64<strong>Mondomix</strong>.comà voir / CINémaMohammed Ali“Soul Power ”de Jeffrey Levy-Hinte(Etats-Unis, 2008)Durée / 1h33S'il prend le temps de mettre en placele décor, le film réserve sa plus largepartie aux performances musicales,absolument ébouriffantes. Starsaméricaines et africaines se succèdentsur la scène, une première qui ne serenouvellera guère. Les Spinners ouvrentle concert, puis défilent Celia Cruz,Franco et Tabu Ley Rochereau, les starslocales, Miriam Makeba, The Crusaders,Bill Withers, B.B. King. Et tous sont ausommet de leur art ! Le film s’achève enapothéose avec la vedette du festival,James Brown, adulé jusqu'au Zaïre,qui délivre un The Payback tonitruant,avant que le générique ne défile (avecun étonnant à-propos) au son de Say itLoud - I'm black and I'm Proud.texte Bertrand BouardPhotographie D.R.Le combat de boxeentre Mohammed Aliet George Foremanen 1974 au Zaïreappartient à lalégende de la boxe.On sait moins qu'unfestival de musique sedéroula en amont ducombatCe Soul Powerdu réalisateur Jeffrey Levy-Hintedevrait singulièrement tirer cet événementde l'oubli. Il en restitue la dimensionépique, symbolique, ainsi que saprodigieuse qualité musicale. Fondé surles images filmées à l'époque, Soul Powercommence par superposer l'angoissedes organisateurs face aux embûcheslogistiques et l'insouciance des musiciens; dans l'avion qui les amène à Kinshasa,Celia Cruz et ses musiciens déclenchentune joyeuse foire, dansant et chantant àtue-tête, tandis que B.B. King tente de lesaccompagner à la guitare acoustique. Lefilm montre aussi l'enjeu de l'événement.Pour les musiciens afro-américains, ceconcert en Afrique a une résonance bienparticulière, et les voir prendre le pouls decette société si proche et si lointaine estl’un des intérêts majeurs du film.James Brown Miriam Makeba B.B. KINGLa figure de proue de cette consciencepolitique afro-américaine n'est toutefoispas un musicien mais MohammedAli, qui crève l'écran à chacune deses apparitions. Au sommet de sonart oratoire, il délivre des rimes aussipercutantes que ses crochets, véritablerappeur avant l'heure. Une successionde scènes savoureuses mènent auconcert : Manu Dibango jouant dusaxophone dans la rue parmi unetroupe de gamins complices ; un groupecongolais esquissant un morceau derumba au coin d'une rue ; le chanteurdes Spinners s'essayant à un combatcontre Mohammed Ali lui-même !Un seul regret : que cetteimmersion dans cetévénement unique ne durequ'1h33. On guettera la sortieDvd, que l’on espère richeen bonus. En attendant, lesfans de musiques noires,qu'elles soient américainesou africaines, savent où allerà partir du mois de juin : dansles salles.Sortie le 10 juin 2009Distribution Océan Filmsn°34 mai/juin 2009
65Cinémix/ TEMOIN INDESIRABLE..............................Un documentaire en forme de cri d'alarme ! Juan Jozé Lozanolève le voile sur la réalité du journalisme en Colombie, sur ceshommes et ces femmes qui risquent leur vie à dénoncer laguérilla et la corruption qui ensanglantent leur pays. Censure,menaces de mort, exil forcé : là-bas, la presse est devenueune cible, un témoin indésirable à bâillonner. Hollman Morrisrefuse pourtant de céder aux intimidations. Avec son émissionde télé multi-primée, il se bat pour faire tomber les trafiquantsde drogue et ceux qui les couvrent. En creux, c'est son portraitqui se dessine, le quotidien et les dilemmes d'un homme prisentre sa déontologie et ses responsabilités de père de famille.Continuer le combat ? Préserver les siens ? Ses questions sontcelles de l'avenir de sa profession.D'utilité publique, comme on dit.Réalisé par Juan Jozé Lozano, distribué par Eurozoom,Colombie, 1h25Sortie le 15 avril// LES ENFANTS INVISIBLES ........................Grands réalisateurs ou non, rien n'y fait : les meilleures causesdonnent rarement les meilleurs films. Cas d'école : ce recueilde sept courts-métrages qui nous balade aux quatre coinsdu monde et braque ses caméras sur les victimes innocentesde notre monde d'adultes, les enfants. Sujet miné. D'un film àl'autre, on balance entre chantage à l'émotion (le Spike Leesur une sidéenne new-yorkaise, le John Woo sur une orphelinechinoise) et didactisme bon teint (le Mehdi Charef sur les enfantssoldats d'Afrique), comme s'il fallait absolument asséner lemessage pour qu'il passe. Finalement, Il n'y a guère que l'opusde Katia Lund, périple picaresque dans une favela brésilienne,qui se joue du misérabilisme sans rien lâcher sur le fond. C'estpour son portrait tragi-comique de deux gamins condamnés àramasser les ordures que Les Enfants invisibles mérite le détour.Réalisé par Spike Lee, John Woo, Ridley Scott, EmirKusturika... distribué par Acte films, France-Italie, 2h04Sortie le 20 mai/// CE CHER MOIS D'AOUT ........................Ils sont rares les films à assumer leur modernité, appeleraux larmes et se concentrer sur leurs héros. Ce cher moisd'août y parvient pourtant, l'air de rien, avec la puissancetranquille des chefs d'œuvre. D'abord docu sur l'été portugaiset ses bals populaires, le film de Miguel Gomes prend viteun tour pirandellien, mêle la vie au tournage, les acteurs auxpersonnages, jusqu'à nous paumer corps et âme quelque partentre fiction et réel. Pas grave. Une beauté magmatique irradiede cette confusion : ici une surimpression d'images sur fond depop lusitanienne, là les larmes de l'héroïne qui se muent en fourire sans que l'on sache si elle joue encore... Et surtout cettegalerie de personnages, qu'ils soient comédiens ou gens du cru,qui transforme l'exercice formel en peinture solaire du Portugalprofond. Une toile de maître.Réalisé par Miguel Gomes, avec Sandra Bandeira, FabioOliveira, distribué par Shellac, Portugal, 2h27Sortie le 17 juinPar Julien Abadie2009 MAi/juin n°34