(Rockers Revolt-2009)Les ponts musicaux parfaitemententretenus entre l’Angleterre etson ancienne colonie caribéennefont du reggae british l'un desmeilleurs représentants du genre.Très tôt, l’Anglais a su accorderla hargne de son punk rock auxsonorités de Kingston, la fameusePunky Reggae Party de Marley…Inspiré par le son et l’esthétiquedes grands enregistrementsjamaïcains des années 60-70,Pama a écumé la productionmusicale de l’île dans ce qu’ellea de plus authentique (reggaeroots aux incantations politicosociales,rocksteady amoureux,ska sur ressorts ou dub à soundsystem) pour en faire un albumà l’esprit oldies où le digital n’estpas le bienvenu. Avec toujours cefeeling anglais dans le chant quisent la rouflaquette et la pinte debière. F.C.CUMBIA BEAT Vol. 1"EXPERIMENTAL GUITAR DRIVENTROPICAL SOUNDS FROM PERU1966 – 1976"(Daqui/Harmonia Mundi)Si merengue, cumbia et rumbaont accueilli dans les sixties le rockpsychédélique avec les mêmeségards que ceux accordés auxconquistadors du 16 ème siècle, ils ontensuite dû s’en mordre les doigts.Car une fois invitées, les guitaresélectriques ont pris possessiondes lieux et se sont comportéescomme chez elles, n’hésitant pasà enfoncer profondément leurscordes dans la musique populaireet traditionnelle péruvienne. Seulsquelques arrangements typiquesfurent conservés mais ne purents’exprimer que sous le joug depercussions bien sévères. Connuessous le nom de cumbia péruvienneou chicha, ces bizarreries exhuméespar Vampisoul s’apprécientcomme un documentaire musical,à condition d’aimer les guitaresaccordées « tropicales ». F.C.Stéphane San Juan"Legal ! New beats from Rio "(Totolo/Harmonia Mundi)Stéphane San Juan, batteuret percussionniste de groupesphares brésiliens (OrquestraImperial, +2, Vanessa Da Mata…),livre une compilation réunissantles acteurs de la nouvelle scènecarioca. On y trouve les airsà la mode de Rio de Janeiro,qui témoignent de la richessemusicale brésilienne. Parmi lesprotagonistes : Dadi, bassistequi a travaillé avec Marisa Monte,Caetano Veloso ou Mick Jagger,et dont le titre Cantado PorVocê affiche une mélodie d’unegrande douceur. Autre pépite :Samba de Pacto, du groupe OsRitmistas, trio de percussionnistesauquel Stéphane San Juanappartient, qui marie avec brio lesracines africaines du Brésil et lerenouveau du son électro. C.V.Magic Slimand the Teardrops"Raising the Bar"(Dixiefrog/Harmonia Mundi)Des bluesmen, des vrais, brutsde fonderie, de ceux qui ont faitle voyage du Sud profond vers leSweet Home Chicago, il n'y en aplus des masses. Restent BuddyGuy, bien sûr, et puis Magic Slim,personnage aussi authentique etnature qu'il est permis d'imaginer,pilier de la scène blues deChicago, à la guitare nourrie dufabuleux vibrato d'Elmore James,Johnny Shines et consorts.Sur scène, pas de playlist. Ilpuise selon l'inspiration dansson répertoire de plus de 250chansons et ses musiciensn'ont qu'à suivre ! Rassurezvous,ils assurent. La preuve, cetexcellent album enregistré, m'aaffirmé Magic Slim, en moins de4 heures de studio.Qui dit mieux ? JPBTELECHARGEZ sur MP3.mondomix.com / 31667TELECHARGEZ sur MP3.mondomix.com / 26079


Mondomix.com57Judy Collins"Paradise"(Wildflower/Naïve)Cette jeune dame de 71 ans àla voix enchanteresse fut l'unedes deux égéries (l'autre étantJoan Baez) du mouvement folkdes sixties. Elle fit par ailleursoffice de découvreuse de talents,notamment de Léonard Cohendont elle fut la première interprètedu superbe Suzanne. Ce disque,son 39 ème , prouve qu'elle n'arien perdu de ses remarquablescapacités vocales, qu'elle chantele Gauguin de Jimmy Webb,Diamonds and Rust en duo avecJoan Baez ou Last Thing on myMind avec Stephen Stills qui futson compagnon et écrivit pour ellele fameux Suite : Judy Blue Eyesqui démarra le set de Crosby, Stills,Nash and Young à Woodstock en69. JPBASIE/moyen orient© Michael Collopyres dans le mondeRavi Shankar"The Master"(Deutsche Grammophon/Universal Crossover)<strong>MONDOMIX</strong>M'aimeC’est l’histoire d’un homme qui auratraversé un siècle à l’écoute du monde,fréquentant le Paris des folles annéeset le Londres qui swinguait, devenantla référence pour George Harrison etJohn Coltrane, jouant dans les festivalshippies ou sous les lambris princiers,pratiquant son art aussi bien avec sonami Yehudi Menuhin que Philipp Glass. Reste que le principaltalent du père de Norah Jones et Anoushka Shankar aura étésa pratique de l’instrument, le sitar. Et que l’aura du natif deVaranasi guidera ses cadets dans la voie d’une ouverture versl’autre, sans jamais renier ce qui fonde son originalité. C’est celaqui fit de Ravi Shankar un Pandit (« maître ») d’exception.C’est cela que l’on retrouve dans ce triptyque enregistré entre1978 et 1981 : trois disques pour un autoportrait. Sur Spirit OfIndia, il interprète sous l’emprise de la déesse du yoga un ragade sa facture, Jogeshwari, et va chercher au plus profond dechaque note pour pouvoir laisser libre cours à son imaginationet toucher au plus juste le rasa, l’émotion. Cinquante minutescaptivantes, qui résonnent comme une formidable ode à la lenteur,à méditer par tous les amateurs de vertiges virtuoses. Surle second disque, Homage To Mahatma Gandhi, réédité il y aquelques années, il reprend l’une de ses pièces de jeunesse, leraga Mohan Kauns, composé en février 1948, quelques joursaprès la mort de l'apôtre de la non-violence. En vingt-quatre minutes,le sitariste enchaîne un merveilleux alap introductif, avantd’accélérer crescendo la cadence, puis d’être rejoint par son fidèleAlla Rakha, maître des tablas modernes et père de ZakirHussain. Un vrai condensé de tous les développements inhérentsà un raga. Enfin, Sur Towards The Rising Sun, il invite deuxvirtuoses du Soleil Levant, Susuma Miyashita au koto et HozanYamamoto au shakuhachi, pour communier autour d’anciens ragas.Pas de doute : la relation Orient/Orient sonne comme uneévidence, tant sur les pièces méditatives que les parties plus enlevées,où le maître donne le tal rythmique. Avant de clore cetteanthologie au sitar par un superbe hommage à Allaudin Khan,le maître sans qui Shankar n’aurait jamais atteint ce degré derigueur et de sophistication. Jacques Denisn°42 Sept/Oct 2010


58 EUROPESandhya Sanjana"Random Access Melody"(Loplop production)Originaire de Mumbai (l'ancienneBombay), Sandhya Sanjanapossède l'art de créer des pontsentre l’art vocal indien et le jazz.Très appréciée d'Alice Coltraneet formée à la pratique de lamusique indienne classique, cetteartiste a tout d’abord frayé avecla scène pop rock de Bombay etde Delhi. Elle a ensuite multipliéles expériences de fusions Est/Ouest avant de s’installer enEurope (Londres, puis la Hollande)et d’envisager une pratiqueplus réflexive. Cet album illustrele tact avec lequel elle abordechaque idiome musical. Sescompositions, servies par quatorzede ses musiciens favoris, sont trèséquilibrées et les plus dépouillées(Neelam, Narayan), sublimes. Unerévélation.P.C.TELECHARGEZ sur MP3.mondomix.com / 31918ECOUTEZ sur Mondomix.com avecres dans le monde<strong>MONDOMIX</strong>M'aimeAmira& MerimaKljuco"Zumra"(World Village/Harmonia Mundi)res dans le monde<strong>MONDOMIX</strong>M'aimeIl y a peu disparaissait la chanteusebosniaque Ljiljana Buttler, magnifiqueinterprète de la sevdah, le bluesgitan qui a fleuri à Mostar (Bosnie-Herzégovine). La grande dame n'estpas partie avec son secret et nouslaisse une héritière qui va aussi nousfendre le cœur. Ce magnifique albumest une pierre précieuse. Zumra signifieen effet émeraude en bosniaque, mais désigne aussi quelquechose qui sort de la norme. Nous avions négligée cette œuvrehors du commun lors de sa sortie, il y a quelque mois, il estgrand temps d’en révéler l’éclat.Zumra réunit la jeune et troublante chanteuse Amira et la sensibleaccordéoniste Merima Kljuco, qui a produit la chose.Les deux femmes se réapproprient des chants d'amour bosniaques,serbes ou macédoniens parmi les plus populaires etpoignants. Au bénéfice d'arrangements délicatement épuréset d’une modernité respectueuse, ces chants retrouvent unenouvelle lumière, une nouvelle pertinence.Entre tension et extase, violence et douceur, l'accordéon, tourà tour lyrique, rythmique ou bruitiste, n'élude aucune nuance© D.R.TELECHARGEZ sur MP3.mondomix.com / 30778des sentiments parfois extrêmesqui flottent dans les Balkans encoremeurtris par la récente guerrequi en a bouleversé les équilibres.Propulsée par l'instrument quipose les décors et suit les constructionsnarratives, la voix souventcéleste d'Amira incarnetoute la gamme des soubresautsamoureux mélancoliques. Du désirbrûlant inassouvi à la nostalgie,de la tendresse disparue à laprésence obsessionnelle de l’êtreaimé en chaque lieu et à chaqueinstant, la chanteuse ne cesse denous rappeler que l'amour sincèretranscende la vie.Zumra est bien sûr un disque atypiquemais restera comme uneétape majeure dans l’histoire de lasevdah, en prouvant qu’une musiqued’essence populaire peutgarder sa vérité intacte tout en répondantà des critères d’exigenceet d’innovations artistiques, pourpeu qu’elle laisse battre librementles cœurs qui l’animent. BenjaminMiNiMuM


EUROPE59res dans le monde<strong>MONDOMIX</strong>M'aimeThe Rosenberg Triowith Biréli Lagrène"Djangolists"(Enja/Harmonia Mundi)Cent ans après la naissance deDjango Reinhardt, les hommagesaffluent au risque d’enterrer unenouvelle fois cet astre du jazz, desanctifier ce diable de guitariste,de muséifier cette étincelle devie, ce swing à l’état brut. Fortheureusement, Djangolists, portépar le Trio Rosenberg, deuxfrères et leur cousin, avec lachaleureuse complicité de BiréliLagrène, est tout simplementcaptivant. Au delà des 18 titresgravés sur ce CD, auxquels il fauten ajouter 5 offerts sur le net, cerecueil propose un Dvd d’uneheure qui retrace les sept jours del'enregistrement. Ni plus, ni moinsque le temps qu’aurait pris Dieupour réaliser son bel ouvrage.Mais lui, malheureusement pournous, n’était pas guidé par le jeulibre du grand Django. SQ’Deolinda"Dois Selos E Um Carimbo"(World Connection / Pias)Après un premier album qui leura apporté le succès dans leurpays et la reconnaissance surles circuits internationaux desmusiques d’essence patrimoniale,les Portugais de Deolinda ont choisila voix de l’évidence. Si l’effet desurprise du précédent CançãoAo Lado n’est pas renouvelé,leur fado délesté de pathoset la recréation de traditionssagement jazzifiées procurent lesmêmes sensations de fraîcheuret d’insouciance. La maîtrisetechnique est en progression, lathéâtralité de l’interprétation restelégère et les compositions suivent laplaisante direction précédemmentesquissée. Sans nier la cohésionde l’ensemble, on peut regretterle manque de relief, l’absence deprise de risques, un trop grandcontrôle émotionnel ou une certaineuniformité. On peut aussi voir leschoses autrement et apprécierl’équilibre de cette musiquetempérée qui n’a d’autre prétentionque de nous être agréable B.M.MARTIRIO"25 AÑOS EN DIRECTO"(Le Chant du Monde / Harmonia Mundi)Egérie de la movida des années1980, Martirio a annoncé lestendances du paysage musicalespagnol contemporain, versantdans la fusion flamenco-rockavant de s’attacher à réhabiliter lerépertoire sentimental de la coplaen le parfumant d’accents jazz eten le reliant à l’univers du bolero etdu son cubain. Sur cette captationde concerts visant à commémorerses 25 ans de carrière dans uneambiance de cabaret intime, ladiva andalouse, toujours cachéederrière ses lunettes noires etcoiffée d’une peneita (le peignetypique de sa région), revisiteune quinzaine de ses plusgrands succès pour en offrir desversions délicieusement épurées,simplement accompagnées par laguitare de son fils Raúl Rodríguez etpar le piano de Jesús Lavilla.Yannis RuelECOUTEZ sur Mondomix.com avecCompagnie Montanaro"D’Amor de Guerra"(Nord Sud Music/Codaex)Ce double album raconte unvoyage à travers six pays. Le CDD’Amor de Guerra a été enregistréavec les proches du musicienprovençal. Une vielle à roue, unecontrebasse, un violon (tenuspar Laurence Bourdin, EstelleAmsellem et Balthazar Montanaro)et la guitare préparée de SergePesce constituent la pâte sonorede ces musiques vagabondes.L’instrumentarium de Micquèu etles fines percussions de FabriceGaudé et Siavash Nazeri sefaufilent dans ce dédale sonore.Les chansons parlent d’amourrenaissant et de résistances auxconflits, à l’enfermement : « Aupetit jour/Sous les décombres/Pleure ton ombre/Ton coeur estsourd ». On retrouve la jubilationdes instants musicaux partagéslors des nombreux voyagesde Montanaro dans le seconddisque. Des moments intenses etréjouissants traversent ces Carnetsde campagne comme cettesession magique à Khartoum, encompagnie d’Abbas el Noor, DafAllah et Kamel Youssif. Une œuvreriche de contrastes. P.C.Gigi de Nissa"Gigi de Nissa"(Manivette Records)Au bout de la Linha Imaginòt surlaquelle circulent, entre autres, lesFabulous Trobadors, le MassiliaSound-System et leurs différentesdéclinaisons, Nissa (Nice si vousne parlez que pointu) fait figure deparent pauvre, même si le plasticienBen ou les musiciens de NuxVomica revendiquent eux aussi cettepratique de l’art-péyi.Chanteur et leader de NuxVomica, Gigi (Louis Pastorelli pourles R.G.), signe un premier opussous son nom en collaborantavec Tatou, le leader de MoussuT e Lei Jovents, et son équipe (Blu,Jam da Silva…). Inévitablement,cette dizaine de chansonscourtes (32 minutes au total), estdirectement influencée par le bluesprovençal du combo phocéen,où l’on pointe le son facilementidentifiable du banjo. Au bout de lalinha, Gigi a mordu à l’âme son.SQ'ECOUTEZ sur Mondomix.com avecMardi Gras BrassBand"Von Humboldt Picnic"(Hazelwood Music/Differ-Ant)Fanfare hors norme qui s’esttoujours exprimée en toute liberté,le Mardi Gras Brass Band revientavec un carnet de voyagemusical en guise de neuvièmealbum, carnet qu’ils attribuent àl’explorateur allemand Alexandervon Humboldt (1769-1859).TELECHARGEZ sur MP3.mondomix.com / 31710Bien sûr, la Nouvelle-Orléans etses musiques de rues donnenttoujours la tonalité de ce nouvelenregistrement, mais commeà chaque fois avec ce comboallemand, les ingrédients sontmultiples. Des réminiscencesindiennes de Delhi Morning Raga,aux bribes de souvenirs de fêtes dela bière de Lotterie des Lebens, enpassant par la carte postale en noiret blanc quelque peu datée, postéedepuis Paris avec Blvd de Clichy,ce Picnic se laisse grignoter soustoutes les latitudes. Bon appétitaux oreilles buissonnières. SQ'


606 éme continentres dans le mondeNatacha Atlas"Mounqaliba"(World Village/Harmonia Mundi)Après s’être produite en juin dernier à labasilique de Saint-Denis dans une créationoriginale du joueur de oud Smadjavec une quinzaine de musiciens (dontle trompettiste Ibrahim Maalouf), Natacha Atlas revient avecMounqaliba (« la tête à l’envers »), son huitième album. Dans la lignéed’Ana Hina paru en 2008, ce nouvel opus coréalisé avec levioloniste Samy Bishai sonne très acoustique. Enregistré à Londresavec la participation de la pianiste Zoe Rahman, d’un ensemble devingt musiciens turcs et d’un orchestre de chambre à même delier les formes occidentales et moyen-orientales, cet album inspirépar l’œuvre du compositeur, écrivain, dramaturge, peintre et philosopheindien Rabîndranâth Thâkur, dit Tagore, est une sorte dequête du Graal pour la chanteuse, qui atteint là l'un des sommetsde son art.Album de création aux compositions originales à l’exception dedeux reprises (Riverman de Nick Drake qu’elle sublime et La Nuitest sur la Ville, nouvel emprunt à Françoise Hardy), Mounqaliba estponctué de délicieux interludes. Son mystère s’apparente à uneœuvre de pacification par la connaissance. Qui mieux que cettechanteuse née à Bruxelles d’un père natif de Jérusalem flottantentre Maroc, Palestine et Egypte, et d’une mère anglaise convertieà l’Islam, peut ouvrir des portes sur des mondes inconnus oufantasmés ? Qui mieux que Natacha Atlas peut embrasser la beautéde ces mondes que trop d’idéologues cathodiques cherchentà opposer ? Sa voix limpide est un trait d’union qui rapproche lespensées arabe, perse, hindi et occidentale, les éclaire. Dans uneépure sensible, l’ex-Transglobal Underground fait briller le diamantde ses compositions. Du brut, de l’essentiel qu’elle saura assurémentsertir sur scène en petite formation ou accompagnée par desensembles plus conséquents.SQ’res dans le monde<strong>MONDOMIX</strong>M'aimeD.R.Various Artists<strong>MONDOMIX</strong>M'aime"Les Champs de l’Hommeprésente Mongolia 2008"(Enja/Harmonia Mundi)Sommes d’aventurespersonnelles, intimes, vécuespar des musiciens d’ici oudes steppes d’Asie Centrale,Mongolia 2008 est devenue unprojet collectif au fil des concerts,une aventure moderne à mêmede tisser des liens, de réuniret de s’ouvrir aux mondes desesprits. A l’apparente duretédu chant diphonique khöömeides cow-boys du far-east, sesont mêlés les beats buccauxdu crew marseillais PHM, lesvocalises de La Mal Coiffée, lesconstructions électroniques deLoan… Si chaque titre possèdeson propre mood, le grain decet album, le fameux grain àmood, est réellement communà tous. Une qualité à mettre aucrédit de Dumé (Laurent de Wilde,Sam Karpénia, Ti-Fock…) qui asupervisé toute la réalisation del’album, et de tous les participantsde ce beau projet. SQ’Donso"Donso"(Comet Records)res dans le monde<strong>MONDOMIX</strong>M'aimeC’est à Paris, autour de Pierre-Antoine Grison, connu dans lasphère électro sous le nom deKrazyBaldhead, et de son voisinThomas Guillaume que s’estformalisé en 2004 Donso, unVarious Artists"Arabitronics Lounge Vol.""(Barraka el Farnatshi/DG Diffusion)Label suisse, Barraka el Farnatshia ouvert il y a une vingtained’années les portes de la fusionélectro-maghrébine à coup debélier, heurtant ses rythmiques enbéton armé sur des dancefloorsexigeants. Pour la première fois, ilvient poser sa griffe sur le terraindu lounge, cette dénominationsans grande significationartistique mais ayant l’énormeavantage d’amadouer lesfrileux du beat, de les rassurer.Si tel est votre cas, vous vouslaisserez séduire par ces remixsignés Bill Laswell, TransglobalUnderground ou Recycler, etpar des versions alternatives detitres déjà entendus au fil desproductions du label.Si vous étiez déjà addict, necraignez rien : Pat Jabbar, lecréateur du label, n’a pas baissésa garde, juste ralenti un peu lestempi ! SQ'combo qui emprunte son nom audonso n’goni, luth des chasseursde l’empire mandingue auquels’était initié Thomas lors d’unvoyage au Mali. Ce duo devenuquartet au fil des ans avec l’arrivéede Gédéon Papa Diarra au chantet Guimba Kouyaté à la guitare etau djele n’goni, signe une dizainede titres où l’électro vient ourlerdélicatement les rythmiquesd’Afrique de l’Ouest. Irrigué parune transe tranquille, Donsogagne en profondeur de champà chaque écoute. A noter laprésence de Cheick Tidiane Secksur Mogoya, du koriste BallakéSissoko sur Baara et de MamaniKeïta aux chœurs. SQ'ECOUTEZ sur Mondomix.com avec


Selection / Collection61Dope en stockTexte Smaël BouaiciLabel underground du Cap, African Dope produitles sons les plus excitants d'Afrique du Sud,au moyen d'un modèle économique pragmatique.C'était à la fin des années 90. La scèneélectronique du Cap en était à ses prémices.Le duo de DJ's Krushed & Sortedpassait quelques disques timidement,et le premier nommé, aussi connu sousle nom de Roach, galérait pour trouverdes disques. « A l'époque, c'était difficilede se procurer des beats de qualité, sesouvient-il. Personne ne faisait rien dans lecoin ». Les Sud-Africains appliquent doncla doctrine du Do It Yourself et lancentleur propre label. Après une musique depub lucrative, les deux DJ's associés semettent en recherche de titres pour unecompilation. Ils en trouvent peu, mais signentles groupes locaux Moodphase5iveou Kalahari Surfers. Cinq cents titres etdix ans plus tard, African Dope a largementstimulé la scène sud-africaine et n'aplus aucun mal à trouver des chansons àcompiler.Stratégie 2.0Son développement, le label le doit notammentà une stratégie 2.0. « On a réalisétrès vite qu'on ne pourrait pas devenirviables en s'appuyant sur le marché local,explique Roach. On a donc décidé deviser une audience globale. L'ère digitaleest une bénédiction pour nous ». AfricanDope est aussi un label pragmatique : lavente de disques n'est pas sa principalesource de revenus. Le label a trouvé desfinancements extérieurs, dans l'édition etle licensing, dans les pubs, les films, lesjeux vidéo. Un ou deux gros contrats chaqueannée assurent la stabilité, et parfoisplus : « En mettant en place les projetsmusique de Nokia, on a ramassé 1 millionde rands (monnaie sud-africaine, ndlr), quiont été redistribués au sein de la scèneunderground du Cap. Je crois que personnen'avait jamais fait ça avant ».« Avec les projets musique de Nokia,on a ramassé 1 million de rands,qu'on a redistribué au sein de la scène undergrounddu Cap » RoachContre-cultureDans l'écurie, aux Kalahari Surfers ontsuccédé les Sibot, Spoek Mathambo etTeba, pour le côté ragga hip-hop, et côtéélectro, Felix Laband et les différentsprojets de Markus Wormstorm sont déjàbien installés et remarqués par les labelsétrangers. A l'épicentre de la musiqueunderground du pays, Roach explique lanouvelle exposition des artistes locaux parl'arrivée à maturité de la scène sud-africaine.« Pendant trente ans, nous étionsprivés d'influences et d'audience. C'étaitdur, mais ces années ont paradoxalementcréé une forte contre-culture, chez lesNoirs comme chez les Blancs. Ce n'estpas vrai que pour la musique, le graphismeou le cinéma underground décollentfort aussi. Il y a du carburant pour une expressionartistique forte ».n www.africandope.co.zan°42 Sept/Oct 2010


62Mondomix.com<strong>MONDOMIX</strong> <strong>AIME</strong> !Les meilleures raisons d’aller écouter l’air du tempsLes veillées du RamadanDu 2 au 11 septembreParisDurant la fin de la période duRamadan, l’Institut des Culturesd’Islam organise une sériede débats, de spectacleset d’installations artistiques.Chaque soir, après la tombéede la nuit, des repas et concertsassurent l’ambiance au cœurdu quartier de la Goutte d’Or.Les soirées se poursuivent avecdes débats autour de la placede l’Islam en Europe. L’occasionpour tous d’échanger des idéeset de découvrir, au-delà desclichés, une culture riche etmétissée.Le petit truc en plus : Lagrande soirée de clôture auThéâtre du Chatelet, qui réunittous les artistes étant intervenuspendant les dix jours del’événement.Avec notamment :Natacha Atlas / FedayiPacha / Transglobal Underground/ carte blanche à TitiRobin+guests (Jeanne Cherhal,Brigitte Fontaine…) / Ibn Arabi /François Morellet / Martin Parr/ Hassan Hajjajwww.paris.fr/portail/ici/Portal.lutAgendaFestival d’Ile De FranceDu 5 septembre au 10 octobreIle-de-FranceMusique et nourriture ont descaractéristiques communes.L’une nourrit l’âme, l’autrele corps. Deux arts à traverslesquels le festival a choisi des’embarquer pour un voyagede plus d’un mois, d’unbout à l’autre des continentset de la région Ile-de-France.Vagabondant entre Argentine,Afrique de l’Ouest, Corée,Algérie et Italie, le menu varié,entre musiques, cinéma etgastronomie, offre l’embarrasdu choix. Y compris si l'onaime les plats plus pimentés,avec Factory, festival dans lefestival dédié aux expérimentationset à la musique électronique.Le petit truc en plus :Une série d’ateliers destinésaux musiciens amateurs. Lescurieux pourront notamments’initier aux chants des ilesFéroé, fabriquer des instrumentsen légumes ou se frotterà la chronique musicale radiophonique.Avec notamment :Willie Colón / The Vienna VegetableOrchestra meets GaBLé/ Chapelier fou / Aufgang /Khaled / Baaba Maal / ChangoSpasiuk / Roxana Carabajal /Minino Garay / !!!www.festival-idf.frRetrouvez l’agenda complet,les infos pratiques et les dates des concerts,sorties, festivals, expo surwww.mondomix.com/fr/agenda.php !Laissez-vous guiderpar la sélection des évènements« Mondomix aime » !Zoom FestivalDu 22 au 26 septembreBeauvaisPour son édition zéro, le ZoomFestival se la joue 3D et meten relief trois territoires européens: le Portugal, la Bretagneet la Picardie. Des choixjustifiés par une volonté dedécouvrir d’autres cultures,tant françaises qu’étrangères,et d'éventuellement susciterl’envie de voyager. Uneprogrammation transversalequi fait la part belle auxmusiques actuelles, aux artsnumériques et au cinémad’art et d’essai.Le petit truc en plus : Lesenfants profitent aussi de lafête avec « le mercredi pour lespetits », une journée qui leurest spécialement dédiée. Auprogramme : découvertes descornemuses bretonnes, portugaiseset picarde, goûter decrêpes et cinéma d’animation.Avec notamment :X Makeena / Micronologie /Montgomery / Percubaba /Terrakota / Electric Bazar Cie /Les Ours du Scorffwww.beauvais.fr/SpectaculaireLe 25 et 26 septembreParisSpectaculaire. C’est peut-être lemoyen le plus efficace et le plussympathique de s’y retrouverdans la jungle des sorties culturellesparisiennes. Le tempsd’un week-end, l’événementTribu FestivalDu 24 septembre au 3 octobreDijonEn ce début d’automne,le Tribu Festival risque deréchauffer d’une brise fiévreuseles rues de Dijon. Avec uneprogrammation battant auxrythmes de l’afro-beat, du jazzet de la musique éthiopienne,le festival joue la carte de laqualité et de la diversité, entregrands musiciens, découverteset créations théâtrales. Unweek-end d’évasion musicalequi donnera du piquant à uneville qui n’en manque déjàpas.Le petit truc en plus : L’atelierde pratiques collectives, ouvertaux cuivres et aux percussionnistes,qui propose, autour demusiciens professionnels, devenir revisiter les standards del’âge d’or de la musique éthiopienne.Avec notamment :Ibrahim Maalouf / VincentSégal & Ballaké Sissoko / JimiTenor & Tony Allen / Fanga /Eténèsh Wassié / Zé EthiopianBrass Band / Ebony Boneswww.tribufestival.comprésente, sur les quais de scène,au pied de la Bibliothèque Nationalede France, l’intégralité des sortiesde la capitale et d’Ile-de-France. Unmarché qui offre l’occasion d’unebelle promenade et surtout dedécouvrir une centaine d’extraitsde spectacles inédits.Le petit truc en plus : A borddu Batofar, le Mur du son quipermet d’écouter un artiste tout ens’informant de son actualité.Avec notamment :Brune / Khalid K. / So Kalmery /DuOud / Sylvain Vanot / Kaloomé /Sheraff / Yules / Franck Avitabile /Arman Meliès / British Hawaii / MrLabwww.spectaculaire.comn°42 Sept/Oct 2010


sélections / Dehors 63Nancy Jazz pulsationsDu 6 au 16 octobreNancyComme son nom ne l’indiquepas, Nancy Jazz pulsations’ouvre à toutes les formes demusiques actuelles, notammentrock, chanson, electroou reggae. Le jazz reste,bien entendu, l'un des piliersde l’événement. Un genre tropsouvent cloisonné que le festivalsouhaite rendre accessible à tous.Une des volontés de la manifestationest aussi de se décentraliserdans toute la Lorraine.Le petit truc en plus : Afin que leplus grand nombre puisse profiterde l’événement, le festival proposedes concerts dans les quartiers, lesmilieux hospitaliers et même chezl’habitant.Avec notamment :Sharon Jones & The Dap-Kings /The Yardbirds / John Mayall / RobertAaron feat. Cheick Tidiane Seck &Anthony Joseph / Nnenna Freelon5tet / Jacques Higelin / Alpha Blondy/ John Butler Triowww.nancyjazzpulsations.comLes Nuits EuropéennesDu 8 au 16 octobreStrasbourgPortées par la volonté defavoriser les échanges culturelsen Europe et la circulationdes artistes, les Nuits Européennestransforment Strasbourgen plaque tournantedu multiculturalisme musical.Privilégiant les découvertesde tous horizons et les artistesde qualité, le festival nes’arrête à aucune frontièrede style et, cette année, sonpartenariat avec la ville deSaint-Pétersbourg réservequelques surprises.Le petit truc en plus : LesNuits de la Ville, festival off quipropose une série d’apéroconcertsdans les bars deStrasbourg. Un bon moyen defavoriser la proximité entre lesartistes programmés et leurpublic.Avec notamment :Gablé / Messer Chups / AmparoSanchez / Izia / Jessie Evans/ Iva Nova / Ben l’Oncle Soul /Chapel Hillwww.lesnuits.euLe Grand SouffletDu 7 au 16 octobreIlle-et-VilaineLe Grand Soufflet s’annoncecomme une grande claque.Souvent raillé, taxé de ringard,l’accordéon peut compter surla fervente protection du festivalbreton, entièrement acquisà sa cause. Puisant dansla multitude de cultures quiémaillent leurs thèmes musicauxde l’instrument à vent,la programmation du GrandSoufflet propose, cette annéeen particulier, de partir à ladécouverte de l’accordéonaméricain.Le petit truc en plus : Le festivalcouvre tout le départementet s’installe dans plus de trentecommunes, dont certaines necompte que quelques centainesd’habitants. Une initiativequi permet à tous de profiterde la fête.Avec notamment :Feloche / Rona Hartner & DJTagada / Toninho Ferragutti /L'Orchestre du Grand Consul /Mouss & Hakimwww.legrandsoufflet.frn°42 Sept/Oct 2010


64 Mondomix.com<strong>MONDOMIX</strong> <strong>AIME</strong> !LES CYCLESVoyage en RussieDu 9 au 19 octobreThéâtre de SuresnesA l’occasion de l’année de laRussie, le Théâtre de Suresnesrevêt les apparats du pays dePouchkine pour une épopéethéâtrale, musicale et littéraire.Dix jours d’un voyage poétiqueà travers la Russie, en cabarets,musique et chansons.L’occasion de redécouvrir lesgrands classiques, de Tchaïkovskià Tchekhov, en passant parRachmaninov ou Dostoïevski.Le petit truc en plus : TziganeImaginaire, un spectacle retraçantle parcours des Tziganes,depuis l’Inde jusqu’auxBalkans.Avec notamment :Tzigane Imaginaire, de Jean-Marc Zelwer / Notre cherAnton, de Guillaume Gallienne/ Catherine Salviat / EnsembleKudesy / Volodia Serre / VadimPiankovwww.theatre-suresnes.frVillesdes Musiques du MondeDu 14 Octobre Au 14 novembreSeine-Saint-DenisScènes multicolores d’unegrande diversité culturelle,Aubervilliers, Bobigny, laCourneuve ou encore Pantinsont le théâtre du festival Villedes Musiques du Monde.Des lieux de diversité où lesnationalités et les culturesse croisent et dans lesquelsl'appellation « musique dumonde » prend tout son sens.Pendant près d’un mois,le festival ira à la rencontredes habitants, leur proposantcréations artistiques,concerts, expositions, ateliersou spectacles de danses.Le petit truc en plus :En association avec diversesstructures de diffusions,basées en banlieue, le festivals’engage dans la promotiond’artistes débutants. Lasoirée Coups de pousse du 21octobre va permettre au DjéliMoussa Conde Trio, aux FrèresMakouaya et au Zab’Orchestrad’étendre leur public et leurexpérience professionnelle.Avec notamment :Ben l’Oncle Soul / Mouss &Hakim / Tumi and The Volume/ Vincent Ségal & BallakéSissoko / Tribeka / FanfareNationale du Maliwww.villesdesmusiquesdumonde.com/Pas de déprime automnale pour les grandes salles parisiennes. Le MuséeGuimet célèbre « l’été indien », cycle hommage aux films du réalisateurindien, Satyajit Ray. La Cité de la Musique joue les entremetteuses, entre JimiTénor et Tony Allen pour un afrobeat summit, entre Chucho Valdés et ArchieShepp, pour une soirée afro-jazz de légendes. Singapour et ses orchestrestraditionnels sont à l’honneur au Musée du Quai Branly, tandis que le Théâtredes Abbesses ouvre ses portes aux musiques algériennes, maliennes etbrésiliennes.• 01/09/2010Jimi Tenor & Kabu Kabu meet Tony Allen - Nigéria et FinlandeAfro-Beat, Electro-funk - Musique - Cité de la Musique• 07/09/2010Chucho Valdés et Archie Shepp "Afro-Cuban Project" Cuba et États-Unis -Jazz cubain et Free Jazz -Musique - Cité de la Musique• 11/09/2010Damily - Madagascar - Musique Tapi de la région de TuléarMusée du Quai Branly• 11/09/2010Gonzalo Rubalcaba - Cuba - Piano solo - Musique - Cité de la Musique• 15/09/2010L’œil Intérieur (The Inner Eye) : Film documentaire de Satyajit Ray –Portrait du peintre Binod Bihari Mukherjee - Inde – Musée Guimet• 17 et 18/09/2010Vaibhav Arekar et ses musiciens - Inde - Danse bharatanatyam -Raga Nritya - Musée Guimet• 22/09/2010Bala - Film de Satyajit Ray, hommage à la danseuse indienne BalasaraswatiMusée Guimet• 27/09/2010Satyajit Ray, Le Cinéaste : film documentaire de Shyam Benegal - IndeMusée Guimet• 02/10/2010Kamel El Harrachi : Hommage à Dahmane El Harrachi - AlgérieMusique chaâbi - Théâtre des Abbesses• 08 et 09/10/2010Singapour Chinese Orchestra - Singapour - Musique traditionnelleMusée du Quai Branly• 10/10/2010Andrew Lum and The New Asia Band - SingapourMusique d’Asie du Sud-Est - Musée du Quai Branly• 14/10/2010Ballaké Sissoko et Vincent Segal - Mali et France - Kora et violoncelleMusique - Théâtre des Abbesses• 15 et 16/10/2010Luna Poddar et Ashimbandhu Bhattacharya - Inde - Danse KathakMusée Guimet• 19/10/2010Ishango Opus2 : Une création de Camel Zekri - France et CentrafriqueCréation slam et voix pygmées - Musique - Musée du Quai Branly• 22/10/2010Chants soufis des villes saintes - Sénégal - Chants religieuxCité de la Musique• 23/10/2010Les Roseaux, ensemble d'enfants griots - Sénégal - Tambours sabarMusique, percussions - Cité de la Musique• 23/10/2010John Hébert's Byzantine Monkey - États-Unis - Musique cajunMusée du Quai Branly• 30/10/2010Spokfrevo Orquestra - Brésil - Frevo et Jazz - MusiqueThéâtre des Abbesses


sélections / Dehors 65Festival du ventDu 27 au 31 octobre 2010CalviLe festival vert de Calvi reprend du service, pour unenouvelle campagne festive de sensibilisation auxquestions environnementales. Sont prévus : spectaclesde rue, concerts, rencontres de plasticiens etdébats autour de l’éco-responsable, le tout avec unbilan carbone évidemment réduit.Avec notamment :Nataf / Mustang / Jakez Orchestra / Lalbatros avec Isabelle Autissier / Xavier Juillot/ Laurent Billard / Sylvie Gasnierwww.lefestivalduvent.comFiesta des SudsDu 15 au 23 octobre 2010MarseilleUn vent de liesse souffle sur la citée phocéenne letemps d’une folle semaine de Fiesta des Suds. Cefestival orienté arts et musique du monde prendparfois des airs de feria ou de carnaval. Dans uneatmosphère enflammée, le Dock des Suds, site atypique sur les bords dela Méditerranée, verra se produire grandes têtes d’affiches et petites perlesmusicales des quatre coins du globe. De nombreux lieux de la ville accueillerontégalement installations et expositions.Avec notamment :Mouss et Hakim + invités / Gaëtan Roussel / Daniel Waro / Arno / Youssou NDour /Dub Inc / Naby / Gotan Projectwww.dock-des-suds.org/À LA LOUPEProgrammation de la salle Le CapAunay-sous-bois(93)pour le trimestre octobre-novembre-décembre 2010l 01/10/2010 : Ben l’Oncle Soull 03/10/2010 : The Congosl 08/10/2010 : Alina Orlova+Piers Faccinil 16/10/2010 : Aronas invite Aziz Sahmaouil 23/10/2010 : Sollilaquist Of SoundDo Montebellol Le 4 septembre à l'Européen - Paris© D.R.n°42 Sept/Oct 2010


ABONNEZ-VOUS À<strong>MONDOMIX</strong>ET RECEVEZ le dernier albumde Baloji "Kinshasa succursale"(Kraked/Discograph)dans la limite des stocks disponiblesOui, je souhaite m’abonner àMondomix pour 1 an (soit 6 numéros)au tarif de 29 euros TTC.(envoi en France métropolitaine)NomPrénomAgeAdresseVilleCode PostalPayse-mailOù avez-vous trouvé Mondomix ?Renvoyez-nous votre coupon rempliaccompagné d’un chèque de 29 eurosà l’ordre de Mondomix Service clients à l’adresse :Mondomix Service clients12220 Les AlbresTél : 05.65.80.47.73 Fax : 05.65.63.26.79contact@bopress.frHors France métropolitaine : 34 eurosnous consulter pour tout règlement par virementLe Mondeen culottescourtes> Prochaine parutionLe n°43 (Nov / Dec 2010) de Mondomix sera disponible début Novembre.Retrouvez la liste complète de nos lieux de diffusion surwww.mondomix.com/papierMondomix remercie le Ministère de la Culture pour son soutien et tous les lieux qui accueillent lemagazine dans leurs murs, les FNAC, les magasins Harmonia Mundi, les espaces culturels Leclerc,le réseau Cultura, l’Autre Distribution, Staf Corso ainsi que tous nos partenaires pour leur ouvertured’esprit et leur participation active à la diffusion des musiques du monde.<strong>MONDOMIX</strong> - Rédaction144 - 146 rue des poissonniers – 75018 Paristél. 01 56 03 90 89 fax 01 56 03 90 84redaction@mondomix.comEdité par Mondomix Media S.A.SDirecteur de la publicationMarc Benaïche marc@mondomix.comRédacteur en chefBenjamin MiNiMuM benjamin@mondomix.comRédacteur en chef webJean-Sébastien Josset jean-sebastien.josset@mondomix.netConseiller éditorialPhilippe Krümm philippe@mondomix.comSecrétaire de rédactionBertrand BouardDirection artistiqueStephane Ritzenthaler stephane@mondomix.comCouverture / PhotographieYouri Lenquette www.yourilenquette.comResponsable marketing / partenariatsLaurence Gilleslaurence@mondomix.comtél. 01 56 03 90 86Partenariats / Relations aux publicsYasmina Bartova Zouaoui yasmina@mondomix.comtél. 01 56 03 90 86<strong>MONDOMIX</strong> RegieChefs de publicitéAntoine GirardMathieu Prouxtél. 01 56 03 90 88Ont collaboré à ce numéro :Nadia Aci, Alain Arsac, François Bensignor, Jean Berry, Samuel Bouaci, BertrandBouard, Jean-Pierre Bruneau, Églantine Chabasseur, Bruno Charenton, Franck Cochon,Isadora Dartial, Jacques Denis, Jean-Sebastien Josset, Mathieu Jouen, PatrickLabesse, Anne-Laure Lemancel, Jean-Louis Mingalon, Alexis Munteanu, Jérôme Pichon,Emmanuelle Piganiol, Yannis Ruel, Squaaly, Florence Thireau, Carène Verdon.antoine@mondomix.commathieu@mondomix.comTirage 100 000 exemplairesImpression Rotimpres, EspagneDépôt légal - à parutionN° d’ISSN 1772-8916Copyright Mondomix Média 2009- Gratuit -RéalisationAtelier 144info@atelier144.comtél. 01 56 03 90 87Toute reproduction, représentation, traduction ou adaptation,intégrale ou partielle, quel qu’en soit le procédé, lesupport ou le média, est strictement interdite sans l’autorisationde la société Mondomix Média.Mondomix est imprimésur papier recyclé.

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