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Danyel - Mondomix

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SergentGarciaFiestamuffinpage 14DossierFlamencoOjos de brujopage 16LhasaLe grand retourpage 22<strong>Danyel</strong>WaropageLe maloya en pleine lumière20


ÉditoParis,capitale de la culture arabe-?Cet hiver, pas moins de quatre festivals à Paris qui se déroulent pendant le ramadan-:“Folles nuits berbères” au Cabaret Sauvage, “Belles nuits du ramadan” au Café dela Danse, “Nuits égyptiennes du Ramadan et “L’Algérie des musiques” à l’Institut duMonde Arabe. La France fait ainsi la part belle aux musiques et aux cultures arabes.Ce n’est pas sans oublier l’effort de la mairie de Paris qui, depuis deux ans, célèbreen son palais la fin du ramadan avec musique et douceurs du Maghreb.Ce n’est pas sans oublier non plus le travail de nombreuses maisons de disquesfrançaises qui produisent sans relâche des artistes de cultures arabes. Et qui font émergerchaque année de nouveaux talents, comme tout récemment Abdelhadi el Rharbi,musicien et chanteur d’origine marocaine qui vient de réaliser un disque remarquable(“Ghorba”, chez Utica/Mosaïc Music).Cette place particulière de Paris auprès de la culture arabe a bien sûr une histoire,ainsi que des raisons d’être qui s’inscrivent dans une géopolitique complexe et unentremêlement d’intérêts économiques et culturels.Mais cette place est d’autant plus importante aujourd’hui que le monde arabeprésente des carences culturelles dramatiques qui empirent de jour en jour. C’estce que démontre le récent rapport de l’O.N.U., “Arab Human Development”, publiéle 20 octobre et disponible sur Internet ( * ) .Ce rapport écrit par un collectif d’intellectuels arabes démontre que trois facteursempêchent le développement des pays arabes, à savoir le manque ou l’absencetotale de démocratie, le statut déplorable des femmes et un retard immense dansl’acquisition du savoir-:«-Quelque 65 millions d’arabes adultes, dont les deux tiers sont des femmes, sontanalphabètes. Les taux d’analphabétisme sont beaucoup plus élevés que dans despays beaucoup plus pauvres. Ce problème n’est pas près de disparaître. Actuellement,dix millions d’enfants de 6 à 15 ans ne sont pas scolarisés et, si ces tendancesperdurent, ce nombre augmentera de 40-% d’ici à 2015.-»Bien sûr, cet immense retard culturel amplifie les tensions et les fractures redoutablesgénérées par le 11 septembre, la seconde Intifada et l’intervention américaine enIrak.Si on n’impose pas la démocratie avec des canons, des chewing-gums et des dollarscomme le pense Bush, il semble néanmoins que favoriser l’accès à la connaissance,cesser la discrimination de plus de la moitié de la population et engager de vraispolitiques démocratiques serait, selon ce rapport, un moteur providentiel de développementde la région.Pourtant, à quelques exceptions près, aucun des vingt-deux pays de la ligue arabe, etnotamment ceux du Golfe persique, ne semble prendre ces problèmes à bras le corpset n’engagent aucune politique courageuse pour améliorer le sort de leur population.Les conflits irakien et israélo-palestiniens polarisent toutes les attentions et fontoffice de cache misères. Espérons que Paris ne devienne pas l’ultime bastion d’uneculture arabe émancipée et ouverte sur le monde.Marc Benaïche( * ) : tous les liens sur mondomix.org/papier© Photo couverture : Serge


4 Expressowww.mondomix.org • hiver 2003/04© D. R.L’Annéede la ChineL’Année de la Chine en France, qui adébuté en octobre 2003, présente denombreux spectacles musicaux, dontune bonne partie n’ont jamais étéprésentés dans l’Hexagone.Il y a d’abord les “grosses machines” comme le“Déta- chement rouge féminin”, ballet kitsch issu del’ère maoïste (du 8 octobre au 18 novembre à Lyon,Avignon, Nevers, Montpellier et Vichy) ou une autresuperproduction, “Épouses et concubines”, présentépar le Ballet national de Chine.Les musiques traditionnelles ne sont pas pour autantoubliées. Citons le délicieux opéra du sud de Li YuanXi, “Le miroir aux litchis”, joué au Théâtre de la Villeen octobre 2003 et dont la musique est l’une dessources du nan kouan (ou nan yin), délicate musiquede chambre qui sera présentée au même théâtre le29 novembre. Un joueur de luth dirige une petiteformation “de soie et de bambou”, c’est-à-dired’instruments à cordes et à vent, qui accompagnentun chanteur ou une chanteuse, créant une atmosphèrequi rappelle celle des chants courtois de la findu Moyen-Âge européen.Éminente spécialiste du luth à trois cordes sanxian,Tan Longjian se produira les 18 et le 19 mars 2004à la Maison des Cultures du Monde à Paris. Elle yprésentera son Ensemble qui joue la musique de lacour impériale mandchoue, démantelée avec l’arrivéeau pouvoir de Sun Yat Tsen en 1912. Cette remarquablemusicienne a bénéficié de l’enseignement del’un des derniers survivants de l’orchestre de la Citéinterdite.Un certain nombre de spectacles de marionnettes(à fil ou à gaine), venus de diverses régions et qui sontles ancêtres de l’opéra, seront également présentés,accompagnés par de petits ensembles, alliant souventhautbois, vièles et percussions. Les opéras proprementdits ne seront pas oubliés, avec celui duSichuan qui présentera “Jinzi et la fille fantôme” etdont on n’a pas publié la magnifique représentationde “Serpent Blanc”, qui sera donné cette année parun autre opéra, celui de Shanghai.Le pipa, luth piriforme venu d’Iran, sera représenté ensolo par le concertiste Ling Ling Yu au musée Guimet(Paris) le 6 février. On pourra aussi admirer une expod’instruments de musique rares, du néolithique ànos jours, au Centre culturel de Chine (1 bd de laTour-Maubourg, Paris) du 13 janvier au 28 février.Enfin, parmi bien d’autres manifestations, nous nemanquerons pas les hautbois, tambours et orgues àbouche qui défileront sur les Champs-Élysées pour leNouvel An. Et nous tendrons peut-être une oreille auxcon- certs de musique contemporaine comme ceux,donnés à Lyon les 1 er , 3 et 5 juin, de l’“Opera Tea”de Tan Dun, connu en Europe pour sa musique dufilm “Tigre et dragon”.Espritscréolesau TriptyqueLe festival “Espritscréoles” est une manifestationoriginale quiveut « renouer avec lesesprits d’Afrique ». Il réunitsous la houlette de l’énergiquesaxophoniste David Murray,responsable de ce projet créole,des musiciens guadeloupéenscomme la réunion des tamboursgwoka de Koncept Kabann oule groove plus contemporain duchanteur Dominik Coco. Du 1 erau 3 décembre au Triptyque, àParis.Fabulous Trobadors auZénithLes FabulousTrobadors donnerontun grand concert-balle samedi13 décembre auZénith de Toulouseà 20h30. Les Bombes 2Bal assureront la premièrepartie. La chorale Toulousain Pas Chauvin participera aussià cette soirée. Ce collectif réunit trois Zebda, trois TêtesRaides, quatre Massilia Sound System, les Femmouzes T,les Beautés Vulgaires, un Fly & The Tox, etc. Auparavant,vous pourrez participer (à 18h30) à une initiation aux rondestoulousaines et à un forum associatif dans le hall de la salle.Entrée : 16 € (gratuit pour les moins de 12 ans et plusde 70 ans). Côté discographie, rappelons que les Fabulousont sorti au printemps dernier leur nouvel album “Duels detchatche et autres trucs du folklore toulousain” (chez Tôt ouTard).Rens. : 05 62 73 44 77© D. R.


Expresso 5“Cuba Son” au ciné“Cuba Son” d’Yves Billonest le troisième documentairesur les musiquescubaines à sortir en sallesces dernières années (aprèsl’archipopulaire “Buena Vista SocialClub” de Wim Wenders et “Cuba Feliz”de Karim Dridi). Ce film nous entraînelui aussi à la découverte de musiciensseptuagénaires, Los Jubilados (“lesretraités”). Peu enclins à l’oisiveté (l’und’entre eux émet le souhait de « mourirsur scène-»), ils perpétuent la musiquede leur jeunesse, le très populaire “sonmontuno” de la province d’Oriente. Lagrande force de ce film est de nous fairedécouvrir le peuple, misérable, digne,fort attachant (et rarement filmé) de cetteprovince si éloignée de la Havane et oùrègne une culture particulière, due enpartie aux descendants d’une importantecommunauté venue au dix-neuvièmesiècle de l’île voisine (et alors française)de St Domingue.Deux scènes frappent particulièrement-:un enterrement à Santiago où une fouleimposante accompagnée d’un orchestreprimitif (on songe aux raras haïtiens)emmène un défunt jusqu’à sa dernièredemeure ; et l’unique séquence ruralefilmée dans un village de la montagneoù l’on se croirait du côté de Port-au-Prince voire en Afrique. Le fil conducteurdu film est fourni par Azuquita,salsero panaméen, ancien de la FaniaAll Stars new-yorkaise installé à Paris.Et qui, ayant rencontré Los Jubiladosen Europe, décide de les retrouver chezeux, prétexte à de superbes “descargas”et à des improvisations verbalessur le “son” où sa faconde et sa bonnehumeur font merveille.Vrai documentariste, Yves Billon connaîtla force de ses images saisies au vol.Il sait traquer l’insolite comme ce personnagesous la pluie aperçu à la fin. Etgrâce lui soit rendue de nous épargnertout fastidieux commentaire. Dommagecependant qu’un trop long prologue enFrance ainsi qu’une sempiternelle etinutile session d’enregistrement auxstudios Egrem de La Havane plombentun peu une œuvre aussi riche etvivante.Jean-Pierre BruneauGuerreiro et Frolovaà ParisAprès avoir triomphé en mai au Théâtre des Abbesses,l’émouvante fadista Katia Guerreiro revient à Paris à la Maison des Cultures duMonde les 6 et 7 décembre. Les 16 et 17 décembre au même endroit, c’est ElenaFrolova qui viendra entrouvrir les portes de son univers romantique et slave.Du bluegrassà Paris© Benjamin MiNiMuMElena Frolova© D. R.Peter Rowan, figure culte dubluegrass dit progressif — et grandcompositeur-guitariste-mandoliniste-chanteuret yodeleur — donne un unique concerten France le 9 décembre, à l’Hôtel du Nordà Paris. Musicien prolifique (une vingtained’albums sous son nom), généreux et engagé,il fit ses débuts au sein des légendaires BlueGrass Boys de Bill Monroe. Puis il appartintà une myriade de formations ou groupestrès créatifs où il côtoya des gens aussi diversque Bill Keith, David Grisman, Jerry Garcia,Ramblin’ Jack Elliott, Vassar Clements, SteveEarle, Norman Blake, Ricky Skaggs ou encorel’accordéoniste tex-mex Flaco Jimenez.J.-P. B.


6 Expressowww.mondomix.org • hiver 2003/04© Patrick EocheEn concert- • 05/12 Théâtre du Garde Chasse aux Lilas (93) • 12/12 Centre culturel Saint Exupéry à Reims.Album “Absolut jazz vocal” (RCA/BMG).Absolut jazz vocalAmateurs de Bobby McFerrin, Take6,Double Six, ne ratez pas le spectaclemusical des Grandes Gueules.C’est sur scène que ce groupe a cappella prend toutesa valeur. Les lumières s’allument ; apparaissent quatrefemmes et deux hommes aux pieds nus, s’amusantavec leurs voix et leurs corps tels six enfants construisantleur monde imaginaire. Ils jouent avec les genresmusicaux (jazz, world, techno) mais aussi avec lesmots (allitérations, assonances, poésie, humour), leursvoix et leur corps (amplification de percussions thoraciques,de frottements et claquements avec les pieds,les mains, la langue…), et les lumières (jeu d’ombreset d’aplats monochromes). Les voix ne sont pas exceptionnellesmais s’intègrent parfaitement les unesaux autres. Le septième membre du groupe, c’estl’ordinateur qui pilote les effets de voix, le mixage etles lumières. Mais attention, pas de triche-! Le concertest entièrement “live”-: pas de bande son, nide samples. Difficile de dé- crire ce spectacle quioscille entre concert vocal, danse contemporaine,tableaux impressionnistes et humour bon enfant. Entout cas, on aimerait bien que ce voyage aux accentsoniriques se prolonge. Ne vous fiez pas à l’allureA place calledJamaicaIl y a un peu plus d’un ansortait le CD “A place calledJamaica” (Makasound/M10), sublimeéchantillon sonore de la prolifiqueproduction reggae roots et lovers deDerrick Harriott. Contributeur honorableau dynamisme de la scène de Kingston àtravers ses multiples activités (chanteur,compositeur, producteur, distributeur), Mister Harriottassemble ici des morceaux parus entre 1967 et 1976sur ses labels Crystal et Move and Groove Records, jouéspar la crème des musiciens de studio de l’époque (SlyDunbar, Robbie Shakespeare, Dean Fraser, Scully…).Harriott lui-même ouvre la danse avec le poignantMessage from a blackman, reprise des Temptations.S’ensuivent des titres rares comme Lips of wine (chantéavec toute l’assurance d’un lover par un Dennis Brownâgé de 12 ans), le tubesque Shaft des Chosen Few, lepercutant Ugly days de Winston Mc Anuff, auteur duhit Malcolm X interprété ici par son ami Earl 16. JuniorMurvin et Horace Andy sont aussi à l’affiche de cettecompilation sans fausse note.“Rendez-vous folk !”à MontréalSous l’égide de Folk Alliance Canada, Folquébec,poussé par Gilles Garant et son association la SPDTQ,les tenants des musiques du monde de la Belle Province ont proposé du 20au 24 novembre de nombreux showcases riches de découvertes. Histoire devous appâter, nous sommes tombés sous le charme de (entre autres) Ivy,Gérald Laroche, Genticorum, Harry Manx, Sandy Silva & Laura Risk, le Ventdu Nord, Michael Jérôme Browne, Galitcha… Pour en savoir plus sur ce beaumonde que vous ne connaissez sans doute pas encore, suivez leurs sites :www.ivyetreggie.comwww.geraldlaroche.comwww.genticorum.comwww.harrymanx.comwww.sandysilvalaurarisk.comwww.leventdunord.comwww.michaeljeromebrowne.comwww.galitcha.comRésidence d’artistes étrangers à ParisLa Mairie de Paris et le ministère des Affaires étrangères lancent un appel àcandidature aux artistes étrangers, toutes disciplines confondues, pour un programmed’accueil. Celui-ci se déroulera en résidence au Couvent des Récollets,lieu prestigieux au cœur de Paris. La résidence durera de trois à douze mois etdevra servir à la réalisation d’un projet artistique à Paris. Pour plus d’infos-etaussi le dossier de candidature, consultez le site indiqué ci-dessous.Site Internet : http://www.france.diplomatie.fr/culture/residence_artistes/index.htmGilles Garand© D. R.


Expresso 7La Fnac aime le nouvel album deAltre Latitudinisortie le 24 octobre© D. R.ModakaOuvert depuis le mardi 18 novembre dernier, la boutique Modakase veut «-un petit bazar ethnique » où l’on peut trouver un grand nombre d’objets et demeubles réalisés par des artisans de différentes communautés. Un lieu qui permet d’accordervotre intérieur au son qui sort de vos baffles.Modaka — 1/3 rue Basfroi — 75011 Paris. Tél. : 01 43 71 86 15.Site Internet modaka11@yahoo.frFestival GallianoL’enfant terrible de l’afro electro faitson festival. En huit concerts et quatre soirées,Frédéric Galliano présente les artistes d’Afrique del’Ouest qu’il a signé sur son label Frikyiwa. DiéfadimaKanté, Filifin et N’Gou Bagayoko (guitariste deNahawa Doumbia) sont de la partie du 3 au 6 décembreau China Club à Paris.France, mère patrie de la world music ?Pour la première fois, les services culturels de l’ambassade de France aux États-Unis et leFrench Music Export Office promouvoient la world en grand en sponsorisant un mégafestivalappelé “GlobalFEST” qui aura lieu le 10 janvier 2004 à New York. Seize artistes ou groupesworld ayant quelques liens avec la France à des titres divers comme Raul Paz, DJ Dolores,Susheela Raman, Mariza, Rajery, Tania Libertad, Diego El Cigala, Mercan Dede, Amina ouencore Les Yeux Noirs s’y produiront.Infos sur site Internet www.rockpaperscissors.biz/go/GlobalFESTProduction Com’ NicoleCourtois Higelinharmonia mundidistribution


8 Expressowww.mondomix.org • hiver 2003/04Barrio ChinoMusic-halld’Algérie© Photos : D. R.Les Orientalesà MogadorEspagnols, Cubains et Algériensrendent ensemble hommage auxriches heures du music-hall d’Algérie.Contacté en 2001 pour l’anniversaire de la créationde la ville d’Oran, Gil Aniorte-Paz, un musiciende famille oranaise, s’attelle avec son Barrio Chino(huit musiciens) à ce faste projet. Il entre d’aborden contact avec Line Monty. Mais «-ne voulant pasfaire du communautarisme, on a ouvert au music-halld’Algérie », il se met en rapport avec Farid Touabi,directeur de Radio Badja qui s’occupe de l’orchestrede ladite station. «-J’ai décidé de travailler avecl’orchestre à cordes (en juin 2002). Au départ, la rencontreentre Cubains et Algériens ne semblait pas évidente.Mais peu à peu, grâce a la musique, les deuxgroupes se sont soudés. Depuis quelques années,j’avais beaucoup travaillé avec Maurice el Medioni etcela m’a énormement servi. Je m’étais vraiment réappropriéune culture que je regardais de loin. Ensuite,nous avons travaillé avec le grand orchestre danslequel on a sélectionné les musiciens qui pouvaientjouer traditionnel et moderne. Certains savaient lirela musique, d’autres pas. Cette musique n’a jamaisété écrite. On a donc réalisé, avec mon camaradeAlejandro Del Valle, un travail d’orchestrationsur trente morceaux. On a respecté les préludes,les rythmes, les gammes mais avec une approcheactuelle. Une semaine de répétition et deux concertsont parachevé le travail sur la terre algérienne. Le travails’est poursuivi en France par deux résidences àMarseille en janvier et en mars. À chaque fois, on ajoué devant un public nombreux, constitué de personnesproches de l’Algérie, des pieds-noirs et desAlgériens. Avec ma sœur chanteuse, on avait beaucoupœuvré dans les quartiers nord de cette ville. »Au mois de juillet dernier, ils devaient se produireaux “Francofolies” mais le festival a été annulé. «-Ona présenté notre spectacle à l’arraché dans la rue.C’était fondamental. Il fallait que toutes ces heuresde travail aboutissent. » Un concert à Mogador asuivi en septembre. «-Aujourd’hui, le spectacle estpresque achevé. Il manque encore un morceau pourl’orchestre et la rencontre sera complète. L’orchestrearbore aujourd’hui une très belle couleur. La fusiona eu lieu. On a l’impression de rouler dans une magnifiquevoiture de course.-» Gil Aniorte-Paz espèredécrocher une date cet hiver à Paris. «-Évidemment,nous travaillons aussi sur un disque. Et nous devrionsêtre à nouveau programmés aux “Francofolies”. »L’aventure ne fait que commencer.Paul BarnenSite Internet www.archipeletcompagnie.orgL’Irlande à la VilletteDébut octobre, la Cité de la Musique à la Villettea eu la riche idée de vivre pendant quatre joursau rythme de la musique irlandaise. La programmationplurielle, articulée autour de Donal Lunny, n’avait rien de racoleuse.Au-delà des concerts, l’idée d’une animation danse était louable.Hélas, les “instructions” lues dans un français incompréhensiblea parfois découragé les plus motivés. Il ne fallait pas manquer laprestation du groupe Lunasa et le jeu superbe de Mairtin O’Connor.Repéré mi-juillet 2002 à Saint-Chartier, Lunasa a proposé à laVillette une prestation très différente. La variation des arrangementset des ornementations fait que chacun de leurs concertsest unique. Au-delà de la maestria de leur jeu, ces cinq instrumentistesexpérimentés font preuve d’une cohésion remarquable.L’énergie est palpable, la maîtrise totale, le jeu vif et créatif. MartinO’Connor, accordéoniste de groupes reconnus dès la fin des années1970, a éclaboussé le concert d’un dimanche après-midi. Son jeuest tellement riche qu’on comprend aisément pourquoi il a réaliséquatre albums solo. Il a dynamisé et mis en valeur la prestation desmusiciens invités par Donal Lunny pour clôturer ces quatre jours.On espère le revoir bientôt et, pourquoi pas, en soliste : il excelledans ce rôle. Et si on remettait ça l’année prochaine ?Bernard BouquinAlbums de Lunasa “The Other World”, “The Merry Sisters of Fate”, “Redwood”.Site Internet : http://www.lunasa.ieAlbums de Mairtin O’Connor “The road west”, “Chatterbox”, “Perpetual Motion”, “Rain of Light”.Site Internet : http://www.mairtinoconnor.comLe raï par TenailleAvec “Le raï —De la bâtardise àla reconnaissanceinternationale”,Frank Tenaillesigne le derniernuméro del’excellente (maisaujourd’hui défunte)collection delivres de la Citéde la Musique(chez Actes Sud), incluantun CD et traitant desmusiques du monde.Voici de quoi tout comprendresur cet importantcourant musical algérien,y compris et surtout sonenvironnement humain,géographique et politique. Tenaille écrit bien et donne un regardengagé sur une musique dont on n’entend trop souvent que les starsglorifiées par le show-business. Le raï est bien plus que cela. Ce livrele prouve et l’explique parfaitement. Il est encore temps de se le procureretde terminer de façon intelligente une année consacrée à l’Algérie.Étienne Bours


Expresso 9Un Cabaret Sauvagefollement berbère-Clowns trapézistes, loukoums, acrobates équilibristes,transe gnawa, crêpes au miel, pyramides humaines marocaines: toujours aussi folles et toujours aussi berbères, lesnuits au Cabaret Sauvage jusqu’au 3 janvier 2004. KarimZiad sera le “mâalem de cérémonie” de la 3 e édition du festival. Ce batteur derenom et véritable homme-orchestre était déjà chargé de la direction artistique duFestival de musique gnawa d’Essaouira et s’apprête à sortir son deuxième album,“Chabiba”. Pour les “Folles nuits berbères”, il orchestrera la mise en musique desdifférents numéros de cirque et veillera à la-“mise en ambiance” de ces trentesoirées de folie. Pour l’occasion, il dit lui-même avoir puisé ses rythmes aussibien dans le Maghreb que dans les Balkans. Avec lui : Michel Alibo (basse),David Aubaile (flûtes, piano-claviers), Alain Debiossat et Vincent Mascart (saxophone),Abdenour Djemaï (guitare, chant), Mohamed Menni (chœurs, percus),Aziz Sahmaoui (guembri, chant, percus) et Hichem Takaoute (basse). Et sur lapiste aux étoiles-: Angelina (trapèze, clown), la troupe Akalay (acrobates, pyramidehumaine), Stéphane Haffner et Emiliano Simeoni (duo acrobatique sol ettissu) et Marin (sangles aériennes).Yasrine Mouaatarif“Folles nuits berbères” jusqu’au 03/01/2004 au Cabaret Sauvage, parc de La Villette(accès piéton par le 59 bd Mac Donald), Paris 19 e .Réservations- 01 42 09 01 09.Site Internet www.cabaretsauvage.comPlanètes musiquesC ie BismutLe festival “Planètesmusiques” se poursuitjusqu’au 12 décembre à laMaroquinerie à Paris. La soiréedu 28 novembre sera consacrée aux“Itinérances méditerranéennes” avec la C ieBismut (Languedoc) , ainsi que FrançoiseAtlan & Nabil Khalidi (Espagne)-; celle du5 décembre aux “Cordes sensibles” avecMarc Anthony (Centre) + Justin Valli Trio(Madagascar). Enfin, le 12 du même mois,ce sera au tour du duo Lors Jouin & SoigSibéril (Bretagne) et du Trio DCA (Centre).Rens. : 01 40 33 30 60.Françoise AtlanMarc AnthonyTrio DCAJustin Valli Trio


10 Expressowww.mondomix.org • hiver 2003/04© D. R., Marc Robine — photo ci-dessus — se vivait multiple-: musicien,luthier, chanteur, auteur, compositeur, journaliste, historien de lachanson. Une trajectoire marquée par deux influences majeures,celle des folksingers façon Woody Guthrie ou Pete Seeger, cellede la chanson. Ainsi a-t-il participé à multiples formations (PerlinpinpinFolc, Bière Brune et Misère Noire, Long Courrier, Tulipe Noire…), gravéune dizaine d’albums, écrit plusieurs livres (dont un Brassens et unBrel), réalisé pour EPM (à l’instigation de François Dacla) “L’anthologiede la chanson française” (huit volumes et 90 CDs suivi de lacollection “Poètes et chansons”). Une activité protéiforme, brutalementarrêtée le 26 août dernier, dans la région de Nîmes, où ilvenait de s’installer. Marc Robine avait 53 ans.Salut les artistes, François Béranger, même esprit libertaire que Marc Robine,même affinité pour le folksong américain, la country, la chansonrive gauche, fut une des figures emblématiques de la chansoncontestataire des années 70. Ex-ouvrier chez Renault (avant defaire du théâtre, ou de travailler dans le cinéma et à l’O.R.T.F.dans le service de Pierre Schaeffer), il participa après la parutionde son premier album“Tranche de vie” (1969) à toutes les mobilisations(le combat des Lip, le Joint Français, contre le nucléaire,les taulards, etc.) et fêtes politiques (L’Humanité, PSU, LutteOuvrière, Libération). Il fut aussi un des premiers, lui qui avaitété marqué par sa guerre d’Algérie, à soutenir l’expression d’unemu- sique africaine immigrée (cf. sa chanson Mamadou m’a dit etsa participation à la naissance d’“Africa fête”). Comme il fut l’undes premiers à quitter une multinationale (CBS) pour un label indé(L’Escargot/Sibecar). Ces dernières années, il nous avait régalé deses retours et de ses chansons réorchestrées. Il venait d’enregistrerun seizième album consacré au Québécois Félix Leclerc. L’héritierspirituel d’Aristide Bruant et de Fréhel est décédé à 66 ans, le14 octobre à Sauve (Gard), victime d’un cancer., Christian Lanau était le violoniste du mythique PerlinpinpinFolc avant de fonder, avec des rescapés de cette aventure et dela compagnie Chez Bousca, le groupe Ténarèze. On lui devaitaussi l’Ensemble des violons de Gascogne et une implication dans“La Marseillaise” de Jean-Paul Goude en 1989. Bien sûr, il fut unacteur important du réseau des musiques en Midi-Pyrénées (de larevue Pastel, liée au conservatoire occitan, à nombre de formationsde terrain). Christian Lannau nous a quitté le 1 er octobre dans sa53 e année.Frank TenailleMarc Robine-: discographie chez EPM (188 bd Voltaire, 75011 Paris). Site Internet-: www.epm.frFrançois Béranger : discographie chez Futur Acoustic/Musidisc. Site Internet-: www.futur-acoustic.frChristian Lanau : discographie Compagnie des Neuf tribus. Site Internet : http://www.art-scenes.comLire aussi la revue Chorus (BP 28 — 28270 Brezolles). Site Internet : www.club-internet.fr/chorus/© D. R.Prix RFIMusiquesdu Monde2003Le rapper sénégalais DidierAwadi a remporté le prix RFIMusiques du Monde présidé cetteannée par Youssou N’Dour. Ex-membredu duo Positive Black Soul, DidierAwadi entame une carrière solo et a sorticette année un premier CD : “Paroled’honneur”. Dans une interview donnéeau quotidien sénégalais Le Soleil, il atenu a dédié son prix à Jean Hélène, journalistede RFI assassiné à Abidjan.Musiques nomadesà NouakchottDu 8 au 12 février 2004, PremierFestival International des MusiquesNomades à Nouakchott en Mauritanie.Le Centre culturel français de Nouakchott et legouvernement mauritanien ont confié à BenoîtThiebergien (Directeur du Festival des 38 eRugissants à Grenoble) la réalisation d’une manifestationculturelle unique qui a pour vocation de créerun carrefour des cultures africaines et maures.www.musiquesnomades.com© D. R.


Zoom 11Les nuits groovyd’Addis AbebaLa collection “Éthiopiques” racontel’histoire d’un pays paradoxal,autrefois miné par la dictature, lesguerres et les famines, mais dont lestalentueux musiciens étaient capablesde métamorphoser un orchestremilitaire en redoutable machine àdanser.Pantalons pattes d’éléphant, jupes légères et souriresenjôleurs-; guitares funky, cuivres tranchants et grooveà gogo-: l’Éthiopie des années 1960 et 1970 se la jouefrime et swing. Accompagnés par les grands orchestrestraditionnels (ceux de la police, de l’armée et de la Gardeimpériale), une génération de chanteuses et de chanteursaudacieux écume alors théâtres et soirées des grandshôtels d’Addis Abeba. Leurs déhanchements frénétiquesrappellent ceux de James Brown. Mais si le modèle estaméricain —-en Erythrée, la radio d’une base militaire U.S.diffuse dans la Corne de l’Afrique les nouveautés country,soul ou rhythm’n’blues —, le répertoire, lui, estéthiopien et exclusivement chanté en amharique. Laconfrontation est explosive-: basses, batteries, guitares,orgues et cuivres (pas deux ou trois souffleurs mais dixou quinze-!) rythment sans relâche les nuits abyssines.Mais la dictature stalinienne qui s’empare du pouvoir àla chute de l’empereur Hailé Sélassié, en 1974, sifflebrutalement la fin de la récréation. Résultat, au termede dix-huit années de couvre-feu et de répression féroce,les Éthiopiens ont oublié leurs années folles. Une trentainede 33 tours et quelque cinq cents 45 tours ontlongtemps moisi, éparpillés au fond des caves. Sans les“Éthiopiques” ( * ) , ces joyaux, témoin de ce SwingingAddis à la saveur unique, seraient tombés dans l’oubli.Les trois quarts de la collection sont consacrés à cesheures richement cuivrées de la musique éthiopienne.Et la source ne semble pas vouloir se tarir-: le dix-septièmevolume, publié fin novembre, raconte l’histoirede Tlahoun Gèssèssè, vedette absolue et vétéran de lascène moderne éthiopienne. Sa voix puissante rivalisesans peine avec les prouesses vocales de MahmoudAhmed et d’Alèmayèhu Eshèté, autres figures emblématiquesdes “Éthiopiques”. Confronté à la furieuse interprétationet aux arrangements dantesques de Ras-HenBetcha, l’auditeur en reste pantois-: les cuivres atomiquessemblent avoir été composés par un émule desSex Pistols. L’impérial Body Guard Band, l’Orchestre dela garde impériale d’Hailé Sélassié, lui-même, est à lamanœuvre et accompagne Tlahoun Gèssèssè. Une véritabletornade punk dans les jardins de l’Empereur.«-Une terre de paradoxes-»Au rythme de trois volumes tous les ans depuis 1998,-FrancisFalceto, directeur artistique de la collection“Les Éthiopiques”,dépoussière patiemment les riches heures de la production musicaleéthiopienne. Et il lui reste encore du travail.Quelle était, à l’origine, l’ambition de la collection“Éthiopiques”-?Partager avec le plus grand nombre une musique totalementinconnue du public. Y compris des spécialistes.De Mahmoud Ahmed aux troubadours azmaris en passant par lamusique ethnique des Konso, quelle est la cohérence de ce travail ?C’est une collection ouverte, quelque chose comme l’ambassadesonore de la musique éthiopienne. Une orientation affirmée dès ledeuxième volume, entièrement consacré aux azmaris, les chansonnierstraditionnels. Mais il est vrai que le point d’orgue du projetdemeure la musique urbaine des années 1970.Au moins vingt-cinq disques sont finalement prévus. Commentrelancer la collection-?Il reste quantité de chefs-d’œuvre inexploités. Les licences signéesentre Buda Musique et divers labels du pays en constituent unepreuve concrète. Il n’y aura pas de fonds de tiroirs.Qu’avez-vous compris de l’Éthiopie en menant ce travail ?C’est un pays très différent de ses voisins africains, ne serait-cequ’en raison d’une tradition écrite, vieille en Éthiopie de trois milleans. Ce pays n’a jamais été durablement colonisé. Pourtant, sesinfluences musicales sont occidentales et certainement pas africaines.C’est une terre de paradoxes.Propos recueillis par Philippe Bordier.Une cuisine méconnueTefera, patron du restaurant Ethiopia, un des premiers établissementsdu genre implanté à Paris, dès 1995, vient de porter sa capacité à90 couverts en ouvrant La Reine de Saba. Accueil incomparable etmets délicieux sont appréciés par une clientèle cosmopolite, ravie dedécouvrir ou de renouer avec les saveurs de la cuisine éthiopienne.Quelles sont les principales caractéristiques de cette cuisine-?Elle est sincère et savoureuse. Elle repose sur le traditionnelBeyeaynetou, un grand plat où les viandes sont accompagnées dedifférents légumes et sauces, épicées ou non. On le déguste avecla galette d’injera, incontournable en Éthiopie.Certains ingrédients comme le tef (la céréale indispensable àla confection de l’injera) justement, sont pourtant introuvablesen France.Le blé noir permet d’obtenir une galette dont le goût et la texturesont très proches de l’injera. Le talent de la cuisinière, ma femme,fait le reste.En Éthiopie, on mange avec les doigts. Chez vous aussi-?Oui. Je procède moi-même à la démonstration quand les clientssont décontenancés. Mais je propose un couvert s’ils ne s’adaptentpas.La cuisine éthiopienne est en vogue actuellement. Pourquoi-?Elle est originale, n’est pas commercialisée en barquettes et lesproduits sont frais. C’est une cuisine de qualité.Propos recueillis par Philippe Bordier.Restaurants Ethiopia / La Reine de Saba — 91 rue du CheminVert — 75011 Paris. Tél. 01 49 29 99 68. Menus à partir de 15 €.


12@www.mondomix.org • hiver 2003/04Cadeaux d’artistesDans cette rubrique, retrouvez des adresses de sites Internetoù des artistes vous invitent à télécharger leur musique gratuitement.Sans arpenter les allées du dernier salon“Womex” à Séville, sans fréquenter lesbars obscurs de Jerez de la Frontera ou lesbistrots espagnols des mégapoles à traversle monde, il est aujourd’hui possible d’avoirune oreille sur les dernières nouveautés flamencovia le site www.flamenco-world.com.Là, en quelques judicieux coups de clics,vous pourrez découvrir des extraits sonoresen mp3 et Real Audio de ce registre musicaloù rivalisent puristes exigeants et audacieuxnovateurs. Parmi les premiers, Diego el Cigalaoffre son Abriendo la Mañana. Irréprochable.Quant aux Barcelonais d’Ojos de Brujo, ilschantent d’une voix moins marquée par lesaléas de la vie leur Ventilaor R-80. Grifféhip hop et extrait de Bari, leur deuxièmeet dernier opus (commercialisé depuis peuen France par Mosaic Music), ce titre leura entre autres valu d’être sélectionné auxBBC Awards 2003 dans la catégorie worldmusic. Toujours sur ce site, vous trouverezdes infos récentes comme l’annonce de lasortie en 2004 du nouvel album de Juan PeñaFernández. Il est plus connu sous son surnomd’El Lebrijano pour avoir enregistré en compagniede l’Or- chestre Arabo-Andalou deTanger, il y a de cela une vingtaine d’années,Encuentro, première fusion des musiquesdes deux rives du détroit de Gibraltar.Ayenn, lui, est né à New York de parents haïtiens.Adepte du konpa haïtien et du zoukantillais qu’il emberlificote à loisir, ce jeunehomme propose Pouki Lanmou (“Pourquoil’amour”), un premier single qui s’inscrit dansla veine zouk love en vogue dans les Caraïbesfrançaises. Romance sucrée, ce titre est lasélection du moment de www.zoukarchive.com.Sur ce site, vous pourrez aussi déguster deuxfois quarante-cinq minutes de zouk mixé parDJ Patou. Aux antipodes ou presque, à Bandung,principale ville de la province de Sundaà quelques heures de route de capitale Jakarta(Java) ; Sabah Habas Mustapha, l’un des mythiquesmembres des 3 Mustapha 3 (les précurseursde la cosmopop avec les Allemandsde Dissidenten), s’est associé avec le JugulaAllStars. Ensemble, ils ont enregistré deuxalbums (“Jalan Kopo” et “So la Li”) sur lelabel Kartini Music. Trois titres du dernieropus que l’on peut aisément qualifier d’indofolk-surfmusic, sont téléchargeable sur lesite de Kartini Music (http://kartini-music.com). Très proche sur le plan géographique,Spacebar est un collectif malaisien sousinfluence drum’n’bass. Sur la page qui leurest consacrée sur le site voué aux musiquesurbaines de Malaisie (http://malaise.malscene.net), ce collectif installe un remix de Borneo,titre du groupe culte de l’underground electrode Kuala Lumpur, Herb Vendors. C’est doncdans ces contrées éloignées que s’achèvecette nouvelle sélection de mp3 gracieusementofferts par leurs créateurs. Si vous aussi, voussouhaitez nous faire partager vos découvertes,n’hésitez pas.Les CosmoDJs-: DJ Tibor & Big Buddhacosmodjs@mondomix.comhttp://www.zoukarchive.com/findex.shtmlRéférence flamencohttp://www.flamenco-world.com/Élégant et complet, FlamencoWorld est réalisé à Madrid.Son contenu est consultableen anglais et en espagnol. Ilse décompose en trois grandessections. Un magazine quicomprend de nombreuses bioset des minisites d’artistes, desinterviews illustrées et desgaleries photos de grandequalité. Dans le magasin, onpeut acheter de très nombreuxdisques vendus au prix fortou en solde, des livres, VHS etDVDs. La section service proposedes cours d’espagnol et deflamenco. Elle s’adresse aussiaux professionnels en leur proposantde servir d’intermédiaireentre les artistes ou leursagents. Ajoutez à cela unebelle poignée de vidéos et degénéreux extraits audio, et vousobtenez un site musicalexemplaire.Le quotidiende la culture flamencahttp://www.flamenco-news.comCe récent journal numériquesévillan rédigé en castillan eten anglais possède une interfacesobre, pratique et attractive.Cinq jours sur sept, desbrèves, compte-rendus, photoset interviews écrites sont misen ligne, restant accessiblesune semaine. L’agenda d’événementss’étale sur un mois.Dans la section opinion,on trouve des articles sur le31 e congrès d’art flamenco deBadalona et la 3e féria mondialede Séville. On peut lire desprises de position sur le métissagenaturel de cette musiqueet même un rapport sur lesrecherches de scientifiques surle gène du cante jondo. Un sitequi doit passionner les aficionadoset intriguer les autres.El flamencoen Americahttp://www.flamenco.orgCe site américain parle de laconquête du duende à l’Ouest.Il dresse une liste des artisteset des cours de guitares ou dedanses en Californie et tentede maîtriser celle des écolesflamenco dans le monde.Il raconte l’histoire de cettemusique espagnole et révèleles adresses de quelques lieuxhistoriques ou actuels dansla péninsule ibérique.Flamenco.org offre une interfacepour le moins scolaire,quelques MIDIfiles, un lexiquedes mots gitans et flamenco,de nombreux liens cassés et undépart pour un Flamenco Ringen langue anglaise drôlementexotique.Camarón de la Islasur Internethttp://www.terra.es/personal5/camaronleyenda/camaron.htmLa leyenda del flamenco est unsite d’un fan argentin de JoséMonge Cruz. Après avoir choisientre la version anglaise ou espagnoleon trouve de nombreux documentsphotos, soixante-dix chansonset autant de pages classéespar période (classique, rénovateur,légende, Paris 1987). Chaquepage contient les lettras, la distribucionmais aussi un lien audiode bonne résolution directementencodé en streaming dans la page.Ce procédé appelé Streamingpages ne fonctionne que sur unPC muni d’au minimum Windows95, Internet explorer 6, etWindows Media Player 7 et d’unebonne connexion. Apparemment ilfaut aussi tomber sur un momentoù leur serveur audio n’est pas enpanne et prier un peu la viergeMarie. Mais quand ça marche,c’est génial.L’officiel Paco de Luciahttp://www.pacodelucia.orgParce qu’il est encore vivant ettoujours dans la course, Pacode Lucia possède un site trèsperformant (en Flash et html).Pour les textes, il vaut mieuxparler espagnol, la moitié desnews ne sont pas traduites.La section multimédia présenteune longue interview en v.o.entrecoupées d’images de concert; et la galerie, une quinzainede photos de scènes plusune dizaine de photosd’amateurs. Les pochettes desvingt-trois albums enregistréspar le guitariste ont été scannéeset sont parfois accompagnéesd’extrait sonores.Le magasin vend guitares etpartitions. Le chat et le forumsont en action et le calendrierannonce une tournée de deuxmois en début 2004 aux États-Unis.Benjamin MiNiMuM


EncycloChaque mois, Étienne Bours nous donne des définitionsde mots autour de la world music, extraites de son“Dictionnaire thématique des musiques du monde”(éditions Fayard). Prix du livre de l’Académie Charles Cros.MaloyaMusique traditionnelle, chanson (Réunion).Le maloya est un style musical, chanté et dansé, de l’île de la Réunion. Ses origines remontentsans doute au temps de l’esclavage mais le style lui-même s’est développé durant le XIX e siècle.Le maloya fait en quelque sorte partie d’un rituel sacré qui est à la fois culte des ancêtreset séance de guérison. Ce rituel s’appelle kabaré. Le maloya en est la phase finale et le côtéprofane. Les Réunionnais pratiquaient ce culte pour rester en contact avec les esprits desancêtres, puis se mettaient à chanter et danser le maloya. Celui-ci a failli disparaître, parceque récupéré et assimilé par les pouvoirs publics. Heureusement, quelques familles le pratiquaientencore et l’ont littéralement sauvé en lui conservant son côté traditionnel et populaire,ce que fit par exemple la famille de Firmin Viry. Le maloya se joue sur accompagnement depercussions-: le grand tambour “rouleur”, le triangle, l’arc musical “bobre”, le “kayamb”, caisseplate faite de hampes de fleurs de canne à sucre et que l’on secoue horizontalement. À cespercussions, s’ajoutent aujourd’hui quelques apports récents comme le djembé. Sur des rythmesondulants, lancinants, parfois même mélancoliques, mais toujours dansants et chaloupants,le chanteur entonne un chant en créole que reprennent en chœur les participants. Le chantparle en images savoureuses de la vie quotidienne, des amours, du pays, des oiseaux, du travail,voire d’un engagement social et politique comme le fait le chanteur <strong>Danyel</strong> Waro. Il est encorepratiqué par de nombreux groupes qui le chantent selon la formule la plus traditionnelle.D’autres musiciens jouent aussi bien maloya que sega, avec une instrumentation moderniséeallant jusqu’à utiliser l’accordéon et une section rythmique électrifiée.Sélection CDs :• Firmin Viry, “Ti mardé” (Label Bleu/Indigo LBLC2548)• Granmoun Lele, “Namouniman, Maloya. — Île de la Réunion” (Label Bleu/Indigo LBLC2508).• Granmoun Lele, “Soleye” (Label Bleu/Indigo LBLC2528).• <strong>Danyel</strong> Waro, “Foutan Fonnkér” (Cobalt 09293-2).• <strong>Danyel</strong> Waro, “Bwarouz” (Cobalt 09351-2).• Zarboutan, “Maloya improvise” (Label Bleu/Indigo LBLC2538).• Clermont Chamand, “Tou sel” (Sonodisc 51743).SegaMusique traditionnelle, musique moderne(Mascareignes, Seychelles).Le sega est la musique de référence des îles Mascareignes et Seychelles. Il serait né sur l’îleMaurice, sans doute d’origine africaine, musique des esclaves venus d’Afrique et de Madagascaraux dix-huitième et dix-neuvième siècles. Plus tard, et bien au-delà des interdictions pesantsur les expressions des esclaves, cette musique resurgira et se répandra dans les autres îles del’océan Indien. Sa langue deviendra le créole. Et différentes formes, souvent abâtardies, verrontle jour, comme le sega typique (voir Ti’ Frère), le sega salon que l’on danse chez soi (styleplus urbain, comme le sega hôtel), voire le seggae (mélange avec le reggae). À la Réunion,le style est plus commercial et ne garde que peu de caractéristiques du sega typique. AuxSeychelles, il est une danse plus lente et plus retenue. Mais on pratique aussi beaucoup lesega chanson, chanson actuelle en créole sur accompagnement de guitares. Depuis les années1960 et surtout 1970, le style jouit d’un sentiment nationaliste qui le pousse au-devant de lascène comme musique en concurrence avec le rock et les autres musiques modernes, allantmême jusqu’à connaître un succès important dans la communauté parisienne. Des segas plustraditionnels sont encore pratiqués sur l’île Maurice (sega ravanne, du nom du tambour surcadre qui en assure le rythme) et sur l’île Rodrigues (sega tambour).Sélection CDs :• Île Maurice, “Sega Ravanne mauritien, Sega Tambour de l’île Rodrigues” (Ocora C580060).• Ti’ Frère, “Île Maurice, hommage à Ti’ Frère” (Ocora C560019).• Les Segatiers de l’Ile Maurice (Playasound PS65126).• “Musiques populaires des îles Seychelles” (Buda 1984862).• Michel Admette, “Le prince du sega” (Piros CDP 5136).• Sega Sega, “Chanson longtemps” (Groupe Folk Reunion GFR07-974).


14 Iciwww.mondomix.org • hiver 2003/04© Bill Akwa BetoteSon nouvel et quatrième album à peine dans les bacs, SergentGarcia est parti dès octobre sur les routes de France pour dessoirées sound systems. «-C’est la version commando, souple etlégère, de ma musique en live. On peut partir à cinq dans une bagnoleet ça roule.-» DJ Sisko, le toaster Bionik, le Cubain Hector Carameloet le percussionniste Ivan Montoya l’accompagneront. En mars 2004,celui qui se définit comme «-un agitateur poétique-» tournera cettefois avec Los Locos del Barrio (son groupe qui compte une quinzainede membres). « Je ne veux pas me lancer des fleurs mais jepense qu’en concert, il se passe quelque chose entre mon public etmoi, déclare notre roi du salsamuffin. Sur scène, on a l’énergie. Et jesuis le premier artiste à avoir mélangé les musiques de la Jamaïqueet celles de Cuba, des références qui plaisent actuellement en France.» Enregistré d’ailleurs à Kingston et Santiago de Cuba, “La semillaescondida” est dans la lignée dansante, latine et positivement engagéede son album référence “Un poquito quema’o” (1999).Long time (avec la participation de Bionik), le premier extrait de tonalbum, sonne reggae ragga FM façon Mets de l’huile de Regg’lyss. C’estpour infiltrer massivement les ondes radios ?Regg’lyss ? Alors ça, c’est pas gentil. Mes références, c’est plutôtCapleton, ce genre-là. Si tu écoutes un peu de musique jamaïcaine,tu verras qu’il existe des riddims comme celui de Long time etque ce n’est pas du tout commercial. En plus, ça m’amuse d’avoirun morceau qui passe en radio et qui contient des paroles comme«-regarde la télévision, t’entends que des bruits de bottes et desbruits de bombes ». C’est aussi un morceau sur l’amitié. Bionik etmoi, on se connaît depuis super longtemps, on avait envie de faireun morceau ensemble. Je l’avais invité plusieurs fois à l’époquedu Bawawa Sound System, avant même la sortie de mon premieralbum. Depuis environ un an, on refait des soirées avec lui, à troisou quatre, au sein du collectif Sin Fronteras Sound System.Sergent GarciaEntre Cubaet Kingston,le Sargentoparigotagitateura mis enboîte sonquatrièmeopus,“La semillaescondida”.Au menu: salsa,reggae,ska, ragga,dans la joieet la bonnehumeur.L’excellent morceau Revolucion fait clairement référence au Revolutionrock des Clash. C’était pour rendre hommage à leur chanteur JoeStrummer, décédé fin décembre 2002 ?Au départ, je voulais même le chanter avec lui. Je lui en avais parlélors de son concert à l’Élysée Montmartre en novembre 2001 avecson groupe The Mescaleros. Il m’avait répondu : «-OK, quand tuferas ton disque, recontacte-moi. » Hélas, il est mort entre-temps.Étant un grand fan des Clash, je leur ai donc fait un clin d’œilen reprenant «-tell your mama, tell your papa, everything is gonnabe allright-», ce petit passage tirée de la chanson Revolution rock.Je pense que ça serait un très bon choix pour un futur single.Sur ton site Internet, on trouve Radio Timbo. Quel en est le principe ?Ah, je suis content que tu m’en parles car j’aime beaucoup ce projet.On me demande vachement souvent quelles sont les référencesmusicales de mes voyages, ce que j’écoute, mes influences. Je mesuis dit : «-Pourquoi ne pas me servir de mon site pour proposerune radio qui diffuserait ce qu’on n’a pas l’habitude d’entendre surles radios françaises ? » Ça fonctionne de manière super simple : ilfaut aller sur www.sergentgarcia.com puis cliquer sur Radio Timbo,ensuite rentrer dans la radio. Là, on accède à une programmationqui dure environ deux heures. Dans le futur, je voudrais réaliserplein d’émissions, avec plus de tchatche, où l’on parle en détail desartistes que je découvre dans les pays que je visite. Suite à mapremière émission, j’ai déjà reçu des e-mails de mecs du Mexique,des États-Unis, de Hollande, Madagascar, Tahïti… Je trouve çaintéressant.Ça te fait quoi de voir surgir plein de groupes indés qui pompent pasmal d’éléments —-cuivres, textes en espagnol, rythmes ska reggae,ambiance latino fiesta-— dans ta musique ou celle de Manu Chao-?Le mouvement alternatif des années 1980 et 1990 a été l’école durock français actuel. Il a permis la création d’un réseau de salles, degroupes et d’assos’ en France. Marcel & son Orchestre, je les considèreun peu comme les fils des Ludwig, des Wampas & co. Ils ont encoreplein d’idées et de folie, j’aime bien ça. Ils jouent mieux que nousà l’époque des Ludwig. Peut-être que Manu Chao et moi — même sion fait une musique totalement différente l’un et l’autre-—, on a aidéà faire que l’univers du rock ne se limite pas à une guitare saturée,une batterie et une basse. On a également réussi à imposer le fait dene pas chanter forcément en anglais ou en français.Et du côté de la dance et de la variété, ça ne te gonfle pas de voir cetesprit latino récupéré par de vrais opportunistes tels que Jarabe dePalo, Lorie ou Florent Pagny ?Jarabe de Palo, c’est pas un coup commercial. Le mec je le connais,il a toujours fait ce style de musique. Mais c’est clairement la versionvarièt’ de Manu Chao. Après, Sur un air latino de Lorie et toutça, ben ouais c’est des Canada Dry de la vraie culture latine-: ça ale goût et la saveur mais ça n’en est pas. La mode passera et lesartistes authentiques du mouvement resteront.Propos recueillis par François Guibert.Album “La semilla escondida” disponible chez Labels.Site Internet http://www.sergentgarcia.com/En concert 15 au 17/12 Tryptique à Paris (75).vidéos en concert sur :http:// www.mondomix.org/papier


16 Dossierwww.mondomix.org • hiver 2003/04Nuevo flamencoOjos de Brujo© Benjamin MiNiMuMDepuis queJosé Monje CruzCamarón dela Isla et Pacode Lucia ontmontré la voie,l’esprit flamencone cesse de semétisser.Par leurs incursions dans des territoires jazz,rock ou orchestral et par leurs innovationsprépondérantes, les deux messies contemporainsde l’art flamenco ont repoussé les frontièresde cette musique, la liberté de chant de Camarón,l’apport essentiel par De Lucia d’instruments commela basse électrique ou le cajon, percussion péruvienneintroduit par son percussionniste. Aujourd’hui,les jeunes artistes espagnols ne peuvent dissocierleur héritage national des influences venues du rock,du hip hop, de la techno et des autres musiques dumonde.Ironie du sort, c’est d’une ville que les aficionadosne prennent pas la peine d’inscrire sur la carte duflamenco que pourrait bien venir la reconnaissancepour ce que l’on appelle depuis quelques années déjàle nuevo flamenco. Après un premier album “Vengue”mal vécu avec une major company, les BarcelonaisOjos de Brujo prennent le maquis. Ils montent unestructure indé collectiviste et multidisciplinaire, LaFabrica de Colores, et gagnent le jackpot. Leur albumautoproduit, “Bari”, vient d’être proclamé disque d’oren Espagne. Ils ajoutent avec ironie qu’en accumulantles ventes du marché parallèle, l’or se transformeraiten platine. Le magazine world américain Global Rhythmleur a alloué sa dernière couverture. La bible anglaisefRoots leur a consacré de belles pages dès le premiertrimestre 2003. Et “Bari” qui arrive en France nedevrait laisser personne indifférent.Mélange plus que naturel d’esprit gitan et de culturesurbaines, au sein d’Ojos de Brujo, guitares flamenca,percussions, voix et danse ont la même importanceque le travail du DJ, des graffeurs ou des vidéastesqui accompagnent les musiciens. Ce collectif à configurationvariable ne se réclame pas du cante jondo.Leur univers englobe toutes les cultures qui fontvibrer la cosmopolite et moderne Barcelone. Lorsde la Merce (une fête qui célèbre la patronne de laville) fin septembre 2003, leur show sur une Piazzade Catalunya bondée a été précédé par les prestationsde leur DJ et deux MCs très en verve. Ce tour dechauffe passé, guitares flamencas, basse électrique,cajon, congas et tablas tissent le squelette d’ungroove sur lequel se posent les scratches de Panko etqu’enflamme leur chanteuse Marina. Au troisième titre,le chanteur sénégalais Cheikh Lô est venu les rejoindrepour une rumba catalane pimentée. Une heure plustard, des danseuses africaines ont accompagné lespas saccadés de l’atypique danseuse flamenco Paloma.Devant une foule surexcitée, Ojos de Brujo déverseun flot d’énergie prompt à réveiller les fantôme deBob Marley ou encore Elvis Presley et surtout celuide Camarón.Benjamin MiNiMuMSite Internet http://www.ojosdebrujo.com/html/Ojos de Brujo en concert 27/11 Centre culturel La Gespe à Tarbes •28/11 New Morning à Paris • 29/11 Espace Prévert de Savigny-le-Temple.Les petits nouveauxTomasitoDans l’entourage d’Elbicho, on retrouve à nouveauTomasito et Diego Carrasco, venus apporter un peu de l’esprit de Jerezà l’enregistrement du premier album des jeunes Madrilènes.Au début de ce siècle, Miguel Campello de Elche (chanteur au canteflamboyant) rencontre Victor Iniesta, guitariste à la posture rock dansun atelier musical de la capitale ibère. Avec un bassiste, un batteuret un percussionniste, ils fondent un premier groupe, El ComboFlamenco, qui se transforme en Elbicho avec l’arrivée d’une sectionde cuivre (flûte et trompette). Leur flamenco est une fusion prog’rock, jazzy aux teintes africaines, les karkabous marocains remplacentles castagnettes. Sur scène, leur fougueux mélange paraît parfoischargé, mais leur énergie est impressionnante et leur sincéritétouchante.B. M.El Bicho© B. M.© B. M.


Flamenco 17Les précurseursCette révolutionmusicalecatalanene serait sansdoute passurvenue sans lechemin parcourupar de nombreuxartistes danstoute l’Espagne.Les premières manœuvres importantes entre rock etflamenco sont apparues à Séville dans les années1970 avec des groupes comme Triana, AlamedaGuadalquideir, ou Smash. Le guitariste de ce derniergroupe, Gualberto, poursuit aujourd’hui une carrièreaprès avoir troqué sa guitare contre un sitar. Plusrécemment, Martires del Compas chante le tiriti-rapen hommage à un titre célèbre de Camarón. Il mélangecajon et djembé en signant en 1995 avec FlamencoBilly un manifeste pour un flamenco ouvert et polymorphe.À Grenade, Enrique Morente, souvent classé en têtede listes des plus grands chanteurs de flamenco, alargement contribué à ouvrir cet art. Sur son album“Omega”, il adapte brillamment Frederico Garcia Lorcaet Leonard Cohen en compagnie de plusieurs invitésdont Tomatito ou Miguel Poveda et du groupe rockLagartija Nick. Dans son dernier album “El pequeño”,Morente rejoue son parcours flamenco. Ainsi il improvisesur des compas de maîtres guitaristes disparus.Il chante avec sa fille Estrella accompagnés par legratin des musiciens actuels (Pepe Habichuella,Tomatito). Et s’essaie à une incursion sur la musiquecubaine et une autre dans l’univers de Beethoven,pour terminer sur un flamenco techno assez réussi.Depuis le début des années 1990, Radio Tarifamélange des traditions des quatre coins de la péninsule,à des influences venues du Maghreb, de la musiquemédiévale et bien sûr du flamenco. Le groupe Ketama,dont les membres sont issus de plusieurs grandesfamilles flamenco du Sud, s’est formé à Madrid.Depuis le début des années 1980, ils tentent avecplus ou moins de succès des greffes avec de nombreuxautres styles, principalement rock mais aussiavec des musiques latines ou africaines. Citons lestrès réussis albums “Songhaï” et “Songhaï 2”, enregistrésavec le roi malien de la kora Toumani Diabatéou leur anecdotique rencontre avec Khaled.Dans le quartier gitan Santiago à Jerez de la Fronterra,la Mecque du Flamenco, c’est Diego Carrasco quisymbolise le nuevo flamenco. Cet ancien compositeurde Camarón a d’abord été guitariste avant de sortirses propres disques dans lesquels il ne cesse d’affinerson univers baroque. N’ignorant rien de l’alchimie desformes pures du flamenco, il est à la fois respectépar les gardiens du temple et les jeunes générationsauxquelles il a montré une façon libre et rock’n’rolld’arranger, de chanter et de vivre cette musique. Ila largement encouragé El nino robotico, comme futsurnommé Tomasito à ses débuts pour incorporer desfigures de breakdance sur des bulerias. Tomas MorenoRomero est jeune, fougueux, sexy et provocant. Sonflamenco évoque un rock décadent que n’auraient pasdénigré T.Rex ou Ziggy Stardust. Mais son cante et lescompas des guitares n’auraient pu se forger ailleursque dans cette ville.Aujourd’hui, un des projets de fusion les plus intéressantsà observer est celui qui unit le chanteur pakistanaisFaiz Ali Faiz aux ténors Miguel Poveda, Duquende© Benjamin MiNiMuMDiego CarrascoBelen Maya© B. M.Celle dont tout le monde s’accordepour dire qu’elle a révolutionné ladanse flamenca contemporainese nomme Belen Maya.La révolution en dansantEn marge de la “Biennale” de Séville en octobre dernier, àl’occasion d’un concert de bienfaisance au profit du chanteur Antonio Vizarraga accidenté,le danseur sévillan Farruquito, gardien d’un style créé par son grand père Farruco,a été intronisé par les grandes dynasties sévillanes comme le roi des gitans le dieu desdanseurs.Fille des illustres danseurs Carmen Mora & Mario Maya, Belen Maya est néeà New York. Elle a étudié la danse contemporaine dans le cours de Martha Graham etla danse kathak en Inde. C’est la somme de ses connaissances, sa participation au film“Flamenco” de Carlos Saura mais surtout son talent inné d’une expressivité extrême quifont d’elle l’incontournable artiste qu’elle est devenue. Bien entourée et foncièrementféministe, elle se produit actuellement avec le guitariste José Luis Monton et la chanteuseMayté Martin avec laquelle elle a fondé une compagnie. À travers les nombreusesmasterclasses de danse qu’elle donne à longueur d’années dans le monde entier, elleest devenue la danseuse la plus influente d’aujourd’hui. Toutes les jeunes danseusess’en inspirent. C’est le cas d’Ana Salazar de Cadiz, qui a réussi a s’imposer en tant quedanseuse mais qu’un accident de ski a poussé à entamer une prometteuse carrière dechanteuse. Aujourd’hui, elle est totalement rétablie et s’est remise à danser. Pour lespectacle accompagnant la sortie de son fort réussi hommage à Édith Piaf (“Un hymnoal amor”), elle devrait à la fois danser et chanter.B. M.


18 Flamencowww.mondomix.org • hiver 2003/04Loin del’Andalousie et despesants diktatsdes gardiensLa scène madrilèneNommé La Pequena Jamaica (“petite Jamaïque”)en l’honneur du roi des bidouilleurs Lee “Scratch”Perry, le label underground madrilène fondé parle DJ Juanjo Valmorisco fut le premier à s’attaquersérieusement à la “mescla” flamenco electro. L’idée vintà Juanjo un soir dans un club d’Ibiza où l’officiant auxplatines surimposa de la techno allemande à un vocalde Camarón de la Isla. Résultat d’une année d’effortscollectifs, l’excellent album “Digitano” (2002) regroupeune dizaine de flamenquistes de renom dont Eva Duran(connue en France pour sa participation à Chanson Flamenca); Antonio Carmona (du groupe Ketama) ; Tomasito,figure proue de l’avant-garde, créateur du “solea punk” ;l’étonnante Elena Andujar, dont la maman est une gitanede Séville et le papa un noir américain. Puisant dansces deux héritages, Elena distille son “Tanguillos de laabuelita” avec l’abattage d’une Tina Turner. Digitanoa fait l’objet de plusieurs prestations live mémorablesà Madrid (dans la Sala Caracol d’ordinaire vouée au rocket dans le temple du jazz qu’est la Sala Clamores) età Londres, invité par le DJ Martin Morales.Madrid a son quartier gitan, foyer du flamenco, leRastro (qui se transforme chaque fin de semaine enun immense marché aux puces). Et le roi du Rastro,c’est le chanteur Diego El Cigala qui lui aussi bousculela tradition de belle manière. Les longs cheveuxet la démarche caractéristique de cet héritier vocalde Camaron (“la crevette”) lui ont valu ce surnomde cigala (“l’écrevisse”). Avec son dernier album “LagrimasNegras” qui fait sensation en Espagne, voilà quele Rastro rejoint le Malecon de La Havane-: accompagnéd’un pianiste de 85 ans exilé en Suède, BeboValdès (père de Chucho Valdès, créateur d’Irakéré), dupercussionniste Tata Güines et aussi du saxophonistePaquito d’Rivera, Diego revisite à sa façon ce genresentimental voir sirupeux qu’est le boléro cubain.Il lui insuffle une modernité et une âpreté bienvenues.À l’origine de cette étonnante rencontre, il y a lecinéaste espagnol Fernando Trueba, fervent amateurde musiques qui avait déjà réalisé un vidéoclip pourDiego El Cigala (une première dans le domaine duflamenco). Il avait par la suite produit le long métrage“Calle 54”, hommage au latin jazz où apparaissaientBebo Valdès et déja Tomasito dans une séquencetournée à Séville.Jean-Pierre Bruneau© Benjamin MiNiMuMVéronica ValleciloEn FranceQuelques Français ont atteint un très bon niveau dans l’artflamenco. Ils sont le plus souvent fils ou fille d’émigrés.La réputation du guitariste parisien Daniel Manzanas dépasse largement nosfrontières. Le style du guitariste bordelais Pascual Gallo a été salué par Pacode Lucia. La jeune chanteuse et danseuse lyonnaise (et l’une des rares femmesà pratiquer le cajon) Sabrina Romero se réclame du Nuevo Flamenco et a récemmentrejoint le groupe de Rumba catalane Tekameli, basé à Perpignan.Né à Lyon dans une famille gitane rattachée à la dynastie des Habichuelas deGrenade, le guitariste Juan Carmona est parti peaufiner son art à Jerez dansles années 1980. Là, il travaille avec d’éminents artistes comme les chanteursAgujetas ou Duquende, les danseurs Joaquin Grillo, ou Ana Parilla et les guitaristesMoraito ou Rubem Dantas. En Espagne, son jeu lui vaut une pluie de récompensesprestigieuses. Revenu vivre à Marseille, il se lance avec succès dans une carrièresolo et enregistre une poignée d’albums. Son dernier CD, “Orillas”, lui a valucette année une nomination aux Latin Grammy Awards. Il est aussi l’auteur d’uneRhapsodie Flamenca qu’il a créée en 1999 avec l’orchestre philharmonique dePostdam. Le chanteur guitariste Paco El Lobo est un cas à part. Ce Français pursouche, totalement imprégné de culture gitane, s’est spécialisé avec succès dansla redécouverte des répertoires anciens. Et entretient une vision dépouillée ducante et des compas. Lorsque des artistes venus d’autres horizons comme Thierry“Titi” Robin ou l’accordéoniste Marc Perrone font appel à lui, c’est pour ses qualitésde pureté., Dans l’Hexagone, la palme de l’innovation est sans doute à attribuer à une jeunedanseuse parisienne. Cousine de Miguel Vallecilo, l’organisateur des historiquesconcerts de Camarón au Cirque d’hiver, Veronica Vallecilo incorpore dans sesspectacles des éléments du rock, du rap et de l’avant-garde. Des chanteurs aussidifférents que Paco El Lobo, le rapper algérien Mr Salek ou la poétesse russeElena Frolova trouvent leur place dans son univers flamenco ouvert., Dans notre pays, deux événements importants sont dédiés au flamenco-: le festivalde Mont-de-Marsan début juillet et celui des arènes de Nîmes en janvier. Dans lesfestivals de musiques du monde, seuls “La fiesta des Suds” et surtout “Les Suds àArles” proposent une programmation pertinente. Notons qu’à Montreuil (93), unepetite salle, Planète Andalusia, est presque entièrement dédiée au Flamenco.Interviews audio& vidéos en concertsur :http:// www.mondomix.org/papierSite internet http://www.juancarmona.com/Retrouvez sur <strong>Mondomix</strong>.org l’entretien avec José Renato, aficionado, ami etagent des plus grands musiciens de ce style, sans qui la rédaction de cet articleeut été impossible.


Là-bas 19Colophon RecordsLa “Collection de musiquespo- pulaires du monde” dulabel Colophon est née enBelgique au sein du Consortium 6novembre. Ce consortium d’ONGde Dévelop pement, avec le soutiende la DGCI (Direction généralede la coopé ration internationale),a décidé la création decette collection «-pour contribuer,par la culture, au rapprochementet à la compréhension despopulations défavorisées-», mais aussi pour sauvegarderdes «-patrimoines immatériels menacéspar les déséquilibres économiques-». Les bénéficesgénérés par les ventes seront donc consacrésaux actions d’éducation du consortium. En d’autrestermes, voici un label sous la houlette d’une associationsans but lucratif. Son but principal estde montrer au public que coopération veut aussi direcompréhension des cultures desautres, approche et respect des différences.Pour le label Colophon,les relations Nord-Sud c’est aussila recherche d’un équilibre dans laperception mu- tuelle des cultureset non une con- sommation passivede celles du Sud par ceux duNord-! La formule n’est pas banale.Voilà en effet des militants desmusiques du monde qui s’en vontsur le terrain rencontrer et enregistrerdes musiciens dont les chants et musiques collentencore à la vie quotidienne. Des rencontres proposéessur disque avec un commentaire humain et politique.On entre en ces musiques par leur situation géographique,économique, sociale, par leur rôle au seinde cet amalgame, par ce qui leur reste encore defonctions essentielles dans le déroulement d’une viesouvent ardue.Avec patience,méthode et peude moyens,le label Colophona sorti seize CDsà ce jour.Catalogue :• Brésil-: Folias, “Ballades et chants populaires”. Grupo de Folia-de-Reis de Casa Branca (coll. CD106).• Bolivie : Wayra, “Musiques des Indiens Yampara et Charkas” (coll. CD109).• Pérou-: Duo Arequipa, “Criollo, chansons métisses” (coll. CD108).• Pérou : Los Hermanos Delgad “Yaravi, sérénades et chants tristes d’Arequipa” (coll. CD107).• Pérou : Takiy Huyana, “Min’ka, chants de la terre et de la jeunesse” (col. CD114).• Équateur : Grupo Cantavicos, “La Jora, mélodies et chansons métisses de la Sierra Norte” (coll. CD115).• Afrique du Sud : Kanala, “Hollandse liedjies, petites chansons hollandaises et autres chants métis du Cap”(coll. CD105).• Afrique du Sud : Lokishini, “Chants Xhosa du township de Langa” (coll. CD104).• Érythrée : Golagul, “Chants d’amour et de résistance” (coll. CD102).• Kenya : Mohamed Famao Group, “Tarabu. chants d’amour — Lamu” (coll. CD103).• Soudan : Basbar, “Chants de lutte et autres chansons du peuple Beja” (coll. CD112).• Cambodge-: Plôw Tcha, “Mélodies villageoises” (coll. CD110).• Inde-Rajasthan : Mahesa Ram Group, “Bhajans, chants populaires de dévotion” (coll. CD101).• Inde-Rajasthan : Kutal Khan Dahrh, “Barsalo, chants de la mousson” (coll. CD116).• Mongolie : Chichgedin Oianga, “Tengis, chants du peuple Darkhad” (coll. CD111).• Vietnam : Quan Ho, “Ballades galantes, chants d’amitié” (coll. CD113).Site Internet : www.colophon.beDistribution : DOM


20 Là-baswww.mondomix.org • hiver 2003/04<strong>Danyel</strong> WaroIl est l’un desreprésentantsmajeurs dumaloya, unemusique de laRéunion.Né au Tampon dans une famille de petits planteurs,c’est au détour de l’enfance que <strong>Danyel</strong>Waro, cheveux blonds esprit noir, prend partipour la cause créole. En l’occurrence cette “culturemarron” qui à partir de 1946, début de la départementalisation,sera jugée obscurantiste par les éliteslocales. Au point d’être, prohibée sous le gouvernoratde Perreau-Pradier (1956-1962), ce qui l’obligera àse recroqueviller chez les coupeurs de canne ou leslaissés-pour-compte des “hauts” de l’île. Ainsi, bienavant que la bataille pour la graphie créole ne prennecorps dans les années 1970, la «-musique des ancêtres-»est-elle perçue comme le véhicule privilégiéd’une identité clandestine. À travers les fêtes de sonjournal Témoignages, le PCR (Parti communiste réunionnais)en fera argument en faveur d’une culture nonaliénée par les produits d’exportation.Comme d’autres adolescents, fous de verbe et d’utopie,<strong>Danyel</strong> Waro découvre ce filigrane. Il est cueilli par deschanteurs comme Firmin Viry, qu’il revendique commepère spirituel, Lo Rwa Kaf, Gran Moun Baba, GranmounLélé ; par un patrimoine souterrain (thèmes, syntaxe,pulsions rythmiques) qui légitimera son engagement© Sergenationaliste. Au point de subir vingt-et-un mois deprison à Rennes et Écouvres pour insoumission. Uneexpérience qu’il couchera dans un livre pamphlet,“Romans ékri dans le zol an Frans”. En 1975, à sonretour, il s’investit dans la Troup Flanboyan. Puis ildevient un des acteurs essentiels du “maloya sec” avecpour « zarme pou litte cont’ loppression-», le créole. Et,au fil des années, quand d’autres lorgnant vers la worldmusic, lui quête sa légitimité au cœur des “kabars”,version rituelle (culte des morts, des esprits et desdieux) ou version fest-noz local. Une immersion toutautant stylistique que philosophique tant le maloya est«-une respiration, une façon de penser et d’être-». Dansune société à tradition orale, cet enracinement a pourbut de «-protéger la profondeur de notre musique-». Cetravail de longue haleine porte ses fruits. D’autant querigoureux sur la réhabilitation, le «-petit blanc-» (filsde colon pauvre) n’en a pas moins enrichi son idiomede prédilection d’inflexion jazzy et de couleurs sonorespropres aux Mascareignes. Affaire d’orthodoxie ouverte-:«-Maloya ne rime pas seulement avec cafre. Dans laréalité, ce n’est pas ça. C’est une musique métisse dèsle départ puisque faite par des esclaves très différentsles uns des autres. Dans ma façon de chanter, il y a unpeu de malbar (indien), de cafre (africain), etc. C’estpareil pour les instruments. Ce grand mélange, cheznous, est notre richesse. Dans notre palais, il y a ungoût de massala, de chop-suey, de siriani...-», déclaret-ilalors. Depuis, sa voix haute et voilée, dous’ment,dous’ment, s’est fait manifeste poétique. Son chantrebelle a pris des accents nouveaux. Il revendique àtravers le maloya cette réunionité qui fait que chaque“réyoné” possède en lui toutes les composantes ethniquesinsulaires «-quel que soit sa carrosserie-». Pardelàune histoire insulaire, le maloya a trouvé avec luison universalité. En témoignent ses derniers enregistrementsà l’instar des magnifiques “Foutan Foonkér”(1999) et “Bwarouz” (2003), ou de cette rencontreavec l’harmoniciste de jazz Olivier Ker Ourio (album“Sominnkér”) qui sera l’objet de deux concerts inéditsau festival Africolor.Frank TenailleDisques- Foutann Fonnkér (Cobalt/ Mélodie, 1999 Grand Prix de l’AcadémieCharles Cros), “Bwarouz” (Cobalt/Mélodie, 2002), “Sominnkèer” (Colbat/Mélodie,2003), “Rest’la Maloya-: hommage collectif à Alain Peters” (Cobalt).Les disques, superbes, de Granmoun Lele et Firmin Virysont disponibles sur le label Indigo.En concert le 04/12 aux Transmusicales de Rennes (35),à la Liberté Bas de 2h50 à 4h du matin.Création “Sominnkér” 05/12 Théâtre Paul Eluard de Stains (93) • 06/12Forum culturel de Blanc-Mesnil (93) dans le cadre du festival “Africolor”.Site Internet www.africolor.comInterview audio &vidéos en concert sur :http:// www.mondomix.org/papier


Là-bas 21Nathalie NatiembéD’habitude, elle se produit avec ses musiciens etoffre un spectacle généreux où son maloya seteinte de couleurs vives empruntes au reggae,au funk ou au rock. Aujourd’hui, pour la seconde fois desa carrière, elle veut nous montrer ses chansons dansl’état où elles lui arrivent. Nathalie est de ces artistesqui ne cherchent pas mais trouvent. Quand les motsviennent seuls, ils deviennent poèmes. S’ils surgissentsur le dos d’une mélodie, ce sont des chansons entièresqu’elle adopte comme un don de la nature, uneoffrande du ciel. Histoires tristes ou gaies, elle rythmeles vers créoles à l’aide de petites percussions, kaskass, potée, tablar, carlon, cloches tibétaines, djembéet surtout le triangle. Cet instrument modeste, quiservait autrefois aux maîtres négriers pour rassemblerleurs esclaves, est devenu pour la Réunionnaise lesymbole de l’équilibre entre le corps, la tête et l’âme.Une heure durant, Nathalie Natiembé nous offre sansfausse pudeur la face la plus intime de sa joyeuse personnalité.Quand elle parle au public, elle rit beaucoup,décrit son pays, évoque le Mozambique (terrede ses ancêtres) et nous fait revivre la naissance d’unechanson au milieu d’une rivière. Quand elle chante, savoix, nourrie au soleil de l’océan Indien, anime sa poésieet son humanisme. Cette artiste sincère et entièretouche en plein cœur et réconforte comme elle a émuavant nous le sensible mais exigeant <strong>Danyel</strong> Waro.Benjamin MiNiMuM© Benjamin MiNiMuMDimanche 3 août2003, NathalieNatiembé entreseule sur lapetite scènedes Arcadesau festival “Lesnuits atypiques”de Langon.L’arc-en-ciel du maloyaLe maloya, avatar d’un sega primitif, renvoie aux temps des esclaves. À ces tempsd’après 1848 qui vit la libération de 58-000 d’entre eux, soit près de 60-% de lapopulation, lesquels vont par la suite se mélanger dans les champs de canne auxengagés venus d’Inde et aux “petits blancs”. Une musique à la fonction cathartique,véhiculée par des mélodies en mineur, portée par des voix lancinantes que soutiennentdes instruments ruraux : le rouler (tambour de basse que l’on chevauche, néd’une barrique raccourcie fermée d’une peau de bœuf), le fer blanc (boîte de laitcabossé), le bobre (arc musical arrimé sur une calebasse séchée), les tablas etle ravan indiens, le triangle, et surtout le kayanm (instrument en tiges de fleur decanne contenant des graines de safran sauvage que l’on agite à plat) ce mouvementdonnant naissance au 6-8, signature rythmique du maloya. C’est après 1981 quenombre de jeunes artistes servis par des écrivains (Gauvin, Marimoutou, Gauliris,etc.) s’emparent du maloya (Waro, Patrick Persée, Ziskakan, Ti Fock, Baster…),lui insufflent l’énergie électro-acoustique, l’hybrident à d’autres genres (du reggaeau jazz). Reconnaissance qui contribue à réhabiliter aux grands jours les groupesfamiliaux (Granmoun Lélé, Firmin Viry, Ramouche, etc).F. T.© Bill Akwa BetoteGranmoun Lele


22 Là-baswww.mondomix.org • hiver 2003/04Inlassable LhasaAprès cinq ansd’absence,Lhasa arrive enville comme ungéant auxmains vides,annonce-telledans unechanson.Le cœur plein,a-t-on envied’ajouter.© Benjamin MiNiMuM“The living road”, successeur du magnifique“La Llorrona”, possède les mêmes qualitésque ce premier album au succès incontestable(près de 500 000 ventes sur les seuls territoiresfrançais et canadien). Des mélodies construitesen crescendo et des arrangements délicats posentune ambiance intime et onirique. Juste et intense,l’interprétation de la chanteuse abolit la distanceentre la fluidité de sa voix et la profondeur des émotionsexprimées.En 1999, restée en France après une longue tournéesur les scènes du monde, cette voyageuse née (filled’un écrivain mexicain et d’une comédienne et photographeaméricaine) a rejoint ses sœurs en Bourgogne.Pendant un an, elles ont préparé et présenté un spectaclede cirque. Lhasa jonglait avec les mots, voltigeaitavec les émotions et partageait la joyeuse ettrès physique vie de la troupe. Voyageant en roulottede ville en ville, les sœurs de Sella renouaient ainsiavec leur enfance passée dans le minibus de leursparents à la recherche d’une vie toujours plus ouverteet inventive.Après cette épisode sous chapiteau, la chanteuse partvivre dans l’air iodé de Marseille. Trois année pendantlesquelles les nouvelles chansons se sont lentementformées. Espagnoles, anglaises ou françaises, lorsquequ’elles furent treize, Lhasa sut qu’elle tenait, selonses mots, un nouvel album des musiques traditionnellesde son pays imaginaire.Séparé du talentueux artisan de “La Llorona”, YvesDesrosières, il lui fallait trouver d’autres musicienspossédant un visa pour rejoindre son étonnante contrée.À Paris, elle rencontre de fins joailliers, dont lepercussionniste Cyril Atef et le violoncelliste VincentSégal. Mais le rythme de croisière à bord d’onéreuxstudios parisiens est trop rapide pour elle. Pas letemps de s’imprégner d’un paysage, ni de bien dessinerles trajectoires. Elle quitte la France et rejointMontréal. Elle y retrouve de vieux compagnons de route,François Lalonde et Jean Massicotte, qui avaient déjàparticipé au premier disque. Après un essai fructueux,elle décide de leur confier la réalisation de“The Living road”.Le résultat reste dans la continuité du travail autrefoisaccompli par Desrosières, qui cosigne ici troistitres, mais élargit la palette. Entre leurs compétenceset celles de leurs invités, les deux capitaines convientmille saveurs, guitares électriques, en plastique,pedal steel ou ukulele, theremin, glockenspiel, claviersélectroniques ou de bambou, des instruments àcordes de toutes tailles, des clarinette tziganes et destrompette mariachis. Des idées de Vincent Ségal ontété conservées mais rejouées. Des hasards heureux,comme une rythmique née dans une poche pleine depièces, ont été bien exploités.Lhasa possède chaque nuance poétique des trois languesqu’elle maîtrise. Ses textes, traduits dans le livret, sontgais ou tragiques mais toujours ciselés et amoureuxdes notes qu’ils accompagnent. Elle travaille aussisur le langage des yeux. Inspirée par Max Ernst,elle a réalisé pour la pochette des collages fantasmagoriquesà partir de vieilles illustrations. En arrivantà Montréal, elle s’est lancée dans la réalisationd’un vieux rêve-: peindre de grandes toiles abstraites,jouant avec les formes et les couleurs pour explorerde nouvelles zones de cet univers décidément sansfrontières. Aujourd’hui, elle réfléchit à des costumes,à de petits effets de lumière. Des événements visuelsdiscrets qui, sans les distraire de la musique, plongeraientles spectateurs au cœur de son mondeintérieur. Heureuse d’emmener avec elle une partiedes musiciens de l’album, elle prépare les concertsqui durant deux ans doivent promener “The livingroad” sur la route des salles de spectacles vivants.Benjamin MiNiMuMAlbum “The Living road” (Audiogram/Tôt ou Tard).En concert- • 23 et 24/03/2004 Grand Rex à Paris• 02/04 Neuilly-sur-Seine• 03/04 Amiens (80).http:// www.mondomix.org/papierInterview audio sur :


24 Dossierwww.mondomix.org • hiver 2003/04Né dans le sudalgérien, ceguitariste éruditest l’un des raresartistes à établirun lien entredes extrémitésque l’on pensaitinconciliables.© D. R.CamelZekriArtiste reconnu de la scène française desmusiques électroacoustiques, son dernieralbum “Venus Hoppentote” ne rencontre quedes éloges. Fondateur et pivot du Diwan de Biskrat, ilest aussi un réalisateur prisé par les artistes traditionnelssubsahariens. Sa compréhension de ces cultures,son agilité musicale et son immense respect pour la réalitédes artistes avec lesquels il travaille ont apporté uneamplification clarifiée et fidèle aux natures artistiquesdes Nigériens Mamar Kassey, de l’Algérienne Hasna ElBécharia ou de la Mauritanienne Malouma.Avec la même approche délicate, il organise un événementoriginal-: le “Festival de l’eau”. Embarqués surun bateau sillonnant un fleuve africain, des artistes internationaux,musiciens, plasticiens ou écrivains ouvertset aventureux présentent leur travail dans des villagestraditionnels. Ce choc de civilisations peut susciterdes échanges aussi inattendus qu’une démons-trationde musique pour capteurs sensoriels précédantune danse traditionnelle de masques sacrés. Chaquepériple africain est suivi d’une série de concertseuropéens qui témoignent de ces collisions. Après latraversée du fleuve Niger en 1996, celle du Mouhounen 2000 de Centre Afrique en 2001, la prochaineédition doit se dérouler le long du fleuve Sénégalen 2004.Pour le festival “Africolor”, Camel Zekri a naturellementvoulu réunir le Diwan de Biskrat avec ces deuxpersonnalités uniques que sont Hasna el Béchariaet Malouma dans une création nommé “Warda”. Sile Diwan de Biskrat est porteur de la tradition gnawi,il est aussi totalement en phase avec la modernité.Membre à part entière de cette formation, levidéaste Kamel Maad remplit avec ses manipulationsd’images en direct le rôle qu’ailleurs un DJ endosserait.La grande Hasna el Bécharia —-dont la cultureest extrêmement proche de celle des gnawas-— estun symbole de l’émancipation féminine du Maghreb,tout comme la griotte électrique Malouma l’est pourla Mauritanie. Warda “La Rose” est un voyage entreles cultures arabe, berbère, subsaharienne et maure.Il célèbre une vision spirituelle mais libérée de traditionsséculaires.Benjamin MiNiMuMCamel Zekri, “Venus hoppentote” (La Nuit Transfigurée, 2003).Mamar Kassey, “Denké Denké” (Daqui, 1999).Hasna El Bécharia, “Djazair johara” (Indigo, 2001).Malouma, “Dunyaé” (Marabi, 2003).Un DVD et un CD du Diwan de Biskrat doivent paraître courant 2004Warda en concert- • 29/11Grenoble (“38 e Rugissants”)• 06/12 Tremblay-en-France • 12/12 Montreuil-sous-Bois• 13/12 Clichy-sous- bois (“Africolor”).Équinoxe africaineArchives &compte rendude l’édition2003http:// www.mondomix.org/papierDans les semaines à venir, ne manquez pas l’excellente émission “Équinoxe”, consacrée auxmusiques du monde sur France Culture présentée par Caroline Bourgine. Dans le cadre du festival“Africolor”, dans la nuit du 14 au 15 décembre à minuit, Faytinga et Ouï Dire en seront les invités.Dans la nuit du 21 au 22 décembre à minuit, ce sera au tour de Tissage Africain.Enregistrement en public le 18 décembre au studio 105 de Radio France.Invitations au 08 92 68 10 99 (0,34 € la minute).Création “Warda” de Camel Zekri et chants de l’Empire mandingue avec les frères Cisse, Mory DjeliDeen Kouyate et Jean- Philippe Rykiel.


Africolor 25Faytinga&Ouï DireFaytinga, l’une des plus grandeschanteuses d’Érythrée, rencontrerasur scène Ouï Dire, un duo de voixbien françaises, dans le cadredu festival “Africolor”.Deux voix, deux cordes sensibles, forment OuïDire. Marie Estève et Marylène Ingremeauexplorent des contrées vocales originales enarrangeant à la couleur de leurs sentiments les chantsde différents pays du monde. Plus de huit ans que lesdeux amies se connaissent. De la première rencontreau théâtre du Lière dans un atelier sur les chantspolyphoniques jusqu’à aujourd’hui où elles préparentun spectacle avec la chanteuse érythréenne Faytinga,les deux sœurs de chant ont développé une identitéforte, faite de sentiments autant que de travail, dejeux scéniques et de bonne humeur. «-Dans notre répertoire,les cinq continents sont représentés maisce n’est pas une démarche de notre part. » Marylèneet Marie chantent ce qui les touchent. « On fonctionneaux coups de cœur. Ça peut être un chant de Bulgariesur lequel on entend des rythmiques indiennes. On avraiment un répertoire très ouvert. » Larencontre avec Faytinga, chanteuse à ladimension politique autant qu’artistique,est une grande première pour Ouï Dire.Elle est très populaire en Érythrée. Sonpère était le symbole de la lutte engagéecontre les colons pour la libération deson pays. Faytinga s’est, elle aussi,engagée très jeune.La création fait encore partie du domainedu fantasme. Les artistes ne s’étant rencontréesqu’une seule fois pour l’instant, les espritstravaillent beaucoup. «-Le souci, c’est de nous mettreen lien avec sa personne et puis d’amener notre proprevocabulaire pour le mêler au sien. Je vois ça commeun dialogue où on parlerait en même temps mais enessayant de construire quelque chose d’intéressantsur le plan musical. Maintenant, au niveau du vocabulairemusical, il y aura sans aucun doute des arrangementsliés à la culture de l’Érythrée, plus d’autres oùnous allons peut-être essayer de mélanger des chantsde différentes cultures avec ses chants.-» Elles aimentexplorer, comprendre l’autre. «-Lorsque Faytingachante, c’est dans un registre et sur des modesmusicaux très précis, une tessiture vocale spéciale.Elle chante dans l’aigu, elle a une identité, c’estévident. On va s’amuser à tournicoter autour et changerde couleurs-», lance Marie dans un rire qui exprimeenvie et plaisir.Arnaud Cabanne© Arnaud Cabanne© D. R.


26 Africolorwww.mondomix.org • hiver 2003/04Mory Djely Deen Kouyaté (à gauche) & Jean-Philippe RykielJean-Philippe RykielIl a travaillé avec des artistes aussi différentsque Léonard Cohen, Brigitte Fontaine, le LamaGyurme ou encore Youssou N’Dour. Mais ilest surtout attaché à la musique africaine. Ilprépare un nouveau spectacle, “Les champs del’Empire mandingue”, pour le festival “Africolor”.Aveugle de naissance, Jean-Philippe Rykiel n’a jamais vul’Afrique avec ses yeux. Il en estpourtant tombé amoureux il y aplus de vingt ans. La terre mandingueau souffle musi- cal et àl’hospitalité légendaire l’a transportéalors qu’il vivait à plusieursmilliers de kilomètres de là. «-J’aiété subjugué par le mode de vieafricain. En 1979, j’ai rencontréAdjiman, un musicien venu duGhana. Il m’a fait découvrir unemanière de vivre totalement différente.Il m’a emmené dans sonpays. J’ai vu des choses extraordinairesque je ne croyais pas possible: des maisons dont les portesn’étaient jamais fermées, quatregénérations sous le même toit etde la musique partout.-» Assis dansun canapé à côté de son pianoà queue, les cheveux etla barbe ébouriffés, il tireune grande bouffée sur sonbidies. À 18 ans, cette rencontrea fait office de révélateur. «-J’ai eu envie de rester prochede l’Afrique en utilisant la musique comme moyen de communication.Car je me suis aperçu que ça me permettait de parler avec des personnesqui ne comprenaient pas ma langue.-»Ses faits d’armes sont nombreux-: il arrange trois titres de l’album “Soro”de Salif Keita. Il collabore à deux albums de Youssou N’Dour, “Eyes Open”(1992) et “Wommat” (1994). Amoureux de l’Afrique, «-fier d’être occidental-»lorsqu’il parle de musique classique ou de jazz, il se conçoit commeune passerelle entre les cultures. «-Je crois que le métissage est très important.J’ai peut-être pu apporter des choses que les musiciens africainsn’avaient pas-: par exemple mes connaissances en harmonies, en programmationet en fabrication de sons de synthé.-»-Opposé à la froideur des rythmes techno «-hyper réguliers et hyper mécaniques-»mélangés à la musique africaine, Jean-Philippe préfère les projets“vivants”. Ce qu’il prépare pour le festival “Africolor” en est la plus belleillustration. «-Rencontre, métissage et communication sans l’aide du langage-»,voilà la ligne directrice de cette œuvre.-Les “Champs de l’Empiremandingue” regrouperont deux entités. D’abord, la tradition avec les frèresCissé, des conteurs soninkés venus de Mauritanie. «-Ils ne parlaient pasfrançais, moi je maîtrisais encore moins le soninké. Mais quand ils ontpris leurs instruments et que je me suis mis au clavier, il y a eu cette complicitémagique qui a fait que nous sommes devenus vraiment des amis.-»Il y aura aussi une création plus aventureuse dans une deuxième partieavec Mory Djely Deen Kouyaté, chanteur guinéen à la «-voix de ténor-».«-C’est un chanteur d’opéra ce bonhomme-», s’exclame Jean-Philippe. Ilva donc l’entourer d’un véritable orchestre formé de balafon, kora, n’goni,djembé, doumdoum et d’un clavier qui « apportera un côté un peu symphonique». Un sourire s’étale sur son visage, Jean-Philippe Rykiel estheureux d’être encore en mouvement, évoluant au cœur de la musique.Arnaud Cabanne© Benjamin MiNiMuM


Là-bas 27MisiaAu-delà d’une francophilie ardente, tout un programme.La native de Porto entendait bousculercertains codes (poncifs thématiques et conformismedu pessimisme) et aérer un genre. Ce qu’elle fitau fil d’albums qui n’ont pas été sans inspirer, parfoisjusqu’au mimétisme, certaines voix de la générationsuivante. Ainsi va-t-elle enrichir le patrimoine du fado(à ne pas confondre avec la chanson s’inspirant dufado, confusion ordinaire de nos chers médias) d’apportslittéraires inédits qu’elle suscitera (d’Agustina Bessa-Luis au Prix Nobel de Littérature, José Saramego),de couleurs sonores (violon, accordéon, piano, cordes),d’ex- périences croisées (avec le chorégraphe Bill T.Jones, l’actrice Isabelle Huppert, la Brésilienne MariaBethania, etc.). Elle joue la carte d’une novation ajustéeà l’esprit du fado, dont la métaphysique si elle se nourritde la saudade («-ce mal dont on jouit, ce bonheur donton souffre-») ne saurait se réduire à elle. Avec le temps,l’on voit donc qu’il s’agit avec Misia moins de novo fadoque de l’actualisation d’un classicisme : mise en évidencede la puissance atavique du texte (comme dansles albums “Garras dos sentidos” en 1998, ou “PaixoesDiagonais” en 1999)-; revalorisation des styles fondamentauxde l’arbre fado (cf. son précédent et trèsramassé “Ritual” en 2001). Point étonnant dès lorsqu’avec ce nouvel opus, poursuivant sa «-merveilleuseautant que névrotique relation avec le fado-» (dixitMisia), elle ait choisi de travailler à partir de l’œuvred’un des plus importants compositeurs pour guitare portugaise-:l’ineffable Carlos Paredes, victime depuis unedécennie d’une miélopathie (et dont la situation matérielledes plus précaires laisse l’État portugais totalementindifférent). Un immense musicien, fils et petit-fils dedeux références du fameux cistre (version école deCoimbra) qui outre un son, un style unique, a laissé desenregistrements fatals et le souvenir d’un homme d’unetrès grande humilité. Quelque ait été sa notoriété, il necessa jamais son travail à l’hôpital de Lisbonne. Et futun acteur important dans la résistance à la dictaturede Salazar au même titre qu’un José Afonso, compositeurde Grândola vila Morena, hymne qui servit de pointd’hymne déclencheur à la fameuse Révolution des Œilletsde 1974. Ainsi, c’est à partir des musiques de CarlosParedes que, soumis à des contingences métriqueset prosodiques inédites, Vasco Graça Mouras, SergioGodinho, Pedro Tamen ont écrit des poèmes. HenriAgnel, un temps complice de Paredes, signant avecbeaucoup de tact et d’à-propos (cf. les échos médiévauxet Renaissance de certains titres) des arrangements etorchestrations, interprétés par le quatuor habituel de lachanteuse (guitares et violon) augmenté du quintettede la Camerata de Bourgogne. “Canto”, comme uneoffrande animiste selon une ligne de chant éminemmentintime. Misia-: «-J’ai toujours su qu’un nouveaucorpus devait naître de l’œuvre de Paredes. Et je n’aijamais voulu jouer la duplication d’une esthétiquedont seul Paredes conserve le secret pour toujours…Mon Canto, c’est ce que j’ai pu trouver de mieux à luioffrir-!-»Frank Tenaille© B. Aragão© D. R.Album “Canto” disponible chez Warner Jazz.En concert- • 08 au 10/12 Théâtre du Gymnase à Marseille (13)• 22/12 Théâtre du Châtelet à Paris (75)• 09/01/04 Théâtre de Nîmes• 10/01 Bourse du Travail à Lyon (69)• 13/01 Théâtre de Poissy (78)• 16/01 Espace Michel Simon à Noisy-le-Grand• 17/01 Théâtre de Saint-Maur.Film- “Le fado de Misia” (diffusé sur Arte, en décembre 2003).Site Internet www.fr.misia-online.comIl y a près dequinze ans, dansl’univers alorsquelque peuanémié du fado,une nouvellevoix se faisaitentendre avecses partis prispoétiques et unecertaine dosed’insolence. Elles’appelait Misia,nom inspiré dela célèbre MisiaSert, amie deMallarmé, Proustou Picasso.Carlos ParedesInterviewaudio sur :http:// www.mondomix.org/papier


28 Là-baswww.mondomix.org • hiver 2003/04© Laurent BenhamouAmanda Jones, jeune femme àl’allure très british, nous attend surson stand B24 au “Womex”(“World Music Expo”) à Séville(Espagne) pour une petite causerie àpropos du prestigieux label dePeter Gabriel : Real World.Amanda Jones,militante et professionnelleLe projet affleurait dès 1985 avec lasortie des premiers 33 tours. Depuis,l’entreprise est devenue une véritableholding. Une nébuleuse de sociétésqui gravitent autour de son centre,Peter Gabriel : Womad, the Womad Foundation,Real World Records, Real WorldMultimedia and On-Line, Real WorldPublishing, Real World Design, Real WorldStudios, ainsi que Real World Films.Amanda nous dit (mais ce n’est pas unesurprise) que Peter Gabriel est omniprésentsur le choix et le travail effectuéspour chacune des sorties du label.Aucun artiste n’y apparaît sans sonassentiment. Les sorties sont de huità dix par an. En ce qui concerne purementl’équipe Real World, il n’y a quetrois personnes autour du label managerAmanda. Évidemment, chaque sociétéapporte sa pierre à l’édifice, des splendidesstudios d’enregistrement au studiode création. Pour la diffusion de lacollection qui comporte aujourd’hui prèsde cent CDs, cela dépend des pays.«-Chaque pays a des goûts particuliers-»,comme aime à le souligner Amanda.Certains disques réaliseront ainsi de trèsbons scores tandis que d’autres resteronttrès confidentiels-; la donne est différentesuivant la culture des auditeurspotentiels. Comme de bien entendu,l’équipe Real World est convaincue de laqualité des artistes proposées au catalogue.Mais le travail le plus difficile,même boosté par l’aura de Peter Gabriel,est de faire découvrir les artistes à unlarge public. En France, vu le peu de médiasnationaux qui se consacrent aux musiquesdu monde, le challenge s’avère difficile.Mais à voir l’énergie déployée par ladirigeante de Real World, il ne faut pasdésespérer que les productions dece label soient reconnues à leur justevaleur.Paul BarnenSite Internet http://realworld.on.netCaetano VelosoCaetano Veloso fête trente-sixannées de carrière.Livre “Rock tropical et révolution” (Le serpent à Plumes).Coffret cinquante CDs de l’intégral “Caetano Veloso” (Universal).Double CD “Antologia 67/03” (Universal).Interview audio &vidéo en concert sur :http:// www.mondomix.org/papier© Benjamin MiNiMuMLa passionnante autobiographie de Caetano Veloso, “Rock tropical et révolution”,vient d’être traduit en français et retrace ses prises de positions tantesthétiques que politiques. Universal édite un coffret intégral. Et pour tousceux qui ne peuvent s’affranchir des 400 € que coûtent ces 50cds, le doubleCD “Antologia 67/03” est un investissement bien plus raisonnable et tout à faitdélicieux.Rien d’étonnant à ce que ce disque démarre sur des applaudissements. C‘estexactement ce que l’on a envie de faire en plongeant dans la rétrospective del’œuvre du chanteur bahianais. Interprète d’élite, fils spirituel du grand JoãoGilberto, il transforme en or tout ce que sa voix caresse. Un morceau de NinoRota, le Coucouroucou Paloma (tiré de la B.O. du film “Parle avec elle” de PedroAlmadovar), sa reprise en version originale de Dans mon île d’Henri Salvador etses nombreuses adaptations de standards sud-américains, sont autant de preuvesde sa sensualité protéiforme. Quant au sort qu’il réserve aux Rolling Stones ouà Michael Jackson, c’est une brillante démonstration de ce que fut le mouvementtropicaliste qu’il fonda à la fin des années 1960 avec sa sœur Maria Bethania,Gilberto Gil, Tom Zé , Gal Costa ou Os Mutantes. S’accaparer la pop et la transformeren musique 100 % brésilienne. On jurerait que Let it bleed ou-Billie Jeanont été écrits à Bahia. Aussi remarquable soit-elle, sa voix ne résume pas Veloso.Cet aventurier de l’esprit est un compositeur de premier ordre dont on trouveici nombre de classiques inaltérables. Il n’a cessé de repousser les limites desa musique, se jouant des styles pour les faire siens. Il a toujours su s’entourerde musiciens ou d’arrangeurs inventifs, qui n’hésitent pas à faire des sauts dansle vide. Arto Linsday, Carlinhos Brown, Jaques Morelenbaum ou son surdoué defils, Moreno, ont fait partie des commandos qu’il a souvent lancé à l’assaut desavant-gardes, mais sans y perdre une once de volupté.Benjamin MiNiMuM


© FerrucciGianmaria Testa«-Un disque d’amour à un momentoù on a envie de crier. Partons de làet on verra bien-», dit-il. Pour son cinquièmealbum conçu dans l’environnementdélétère du conflit irakien, Gianmaria Testaa choisi d’autres latitudes (altre latitudini).Entendre-: un autre point d’observation,par- tant, un autre point de vue. Soit quatorzechansons gorgées de swing, marquéesau sceau du doute et du non-dit,toutes de douce mélancolie avec un zested’espièglerie et beaucoup d’aquabonismecomme aurait dit Gainsbourg. Des histoiresde rien, des cartographies mouvantes deces sentiments si évanescents et prégnants à la fois qui font nosidentités. Cela avec des mots jouant l’ellipse («-La vie est un caravansérail/ Mais ton esprit en lame de couteau / Dessinera sur monâme / Une bosse de chameau / Que toujours je reconnaîtrai-»), lamétaphore («-Une luciole du mois d’août / A été trouvé sur une fleur/ Elle serrait encore dans sa main/ sa valise pour la lune-»), presquele haï-ku («-Si tu savais comme il neige où je vis-»). Un style auquelrend grâce Éric de Luca, auteur à part dans le paysage littéraireitalien autant par son écriture (qui trahit une longue fréquentationdu monde du travail manuel) que sa posture morale-: «-Ta voix,c’est Cyrano caché dans le jardin qui enseigne au genre masculinoublieux comment frapper à la porte du baiser d’une fille. Ce sontdes syllabes de pluie, de quoi enlever sa veste et la mettre surles épaules découvertes d’une femme, un des rares gestes sacrésdont l’homme est doté.-» Y voir une fraternité éthique qu’on pourraitrésumer par ce vers du poète grec Yannis Ritsos cher à l’écrivainnapolitain-: «-Ton cerf volant s’est cassé-? Garde la ficelle.-» Pointde hasard dans cette fraternité, alors que la poétique d’un PaoloConte auquel son timbre peut le rapprocher s’inscrit dans un universurbain, celle d’un Gianmaria Testa est fille d’un monde rural. Elleexprime un certain rapport à la terre et au cosmos auquel une partiede sa vie à Madona del Pilone et à la ferme familiale (élevage etcultures) l’ont familiarisé. Aveu d’artisan à propos de la facture decet album-: « Ma seule démarche délibérée fut une recherche desimplicité expressive. Car la simplicité amène la proximité. »Révélé en 1995 avec “Montgolfières” (Label Bleu), le Piémontaisà la voix grave s’est offert, au fil d’un millier de concerts, un publicd’autant plus fidèle que ses rendez-vous fonctionnent à l’intime,jouent le temps suspendu, le diaphane, le lysrisme pudique, la connivence.Chaque nouveau répertoire du toujours chef de Gare deCueno se concevant comme un carnet de croquis intimes qu’il vientfeuilleter avec des amis. Ainsi, après son précédent opus, “La valsed’un jour”, duo guitare-voix avec Pier Mario Giovanonne, volontairementépuré, il renoue avec une belle diversité de couleurs. D’où cesarrangements de cordes et cuivres redevables à Pierro Ponzo (clavier& sax, déjà mis à contribution pour son premier album), lequel ferapartie avec Enzo Pietropaoli (cb) et Philippe Garcia (batterie) de saprochaine tournée. Et la présence de tous ces invités de marque, enparticulier de grandes pointures italiennes, à l’instar du clarinettisteGabriele Mirabassi, du violoniste Carlo de Martini, du violoncellisteMario Brunello, de l’élégant trompettiste Enrico Rava, ou de lapianiste jazz Rita Marcotulli avec laquelle il fait une référence à lachanson napolitaine, matrice de la chanson de la péninsule. Unefaçon de renouer avec la belle tradition des cantatori, songwritersdes années 1960, et indirectement, ce beau cinéma impressionnisteitalien qui n’a cessé de réénchanter le monde.Frank TenailleAlbum “Altre latitudini” de Gianmaria Testa disponible au Chant du monde/ Harmonia Mundi.Réédition de “Montgolfières” en livre-disque (Chant du Monde).En concert du 10 au 15/11 au Café de la Danse à Paris, (01 42 72 29 61) puis en tournée.Interview audio sur :http:// www.mondomix.org/papier


30 Là-baswww.mondomix.org • hiver 2003/04Oumou Sangaré© Benjamin MiNiMuMOumou Sangaréest une desplus grandesvoix du Mali etla chanteuseemblématiquedu Wassoulou,cette région quis’étend à chevalsur le sud-ouestdu Mali et le nordde la Guinée.Les Wassoulounké sont des Peul qui se sont laissésassimiler par les Mandingues et parlent maintenantbambara. À la différence des Bamana (l’ethniela plus nombreuse du Mali), leurs griots sont rares etont un rôle très marginal. Une des musiques les plusreprésentatives de la région est celle des chasseurs,qui s’accompagnent d’une harpe grave à six cordes, ledonzo gòni, relayé au milieu du vingtième siècle parun instrument très proche, le kamale ngòni, la “harpede la jeunesse”, qui a un rôle de basse, dont le timbreest enrichi par le grésillement d’une plaque de métalplacée au haut du manche, et sur laquelle grésillentdes petits anneaux. Curieusement, les chanteuses sesont emparées de cet instrument, au départ réservéaux hommes. Ceci est dû sans doute au fait quecette musique moderne du Wassoulou a été crééeà Bamako, au sein des communautés immigrées del’intérieur.La première de ces chanteuses à se faire connaîtrea été Nahawa Doumbia. Mais la reine incontestéedu genre reste Oumou Sangaré, qui a fait irruptionsur la scène malienne en 1989 avec son premieralbum “Moussolou” (“les femmes”). Tout le Malia alors écouté son tube Diaraby nene (“la fièvre del’amour”)-: «-Je frissonne fortement / Mon amour,attends-moi, chéri, ne t’en va pas / La pensée profondeest puissante »En effet, Oumou ne chante pas de louanges commeses consœurs bambara, mais l’amour et des thèmesrevendicatifs. La lutte contre la polygamie est pour ellecruciale. En témoignent les textes de ses deuxième ettroisième albums, “Ko Sira” et “Worotan”-: «-L’angoisseendurée par les femmes, rien ne peut lui être comparé/ Oh l’angoisse des femmes, la souffrance desmères ! / Ce que ma propre mère a souffert, je n’aijamais rien vu de tel-»Sa voix puissante et légèrement nasalisée est dotéed’un charme envoûtant, très bien mis en valeur par laqualité des arrangements. Ceux-ci allient de manièreharmonieuse harpes et vièles traditionnelles aux cuivresdirigés par Pee Wee Ellis (l’ancien saxophoniste deJames Brown) dans certains titres. Oumou Sangaréa très peu enregistré en comparaison de son grandtalent. En plus des trois albums cités, elle n’a produitqu’une ou deux cassettes au Mali, comme “MusowlaDialla”, dont le moins que l’on puisse dire est que laproduction n’est pas à la hauteur des albums éditéspar World Circuit. On ne peut donc que se féliciter dela parution du double CD “Oumou” (World Circuit LTD,2003), qui présente des titres extraits de ses troispremiers albums et huit inédits, dont six sont issusde “Laban”, exclusivement sorti en cassette au Maliet déjà vendu à plus de 200 000 copies (venteslégales), ce qui constitue sans aucun doute un record,lorsque l’on connaît l’extension de la piraterie enAfrique de l’Ouest.Oumou a aussi été distinguée en 2001 par l’Unesco,qui lui a décerné le prix de la musique pour sa contribution«-à l’enrichissement et au développementde la musique, ainsi qu’à la cause de la paix, de lacompréhension entre les peuples et de la coopérationinternationale-», avant de la nommer «-ambassadricede bonne volonté de la FAO-» pour la lutte contre lafaim dans le monde.Henri LecomteInterview audio &vidéo en concert sur :http:// www.mondomix.org/papier


Là-bas 31Global partypourl’Éthiopie19h30,il fait nuit à Addis Abeba. Nous venonsde boucler une distribution de nourriturerécupérée aux réfectoires de l’université, aux enfantsen haillons réfugiés dans la capitale. Monsieur MulatuTafesse a quitté une O.N.G. suisse pour monter sa propreassociation éthiopienne ( * ) dédiée aux enfants des rues etaux jeunes femmes enceintes sans-abris, séropositives oupas. Il y a vingt ans, M. Tafesse a fait partie de l’aventureBand Aid (We are the world). Mais au-delà des bonssouvenirs, il analyse l’arrivée du charity business, qui a crééen Éthiopie une situation paradoxale-: pas de travail sur ladurée, avec une aide sporadique trop souvent détournéepar les potentats locaux. De plus, cette aide n’est pas adaptéeaux vrais besoins du paysan local. Et tend à déstructurerl’économie vivrière des hauts-plateaux qui, commeaux temps de l’Égypte antique, ne connaît pas encore lesoc de fer. Il faut aussi savoir que le cycle des sécheressesdans la corne de l’Afrique, normalement sur une trentained’années, se réduit à des cycles chaotiques sur deux outrois ans ces dernières années, en raison des phénomènesde réchauffement climatique. Selon l’organisation Savethe Children, environ 14 millions de personnes souffrentd’une crise d’alimentation sans précédent. Une personnesur cinq manque de nourriture. Des milliers d’enfants sontdéjà morts de malnutrition cet été et une épidémie demalaria est déclarée. Alors que l’Éthiopie reçoit le plusd’aide alimentaire directe par tête comparé à n’importe quelautre pays du monde en développement, c’est le pays quireçoit le moins d’aide dans ce domaine par habitant detous les Pays du Sud.Label Virtuel/Planet Generation, en partenariat avec laFIDH (Fédération internationale des ligues des droitsde l’homme), organise la “Global Party4 a Human Planet”. Objectifs : créer unmouvement de solidarité et aider lesassociations éthiopiennes de défensedes droits humains dans leurs actionsde développement sur le terrain. Rendezvousle 13 décembre 2003 à Mainsd’Œuvres à Saint-Ouen (93) à partir de16h.Anne-Cécile WormsLe 13 décembreaux Mainsd’Œuvres àSt-Ouen (93)aura lieu unévénementmusical world rapgroove au profitd’associationséthiopiennes.© Photos : D. R.Sites Internet • 4ahumanplanet.org• fidh.org• planetgeneration.orgContacts d’associations éthiopiennes-• ( * ) Godanaw Rehabilitation Project(fondée par Mulatu Tafesse, pour les enfants des rues)P.O. Box 1581 — Addis Abeba — Éthiopie.e-mail-: grip@telecom.net.et• ECF (Ethiopian Children’s Fund, fondée parAnna Getaneh, pour la scolarisation et la santédes enfants en zone rurale).Site Internet-: www.ethiopianchildrenfund.org• EHRCO (Ethiopian Human Rights Council,fondée par le professeur MESFIN, pour le respectdes droits humains en Ethiopie)P.O. Box 2432 — Addis Abeba — Éthiopie.Site Internet : http://ehrco.nete-mail-: ehrco@telecom.net.et


32 Là-baswww.mondomix.org • hiver 2003/04SuvSur la pistedu soleilDans l’ombre deKrust et RoniSize (avec quiil a longtempscollaboré), Suvcherche à imposersa marque,en croisantdrum’n’basset flamenco,breakbeats etmusiques dumonde.Suv a participé à l’avènement de la scènedrum’n’ bass à Bristol et, plus généralement,à l’explosion du breakbeat à travers le monde.Sa prestation aux prochaines “Transmusicales” deRennes, le soir de l’ouverture de cette 25 e éditionpourrait être un virage déterminant dans sa carrièreémaillée de déjà plusieurs succès. On dit de lui outre-Manche qu’il est le Lee Perry de la drum’n’bass. Maisl’on dit tellement de choses aujourd’hui que l’on nesait plus trop bien quelles enceintes croire.© Albane LaureInévitablement, son parcours fait jaser. Basé à Bristol,ce proche de Krust (avec qui il fonda à la fin des années1980 le groupe Fresh Four) n’est pas un nouveau venu.En 1989, leur reprise du Wishing on a Star de RoseRoyce leur permet de décrocher la 10 e place descharts anglais. Son amitié partagée avec Krust etRoni Size lui ouvre les portes du label Full Cycle, puiscelles de Reprazent. Mais c’est dans son propre studioqu’il affine après la sortie de “Desert Rose”, sonpremier long format, les tracks de “Follow the Sun”,un double album orienté dancefloor, aux influenceslatines, brésiliennes, indiennes et maghrébines. C’estau cours des multiples tournées de Reprazant sur lescinq continents, que Suv s’est passionné pour les beatsdu monde. Enregistré avec la participation du guitaristeflamenco Guy Calhoun, de la chanteuse andalouseMarta de Pablos, du jeune producteur brésilienDJ Patife et de chanteuses émérites de la scèneelectro anglaise (MC Verse, MC Harrison, Tali et HollieGrant), “Follow the Sun” devrait trouver sur scène lebrin de cohérence qui lui manque sur disque. Avec uneéquipe à peu près semblable, Suv sait qu’il n’a pas ledroit à l’erreur. Son atout-: la surprise, car jamais auparavantles musiques du monde n’ont été ainsi traitées.D’ailleurs, ce n’est ni Full Cycle, ni Reprazent quise sont lancé dans l’aventure, mais le label montpelliérainBlack Tambour. Pourtant, tous les ingrédientshabituels de leurs cahiers des charges respectifs étaientdûment remplis. Lee Perry a inquiété même ceuxqui finiront plus tard par reconnaître son talent, c’estsans doute pour cela qu’on le surnomme ainsi.SquaalyMarguerite Taos Amrouche,mémoire berbèreQuid du particulier et de l’universel? Bien avant la vulgate world, ce questionnementfut au cœur de l’entreprise de TaosAmrouche. Née en 1913 à Tunis où elle vécutquarante ans, elle est décédée en Provenceen 1976 où elle repose, loin de sa terrede ses ancêtres. Elle fut l’ardente ambassadriced’une culture kabyle dont elle se fitmission de perpétuer la poésie et le chantet, partant, la vision humaine et cosmique.Cet engagement, elle le dut au legs d’unemère, Fadhma Aïth Mansour, dernier maillond’une lignée d’aèdes des monodies séculaires,mais aussi aux contradictions d’un«-être hybride » (dixit elle-même) qui vécutles tensions Orient/Occident, Arabe/Berbère,France/Algérie, Islam/Chrétienté… s’employantà en garder les données dynamiques. Sa trajectoirede chanteuse, chroniqueuse de radio,musicologue autodidacte qui trouva un échoauprès de nombre de personnalités (Jean Giono,Sedar Senghor, André Breton, Aimé Césaire,Constantin Brailoiu) et d’un public (cf. ses concertsde 1971 à 1975 au Théâtre de la Ville)trouve aujourd’hui toute son actualité. De fait, laréédition de la quasi-intégralité de ses chants(chez Empreinte Digitale, le reste est chezBuda) accompagnée d’un remarquable appareilcritique est plus qu’un acte patrimonial depremière importance. Il redonne à cette porteuse« d’un savoir commun très ancien »toute sa radicale modernité.© Birgit


Là-bas 33HoraceAndyNé en 1951 dans la banlieue de Kingston, leJamaïcain Horace Andy n’est pas simplementl’une des voix singulières de Massive Attack-: il apoussé très tôt la chansonnette dans les studios d’enregistrement dela capitale jamaïcaine avant d’enregistrer son premier 45-tours à l’âgede 15 ans. Les producteurs de l’île sont alors séduits par la richesseharmonique et la voix haut perchée du jeune homme. Ce dernier netarde pas à prendre pension chez Clement “Coxsone” Dodd, incontournablepatron du mythique Studio One. Les albums “Skylarging”et “The best-of Horace Andy”, publiés en 1972 et 1974 par StudioOne, témoignent de la fructueuse collaboration entre les deux artistes.Plus tard, sous la houlette de Bunny Lee, un autre ténor de la productionjamaïcaine, le chanteur enregistre quelques-uns de ses titresles plus emblématiques (Zion Gate, Money Money, You’re MyAngel…). Mais s’estimant floué par ses mentors, Horace Andys’envole aux États-Unis au milieu des années 1970. Il y mèneune carrière discrète, avant de rallier les brumes anglaises pourenregistrer le premier album de Massive Attack en 1991. Férude sonorités insolites, Horace Andy est actuellement accompagnésur scène par le Home Grown Band, une formation françaisecapable de traduire live les audaces rythmiques de “Mek It Bun”,un album de grande classe publié l’année dernière.Philippe Bordier© D. R.L’InstitutMâhoorpublie (enformatCD etK7) desmusiquesde films, poèmesclassiqueset modernes,musiquesrégionales,œuvresiraniennespour orchestresymphonique,œuvres récentesd’instrumentistestrad’ moderneset un imposantfondspédagogique.Mâhoor,Téhéran-IranUn catalogue important, difficilement accessible en France,sauf dans certains magasins iraniens et quelques Fnac. Sontpubliés, entre autres artistes modernes, Hosseïn Alizâdeh, “Râzo-Niâz”et “Sobgâhi”, belles réussites pour ensemble et chant,“Sallâneh” solo pour un instrument antique reconstitué et l’ensembled’Arshad Tahmâsebi, avec l’exceptionnel chanteur Mohsen Kerâmati-:“Deldâr” et “Pandjé-yé Dashti”. Pour les archives : un beaudisque de maître Farâmarz Pâyvar (santour) et son ensemble, dans les années1960/1980, ainsi que les magnifiques derniers solos improvisés d’AhmadEbâdi, ultime maître d’une prestigieuse famille de musiciens d’Iran. Les motsqui s’imposent sont imagination, son, énergie. Pour des archives anciennes-:“L’art du Kemântché” à l’époque Qâdjâr, “Un siècle de chant”, le vingtième,bien sûr, témoignages importants. Les musiques régionales sont représentées parShir-Mohammad Espandâr (flûte donali du Balutchestân), Hamrâ Gol-Âfrouz(chant et dotâr du Khorâsân) ou des artistes ethnomusicologues, jouant plutôt quepubliant, avec des chanteurs du cru, les musiques collectées : “Hasht Behesht”et “Shâbâsh” d’Hosseïn Hamidi. Pour finir, les musiques de films-: “Gabbeh”d’Alizâdeh, la musique symphonique d’Hossein Dehlavi, les poèmes d’AhmadChâmlou par lui-même et pour la haute pédagogie, le radif vocal par MahmudKarimi. La place manque pour parler de cet important catalogue constituéde presque deux cents enregistrements. Mais on aura une vision iranienne de lamusique iranienne... en Iran.ACdlCe-mail du label Mâhoor mahoor@neda.net


34 Là-baswww.mondomix.org • hiver 2003/04Manu DibangoLe parrain de lamusique africainesouffle ses 70bougies.La face cachée deManu Dibango.© Benjamin De Diessbach1973-:un titre envahitles ondes, SoulMakossa. Son auteur-: Manu Dibango.C’est à l’occasion de la 8 e couped’Afrique des Nations, grand événementde football qui se déroule dansson pays, qu’il a composé ce qui deviendrale plus gros tube africain de tousles temps, plagié des années plus tardpar Michael Jackson dans Wanna BeStartin’ Something, qui figure sur sonalbum “Thriller”.12 décembre 2003-: Manu Dibangosoufflera à Douala, sa ville natale, ses70 bougies. Un sacré anniversaire, etl’occasion de regarder dans le rétroviseurdu taxi-brousse du Kojak francophone.En effet, que de pistes parcouruespar cet impénitent globe-trotter, portésur les fonds baptismaux de la musiquepar le gospel protestant, nourri au laitde Glenn Miller au temps de la machineà coudre Singer et des Tirailleurs sénégalais,touché par le virus du jazz aucœur de l’adolescence, adoubé par legrand chef d’orchestre congolais del’African Jazz, Joseph Kabasele, plongédans les chaudes années des Afriquesindépendantistes. Que de compagnonnagesétonnants par la suite, de NinoFerrer aux chanteurs tricolores, des reggaemenaux salseros, des boutefeux dufunk aux rappeurs-! Que d’expériencespicaresques, d’animations de clubs endirections d’orchestres, d’engagements(“Tam-tam pour l’Éthiopie”, émission surFR3 ou RFI), en créations tous azimutsexprimant une impénitente curiosité-!Une fascinante trajectoire, ponctuéed’albums qui expriment ses goûts pluralistes,sa vision afro-européenne,son humanisme panafricain. Touteschoses que symbolisa l’album “Wakafrica”(paru en 1993). Ce safari musical mettaità contribution des artistes pharesde la sono mondiale (Angélique Kidjo,Salif Keita, Ladysmith Blackmambazo,King Sunny Adé, Papa Wemba, Ray Lema,Youssou N’Dour, Ray Phiri, etc.). Un disquevoulu comme un symbole de la réunificationde l’Afrique du Sud et de celledu Nord dont la pochette représentaitla silhouette d’un Dibango épousant laforme de l’Afrique.Pourtant, si l’on sait beaucoup duManu post-“Soul makossa”, on ne saitpas grand-chose de celui qui précéda.D’où l’intérêt aujourd’hui d’exhumerdes morceaux qui font partie de lapréhistoire de la world. Ainsi, avec“Africadelic” a-t-on l’occasion decourir de l’année 1967, bruyammentpop, avec un Dibango cousin desartificiers de Stax et Tamla Motown,jusqu’à l’Algérie de 1973, alors terre deréférence du tiers-mondisme, périodedurant laquelle son alto tombe sous lecharme de la flûte saharienne. D’autrespublications postérieures devant suivrece “best-of”, dont l’Académie CharlesCros a pris prétexte pour décerner à“Papa Groove” un Prix in honorem pourl’ensemble de son œuvre.Frank TenailleAlbum “Africadelic” (Mercury/Universal).


DVD 35J’ai été au bal(BRAZOS FILMS — HTTP://WWW.ARHOOLIE.COM/ )Voilà une exubérante et irrésistibleplongée dans les cultures francophonesdu sud de la Louisiane parle grand maître du documentaire ethnique américain Les Blank secondépar Chris Strachwitz, meilleur connaisseur des styles cajun et zydecodont il est question ici. Les grands ancêtres (Amédée Ardoin, Joe Falcon,Iry Lejeune) sont intelligemment évoqués, les maîtres du renouveau(Clifton Chenier, les frères Balfa, Nathan Abshire) filmés in situ toutcomme la nouvelle vague de musiciens contemporains. Indispensableet magistral. (partiellement bilingue avec commentaire en anglais. Zone1 uniquement)Youssou N’DourLIVE AT UNION CHAPEL(WARNER MUSIC VISION)En 2002, le musicien sénégalaiss’était produit dans unetrès anglicane chapelle londonienneau moment de lasortie-de l’album “Nothing’s inVain“ dont plusieurs titressont repris ici. Un public conquisovationne le maître dum’balax accompagné de songroupe habituel. C’est agréable,bien capté et bien monté avectoutes les limites inhérentes augenre “concert filmé”, surtouten matière de musiques dumonde où un tournage sur leslieux d’origine sera toujoursinfiniment préférable.J.-P. B.Chulas Fronteras &Del Mero Corazon(BRAZOS FILMS — HTTP://WWW.ARHOOLIE.COM/ )Ce DVD regroupe deux superbesmoyens métrages de Les Blankconsacrés à la musique populairetransfontalière-: “Tejana”ou tex mex (Texas mexicaine)et celle, assez semblable, des“Nortenos” (habitants du norddu Mexique) qui débordent surla Californie et l’Arizona. Desémigrants allemands amenèrentaccordéon et polka dans cescontrées et de grands artistescomme Lydia Mendoza, Flacoet Santiago Jimenez en ontfait l’originale expression de cepeuple écartelé entre deux cultures.(partiellement bilingueanglais –espagnol. zone 1uniquement)J.-P. B.Bob Marley &The WailersTHE LEGEND LIVE(TROJAN)Réalisé à partir d’archives précieusesdu label Trojan, ce DVD présentele concert des Wailers au SantaBarbara County Bowl, enregistré fin1979 et dernier live filmé avant lamort de Marley en mai 1981. LeTuff Gong, en transe mystique surla plupart des morceaux, électrisele public. Et se livre à des interprétationstroublantes de ses titresemblématiques, Exodus et Get upstand up, qui clôt magistralement lacérémonie. Le réel bonus de cetteréédition-: un son et une imageentièrement remasterisés ainsiqu’un document inédit, “Propheciesand messages”, où Bob Marley etson claviériste Tyrone Downie débattentsur le rastafarisme.Halloween atTown Hall Party(BEAR FAMILY RECORDS —HTTP://WWW.BEAR-FAMILY.DE/ )“Town Hall Party” était unprogramme télé musical quiémettait depuis Los Angelesdans les années 1950, spécialisédans la country music et lerockabilly. À cette époque, leseul moyen de rediffuser et desauvegarder des programmesTV consistait à filmer l’imageavec une caméra placée devantun récepteur, un procédéappelé kinescope ou “kinny”,très imparfait techniquement.Ce kinny- “DVDisé” a valeur deprécieux témoignage et invite àla touchante découverte d’unevingtaine d’artistes country peuconnus.J.-P. B.American folk &country music(BEAR FAMILY RECORDS —HTTP://WWW.BEAR-FAMILY.DE )1966 : pour la première fois, desmusiciens ruraux des Appalacheset de Louisiane se- produisaient enEurope. Ils furent heureusementfilmés (en noir et blanc) par la téléallemande. Les images rassembléessur ce DVD nous montrentd’émouvantes légendes aujourd’huidisparues : les Stanley Brothers etles Clinch Mountain Boys (bluegrass),la chanteuse Cousin Emmy(country), Roscoe Holcomb (oldtime), les frères Adam et CyprienLandreneau (cajun). Ils étaientcornaqués parles New Lost City Ramblers dontles membres (John Cohen, TracySchwarz et Mike Seeger, petit frèrede Pete) sont eux toujours en vie.J.-P. B.The Spirit of Gospel(FRÉMEAUX & ASSOCIÉS/NIGHT & DAY)Ce documentaire diffusé surArte en 1998 et dû à RégineAbadia et Joseph Licidé offre unpanorama du gospel américaincontemporain. Il nous emmèneà- la rencontre de quelquesunsde ses interprètes les plushabités et les plus captivantsà New York, Chicago et danstrois États du sud profond. Lesmeilleures séquences sont consacréesàun courant méconnu en Europe,le “sacred steel” illustré par lesexcellents Campbell Brothersqui utilisent la guitare dite“hawaïenne” (lap steel guitar),très répandue dans la country,capable de crier et de gémir àl’instar de la voix humaine etqui sonne aussi fort que l’orgue.Voyages sur DVD“Calle 54” et “Cuba Feliz” sont deslongs métrages déjà sortis en salle.Le premier constitue un somptueuxhommage aux grands noms dulatin jazz. Le second, road movie àla cubaine, traque la «-spontanéitémusicale-» de ce peuple de manièreun peu fabriquée. “Voix du Maroc”regroupe les meilleures séquencesd’une dizaine de documentaires dela réalisatrice Izza Genini. Dû au prolifiqueréalisateur télé Don Kent, “AFiletta” est filmé dans une Balagneâpre, au service d’une musiqueempreinte de douleur et de quasireligiosité.La patte d’Olivier Mille,producteur et réalisateur, se retrouvederrière le film de Mahmoud BenMahmoud parti sur les traces d’unpère membre d’une confrérie soufie,prétexte à incursion dans diversesterres islamiques. Et de poser uneintéressante question-: et si laliturgie mystique permettait de luttercontre l’intégrisme ? “Le silence desanges”, propre film d’Olivier Mille,est une fascinante et intelligenteplongée dans un monde méconnu,les chants du christianisme orientalou orthodoxe qui survivent dans l’exempirebyzantin. On y découvre, dela Carélie à l’Éthiopie en passant parla Grèce et la Syrie et surtout chezles coptes égyptiens, le rôle de résistanceque peut jouer une musiquefaisant œuvre de mémoire.Jean-Pierre Bruneau• A FILETTA, VOIX CORSES DE DON KENT.• CUBA FELIZ DE KARIM DRIDI.• CALLE 54 DE FERNANDO TRUEBA.• LES MILLE ET UNE VOIX, TERRES ET VOIX DEL’ISLAM DE MAHMOUD BEN MAHMOUD.• LE SILENCE DES ANGES, TERRES ET VOIX DEL’ORIENT ORTHODOXE D’OLIVIER MILLE.• VOIX DU MAROC D’IZZA GENINI.(COLLECTION “VOYAGE MUSICAL”, ÉDITIONS


36 Mondotekwww.mondomix.org • hiver 2003/04AFRIQUECheikh Sidi BémolEL BANDI(L’USINE)“El bandi”, en arabe dans letexte, c’est… le bandit : dusur-mesure pour un “Cheikh”qui n’a de sage que le nom.Hocine Boukella et ses potes del’Usine (association de musicostous aussi déjantésles uns que les autres) ontconcocté un album à la saucegourbi-rock. Du rock du taulardblédard à la ballade dédiée àsa petite môman, c’est l’albummultifacettes d’un dur au cœurtendre, caustique mais sympa,marginal et fier de l’être.Yasrine MouaatarifKékéléCONGO LIFE(NEXT MUSIC)Avec “Congo Life”, Kékélé offre toutela classe de la rumba congolaise.À l’écoute de cet album, la grandeépoque des soirées enflammées deKinshasa n’est vraiment pas loin. Véritable groupe de stars africaines,Kékélé est l’une des formations qui a fait l’histoire de cette musique.Les titres sont aussi chaleureux et enjoués qu’élégants. Les cinq compères,accompagnés par quelques invités classieux, tel l’accordéonistemalgache Régis Gizavo, impriment une forte dose de sensualité à leurstyle festif. Un vrai moment de plaisir qui donne envie de crier avec eux«-Kékélé transcontinental-!-».Zoumana TeretaNIGER BLUES(COBALT 09361-2)Zoumana Tereta est un Bozo,un de ces pêcheurs qui viventsur les rives du Niger. Lessources du blues proviennenten partie de la boucle du Niger,ce qui est démontré ici avectalent. Zoumana Tereta chanteen s’accompagnant d’une petitevièle à une seule corde, en crinde cheval comme la mèche deson archet. Cela lui donne unson râpeux qui soutient sa voixavec efficacité. On est dans lemême univers que celui d’AliFarka Touré, qui a d’ailleursenregistré lui-même deschansns en bozo.Henri LecomteBa CissokoSABOLAN(MARABI)L’un des disques les plus attendusde l’année. Ba Cissoko, neveudu grand joueur de kora M’BadyKouyaté, sort enfin son albumavec ses trois compères Sekou etKourou Kouyaté et Ibrahima Bah.“Sabolan” laisse apparaître unebande dejeunes griots guinéens inspirés. Cetalbum touche par sa beauté, audelàde l’orchestration, des influencesreggaes et d’autres plus électriques.Deux koras, une basse, unecalebasse, une pédale wah-wah,un peu de finesse et beaucoupd’énergie suffisent à développerleur univers. La “famille” loue lamère, dénonce les mariages forcésou reprend les ballades traditionnellesavec fougue et intelligence.Coco M’BassiSISEA(TROPICAL MUSIC)Le second CD de Coco M’Bassiest dans la droite ligne de“Sepia”. Les arrangements soyeuxprodigués par une équipe d’amisfidèles, augmentée par les visitesopportunes de compatriotesprestigieux (Toups Bebey, RichardBona ou Manu Dibango), construisentune ambiance feutrée. Jazz,gospel et soul y renouent avecleurs origines africaines. Au cœurde la musique, la chaleureusevoix de la camerounaise délivredes réflexions poétiques, inspiréespar sa foi, sa vie et ses racines.Ce disque intimiste, animé parun swing sautillant, peut rivalisersans rougir avec ceux des nouvellesdivas jazz-soul.Abdelhadi El RharbiEL GHORBA(UTICA RECORDS/MOSAIC MUSIC)Un album de “ghorba”, d’exil.Un de plus-? Pas quand “l’exil”en question, c’est l’émouvantgénérique du film “Douce France”de Malik Chibane. Pas quand laterre quittée est celle d’Agadir,dans le sud marocain, au cœurde la généreuse région du Souss.Pas quand l’exilé en questiona été élevé par une grand-mèremusicienne, a grandi aux sons deIzanzaren et de Randy Weston eta mûri auprès d’Archie Shepp etde Mohi Loukili. Il en résulte unblues berbère des plus délectables,teinté de jazz gnaoui etgracieusement servi au ney et auxviolon, piano et kanoun, à la contrebasseet au banjo marocain. Unalbum tout en nuances.B. M.Ensemble Ibn ArabiCHANTS SOUFIS ARABO-ANDALOUS(LONG DISTANCE/HARMONIA MUNDI)Au Maroc, certaines zaouiad’inspiration soufies —-à traversla mémoire de vieilles famillesdont les généalogies renvoientà l’Espagne des trois cultures-—ont préservé unetradition musicale “arabo-andalouse”,quece soit sur un registre sacréou profane. C’est cet héritage,recueilli au sein de la ZaouiaSiddiqia, que l’Ensemble IbnArabi (direction Ahmed ElKheligh) actualise, au cœurmême de la casbah de Tanger.South African GospelRICH VOCAL HARMONIESOF SOUTHERN AFRICA(ROUGH GUIDE RGNET 1099 CD)Le gospel sud-africain s’est faitconnaître dans le monde entiergrâce aux chœurs de LadysmithBlack Mambazo, présentsdans ce recueil. De nombreuxautres groupes de qualité nousfont découvrir la richesse et ladiversité de cette musique oùles groupes alternent voix masculineset féminines, zoulous,xhosas ou sothos. Certainesformes sont très proches dugospel des Afro-Américains,alors que d’autres sont restéesbeaucoup plus dans l’espritsud-africain.Non ! Limite Pas mal Bon ExcellentIncontournable


Mondotek 37Janice de Rosa &Djeli Molissa CondeADUNA(NEXT MUSIC)La native de Manhattan fit sespremières tentatives afro-bluesavec ce grand échalas de Mangalasur les ondes de Radio Nova.Elle transforma l’essai avec DjeliMoussa Diawara et SissokhoYakoubha. La revoici, cette fois,avec le koraiste guinéen DjeliMoussa Conde (outre le guitaristeSal Bernardi, le batteur jazz,Christian Lété, le bassiste JayGolden et Jean-Philippe Rykiel auxkeyborards). Des complices qui luivont bien. Foin de ses feulementsà la Janis Joplin qui émurentle landernau musical, elle a unstyle bien à elle, et il y a de vraisbonheurs d’oreille dans cette muemandingue.AMÉRIQUESCarlos MazaSALVEDAD(INDIGO / LABEL BLEU)Les frontières sonores n’existentplus chez ce jeune compositeuret pianiste originaire du Chili etrésidant à Cuba. Elles se mélangentsubtilement pour faire naîtreun décor musical qui traversetant le jazz, le folklore latinoaméricainou encore le classique.C’est un bouillonnement d’idéeset de sensations. Dans ce dernieralbum, “Réserve”, la conditionhumaine est au centre de chaquemélodie et de chaque instrument— il en joue facilement une dizaine—-comme des couches poétiquesqui nous rappellent qu’àtravers la (sa) musique, «-noussommes tous des êtres uniqueset privilégiés ».Diego OlivaresMolly JohnsonANOTHER DAY(EMARCY /UNIVERSAL)Vétéran de la scène jazz deToronto, Molly Johnson possèdeune voix versatile à lariche texture. Celle-ci faitmerveille sur des blues à laBillie Holiday comme MissCelie’s (écrit par Quincy Jonespourle film “Couleur pourpre”),un Summertime minimalisteou encore le Ooh Child/Redemption Song de BobMarley à l’original traitementpianistique reggae funk.Un CD qui baigne dans uneagréable ambiance jazz clubdes années 1950 mais dontcertains titres auraient méritédes arrangements moinsprévisibles.Son de Los DiablosTONADAS AFRO-HISPANASDEL PERU(LES CHANTS DE LA TERRE/ALPHA)Aussi loin qu’on remonte, le son delos diablos s’épanouit, au Pérou,dans le cadre des fêtes catholiquesen tant que danse processionnelle,se transformant en une occasionpour les Noirs, de revivre à leurmanière, le totémisme africain. DesNoirs bantous emmenés commeesclaves, puis évangélisés par lesdescendants des Conquistadores.Acculturation etrésistance-: ce couple engendrerade curieux syncrétismes via instruments,rituels et danses. C’est cettemémoire que revisitent Diana Baroniavec le groupe Sapukai (guitare,harpe jésuite, vihuela, quena, etc)et ses invités. Un travail séducteur,Françoise Atlan &Moneim OudwanNAWAH(BUDA)Françoise Atlan, Juive séfaraded’une famille originaired’Algérie, travaille au croisementd’influences nées de l’Andalousiedes trois cultures. Elle s’est alliéecette fois à Moneim Oudwan,Palestinien de Gaza, chanteur etmusicien (oud, saz, cumbus). Unparti-pris qui puise son inspirationdu côté des mélodies populairesjudéo-espagnoles, palestiniennes,druzes, etc. Et qui propose unrépertoire chanté en arabe,espagnol ou hébreux liturgique.Entre impros, compositions,textes liturgiques, et poèmes del’Espagne médiévale, le duo joueà saute-frontières avec un bonheurpalpable.F. T.David Hillyard &the Rocksteady 7UNITED FRONT(PATATE RECORDS/TRIPSICHORD)Entouré de ses compères desSlackers et du Stubborn Allstars,David Hillyard, le saxo-agitateurdu ska-reggae américain, livreici un album au groove intéressant,entre ska roots et jazz.Dans l’esprit sixties, quand leska et le rocksteady de Jamaïquepuisaient leurs inspirationsrythmiques sur les ondes radioen provenance de La Nouvelle-Orléans et de Floride, ces dixtitres instrumentaux révèlentquelques bonnes surprises. Parexemple, Love is something, à larythmique implacable, Hélas, il ya aussi quelques longueurs surdes morceaux au tempo un peutrop ressassé.LhasaTHE LIVING ROAD(AUDIOGRAM/TÔT OU TARD)Lhasa est de retour avec son universmouvant et hanté. Sa voix sillonne entrois langues les détours sincères deson cœur et nous capte pour toujoursdès les premières secondes. Laroute chante, les chemins s’enlacent, se déploient et s’évanouissentaux sons des musiques traditionnelles de ces pays délicats qu’ellenous fait traverser. Bien sûr, parfois on croit reconnaître un paysage-:ici pleure une trompette mariachi, là surgit l’ombre d’une bâtisse qued’autres poètes auraient pu rêver. Mais elle n’emprunte jamais d’impasseni ne brouille son identité. Avec ce CD, Lhasa tend vers l’universel ets’accroche à l’histoire.Jim Murple MemorialLET’S SPEND SOME LOVE(MURPLE&CIE/PIAS)Le très scénique Jim MurpleMemorial a su interrompremomentanément sa trépidantevie “on the road” pour concocterun quatrième album studio réjouissant.Le combo perpétue sonexploration originale du rhythm’n’blues jamaïcain des années1950 et 1960 avec dix-neuftitres enjoués entre ska, rocksteadyet boogie. Mais cette fois,le JMM dépasse ces frontièrescaribéennes et épice son swingsurvitaminé de saveurs latines etjazzy. Résultat-: seize compositionsoriginales et trois reprisesintéressantes sur lesquelles—-c’est une première-— la chanteuseNanou ose taquiner la rimeen français.


38 Mondotekwww.mondomix.org • hiver 2003/04Mariana MontalvoPIEL DES ACEITUNA(LE LOUP DU FAUBOURG/MÉLODIE)Il y a trente ans, le magnifiqueespoir porté par les hymnes de“la nueva cancion chilena” futeffacé par la soldatesque d’unPinochet. Mais ne se dissolventpas les traits constitutifs d’uneculture populaire. Cette évidence,Mariana Montalvo — ex-membrede L’Atelier Recabarrenet de divers groupes (Karaxu,Machucambos, Trio Los Puci)-—l’exprime avec une douce convictioncomme le prouve ce CD.On y retrouve ses auteurs deprédilection dont des poétessesd’Amérique latine (la ChilienneGabriella Mistral et l’ArgentineAlfonsina Storni). Avec en primeun clin d’œil à Jacques Brel et unduo avec Lokua Kanza.Tish HinojosaLIVE(RRCD 3221/DIST. HARMONIA MUNDI)Sentimentalement attachée àl’axe Austin, San Antonio, NewMexico, cette fille d’immigrésmexicains a beaucoup tournéet embrassé des jobs d’artistemusicien comme celuid’enregistrer des démos pour lesstudios de Nashville. Cette franctireuses’est forgée un répertoirebilingue où elle développe sesthèmes fétiches (amour, perdition,compassion, frontière),avec son lot d’histoires de galères,de passages ratés, d’injustices.Le tout avec humour. On la retrouvedans la chaleur d’un clubd’Austin, entourée d’un gang trèssoudé qui swingue définitivementlatino. Sa voix, claire et superbe,est pleine d’humanité.Zuco 103ONE UP, ONE DOWN(ZIRIGUIBOOM/CRAMMED DISCS)Maîtres dans l’art de mêlerla langueur chaleureuse dela musique brésilienne à larigueur froide de l’electro, lesZuco 103 quittent leurs sentiersde prédilection et dévoilentsur ce double album unenouvelle facette de leur talent.Le premier disque, “Down”,livre un jazz acoustique auswing très sixties. La voixmutine de Lilian Vieira pimenteles versions unplugged de quatremorceaux du groupe ainsi quedes compositions originalesintéressantes. Le deuxièmeCD, “Up”, agrémenté de troisbonus tracks, retranscrit toutel’intensité scénique du triobrésilien.Steve Riley &The Mamou PlayboysBON RÊVE(ROUNDER)Ce florilège des musiques populairesfrancophones de Louisianetouché par la grâce est un mélangeréussi d’enracinement et de modernité,de créativité et de poésieau service d’un répertoire neuf (ou ancien méconnu). Rythmique impeccable,excellence des harmonies vocales, Steve Riley, David Greely,Sam Broussard et Kevin Dugas atteignent une maturité et une cohésion.La preuve avec la transformation quasi organique du Blues de la prisond’Amédée Ardoin (datant de 1934) en une superbe pièce de rhythm’n’blues contemporain. Jamais, depuis les frères Balfa, le bayou n’avaitretenti de sonorités aussi cosmiquement inspirées.Jean-Pierre BruneauSexteto MayorPASSION DU TANGO(NETWORK/HARMONIA MUNDI)Trente années au compteur pourle Sexteto Mayor conduit par JoseLibertella et Luis Stazo. Une formation(deux bandos, deux violons,un piano, une contrebasse) qui a toujours défendu une acceptionouverte du tango. Dans les années 1980, le Sexteto a acquis une notoriétédepuis jamais démentie. Une longévité due aux qualités de chacunde ses solistes et à l’actualisation d’un héritage qui n’oublie pas que lecocktail tanguiste doit autant à sa part noire qu’à sa part blanche. Entémoigne cette quarantaine de pièces qui courent des classiques versionGardel à l’iconoclaste Astor Piazzolla.Admiral TMOZAIK KREYOL(DON’S MUSIC/MÉLODIE)Très populaire aux Antilles,Admiral T se place sans contestedans le tiercé gagnantdu deejaying à la sauce créole.Toasteur au flow nerveux frôlantl’excès de vitesse, il présenteun premier album mature, échodu rude apprentissage en soundsystem. Dancehall boggle, roots,soca, kako, Mr T jongle avec lesstyles, mêle les rythmes digitalesaux sonorités traditionnelles, ettisse une ambiance dancefloorsympathique. Cette mosaïquecréole révèle un interprète audacieuxdoublé d’un auteur à laplume bien pendue. L’Admiralimpose le créole comme langueofficielle du dancehall et c’esttant mieux.Non ! Limite Pas mal Bon ExcellentLe Diabl’ dansla FourchePASSANT PAR CHEZ VOUS-!(MANDRAGORE LPM170L’AUTRE DISTRIBUTION)Le Diabl’ dans la Fourche joueet chante le répertoire québecoisdepuis un bon bout detemps. Le groupe a quelque peuchangé mais l’un des membresde base, Manu Savinelli, spécialistede ce qui se chante etse jigue en cette belle province,est toujours(bien) là. Comme d’autresFrançais, ces musiciens ontbien compris cette saveurparticulière, ce violon goûteux,cette gouaille des chants àrépons.Ça déménage allègrement, entreIncontournableRanking JoeZION HIGH(BLOOD & FIRE / NIGHT & DAY)Redoutable deejay jamaïcain,Ranking Joe tchatche plus viteque son ombre. Il le clame hautet fort dans “Zion High”, impeccableréédition de son album“Round The World”, publié en1980. Calé sur des rythmiquessurvoltées et ponctuées de rafalesde cuivres généreuses, RankingJoe dévore le micro sans faiblir.Ces sessions ont été enregistréespuis mixées par le regretté KingTubby, jadis l’un des maîtres dela console jamaïcaine. Plusieursinédits de Black Uhuru, avecDennis Brown au chant et Sly &Robbie aux manettes, figurentaussi au programme de cetalbum augmenté d’un livretimpeccable.Philippe Bordier


Mondotek 39Tommy McCookBLAZING HORNS(BLOOD & FIRE/NIGHT & DAY)Membre fondateur desSkatalites, Tommy McCookdélaisse un instant la syncopefrénétique du ska pour poserson sax sur des productions trèsroots signées Vivian “Yabby You”Jackson et Glen Brown. Premièreédition CD de deux vinyles raresde la fin des années 1970 maisaussi d’un white label (jamaisédité) de Glen Brown, “Blazinghorns” présente vingt titres.Parmi ceux-ci, figurent des classiquesjudicieusement revisités-:Dirty Harry, Jamaican place, Itesof zion. À noter également uneversion style “rockers” de RidingWest produit par Bunny Lee. Unalbum de sax-roots jubilatoire.U RoySHOW TIME (CD + DVD)(PASSAGE PRODUCTIONS/MÉLODIE)Pionnier du deejaying jamaïcain(comprendre par là MCet non scratcheur-passeur dedisques), mister Roy perpétuetranquillement ses extravagancesvocales au gré de sespérégrinations. Le voici àl’œuvre sur une sélection demorceaux enregistrés lors deson tour d’Europe version1997. Le papy toasteur prouve,images DVD à l’appui, qu’il n’arien à envier à la fièvre rageusede ses jeunes compatriotes“bobo”, plus grand-chose àprouver non plus. Il assure toutsimplement, enchaînant leshits comme Soul rebel, Passthe kutchie, Wear you to theball… Big up.Renata RosaZUNIDO DA MATA(WORLD KITCHEN DO BRASIL/L’AUTRE DISTRIBUTION)Au milieu des années 1990,Renata Rosa quitte Sao Paulopour Récife. Chercheuse, ellecollecte musiques et danses.Musicienne, elle apprend l’artdu violon rabeca et peaufine uneversion personnelle de l’espritdu Pernambuco. Produit par sesamis Eder Rocha et MazinhoLima de Mestre Ambrósio, ledynamique “Zunido da Mata”conjugue à la fois les véracitésculturelles régionales et unecertaine sophistication due àdes arrangements. Rythmes etmélodies y trouvent un équilibreharmonieux, tout en laissant lepremier rôle à la voix posée etclaire de la jeune Brésilienne.Howard TateREDISCOVERED(BMG)Il aurait mérité de connaître lanotoriété d’Otis Redding ou deWilson Pickett. Mais roulé dansla farine comme tant d’artistesde la soul music des années1960, il- avait disparu de lacirculation pendant trente ans.Miraculeusement retrouvé parle compositeur Jerry Ragovoy,il démontre ici qu’il n’a rienperdu de son célèbre “falsetto”.-Accompagnée par une superbeformation, les Uptown Horns,cette grande voix aux évidentesinflexions gospel et blues ressusciteà merveille les sonoritésdu “Philadelphia sound”d’antan.WemilereSANTERIA, TAMBOURS SACRÉS(LONG DISTANCE/HARMONIA MUNDI)Cet album rassemble quelquesunsdes meilleurs musiciensde la tradition africaine deCuba dont les racines poussentde l’autre côté de l’Atlantiqueschez les Yorubas ou les Fonsdu Golfe de Guinée. Sous lahoulette de Roman Diaz, l’undes plus capés rumbero de l’île,Wemilere, groupe du barrioCentro Havana, est une invitationà pénétrer un peu au cœurdes traditions musicales noireslocales. Au menu-: tamboursbata (Okonkolo, Itoyele, Iya)instruments des cultes sacrés-;soirées des confréries abakuas-;santerias et cérémonies aux orishas-;rumbas originelles.Aurélie BoutetB. M.J.-P. B.F. T.Winston Riley ProductionsDANCEHALL TECHNIQUES 1986-1991(MAXIMUM PRESSURE/NOCTURNE)Vous pensez que le reggaes’est assoupi dans lesan- nées 1980. Erreur.Si, à l’époque, BurningIsrael VibrationLIVE & JAMMIN’(NOCTURNE)Les albums de reggae enregistrésen public sont souvent sans intérêt.Prise de son par-dessus la jambeet mixage au rabais interdisent deconfirmer, sur disque, l’intensitémusicale dégagée sur scène par ungroupe de reggae inspiré. Surprise-!“Live & Jammin”, déjoue les pronosticset témoignecorrectement des concerts qu’IsraelVibration a donné en France cetteannée. Les chanteurs et leurschoristes sont accompagnés parles Roots Radics, formation jamaïcainede légende soutenue par unbassiste àla précision diabolique. Pour unefois, tout est dans le disque. Ycomprisles insupportables accords de cla-Joe GibbsProductions(SOUL JAZZ RECORDS/DISCOGRAPH)L’amateur de reggae doit à JoeGibbs une fière chandelle-: lesmonstres du genre (Culture,Junior Murvin, Dennis Brown,Mighty Diamonds…) sont passésentre les mains de ce producteuravisé. Sous sa houlette, ilsont enregistré quelques-uns deleurs titres historiques. Danscette compilation, l’auditeur lesredécouvre encadrés de talentueuxet méconnus DJs (Trinity,Bigger T et le furieux Shorty ThePresident, pour ne citer qu’eux).Véritable carte postale sonore dela Jamaïque de la fin des années1970, l’album déroule son reggaeroots, ses dubs et ses vocalisesen puissance, mais toujours ensouplesse.Spear, Culture, Gladiators et consorts ont effectivement sombré dans unedébauche digitale rédhibitoire, d’autres en revanche ont parfaitement sumaîtriser les synthétiseurs. Le producteur Winston Riley est l’un d’entreeux. Ses poulains (les duos Tenor Saw & Buju Banton, ou Gregory Isaacs& Tiger, par exemple) sont responsables de fameux tubes jamaïcains.Ce disque raconte une page d’histoire essentielle dans de l’histoiredu reggae —-le dancehall approche-— et montre qu’il est toujourspossible de faire groover un vieux Casio-!Philippe BordierSeyni & YélibaN’TARA(MOSAIC MUSIC)Dépositaire du yankadi, genremusical au sein duquel flirtentles rythmes traditionnelsguinéens et le reggae jamaïcain,Seyni se glisse avec aisancedans la sinuosité des mélodiesafricaines. Son nouveau groupe(Rootsaba a cédé la place àYéliba) cisèle un reggae limpideet soigneusement équilibré-: àl’image du balafon, les percussionstraditionnelles cohabitentsans heurts avec l’armadareggae et sa basse incisive. Enoutre, les subtils arrangementsde cuivres et les chœurs aumillimètre font du quatrièmealbum de Seyni l’exemple réussid’une fusion musicale originale.P. B.


40 Mondotekwww.mondomix.org • hiver 2003/04Farida et l’Iraki MaqamEnsembleLA VOIX DE LA MÉSOPOTAMIE(LONG DISTANCE/HARMONIA MUNDI)Née à Kerbela (Irak), FaridaMohammad Ali a pu pénétrer l’artdu maqâm, alliage de poésie et dechant. Mis à mal par les goûts dupublic moyen-oriental, le maqâmatirakien de Bagdad, le tchâlghi baghdâdi, a subi ces dernières annéesbien des hybridations et simplifications. A contrario, celui qu’interprèteFarida Mohammad Ali, accompagnée au santûr (cithare à cordes frappées)et à la djôza (vièle à quatre cordes), renoue avec sa facture etson esprit classiques. À l’heure où l’Irak est en pleine désolation —-lachanteuse et ses musiciens vivent depuis quatre ans en Hollande-—, cetenregistrement n’en est que plus précieux.Frank TenailleShujaat Husain KhanHAWA HAWA(WORLD VILLAGE)ASIELes chansons traditionnelles del’Inde du Nord sont à l’origine denombreux ragas. Shujaat HussainKhan —-fils de Villayat Khan etdescendant de l’une des plusprestigieuses lignées de maître demusique classique hindoustani-—redonne leur noblesse aux mélodiespopulaires hindi ou punjabi. Adeptedu style gayaki ang, les accords etglissandos du sitariste ornent, suiventou répondent avec souplesseaux déploiements mélodiques desa voix enveloppante. Sans jamaisuser d’artifices technologiques, cedisque d’une incroyable modernitéreprend l’histoire à sa source.Et pourrait poser les bases d’unrenouveau de la musique savanteindienne.EUROPETeruhisa FukudaSHAKUHACHI — ÉCOLE KINKO(OCORA C560184)L’école Kinko a été fondée parKinko Kurosawa, un des maîtresde la secte Fuke au dix-huitièmesiècle au Japon. La secte étaitcomposée de moines itinérantsqui mendiaient en jouant dela flûte shakuhachi. Kinko fixealors un répertoire constituéde pièces anciennes et de sespropres compositions. Si d’autresécoles s’ouvrirent par la suite,les musiciens actuels abordentencore le répertoire kinko auquelils apportent leurs personnalitésrespectives. On retrouve ici despièces connues mais il est vraique l’interprétation est intéressante,très méditative, d’unespiritualité tangible renforcée parla présence du souffle.Zad MoultakaZARANI(L’EMPREINTE DIGITALE)Zad Moultaka continue son explorationde la frontière qui sépare lescultures orientales et européenneclassiques. Après avoir proposéune relecture du Cantique descantiques, il présente aujourd’huiun travail effectué d’aprèsquelques mouwashahs (poèmes)de l’ère andalouse. Accompagnéd’un oud, de percus arabes etde la voix pure de la chanteuselibanaise Fadia Tomb el Hage,le piano du jeune compositeurimagine la rencontre du romantismeou de l’impressionnismeeuropéen avec le sel poétique del’Orient. Cette œuvre exigeante etraffinée ne se déguste pleinementque lors d’une écoute attentive etrecueillie.ChinaANCIENT TRADITIONSTO BEIJING PUNK(ROUGH GUIDE RGNET 1122 CD)Une étrange présentationdes musiques de la Chine-!La musique traditionnelleest représentée par le qin,cithare emblématique des lettréstaoïstes, jouée faux parun musicien de second plan.Les minorités ouigoures oumongoles ne sont pas non plusprésentées à-leur avantage. Lesformes modernes ont l’avantaged’être mal connues-: Cui Jian,rocker renommé, mêle hautboischinois et guitares saturées,alternant avec de mièvres variétésou des exemples kitschde sino-jazz du Shanghai desannées trente.Henri LecomteRichards Pick &Thomas ClementsTANPURA TRIBUTE(WWW.PICK-ET.BOCH.COM)Faire un disque avec un instrumentqui d’habitude sert desupport pour le chant et le jeuinstrumental dans la musiqueclassique de l’Inde, voilà lechallenge de Richard Pick etThomas Clement. Grâce à unsystème de chevalet original,à ses quatre cordes, à son longmanche creux et à sa caissede résonance faite d’une calebasse,la tampoura est sansconteste un instrument quiémet des sons sophistiqués qued’aucuns pourraient qualifier deplanant ! Si si, je vous conseilled’essayer.Paul BarnenGnawa DiffusionSOUK SYSTEM(D’JAMAZ/WARNER JAZZ)Dans leur troisième album, lesgnawis grenoblois restent fidèlesà leur style sans se répéter. Côtémusique, ils sont toujours aussiimpertinents. Ils rappent sur duchâabi algérois, font du reggaeau luth, du ragga aux karkabouset du dub à la derbouka. Ilssavent aussi se montrer respectueuxdes traditions (Lalla MiraEl Gnawia, Saki Baki). Leurstextes sont toujours aussi insolents.Ils repeignent avec malicele monde au vitriol, de Bagdadà Jérusalem en passant parPaname. Et lancent même laplus impudente des danses del’année : la Ben la dance. Dupur Gnawa Diff’ garanti sansOGM.Non ! Limite Pas mal Bon ExcellentIncontournable


Mondotek 41Elliott MurphySTRINGS OF THE STORM(LAST CALL/WAGRAM)Touche-à-tout prolifique ettalentueux, capable de rendreun étonnant hommage aubluesman primitif Blind WillieMc Tell, le “Salvador Dalidu rock” vit en France où ila enregistré ce remarquabledouble album (dont le titre faitréférence à André Breton). L’undes secrets les mieux gardés dela scène musicale européenneoù il tourne cependant beaucoupdans des lieux alternatifsaccompagné d’un combosobre mais vibrant. Il écrit desuperbes textes dans la lignéede Neil Young ou Bob Dylan(quand il ne surpasse pas cesderniers).Claire ZalamanskyGÜL PEMBE-CHANT DU SEFARLAND(ARION)Les juifs d’Espagne exilés en 1492au Maroc, en Grèce et Turquie ontemporté avec eux une langue etune culture qui les conserverontjalousement. On connaît les difficultésde travailler sur une musiquesurtout orale, aux interprétationsmultiples et infinies. Les chantsinterprétés dans ce CD représententles principaux genres du répertoirejudéo-espagnol : romances (balladesmédiévales), coplas (chantsà caractère religieux hébraïques) etkantigas (chants de la vie quotidienne).Claire Zalamansky connaît lasecrète alchimie du chant traditionnel.Gilles Andrieux nous transportedans l’univers instrumental del’Empire Ottoman ; et Paco Inabnezdans l’Andalousie profonde.Jean-Pierre BruneauMartyn BennettGRIT(REALWORLD/VIRGIN)Le lutin iconoclaste d’Edimbourg a eul’heureux culot de se produire seulsur de grandes scènes, muni de sesinstruments et de ses samplers. Dé-sormais, Martyn s’est lancé dans un projet autour du répertoire gaélique.Il sous-tend les chants des travellers, le peuple bohémien du Nord del’Écosse, avec une électronique abrasive, pleine d’aspérité, mais quisouligne miraculeusement les lignes mélodiques. Les paroles sont letémoignage de personnes à qui la vie n’a pas fait de cadeaux, maisqui transcendent tout ça par l’humour, la vitalité, l’énergie, la douceur.Total respect.Pierre CunyOi Va VoiLAUGHTER THROUGH TEARS(OUTCASTE)Dans le premier CD de ce groupelondonien, on trouve la beautédes mélodies klezmer et lesformules bien faites de la popanglo-saxonne. Celles-ci sontportées par le violon virtuosede Sophie Solomon et les voixmagiques de leurs invités (àsouligner les performances del’Écossaise KT Tunstall et JudithNe’meth de l’Anima SoundSystem). Un cocktail unique servisur des breakbeats et rythmeselectro pointus. Le résultat estsans doute l’un des projets lesplus novateurs et cohérents de lascène world d’aujourd’hui. Uneexpression musicale vibrante dela quête éternelle de l’origine del’homme.Spain In My HeartSONGS OF THE SPANISHCIVIL WAR(APPLESEED RECORDINGS — WWW.APLLESEEDREC.COM)Ce disque entend célébrer lamémoire des brigades internationalesqui combattirent aux côtés desrépublicains lors de la guerre civileespagnole qui précéda la SecondeGuerre mondiale. Durant les années1960, le chanteur américainPete-Seeger contribua à faire connaîtretout un répertoire ramené parles anciens de la brigade Lincolncomme Viva la Quince Brigada,Los Quatros Generales ou encoreJarama Valley repris dans cet émouvantCD collectif où apparaissentdivers artistes sud et nord-américainsdont Lila Downs, et même PeteSeeger en personne (il a maintenant84 ans) accompagné d’Arlo Guthrie(fils de Woody).Gürültü &Petko StefanovSOFIA – BOURGES – ISTANBUL(BUDA MUSIQUE)Un voyage sur les rives dela mer Noire, aux sons desmélopées turques et de lagaida, la cornemuse bulgare.Cet album est celui de la rencontreentre quatre artistesissus d’une région où les frontièresmusicalesdébordent généreusementdes limites terrestres. Résultat: on ne parle pas toujours lamême langue mais on vibre auxmême rythmes, en l’occurrenceici l’aksak, ce rythme “en sautillés”(qui veut d’ailleurs dire“boiteux” en turc). Clarinette,bouzouki, oud et darbouka : unjoyeux bazar balkanique.Sharon Shannon& FriendsLIBERTANGO(KELTIA KMCD145)Elle a toujours ce charme fou, cejeu vif et souple, cette aisanceà l’accordéon comme au violon.Elle a donné à sa musique lemême côté désarmant qu’à sonsourire-: franc, direct, timide etpourtant resplendissant. On saitqu’elle peut tout se permettre etqu’elle reviendra toujours à sesracines, la musique irlandaisetraditionnelle. Et si, commeici, des erreurs de goût gâchentun peu la sauce, elle reprendsouvent le dessus avec ses amismusiciens et ses amies chanteusespour des envolées superbes,loin du superflu du début etde la fin du disque.BumcelloGET ME(TÔT OU TARD)Retour de deux musiciensparmi les plus fous et créatifsde la scène française. Explosifet imprévisible, ce CD live deBumcello vogue entre improsexpérimentales, enchaînementsde sons acrobatiques. Unmélange de technique et de talent.Cyril Atef en incomparableboîte à rythmes et chauffeurde salle, Vincent Ségal enchercheur sonore minutieux,le cocktail est volcanique.Percussions et effets en tousgenres, samples et violoncelleforment une mixture prochedu tribal et de la transe auxfrontières des cultures.Arnaud CabanneJean-Pierre LafitteVENT DE SOLANA(NORD-SUD NSCD1107 – NOCTURNE)Clarinette double à bourdon,clarinette simple, flûte à becou fifre n’ont aucun secret pourJean-Pierre Lafitte. Il les cueille,les taille. Il en connaît le nom etl’histoire locale, les répertoirestraditionnels dont il s’inspiredans ses propres compositions.Et le voilà parti sur la route d’unecréation musicale en mouvement,ancrée dans le passé,plongée dans le présent et sesrencontres ou ses vents de passage.Avec quelques complicesaux percus et instruments àarchet, il livre un répertoirevibrant, à la croisée des chemins.À découvrir tant pour la musicalitéque pour la démarche.É. B.Y. M.É. B.


42 Mondotekwww.mondomix.org • hiver 2003/04WimmeBÁRRU(ROCKADILLO ZENCD2081 – L’AUTRE DISTRIBUTION)Wimme Saari revient avec sonjoik mâtiné de musique electroou ambient. Le joik est le chanttraditionnel des Sames que nousavons tendance à appeler lesLapons. Un chant nu, circulaire,sans début ni fin, porteur descaractères de chaque membrede la communauté autant quedu vent du nord ou de la fiertédu troupeau. Le joik traditionnelse chante a cappella maisles Sames le frottent depuislongtemps au rock, au jazz, àla chanson… Wimme est deces interprètes capables dechanter seul autant qu’avecdes musiciens audacieux.Globalement, son œuvre vautlargement le détour.Les Grandes GueulesABSOLUT JAZZ VOCAL(RCA/BMG)Six voix a cappella, quatre filleset deux garçons, vous font visiterquatorze paysages sonores. Leurfil conducteur, c’est le jazz. Maisils n’hésitent pas à s’inspirer de toutes sortes de rythmes et de genresmusicaux-: electro, techno, funk, blues, swing, chants slaves, berbères,grégoriens, flamenco, etc. Ils imitent des instruments (percussions, saxophone)mais aussi la nature (vent, pluie). Tout y passe-! Une compositionoriginale et délirante, une grande rigueur technique, une symbioseexceptionnelle des voix pour un résultat tout à fait bluffant.Tania LatchmanAligot ÉlémentsLE SIGNAL DU LUGUET(MODAL MPJ111031)Deuxième CD de ce groupeauvergnat chez Modal. Les sixmusiciens ne se contentent pasde jouer les traditions de leurrégion. Ils les visitent à leurfaçon, donnant un souffle nouveauet personnel à d’anciensairs-; s’inspirant des traditionspour alimenter leurs compositionset leurs regards surdes paysages faits de valses,mazurkas, bourrées et chantsoccitans. Accordéon, vielle,cornemuse, violon, saxos,guitare, percussions, basseet chant sont leurs moyensde locomotion dans ce voyageoriginal aux qualités musicalesindéniables.É. B.RoquioQUAI DU ROI BACO(CAP 20/L’AUTRE DISTRIBUTION)Roland Brou au chant, infatigable.Patrick Couton aux guitares(il nous manquait un peu).Alain Pennec à l’accordéon,flûte et chant-; toujours actifet vif. Hervé Lorre au violon etchant, efficace. Le tout pour unrépertoire de chants de la Loireet des bords de mer, de Nantesà Saint-Nazaire. Histoires demarins et d’ouvriers de chantiers,chansons de la traditionet compositions récentes-; cedisque raconte en musiquequelques petites pages del’histoire des petites gens. Bienchanté et bien joué.É. B.The ChieftainsFURTHER DOWNTHE OLD PLANK ROAD(VICTOR 82876528972)Ils remettent ça, nos dinosaures-!Ça fait le deuxième disque en deuxans avec les chanteurs et musicienscountry rock et bluegrass-: de JoeEly à Carlene Carter en passant parChet Atkins, Jerry Douglas, JohnPrine, Doc Watson, les jeunes deNickel Creek et d’autres pointurescomme John Hiatt ou EmmylouHarris. Soit. Ça chante superbementbien, ça joue magnifiquement.L’Irlande habille ces chansonsanciennes qui firent le voyagedans un sens ou dans l’autre. LesChieftains se mettent au serviced’une recette agréable mais sommetoute facile. On attend beaucoupplus d’eux, même si ceci est unbon disque.SuèdeLA NYCKELHARPA(OCORA C560177/HM)Violon à touches, la nyckelharpaest une sorte de clavier actionnéde la main gauche tandis quela droite joue l’archet. Entrevielle à roue et violon populaire,cet instrument vibre au son descordes mélodiques mais aussides cordes sympathiques etd’un bourdon. Le jeu se faitample, remplissant l’espaced’un horizon de sons comme sil’instrument, à lui seul, racontaitl’histoire, en dessinait le décoret en jouait la musique. Le CDpropose des instrumentaux(polkas et marches) et quelqueschants. Violon et alto s’y joignentéventuellement. Superbeproduction.É. B.Enrique MorenteEL PEQUEÑO RELOJ(VIRGIN)Sur son dix-huitième album,Enrique Morente remonte sapetite pendule et traverse lestemps et les styles du flamenco.Partant de l’ère du cadran solaire,il improvise sur les compas deguitaristes disparus(Montoya, Sabicas ou deHuelva). Il met ensuite les horlogesà l’heure en conviant ses contemporains(Tomatito, Niño josele,Pepe Habichuela ou sa proprefille Estrella). À l’heure des réveilsà cadran digitaux, il invite unebasse électrique ou un piano, etvisite Cuba ou revisite Beethoven(seule faiblesse du disque). Àchaque époque qu’elle accoste, lavoix sans âge de Morente frappeen plein cœur.Rabih Abou-KhalilMORTON’S FOOT(ENJA ENJ-94622)Chaque CD de Rabih Abou-Khalilest un objet de collection-: digipacksoigné (et non dépourvud’humour), photos, textes originaux,partitions… Tout est là pour attirerl’attention. La musique suit ladémarche-: toujours de qualitémais souvent surprenante. Aprèsun disque en solo à l’oud, le revoicibien entouré pour une œuvre oùjazz et références orientales semarient avec bonheur. L’effet desurprise vient du chanteur GavinoMurgia-: sans tenter d’imiter lesvoix mongoles ou tuva, il arrivenéanmoins à un incroyable travailde gorge mêlé à une sorte de scattrès personnel. Oud, clarinette,accordéon, tuba et percussions fontle reste et le font magnifiquement.David KrakauerLIVE IN KRAKOW(LALBEL BLEU LBLC6667)Évoluant entre tradition klezmeret jazz astucieusement débridé,Krakauer a emmené sesmusiciens à Cracovie. KlezmerMadness-(la folie klezmer),nom de son groupe, a pris toutesa dimension devant un publicheureux et actif. La clarinettede ce magnifique musicienfait ses prouesses habituelles,magnifiquement ensorcelée parl’accordéon,la basse, la guitare électrique,la batterie mais aussi les sampleset autres bidouillagesd’un jeune musicien embarquédans l’aventure. À dégustersans modération.Étienne BoursNon ! Limite Pas mal Bon ExcellentIncontournable


Mondotek 43Amestoy TrioLE FIL(DAQUI 332016 – HM)Jean-Luc Amestoy (accordéon),Gilles Carles (guitare) et NicolasCalvet (tuba), ça sonne commeun orchestre imposant, impeccable,heureux de tourner.Un bonheur communicatif, qui plonge l’auditeur dans cette jubilationsonore. Une recette simple pourtant mais trois instruments quis’entendent, s’écoutent, se convient l’un l’autre entre valses, swing,relents de musette, parfums d’Occitanie… Et musiques populaires,tout simplement. Une musique qui s’est imprégnée de l’histoire, dutemps, des mouvements de populations, des rencontres de cultures etqui nous en donne son reflet et son sentiment. Un régal.Étienne BoursBratschNOMADES EN VOL. PORTRAIT(DEUX CDS)(NETWORK 25.193)Ce double CD fête les 25 ansde Bratsch. Y figurent trentecinqplages extraites de leursdisques-: musiques juives ettsiganes en amour, chansonswing, jazz manouche, improvisations,chansons grecqueset arméniennes, compositionspoétiques… Un univers, celuide Bratsch. On aurait préféré,évidemment, un anniversairesur un répertoire nouveau ousur quelques surprises. Maiscelles-ci se limitent à unepetite poignée d’inédits.Bon, de toute façon-!La TarantellaANTIDOTUM TARANTULAE(LES CHANTS DE LA TERRE/ALPHA 503)Antoine Furetière (1690) notaità propos de l’araignée tarentule-:«-On a dit de tous temps que lamusique guerissoit du venin dela tarentole, parce qu’elle réveilleles esprits des malades, qui ontbesoin d’agitation. » Pour lemoins, reliquat de quelque culteà Dyonisos ou “tarentella tarapeutica”apparue à partir du dixseptièmesiècle, cette musicothérapien’a cessé de passionnerles musiciens. À partir de cettetradition musicale propre auxPouilles, les chanteurs LucillaGaleazzi, Marco Antico, AlfioAntico et le groupe l’Arpeggitaont imaginé un parcours séducteur,accompagné d’un livretfourni.Ross DalyIRIS(PROTASIS/EROSMUSIC — EN IMPORT OU SURINTERNET : HTTP://WWW.STUDIO52.GR/ETHN_R.HTM)Ce CD établit un parallèle entrecultures hindoustani iranienne etcrétoise qui est exploré. Ross Dalyet ses complices grecs, joueur desarangui (Dhruba Gosh), tablas(Partha S. Mukerjee), tombak(Pedram Khavar-Zamini) et de tar(Hamid Reza Khabazi), se liguentpour briser des frontières de toutefaçon étroites entre des traditionsriches et poétiques. Commechaque aventure du plus Grecquedes musiciens irlandais, “Iris”s’est avant tout monté autour derelations humaines fortes. Cellesci,combinées avec un amourpartagé pour l’exploration artistiquedélicate, donnent un disque passionnant.É. B.Marc RobinePOÉTIQUE ATTITUDE(EPM)Érudit, journaliste (L’Escargotfolk, Paroles et Musique, Chorus),historien de la chanson, luthier,musicien multicarte, Marc Robinefut un formidable “passeur”. Uneactivité intense qui n’a jamaisempêché cet impénitent voyageur,ami d’Hugo Pratt, de jouer avecses copains et d’enregistrer. Aprèsavoir contribué à publier chezEMP une anthologie de la chansonen 90 CDs, il avait décidé,l’été dernier, de publier son propreflorilège. Huit jours encore avantde nous quitter, il réfléchissaitencore sur l’ajout de divers titres.Un enregistrement paru pouraccompagner une soirée hommagele 13 octobre dernier, à laMaroquinerie à Paris.Angélique IonatosCanta Frida KahloALAS PA’VOLAR(NAÏVE)« Pourquoi aurais-je besoin depieds, si j’ai des ailes pour voler-?»-: c’est inspirée par cette phrasede la Mexicaine Frida Kahlo(1907-1954) que la GrecqueAngélique Ionatos a conçu cerépertoire. Chantés ici en espagnol,les textes ont été choisis ettraduits par Christine Ferarios,et mis en musique par ChristianBoissel.Sur scène, Ionatos fait montrede beaucoup de brio et de joie,entourée d’un bel équipage conduitpar le bandonéon magique deAna SalazarUN HIMNO AL AMOR(UNIVERSAL)On peut toujours craindre lepire de ce genre de gageure.Mais on avait repéré cette chanteusedans le spectacle/album“Chanson flamenca”, expériencedans laquelle elle tirait sonépingle du jeu. De fait, on n’estpas déçu de son mano a mano(ou plutôt voz à voz) avec lamôme Piaf. L’ancienne danseusede Cadix à la voix sensuelles’en tire avec les honneurs,conférant à certains de ces onzestandards une dynamique etune sensibilité nouvelles (Lavida es rosa, Dios moi, No mearrepiento nada). Nonobstantquelques arrangements un peuemphatiques, ce CD est unevraie curiosité.Robert WyattCUCKOOLAND(HANNIBAL-RYKODISC/NAÏVE)Unique et inimitable, cette figurede légende est un pur à l’écart desmodes. L’ancien batteur-chanteurde Soft Machine, qu’un stupideaccident a laissé paraplégiquedans un fauteuil roulant il y a trente ans, n’a pas son pareil pour créeravec des moyens minimalistes ces climats oniriques, mystérieux, un peutristes. Ni pop, ni jazz, ni ritournelles, ni comptines adultes ou musiquerépétitive : un peu tout cela à la fois, distillé dans une forme poétiqueenvoûtante. Tout en fines touches, fourmillant d’idées, ce copieux CD estcohérent. Et Wyatt n’a pas son pareil pour trousser d’aussi désarmantes,entêtantes et poignantes mélodies.Philippe Bourdin


44 Encyclowww.mondomix.org • hiver 2003/04World en chiffresLes musiques du monde existent. Les chiffres le prouvent ! Nous vous proposonstrois extraits d’une enquête très poussée, réalisée par l’Observatoire de la Musique et GFKsur le marché des musiques du monde (données du troisième trimestre 2003). Vous pourrez constaterque ce marché se situe entre celui du classique et celui du jazz, sachant qu’il suffit d’untube pour faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre-: Norah Jones pour le jazz, André Rieupour le classique, et Dis l’Heure 2 Zouk pour la world. Ce dernier tube, Laisse parler les gens, prendla tête du Top 50 des musiques du monde. Et à lui seul, il fait exploser la catégorie “musique desîles”, propulsant les musiques exotiques en tête des ventes. Dans ce hit-parade déterminé par lesventes de disques sorties caisses, vous y verrez en numéro 2 Shakira : ce n’est pas une erreur,les producteurs de la belle chanteuse ayant décidé de promouvoir son disque dans les rayons“musiques du monde”. Autre constat-: dans les cinquante meilleures ventes, il y a dix-sept compilationset bon nombre de rééditions. Cela tenderait, hélas, à prouver que le commercial empiètelargement sur la création.Philippe Krümm1 2 3 4 5Nombre deréférences deCDs audiosvenduessur le marchéPoids selonl’origine desmusiques


Encyclo 45Le top 50CDs audiosdes musiquesdu monde(période du2e semestre2003).


<strong>Mondomix</strong> Papier remercietous les lieux qui ont bien vouluaccueillir le magazine dansleurs murs, particulièrement lesdisquaires indépendants ettous les magasins HarmoniaMundi, les espaces culturelsLeclerc, les Cultura pour leurouverture d’esprit et leur participationactive à la diffusiondes musiques du monde.Vous pouvez trouver <strong>Mondomix</strong> Papier chez des disquaires, dans lessalles de concerts, bars, médiathèques et lieux spécialisés musique dumonde à travers un réseau de partenaires et dans les médiathèquesde la communauté française de Belgique.Pour connaître nos lieux de dépôts : tél. 01 43 67 02 00.Pour connaître les dates de concerts, contactez nos partenairessur les villes de :Paris — Lylo (01 42 09 65 02),Bordeaux — Clubs & Concerts (05 56 52 09 95),Rennes — La Griffe-(02 23 30 04 44),Toulouse — Let’s Motiv (05 61 14 03 28),Lyon — O’Range Tour (06 63 18 19 91),Marseille — Watt News (04 91 64 79 90)Montpellier — Coca’ Zine (04 67 06 95 83).Pour recevoir chez vous<strong>Mondomix</strong> PapierAbonnez-vous à prix coûtant au prix du postage.Adressez-nous dans une enveloppe timbrée votreadresse sur papier libre plus un chèque de 20 €pour 11 numéros (à l’ordre de “ABC S.A.R.L.”).Expédiez le tout à :ABC S.A.R.L.183/189 avenue de Choisy75013 Paris.Où trouver <strong>Mondomix</strong> Papier ?RéseauHarmonia Mundi :• 20 place de Verdun13100 Aix-en-Provence• 5 rue de l’Hôtel de Ville81000 Albi• 8 rue des Vergeaux59000 Amiens• 3 rue du Président Wilson13200 Arles• 18 rue Bonneterie84000 Avignon• 5 rue du Pont Neuf64100 Bayonne• 9 rue St-Martin41000 Blois• 5 rue des Remparts33000 Bordeaux• 15 av Alsace Lorraine01001 Bourg-en-Bresse• Place Gordaine18000 Bourges• 139 rue St-Pierre14000 Caen• 41 Grande Rue71100 Chalon-sur-Saône• 23 rue Juiverie73000 Chambéry• 1bis rue Grande Rue50100 Cherbourg• 22/24 rue Piron21000 Dijon• 43 rue Pérolière05000 Gap• 11 Grande Rue38000 Grenoble• 4bis av du Général deGaulle83400 Hyères• 63 rue des Merciers17000 La Rochelle• 153 rue Victor Hugo76600 Le Havre• 9 rue du Sec Arembault59800 Lille• 23 rue du Clocher87000 Limoges• 21 rue du Pdt E. Herriot69000 Lyon• 24 rue Vacon130001 Marseille• 6 rue des Carmes82000 Montauban• 29 rue de l’Argenterie34000 Montpellier• 21 rue Crebillon44000 Nantes• 33 rue de l’Hôtel des Postes06000 Nice• 36 rue Jeanne d’Arc45000 Orléans• 15 av de l’Opéra75001 Paris• 20 rue de Rivoli75004 Paris• 54 rue St-Placide75006 Paris• Très Grande Bibliothèque75013 Paris• 18 rue de l’Ange66000 Perpignan• 11 rue du Guéodet29000 Quimper• 3 rue Jean Jaurès35000 Rennes• 28 rue Ganterie76000 Rouen• 4 rue Ste-Catherine42000 St-Etienne• 21 rue des Juifs67000 Strasbourg• 2 rue du Maréchal Foch65000 Tarbes• 56 rue Gambetta31000 Toulouse• 15 rue Nationale37000 Tours• 12 rue Vernoux26000 ValenceEspaces culturelsE. Leclerc-:• 6 rue du soldat Bellot83400 Hyères• Avenue du Gal de Gaulle03700 Bellerive/Allier• 580 avenue de Paris79025 Niort• 11 avenue Jean Jaurès78390 Bois d’Arcy• Espace Clichy167, Bd Victor Hugo92110 Clichy• Le Moulin de ViryRoute de Fleury911170 Viry-Chatillon• 2 rue Eugène Henaff94405 Vitry-sur-Seine• Boulevard du Bab64600 Anglet• Route de Pau65420 Ibos Tarbes• 1234 av du VigneauRocade Est40000 Mont-de-Marsan• 14 route de Paris44071 Nantes• La ConraieC.D.Route de Rennes44700 Orvault• Z.I. de l’étang au Diable35760 Rennes-St-Grégoire• 1 rue OrdonneauRoute de PornicAtout Sud44406 Reze• 55 bd des Déportés35400 St Malo• La TuilerieRoute du Mans72300 Sable-sur-Sarthe• Zone d’activités AtlantisMoulin neuf44807 St-Herblain• Av Jean Burel44460 St-Nicolasde-Redon• Le CadivaisRoute de Nantes44160 Ponchateau• La GuérinièreAv François Mitterrand85340 Olonnesur-Mer• Av Louis Sallenave64000 Pau• Route de FumelLa Justice47300 Villeneuve-sur-Lot• 50 place du Marché47200 Marmande• Route d’Auch65800 Orleix• RN 113Rue des Bastions47400 Tonneins• RN 10 —-Le Busquet64600 Anglet• ZAC du MadrilletAv de la Mare aux Daims76803 St-Etiennedu-Rouvray• Route de RouenMenneval27300 Bernay Menneval• SA Laury Chalonges DisRoute de Clisson44115 Basse Goulaine• Rue Amiral Duchaffault85600 Montaigu• Parc Lann56000 Vannes• 19 rue de Luneville57402 Sarrebourg• Zone artisanale57150 Creutzwald• ZAC Betting-lès-St-Avold57804 Freyming-Merlebach• Bd industriel de la Liane62230 Outreau• Route de Maizières57210 Hauconcourt-Maizières-les-Metz• Rue Aristide Briand60230 Chambly• RN1 — 95570 Moisselles• CC Clichy 2Allée de la Fosse Maussoin93390 Clichy-sous-Bois• ZAC du Plateau22190 Plérin• 3 av de Gourvilly29000 Quimper• Moléon33210 Langon• CC Grand Tour33560 St-Eulalie• Rue Jules Vallès35065 Rennes Cleunay• Rue du Mee35500 Vitre• ZAC du Grand Noble2 allée Emile Zola31175 Blagnac• Route de Paris82000 Montauban• Quartier St-Eloi12000 Rodez• Route du Muret31120 Roques-sur-Garonne• Départementale 11234130 St-Aulnes• 34 avenue Descartes33165 St-Médard-en-Jales• 181 rue Artois45160 Olivet• Place Champ de Foire19000 TulleRéseau Cultura-:• Zac Beaulieu 200017138 Puilboreau• 12 bd de l’Europe31120 Portet-sur-Garonne• 31313 Labège• Parc commercialChemin LongRue Georges Ohm33700 Mérignac• ZAC du Mazaud SudAvenue Pierre MendèsFrance RN 8919100 Brive• Espace commercialQuartier Libre — Lot n° 4764230 Lescar• Zone Commerciale — Cap sud36250 Saint-Maur• ZI de la Vallée du Giers69700 Givors• Centre cial La Madeleine35400 Saint Malo• Zone commerciale AvignonNord ZAC porte de Vaucluse84700 Sorgues• ZAC de la Fontaine au Brun44570 Trignac• ZAC du Linkling III57180 Terville• 89/91 Route de Lyon - RN6Carrefour Pompidou71000 Mâcon• Centre cial desPortes du FuturN° 1 Espace Colette Ouvrard86360 Chasseneuildu-Poitou• Espace commercial14 e avenue Louis Armand95220 Herblay• ZAC les Pieds BlancsRoute d’Orléans18230 Saint-Doulchard• 4 rue Louis de FunèsZAC de la plantation33140 Villenave d’Ornon• Plateau des Couleures26000 ValenceN°6 - Hiver 2003/04 - Gratuit• Rédaction :3 rue Basfroi — 75011 Paris.Tél. : 01 43 67 02 00Fax : 01 43 67 02 40e-mail : papier@mondomix.com• Édité par ABC S.A.R.L. et<strong>Mondomix</strong> Média S.A.R.L.• Directeur de la publication :Marc Benaïche.e-mail : marc@mondomix.com• Rédacteur en chef :Philippe Krümm.e-mail : pkrumm@mondomix.com• Rédacteur en chef adjoint :Benjamin MiNiMuM.e-mail : benjamin@mondomix.com• Ont collaboré à ce numéro :Paul Barnen, Laurent Benhamou, PhilippeBordier, Bernard Bouquin, Philippe Bourdin,Étienne Bours, Aurélie Boutet, Jean-PierreBruneau, les CosmoDJs (DJ Tibor et BigBuddha), Jonathan Duclos-Arkilovitch,Jean-Jacques Dufayet, Blaise Goldenstein,Sophie Guerinet, Henri Lecomte, HélèneLee, Marushka, Yasrine Mouaatarif, DiegoOlivares, Maxime Pécas, Camille Pesier,Claude Ribouillault, Sandrine Teixido, FrankTenaille, Anne-Cécile Worms.• Photographe :Bill Akwa Betote.• Direction artistique :Tania Latchman.e-mail : tania@mondomix.com• Secrétaire de rédaction :François Guibert.e-mail : guibert@mondomix.com• Publicité et partenariats musique :Antoine RiolletTél. : 01 55 80 20 36 — Fax : 01 55 80 20 53e-mail : a.riollet@laroquette.comSite : www.laroquette.com• Publicité instruments de musique :ABC communicationMaurice BruneauTél. : 01 64 95 09 99 — Mobile : 06 14 64 51 38• Impression :Assistance Printing.• Dépôt légal :à parution.Toute reproduction, représentation, traductionou adaptation, intégrale ou partielle, quel qu’ensoit le procédé, le support ou le média, eststrictement interdite sans l’autorisation de lasociété ABC S.A.R.L.• N° d’ISSN :1639-8726Copyright ABC / <strong>Mondomix</strong> Média 2003.<strong>Mondomix</strong> Papier, gratuit.

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