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dans le monde des - Mondomix

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06 06<strong>Mondomix</strong>.com / ACTUMonden Musiques - solidaritén soirée - équitab<strong>le</strong>Alter eco10 juin 2010 au Cabaret SauvageACTU - Monde©G.de R.© BMImportateur et distributeur, Alter Ecos’efforce de sensibiliser <strong>le</strong> grand publicau développement durab<strong>le</strong> et aucommerce équitab<strong>le</strong>. Avec l’Alter EcoFest l’entreprise, complétée par uneassociation homonyme, montre quel’on peut donner un tour festif à cesactions. Nuru Kane, Ba Cissoko et DJMo sont <strong>le</strong>s artistes choisis pour fairede cette soirée un événement engagé.En accord avec <strong>le</strong>s principes d’AlterEco, <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong> répond aux règ<strong>le</strong>sdu rendez-vous éco-conçu. Pour larestauration par exemp<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s platssont bios et équitab<strong>le</strong>s et la vaissel<strong>le</strong>réutilisab<strong>le</strong>. Ce qui s’appel<strong>le</strong> montrerl’exemp<strong>le</strong> ! Sara Ta<strong>le</strong>bhttp://www.altereco.com/http://www.cabaretsauvage.com/n SidaLa recherchecontre <strong>le</strong> Sida menacéeExpulsion d’artistesDes artistes étrangers résidant en France depuis <strong>des</strong> annéesvivent aujourd’hui sous la menace d’une expulsion.Illustration d’une absurdité administrative avec la chanteusecubaine Martha Galarraga.Chanteuse internationa<strong>le</strong>ment reconnue, à la croisée du jazz, <strong>des</strong> musiquestraditionnel<strong>le</strong>s et de la fusion, Martha Galarraga se voit aujourd’huimenacée d’expulsion du territoire français. Cel<strong>le</strong> qui a tourné <strong>dans</strong> <strong>le</strong> documentaireLucumi de Tony Gatlif, accompagné la formation d'Omar Sosaou <strong>le</strong>s musiciens du Buena Vista Social Club en Europe et aux Etats-Unis,s’est vue bruta<strong>le</strong>ment retirer sa carte de séjour en juil<strong>le</strong>t 2008. Résidantléga<strong>le</strong>ment en France depuis 2002, avec <strong>le</strong> statut d’intermittent du spectac<strong>le</strong>,Martha Galarraga se heurte depuis au vide juridique du droit du travail<strong>des</strong> étrangers - qui ne mentionne pas de statut particulier pour <strong>le</strong>s artistes- et à l’acharnement de la préfecture qui lui réclame <strong>des</strong> contrats enCDI ou CDD, sans rapport avec la nature de son activité. Un comité s’estconstitué, derrière notamment <strong>le</strong> cinéaste Laurent Cantet, pour soutenirl’artiste face à l’absurdité d’une situation qui n’est malheureusement pasnouvel<strong>le</strong>, ni isolée, comme en témoigne <strong>le</strong> cas analogue du clarinettistemoldave Adrian Receanu.Un concert de solidarité réunissant de nombreux musiciens et amis de MarthaGalarraga aura lieu <strong>le</strong> vendredi 28 mai, 20h, au Studio de l'ErmitageParis 20 ème .Laurent CatalaCrise économique ? Démobilisationface à l’épidémie ? Affaire Pierre Bergé? Les promesses de dons pour <strong>le</strong>Sidaction ont légèrement baissé cetteannée : 5,7 millions d'euros contre5,8 millions l’année précédente. Unemauvaise nouvel<strong>le</strong> pour la recherchecontre <strong>le</strong> sida, en mauvaise santé financièrecette année. En février dernierJean-François Delfraissy, directeurde l’ANRS (Agence nationa<strong>le</strong> de la recherchecontre <strong>le</strong> sida), a ainsi affirméqu’il ne pourrait poursuivre son travai<strong>le</strong>n 2011 si ses moyens n’étaient pasaugmentés.Rappelons qu’en France, 7000 nouvel<strong>le</strong>sinfections sont déclarées chaqueannée.Jérôme Pichonn Plus d’infossur <strong>le</strong> site de l’ANRS :http://www.anrs.fr/Le Sidaction sur <strong>le</strong> web :http://www.sidaction.org/n°40 mai/juin 2010


invité07Majida Khattari© D.R.Propos recueillis parBenjamin MiNiMuMDepuis 1996, cette artistemarocaine s’est emparée dela question du voi<strong>le</strong> à travers<strong>des</strong> défilés-performances(Vip, Voi<strong>le</strong> Islamique Parisien),qui pointent la comp<strong>le</strong>xitésouvent absurde du débat.Que cache la question duvoi<strong>le</strong> selon vous ?Majida Khattari : C’est tel<strong>le</strong>mentcompliqué et ambigu. Pour ma part, je m'en sers comme pointde départ d’autres sujets. P<strong>le</strong>in de choses entrent en jeu, commel’éducation, la connaissance de la culture de l’autre. Pour <strong>le</strong>s immigrés,il s’agit d’une question identitaire. On <strong>le</strong>ur demande de s’intégrermais on ne veut pas <strong>le</strong>s intégrer. Ils se sentent rejetés, surtoutla deuxième génération. Ils retrouvent du coup une identité avec <strong>le</strong>sgroupes islamistes qui <strong>le</strong>s récupèrent ou au moins <strong>dans</strong> l’oumma,la communauté musulmane.Y a-t-il <strong>des</strong> réactions positives ?MK : Les gens qui assistent aux défilés comprennent la comp<strong>le</strong>xitéde la situation. Ce n’est faci<strong>le</strong> ni pour la République, ni pour <strong>le</strong>s immigrés,de combiner <strong>le</strong>s identités, <strong>le</strong>s cultures, <strong>le</strong>s façons de vivre.Lors du dernier défilé, il y avait <strong>des</strong> femmes ou <strong>des</strong> hommes sousla burqa et <strong>des</strong> fil<strong>le</strong>s nues avec <strong>des</strong> chaussures et <strong>des</strong> coiffuresincroyab<strong>le</strong>s. On cherche soit à voi<strong>le</strong>r tota<strong>le</strong>ment la femme, soit à lagarder jeune et bel<strong>le</strong> comme une poupée. Des deux côtés, on est<strong>dans</strong> <strong>des</strong> extrêmes d’enfermement.n À VOIRDu 6 mai au 19 juin, Majida Khattari expose « Les Houris »,un travail autour <strong>des</strong> vierges du paradis promises aux martyrsà la ga<strong>le</strong>rie parisienne Martine et Thibaut de Lachatrewww.lachatrega<strong>le</strong>rie.coml Interview intégra<strong>le</strong> sur mondomix.comVotre démarche se situe entre <strong>le</strong>s extrêmes ?MK : Oui. Mon premier défilé s’est terminé par ce que j’ai appelé<strong>le</strong> « tchador de la République ». En guise de clin d’œil à la France,c’étaient <strong>des</strong> Françaises qui avaient porté ce foulard. Le débat n'estjamais correctement posé. On entend soit <strong>le</strong>s extrémismes islamistesqui veu<strong>le</strong>nt utiliser la femme et son corps pour revendiquer <strong>le</strong>urposition, soit <strong>le</strong>s extrémismes féministes ou laïcs. Avec la questionde l’interdiction de la burqa, <strong>le</strong> débat est devenu absurde et revientpresque opposer Orient et Occident.Quel<strong>le</strong>s ont été <strong>le</strong>s réactions <strong>le</strong>s plus inattendues à votredémarche ?MK : En 2008, quand j’ai fait <strong>le</strong> défilé VIP à l’Hôtel de la Monnaie,j’ai reçu un coup de fil me prévenant que Ni Putes Ni Soumisesallait saboter <strong>le</strong> défilé, car je faisais soi-disant <strong>le</strong> jeu du voi<strong>le</strong>, et jen’étais jamais déclaré contre. J’ai reçu <strong>des</strong> menaces de la part deféministes. C’est ce qui m’a <strong>le</strong> plus choqué.Sac à main© D.R.n°39 Mars/avril 2010


08<strong>Mondomix</strong>.com / ACTUMusiqueACTU - Musiquen paris - ÉVÉNEMENTSPARIS en capita<strong>le</strong>En mai et juin, de nombreux événements viennent confirmer Paris <strong>dans</strong>son rô<strong>le</strong> de capita<strong>le</strong> <strong>des</strong> musiques du <strong>monde</strong>. Alors que l’on recenseplus de 150 concerts pour <strong>le</strong> seul mois de mai, <strong>des</strong> événements degrande envergure mettent en avant en juin ces esthétiques.Le 21, pour la fête de la musique, la Fnac invite l’Afrique au châteaude Vincennes. Sur la grande scène, quatre heures et demie durant,Amadou & Mariam, Alpha Blondy, Victor Démé, Tumi and The Volume,Bibi Tanga ou Smod apporteront <strong>le</strong>urs vibrations africaines. Sur <strong>le</strong>s pelouses,sur de petites scènes, sous un arbre à palabre ou au milieudu public, de nombreuses animations se succéderont (contes, poésies,slam, hip hop, <strong>dans</strong>es et percussions). En clind’œil à la Coupe du <strong>monde</strong>, <strong>des</strong> footbal<strong>le</strong>urs proset <strong>des</strong> amateurs réunis par <strong>le</strong> rappeur sénégalaisSefyu s’affronteront lors d’un match amical.www.fnac.com/fetedelamusiqueQuelques jours plus tard, c'est la pelouse de Longchampqui recevra pour Solidays la visite d'unpublic chaque année plus nombreux. L'événementmilitant en faveur de la lutte contre <strong>le</strong> sidaconsacre une bel<strong>le</strong> partie de sa programmationaux musiques du <strong>monde</strong>. Entre <strong>le</strong> 25 et <strong>le</strong> 27 juin,Femi Kuti, Hindi Zahra, Nneka, Tumi and The Volume,Rodrigo Y Gabriela, Fanga, Winston Mc Anuff,Toots and the Maytals, Smod ou Staff Benda Bililiferont une bel<strong>le</strong> démonstration de diversité culturel<strong>le</strong>.www.solidays.orgLire aussi pages 18, 24 et 37DERNIERE MINUTEMonument de la musique <strong>des</strong> Balkans, la chanteuseserbe Ljiljana Butt<strong>le</strong>r est décédée <strong>le</strong> 26avril 2010 <strong>des</strong> suites d’un cancer.Cel<strong>le</strong> qu’on appelait « la Mère del’Âme gitane » vit <strong>le</strong> jour en 1944à Belgrade. El<strong>le</strong> se fit connaîtreen se produisant <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s caféset restaurants de Berljina puisenregistra un album à Belgradequi marqua sa consécration.A la fin <strong>des</strong> années 1970, Ljiljanatourna <strong>le</strong> dos à la musique ets’exila en Al<strong>le</strong>magne. El<strong>le</strong> revinten 2000 et renoua avec <strong>le</strong> succès.El<strong>le</strong> enregistra trois albums dont <strong>le</strong> dernier, FrozenRose (2009), n’est pour l’instant disponib<strong>le</strong> qu’enformat digital.l Sur mondomix.com : portraits et vidéosmp3.mondomix.com : ses albums à télécharger


09n Bruits de palier #4Mais comment un musicienvit-il sa vie de voisin ?Philippe Cohen-Solal,de Gotan ProjectParis (20 eme )© Prisca Lobjoy« Lorsque j’emménage <strong>dans</strong> unnouvel endroit (3 déménagementsen moins de 10 ans), je fais généra<strong>le</strong>mentune crémaillère au coursde laquel<strong>le</strong> je mets la musique exagérémentfort. Immanquab<strong>le</strong>ment,<strong>le</strong>s voisins viennent se plaindre. Jem’excuse et je <strong>le</strong>ur promets que çane se reproduira plus. Si bien que lafois suivante, lorsque j’écoute de lamusique à un volume normal, personnen’y trouve à redire. »Voir aussi page 39une interview de Gotan Projetn Musiques - ongLa musique solidaire en ArgentineInstallé au nord de l’Argentine, un coup<strong>le</strong> franco-argentin éveil<strong>le</strong> <strong>des</strong> enfants défavorisésà la musique depuis plus de douze ans. Ces militants pacifistes qui se sont rencontrés<strong>dans</strong> <strong>le</strong>s années 70 au Larzac ont un jour tout quitté pour venir en aide aux populationsabandonnées de Tilcara, <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s An<strong>des</strong>. Susana, musicienne de formation, et Roger,rejoignent alors Musica Esperanza, une ONG fondée par <strong>le</strong> pianiste Miguel Angel Estrellapour promouvoir la musique comme vecteur de paix et de solidarité.Après une tournée mondia<strong>le</strong> de ses jeunes recrues, <strong>le</strong>ur éco<strong>le</strong>, baptisée Centre andinpour l’éducation et la culture, rassemb<strong>le</strong> aujourd’hui deux cent enfants, promis à denouveaux horizons. J.P.n Plus d’infos sur l’excel<strong>le</strong>nt webzine Youphilhttp://www.youphil.com/fr/n Musiques - HommageDjango DromDjango un jour, Django toujours... Les hommages au pèredu jazz manouche se poursuivent en cette année du centenairede sa naissance : il sera à l'honneur du festival JazzMusette <strong>des</strong> Puces de Saint-Ouen, du 18 au 21 juin, puisde celui de Samois-sur-Seine, vil<strong>le</strong> qui fut son dernier refuge,du 23 au 27 juin. Avec une programmation faisantla part bel<strong>le</strong> à ses héritiers <strong>le</strong>s plus connus, parmi <strong>le</strong>squelsTchavolo Schmitt ou Angelo Debarre.Quelques jours auparavant, du 15 au 17, c'est à Lyonqu'aura été présentée la création Django Drom, une commande<strong>des</strong> Nuits de Fourvière et de la Sal<strong>le</strong> P<strong>le</strong>yel réunissantBiréli Lagrène, Stochelo Rosenberg et Didier Lockwood<strong>dans</strong> une mise en scène de Tony Gatlif. A <strong>le</strong>urs côtés, une nouvel<strong>le</strong> générationde guitaristes français, comme Ghali Hadefi, Benoît Convert <strong>des</strong> Doigts de l'Homme(qui viennent de publier l'album-hommage 1910), et Adrien Moignard, auréolé de sonpremier opus, All the Way, paru en avril chez Dreyfus Jazz. Jean Berryn Plus d’infoswww.festival<strong>des</strong>puces.comwww.festivaldjangoreinhardt.comwww.nuits-de-fourviere.org/© Youri Lenquetten°40 Mai/juin 2010


10Bonne nouvel<strong>le</strong>Aziz SahmaouiEspace libreIl y a toujours <strong>des</strong> artistes à découvrir.Ils n’ont pas toujours de maisonde disques ou de structuresd’accompagnement.Ce n’est pas une raisonpour passer à côté !Sur la terre promise de ses fantasmes, il n’a pas rencontréces anges mais <strong>des</strong> musiciens, pas nécessairementblonds ni costauds. En 1995, il participe à laformation de l’Orchestre National de Barbès.Après avoir mis son guembri et ses percussions au servicede l’Orchestre National de Barbès ou de Joe Zawinul, AzizSahmaoui tente aujourd’hui une échappée solitaire.Une bouil<strong>le</strong> sympa, <strong>des</strong> cheveux bouclés en pétard, <strong>le</strong> sourire avenant,Aziz Sahmaoui - révélation du dernier festival de Dakhla (Maroc) -, affiche<strong>des</strong> allures de doux rêveur musicien et chanteur. D’ail<strong>le</strong>urs, quand il aquitté <strong>le</strong> Maroc pour la France, en 1984, c’était, affirme-t-il, « pour rencontrer<strong>le</strong>s anges ». Cela ne s’invente pas ! « Pour moi, <strong>le</strong>s anges, étaient<strong>des</strong> êtres blonds, costauds et qui pouvaient librement boire une bière àune terrasse. En France, j’allais <strong>le</strong>s trouver. »© D.R.Deux albums plus tard, il s’émancipe de cette affairecol<strong>le</strong>ctive à succès pour al<strong>le</strong>r vers d’autres projets. Iljoue alors avec Karim Ziad, Nguyên Lê, Sixun, ou JoeZawinul, qui l’intègre à son Zawinul Syndicate. Le nouveaurêve de Sahmaoui s’appel<strong>le</strong> Schengen Market,un groupe très convaincant qu’il a mis sur pied avecquelques musiciens bien choisis, comme <strong>le</strong> guitaristeHervé Samb, pour concocter une fusion chamarréecroisant instruments traditionnels (gumbri, ngoni) eté<strong>le</strong>ctriques, gnaoui, chaâbi et jazz. Des maquettessont prêtes. Martin Meissonnier, réalisateur du dernierKha<strong>le</strong>d, sur <strong>le</strong>quel était intervenu Sahmaoui, aurait, paraît-il,bien accroché. Affaire à suivre…Patrick Labessewww.myspace.com/azizsahmaoui


Festival1135 anset toujours <strong>le</strong> feu sacré !Musiques MétissesTexte Patrick Labesse Photographies João Meirel<strong>le</strong>sPour sa 35 ème édition, du 21 au 23 mai, <strong>le</strong>festival Musiques Métisses d’Angoulêmepropose une affiche copieuse, prometteused’échappées bel<strong>le</strong>s revigorantes.Les gran<strong>des</strong> voix de l’Afrique, stars épatantes n’ayant plus rien àprouver, seront là, comme Youssou NDour, Angélique Kidjo ouSalif Keita. Mais éga<strong>le</strong>ment de jeunes pousses pour qui MusiquesMétisses pourrait être <strong>le</strong> tremplin ayant porté chance à tantd’autres au fil <strong>des</strong> éditions précédentes (Rokia Traoré, par exemp<strong>le</strong>,y a donné son premier concert en France, en 1997). Certains de ces ta<strong>le</strong>nts endevenir ont d’ail<strong>le</strong>urs déjà été repérés par <strong>le</strong>s professionnels, tels que <strong>le</strong> guitariste etharmoniciste malgache Mami Bastah (lauréat du Prix Musique de l’Océan Indien),<strong>le</strong> Sénégalais Naby (Prix RFI en 2009), ou la Camerounaise Kareyce Fotso (médail<strong>le</strong>d’argent <strong>dans</strong> la catégorie chanson aux derniers Jeux de la Francophonie, àBeyrouth).Si Musiques Métisses affiche un souci constant de donner un coup de pouce auxjeunes artistes, la mémoire y est constamment célébrée. Dans <strong>le</strong>s années 1980, <strong>le</strong>créateur de cet événement réjouissant, Christian Mousset (ancien disquaire à Düsseldorfet instituteur en Algérie), fut <strong>le</strong> premier à faire découvrir en Europe <strong>le</strong>s groupes« historiques » de la Guinée, Bembeya Jazz, Kaloum Star et autres Amazones.En 2007, <strong>le</strong>s Bantous de la Capita<strong>le</strong>, l’un <strong>des</strong> groupes fondateurs de la musiquemoderne congolaise, débarquaient en Charente. Cette année, <strong>le</strong> public va découvrirla transe berbère d’Oudaden, un groupe d’Agadir, passeur et gardien vigilant de laculture traditionnel<strong>le</strong> amazigh depuis 30 ans (14 albums au compteur).Bossa nova et tambours yorubaAutre transe prévisib<strong>le</strong> pour cette 35 ème édition : cel<strong>le</strong> que déc<strong>le</strong>nchera <strong>le</strong> BahianaisCarlinhos Brown. Tête couronnée de la percussion au Brésil, ce gaillard agité estaussi un compositeur malin, branché sur <strong>le</strong> <strong>monde</strong>. Il croit aux vertus du grandbrassage musical, provoque d’intrigantes rencontres, mélange <strong>le</strong>s climats, rapprochantbossa nova et tambours yoruba, funk, reggae et carnaval. Sur scène, c’estune bombe. Il est à l’initiative du Museu do Ritmo de Salvador de Bahia, un lieuculturel qui, <strong>dans</strong> <strong>le</strong> cadre <strong>des</strong> manifestations clôturant l’année de la France auBrésil, a accueilli <strong>le</strong> festival Musiques Métisses d’Angoulême, à travers un plateaud’artistes africains et caribéens qui s'y sont produits avec <strong>des</strong> artistes brésiliens dela scène bahianaise.n Programme comp<strong>le</strong>t sur :www.musique-metisses.coml Reportage vidéowww.mondomix.com/fr/tag/musiques-metissesn°40 Mai/juin 2010


12<strong>Mondomix</strong>.com / ACTUACTU - VOIRn tradition - architectureBrouetten Photos - musiqueLes gnawas<strong>dans</strong> l'oeil d'AlgoChine et nature : un lien ancestralEn écho à l’Exposition Universel<strong>le</strong> de Shanghai, une exposition parisienneillustre <strong>le</strong>s connections profon<strong>des</strong> entre la culture chinoise et la terre.Souvent pointée du doigt en la matière, la Chine a fait de l’écologieun thème majeur de son Exposition Universel<strong>le</strong>, baptisée « Vil<strong>le</strong> harmonieuse». Et pour marquer l’histoire de sa nouvel<strong>le</strong> puissance, <strong>le</strong>pays a décidé d’en faire la plus grande Expo de tous <strong>le</strong>s temps…Shanghai 2010 soulève une problématique très actuel<strong>le</strong> de notre<strong>monde</strong> hyper urbanisé : « meil<strong>le</strong>ure vil<strong>le</strong>, meil<strong>le</strong>ure vie », ou commentréconcilier l’homme avec sa vil<strong>le</strong>. 70 millions de visiteurs sontattendus.La Fondation EDF Diversiterre lui emboîte <strong>le</strong> pas et consacre uneexposition aux liens historiques entre l’Empire du Milieu et la nature.C’est à Jean-Paul Desroches, conservateur général au Musée <strong>des</strong>Arts Asiatiques Guimet, qu’est revenu <strong>le</strong> soin de rassemb<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s pièces de l’exposition.Beaucoup proviennent de la col<strong>le</strong>ction de François Dautresme : ce grandvoyageur aujourd’hui défunt a sillonné la Chine en p<strong>le</strong>ine révolution culturel<strong>le</strong> poury dénicher <strong>des</strong> objets historiques menacés de disparition.Mais l’initiative dépasse la mise en va<strong>le</strong>ur de reliques. À travers de grands thèmesliés à la terre – labourer, façonner, vêtir, soigner – l’exposition met en lumière<strong>le</strong>s découvertes scientifiques et techniques qui ont façonné la Chine, et par extension<strong>le</strong> <strong>monde</strong> d’aujourd'hui.Algo©wwwprojetgnawa.comFruit de cinq ans de travail sur <strong>le</strong>srites gnawas du Maghreb, l’expophotod’Augustin <strong>le</strong> Gall, alias Algo,assortie d'un documentaire sonore,sera à découvrir à Montpellier finmai, à la ga<strong>le</strong>rie Transit. Un beau travailau long cours, titré Tradition etcréation, du sacré au profane, <strong>dans</strong><strong>le</strong> cadre du festival Arabesques, quiaccueil<strong>le</strong> cette année Idir, Nass ElGhiwane, Hindi Zahra, Kamal El Harrachiou Marcel Khalife.J.B.Expositionet documentaire sonore ,à la ga<strong>le</strong>rie Transit à Montpellierdu 20 au 30 mai(vernissage <strong>le</strong> 20 mai à 18h30)Festival Arabesque,du 21 au 23 au Domaine d'O.http://unisonsmtp.free.fr/Sait-on, par exemp<strong>le</strong>, que la brouette ou la charrue à soc de fer sont <strong>des</strong> inventionschinoises du premier millénaire ? Que <strong>le</strong> tissage est connu en Chine depuisla Préhistoire ?L’exposition s’attarde enfin sur la très réputée médecine chinoise, toujours aussimystérieuse pour l’Occident, de l’acupuncture aux plantes médicina<strong>le</strong>s. Un regardoriginal sur la seconde puissance mondia<strong>le</strong>.J.P.Chine, célébration de la terre, exposition du 7 mai au 19 septembre 2010à l’Espace Fondation EDFhttp://fondation.edf.comExposition Universel<strong>le</strong> Shanghai 2010, du 1er mai au 31 octobre 2010.http://fr.expo2010.cn/Algo©wwwprojetgnawa.comn°40 mai/juin 2010


VOIR13n Femmes - soldatsLa révolution mexicaine au fémininDétail de Hombres y mujeres posando con sus armasÀ l’occasion du centenaire de la révolution mexicaine (1910-1911), la Maison <strong>des</strong> Amériques Latines de Paris consacreune exposition photo origina<strong>le</strong> aux femmes soldats lancées<strong>dans</strong> la lutte armée aux côtés de Zapata et Pancho Villa.L’occasion de suivre en images <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> de ces « soldaderas», fusil à l’épau<strong>le</strong> et parfois enfants au bras : certaines,<strong>le</strong>s fameuses « cucarachas », décidèrent de suivre <strong>le</strong>ur mariet accédèrent parfois au sommet de la hiérarchie militaire.D’autres furent enrôlées malgré el<strong>le</strong>s par <strong>le</strong>s révolutionnaires.Un témoignage saisissant issu du fonds Casasola, famil<strong>le</strong>fondatrice de la première agence de photo-journalismed’Amérique Latine.J.P.Las Soldaderas – Femmes de la révolution mexicaineDu 19 janvier au 29 mai 2010à la Maison <strong>des</strong> Amériques Latineswww.maison<strong>des</strong>ameriqueslatines.com/n Cinéma - musique12 ème Festivaldu cinéma brésilien de Paris`Le festival qui invite à découvrir <strong>le</strong> Brésil par son cinéma seplace cette année sous <strong>le</strong> signe de la musique. Un hommageà Chico Buarque souligne sa contribution notab<strong>le</strong> au 7 ème art,avec plus de 50 ban<strong>des</strong> origina<strong>le</strong>s composées et plusieursromans adaptés à l’écran. Le poète et musicien Lenine seraprésent lors de la projection de Continuação, qui retrace sacarrière. Temps fort : Dzi Croquettes, <strong>le</strong> film d'ouverture dela quinzaine consacré à la troupe de théâtre et de <strong>dans</strong>eéponyme, qui fuit la dictature <strong>des</strong> années 1970. Une semainesera consacrée aux fictions, l'autre aux documentaires.L’événement sera aussi l’occasion de récompenser certainsfilms, sous l’égide de personnalités comme Agnès Jaoui ouGeorges Moustaki.Du 5 au 18 mai 2010Au cinéma parisien Le Nouveau Latinahttp://www.festivaldecinemabresilienparis.com/n°40 Mai/juin 2010


14<strong>Mondomix</strong>.com / ACTUWEBACTU - WEBn TÉlÉchargement LÉGALn Blog - VaudouSur la routedu Poly-RythmoNotre collaboratrice Elodie Maillota suivi <strong>le</strong>s vétérans du vaudoufunk béninois sur <strong>le</strong>ur dernièretournée africaine. Un périp<strong>le</strong> à liresur un blog dédié.Legalize it !Suite à la fragilisation de la filière musica<strong>le</strong> et à la diffici<strong>le</strong> mise en placedu téléchargement légal, <strong>le</strong> gouvernement lance la « Carte Musiquejeunes » <strong>dans</strong> <strong>le</strong> but de modifier <strong>le</strong>s comportements <strong>des</strong> internautes.L’opération qui doit durer trois ans sera lancée <strong>le</strong> 21 juin prochain.L’achat de musique sur Internet est possib<strong>le</strong> depuis quelques années grâce auxplateformes de téléchargement légal. Une pratique peu entrée <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s mœursau regard de l'amp<strong>le</strong>ur du téléchargement pirate. Pour tenter de résoudre ceproblème, <strong>le</strong> ministre de la culture a commandé en septembre dernier un rapportsur la question. La mission menée par Patrick Zelnick, directeur du labelNaïve, a planché sur <strong>le</strong>s moyens à mettre en œuvre pour développer l’offre léga<strong>le</strong>.Annoncée <strong>le</strong> 7 janvier 2010, la première <strong>des</strong> 22 propositions est la « CarteMusique jeunes ».Le site web de l’opération réservée aux 12-24 ans sera mis en route <strong>le</strong> 21 juin,jour de la Fête de la musique. Tout un symbo<strong>le</strong>. L’idée est simp<strong>le</strong> et repose sur<strong>le</strong> principe « un titre acheté, un titre offert ». Avec un crédit maximal de 50 eurospar an, l’internaute paye 25 euros et l’autre moitié est prise en charge par l’Etatqui pourrait faire appel à l’aide financière <strong>des</strong> fournisseurs d’accès Internet. Deuxcas de figure sont possib<strong>le</strong>s : soit utiliser l’intégralité du forfait sur une mêmeplateforme, soit opter pour <strong>des</strong> coupons de 5 euros (d’une va<strong>le</strong>ur réel<strong>le</strong> de 10euros) afin de multiplier <strong>le</strong>s expériences de téléchargement. Parmi <strong>le</strong>s interfacessé<strong>le</strong>ctionnées : iTunes, Deezer, la Fnac, Virgin mais aussi <strong>Mondomix</strong> MP3.Cette mesure, dont l’objectif est de changer <strong>le</strong>s pratiques de consommation dela culture à l’heure d’Internet, doit se dérou<strong>le</strong>r sur 3 ans. Rendez-vous en 2013pour voir si <strong>le</strong>s internautes habitués à la gratuité auront été séduits par cettenouvel<strong>le</strong> offre.S.T.www.mp3.mondomix.comFigure de proue de la musique béninoise<strong>dans</strong> <strong>le</strong>s années 60-70, l’orchestrePoly-Rythmo a récemmentété remis en sel<strong>le</strong> par Elodie Maillot.Manageuse du groupe, cel<strong>le</strong>-ci a accompagnéces vétérans du funk africainlors de <strong>le</strong>ur dernière tournée detrois semaines en Afrique, à l’occasiondu cinquantenaire <strong>des</strong> Indépendances.Huit concerts, du Sénégal auMali, sur <strong>le</strong>s lieux de <strong>le</strong>ur gloire passée.L’occasion de constater que <strong>le</strong>urpopularité est restée intacte <strong>dans</strong> denombreuses vil<strong>le</strong>s, comme à Niameyau Niger. C’est l’un <strong>des</strong> enseignementsde ce blog en forme de carnetde route, haut en cou<strong>le</strong>urs et riche enanecdotes, qui compte la participationde nos fidè<strong>le</strong>s Eglantine Chabasseur,Youri Lenquette à la photographieet Guillaume Thibault au son.J.P.Le blog :http://polyrythmo.blog.<strong>le</strong><strong>monde</strong>.fr/n Blog - asie centra<strong>le</strong>au caravansérailNouvel arrivé <strong>dans</strong> l’espace blogde <strong>Mondomix</strong>, « Musique en caravansérail» retrace <strong>le</strong> chemin sonorequi relie la Côte adriatique au Golfepersique. Des textes dynamiquesponctués de vidéos permettent degoûter <strong>le</strong>s performances d’artistes dehaut niveau, comme l’Iranien Ali RezaGhorbani ou la prestigieuse famil<strong>le</strong>Qasimov d’Azerbaïdjan. On trouveaussi <strong>des</strong> curiosités comme ce postsur Sayat Nova, poète arménien duXVIII eme sièc<strong>le</strong> qui fut chanté par Char<strong>le</strong>sAznavour et auquel <strong>le</strong> réalisateurSergey Paradjanov consacra un filmen 1969, dont <strong>le</strong>s images styliséesont été utilisées par <strong>le</strong>s rockers iraniensde Kiosk.l http://mondomix.com/blogs/musique-au-caravanserail.phpn°40 mai/juin 2010


16<strong>Mondomix</strong>.comMusiquesIl était trois foisGotan ProjectTexte Benjamin MiNiMuM Photographie Prisca LobjoyAvec son titre en forme de révolution numérique et son érotique pochetteoù <strong>des</strong> <strong>dans</strong>euses en tenue d’Eve forment <strong>le</strong> nom du groupe, Gotan 3.0annonce clairement la cou<strong>le</strong>ur. Le trio nous raconte la genèse d'un troisièmealbum qui dérou<strong>le</strong> avec sensualité <strong>le</strong> futur du tango.Christophe H. Muel<strong>le</strong>r : D’abord, onvoulait éviter de ne pas se renouve<strong>le</strong>r. Aprèsdeux albums, nous avions déjà exploré pasmal de directions. On avait envie d’al<strong>le</strong>r ail<strong>le</strong>urs.En écoutant beaucoup de disques dejazz, de big band, de jazz éthiopien, on a eul’idée d’intégrer <strong>des</strong> cuivres, qui nous ontamené sur un autre chemin. On a aussi vouluretourner à quelque chose de plus é<strong>le</strong>ctronique,de plus spontané, comme à nostout débuts. On a travaillé avec beaucoupd’instruments qu’on avait sous la main, pourréussir à faire quelque chose de différent surchaque morceau.Eduardo Makaroff : On s’est mis à composerd’une façon hyper enthousiaste.On a fait une vingtaine de morceaux trèsrapidement. On en a écarté très peu parcequ’à part <strong>le</strong>s onze de l’album, il y a <strong>des</strong>bonus pour <strong>des</strong> maxis. Et puis la recherche,l’exploration autour du tango sont la constanteet la raison d’être de Gotan Project. Desfois, nous l'amenons vers une confrontationavec la musique é<strong>le</strong>ctronique, <strong>des</strong> fois c'estavec <strong>le</strong> jazz. Sur Tango 3.0, on a commencéà l’envers en faisant venir d’autres musiquesà la rencontre du tango. Chaque morceau estvraiment <strong>le</strong> résultat d'un effort créatif col<strong>le</strong>ctif.Philippe Cohen-Solal : La Revancha DelTango s’est fait de façon spontanée, sanspenser à bien ou à mal. On ne savait pas, on afait un morceau, ça nous a plu, on en a réaliséun second. Alors on a fabriqué un viny<strong>le</strong>. ça aplu aux DJ, puis à d’autres gens, ça s’est faitde façon un peu empirique. Et à la fin, c’estdevenu l’album que tout <strong>le</strong> <strong>monde</strong> connaît, quia marqué beaucoup d’esprits et de gens.Avec <strong>le</strong> deuxième album, on avait envie deprouver que Gotan Project n’était pas un coupde gros malins qui faisaient de la musique<strong>dans</strong> un studio et avaient trouvé la bonneformu<strong>le</strong>. On voulait montrer qu’on savait écrire<strong>des</strong> musiques, <strong>des</strong> chansons, et s’éloigner unpeu de l’é<strong>le</strong>ctronique parce qu’on en écoutaitmoins. On voulait faire un album un petit peuplus profond.Sur Tango 3.0, on a voulu revenir à quelquechose de plus spontané, proche de nosracines é<strong>le</strong>ctroniques, tout en conservantl'ambition de faire un album très fort, qui allaitentériner notre apport à la musique. GotanProject, c’est une sorte de trilogie. Après, c’estmarrant parce que la dernière chanson del’album s’appel<strong>le</strong> Erase Una Vez (« il était unefois »), qui laisse une ouverture sur <strong>le</strong> futur.« La recherche, l’exploration autour du tangosont la raison d’être de Gotan Project »Eduardo Makaroffn Gotan Project Tango 3.0 (Ya Basta/Barclay)n En concert à l’Olympia <strong>le</strong> 17 main www.gotanproject.coml www.mondomix.com/fr/tag/gotanprojectn°40 mai/juin 2010


Musiques17La revanchede la cumbiaEl Hijo de la CumbiaTexte Yannis Ruel Photographie D.R.Fer de lance de la nueva cumbia de Buenos Aires,El Hijo de la Cumbia débarque officiel<strong>le</strong>ment en Europe. Pour <strong>le</strong>s accueillirnous <strong>le</strong>s attendons avec <strong>le</strong> prix Babelmed/ <strong>Mondomix</strong> 2010. C’est vous dire si on <strong>le</strong>s aime!Il affiche <strong>le</strong> look du parfait b-boy. Sous son t-shirt XL, un tatouageau biceps représentant un accordéon, un tambour et un güirorappel<strong>le</strong> pourtant l’attachement de ce jeune musicien argentin àla cumbia, une tradition inscrite <strong>dans</strong> l’ADN du continent latinoaméricain.D’origine afro-colombienne, cette musique aux multip<strong>le</strong>sramifications régiona<strong>le</strong>s s’offre depuis quelques d’annéesune seconde jeunesse sous l’impulsion d’une génération de producteurs,principa<strong>le</strong>ment argentins et mexicains, qui combinentson rythme aux pulsations de l’é<strong>le</strong>ctro, du hip-hop ou du reggae.Pionnier de ce courant qui ne cesse de gagner <strong>des</strong> adeptes <strong>dans</strong><strong>le</strong>s pays du Nord, El Hijo de la Cumbia (« Le Fils de la Cumbia »)est aujourd’hui <strong>le</strong> premier artiste de cette nueva cumbia signé surun label européen.Musique du ghettoNatif de San Martin, <strong>dans</strong> la banlieue de Buenos Aires, EmilianoGómez pour l’état civil a passé son ado<strong>le</strong>scence à jouer du piano<strong>dans</strong> <strong>des</strong> orchestres de « bailantas », ces bals populaires où règnela cumbia. Depuis <strong>le</strong>s années 1960, cette musique s’est imposée<strong>dans</strong> la capita<strong>le</strong> argentine avec l’arrivée de migrants venus <strong>des</strong>provinces du nord et <strong>des</strong> pays voisins, Bolivie, Colombie, Pérou.En dépit de son immense popularité, el<strong>le</strong> y reste largement stigmatiséecomme l'expression <strong>des</strong> secteurs <strong>le</strong>s plus pauvres de lasociété. « Comme <strong>le</strong> reggae et <strong>le</strong> hip-hop, la cumbia est un rythmed’origine africaine qui a pris forme <strong>dans</strong> <strong>le</strong> ghetto. Il était naturelque ces musiques finissent par se rencontrer », soutient EmilianoGómez. Initié à la production sous l’influence du sty<strong>le</strong> mexicainde la « cumbia sonidera », qui applique au genre <strong>des</strong> techniquesd’amplification et de remixes similaires à cel<strong>le</strong>s <strong>des</strong> sound systemsjamaïcains, celui-ci explore depuis une dizaine d’années un terraind’entente entre la syncope nonchalante de la cumbia et la puissance<strong>des</strong> beats urbains.Une démarche expérimenta<strong>le</strong> à laquel<strong>le</strong> s'est joint <strong>le</strong> col<strong>le</strong>ctif é<strong>le</strong>ctroZizek, dont <strong>le</strong>s soirées et compilations, à l’origine de la déferlantenueva cumbia actuel<strong>le</strong>, n’ont pas manqué d’attirer l’attentionsur la qualité <strong>des</strong> mixes signés El Hijo de la Cumbia. Freesty<strong>le</strong> deRitmos, son album sorti outre-Atlantique en 2008, bénéficie ainsid’une réédition enrichie de deux inédits sur <strong>le</strong> label Ya Basta ! «Mon défi est de faire évoluer la cumbia tout en conservant son« El Hijo de la Cumbia exploreun terrain d’entente entrela syncope nonchalante de la cumbiaet la puissance <strong>des</strong> beats urbains »essence, ce swing organique qu’il est impossib<strong>le</strong> d’obtenir à partird’un ordinateur. C’est pourquoi je travaillais jusqu’à présent exclusivementavec <strong>des</strong> samp<strong>le</strong>s de vieux disques de cumbia. Mais laprochaine étape sera naturel<strong>le</strong>ment d’enregistrer aussi avec <strong>des</strong>musiciens. »n el hijo de la cumbia Freesty<strong>le</strong> de Ritmos (Ya Basta/Barclay)n Blog: www.emayocutz.coml www.mondomix.com/fr/tag/hijo-de-la-cumbiaTéléchargersur mp3.mondomix.com24564n°40 Mai/juin 2010


18<strong>Mondomix</strong>.comVictor DÉméTexte Nadia Aci Photographies D. CommeillasAprès 30 ans d’une reconnaissance discrète, <strong>le</strong> burkinabé Victor Déméa connu à 46 ans une consécration internationa<strong>le</strong> aussi spontanéequ'inattendue avec son premier album. Deux ans après avoir été élurévélation africaine, il revient avec Deli.Le tail<strong>le</strong>ur de rimesSur la pochette de Deli, Victor Démé porte une chemise coloréeet un mètre ruban autour du cou. Un clin d’œil à son pèrecouturier auprès duquel il a travaillé <strong>dans</strong> un atelier d’Abidjanpendant son exil en Côte d’Ivoire, à l’ado<strong>le</strong>scence. « J’ai toujourspréféré jouer de la guitare avec mes amis. Je m’enfuyaissouvent par la petite porte pendant que mon père faisait lasieste » raconte-t-il aujourd'hui. Sur la gauche de la photo, uneca<strong>le</strong>basse est posée à terre à côté d’une guitare. « Il n’y a pasde clin d’œil cette fois, je ne l’ai vue qu’après » assure Victor.« Il n’y avait pas de chapalo de<strong>dans</strong> », ajoute malicieusementCamil<strong>le</strong> Louvel, <strong>le</strong> patron de Chapa Blues, label qu'il a fondépour Victor Démé et dont <strong>le</strong> nom fait référence à la bière demil.La première rencontre de Victor Démé avec Camil<strong>le</strong> a lieuen 2005 à Bobo-Dioulasso. Située au sud du Burkina Faso,la vil<strong>le</strong> fête chaque année la semaine nationa<strong>le</strong> de la culture,un évènement associé à un souvenir amer pour <strong>le</strong> chanteur: « J’ai joué <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s clubs ivoiriens pendant longtemps avec<strong>le</strong> Super Mandé. Abdoulaye Diabaté, <strong>le</strong> chef d’orchestre,m’a tout appris de la musique. Je faisais mes compositionsà côté. De retour au Burkina, j’ai gagné <strong>le</strong> premier prix dela semaine nationa<strong>le</strong> de la culture en 1990. On m’a tout <strong>des</strong>uite fait <strong>des</strong> promesses qui ne se sont jamais réalisées.Pourtant j’ai gardé espoir, et j’ai continué de composer. »C’est donc une renaissance pour lui lorsque Camil<strong>le</strong>, gérantdu Ouagajung<strong>le</strong>, un bar-concert associatif de Ouagadougou,s’associe au journaliste David Commeillas et aux activistes dulabel Makasound pour fonder Chapa Blues en 2007. Déméenregistre son premier disque <strong>dans</strong> un studio improvisé avecune conso<strong>le</strong> 16 pistes et <strong>des</strong> micros d’appoint. A la surprisegénéra<strong>le</strong>, cet album est un véritab<strong>le</strong> carton !De Démé à DeliLorsque l’on demande à Victor Démé s’il est content de voyager,depuis ce premier décollage Ouagadougou/Paris à l’âgede 47 ans, il répond avec un sourire : « Tout <strong>le</strong> <strong>monde</strong> veutdu boulot. Même <strong>le</strong>s fabricants de cercueils, s’ils n’ont pas den°40 mai/juin 2010


MUSIQUESMusiques19boulot ils se disent : “Il faut que <strong>le</strong>s gens meurent pour que jepuisse manger !”. Moi, je voyage pour travail<strong>le</strong>r. »Aujourd’hui, après deux ans d’un succès savouré, il nous livre<strong>le</strong>s 14 joyaux de Deli, qui naviguent entre blues mandingue,folk, country, rumba et afro-beat : « Je me laisse guider parla mélodie. Puis je plaque la voix sur <strong>le</strong>s accords. Je vais làoù ils m’emmènent. Je ne sais jamais si ça va être un reggaeou un blues. Souvent, je démarre avec <strong>des</strong> accords mandingues,et d’un coup je ne vois plus <strong>le</strong> chemin, je sens qu’ilfaut tout chambou<strong>le</strong>r. » Les textes renvoient à l’enfance et aux« Les textes de Démé narrent<strong>des</strong> récits du quotidien africain :la solitude d’une femmequi ne peut pas enfanter, <strong>le</strong> sida,l’amour »westerns que Démé regardait en passant <strong>le</strong> balais au cinémapour quelques sous. «Mon préféré, c’était Django. » assure-til.Ils narrent <strong>des</strong> déboires, <strong>des</strong> espoirs, <strong>des</strong> récits du quotidienafricain : la solitude d’une femme qui ne peut pas enfanter, <strong>le</strong>sida, l’amour. Et la chance, qu’il ne faut jamais perdre de vueet qu’il a su cueillir : « J’ai écrit un texte hier, pour <strong>le</strong> prochainalbum, qui commence par : “Si tu manges un bon fruit, c’estque la racine de l’arbre a été bien traitée.” Cette chanson estpour Camil<strong>le</strong>. Tout ce qui se passe aujourd’hui, <strong>le</strong>s voyages, lapromo, etc., c’est grâce à lui. Il est tout pour moi <strong>dans</strong> cettehistoire. El<strong>le</strong> a bien commencé. » Et ce n’est que <strong>le</strong> début,monsieur Démé.n Victor DÉMÉ Deli (Chapa Blues/Naïve)n concert: la fête de la musique organisée par la Fnacau Château de Vincennesl www.mondomix.com/fr/tag/victor-demen°40 Mai/juin 2010


20<strong>Mondomix</strong>.comMusiquesAli & toumaniTexte Bertrand Bouard Photographie D.R.Cinq ans après In The Heart of the Moon, quatre après <strong>le</strong> décès d'Ali Farka Touré, Ali andToumani donne à entendre dix nouvel<strong>le</strong>s sublimes conversations entre une guitare, unekora et <strong>le</strong>s étoi<strong>le</strong>s. Toumani Diabaté se souvient.« Ali a fait de la musiquepour <strong>le</strong> <strong>monde</strong> entier »Toumani DiabatéCompagnonsd'échappéesAli and Toumani fut enregistré à Londres, alors que In The Heart of the Moonl'avait été à Bamako. Cela a-t-il eu une répercussion sur la musique ?Toumani Diabaté : Je dirais que non, <strong>le</strong>s personnes restent toujours <strong>le</strong>s mêmes. L’esprit,<strong>le</strong>s techniques d’exécution aussi. A Bamako, on n’avait pas eu beaucoup de temps, car onétait pris par <strong>le</strong>s amis, la famil<strong>le</strong>. A Londres, c’était plus calme, on allait du studio à l'hôtel, del'hôtel au studio. Mais il y avait <strong>des</strong> similitu<strong>des</strong> : on n’a pas répété, ni défini de répertoire oud’arrangements préalab<strong>le</strong>s. On a joué en toute liberté, selon ce qui nous venait sur <strong>le</strong> moment,avec <strong>le</strong> souci de suivre notre instinct. C'est une musique d’inspiration divine, spirituel<strong>le</strong>, avecune histoire, une géographie, une légende, qu'il faut servir fraiche. Je considère cet albumcomme un livre : à chaque fois qu’on l’écoute, on découvre quelque chose que l’on n’avaitpas vu avant.Ali et vous veniez de traditions différentes, pourquoi la musique circulait-el<strong>le</strong>aussi bien entre vous ?TD : Généra<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong>s musiciens du nord du Mali ne jouent pas la musique du sud, mais Aliétait un homme très ouvert. Pour ma part, en tant que griot et ambassadeur de la culture mandingue,j'avais une grande affection pour la personne et la musique d’Ali. Il y avait beaucoupde respect entre nous. Je l'admirais aussi pour d'autres choses que la musique, car Ali étaitun homme sage, un grand marabout, un connaisseur de l’Histoire. Quand on <strong>le</strong> rencontrait,on avait l’impression de <strong>le</strong> connaitre depuis 20 ans, avec ses sourires, ses comédies, sesproverbes... Et puis Ali avait appris la musique sans maître, comme moi, pour qui la musiquefut un cadeau du bon Dieu. Sur l'album, on entend Siné Mory, <strong>le</strong> premier morceau qu’Ali aentendu sur une guitare et qui lui a donné <strong>le</strong> courage d’apprendre à en jouer. Il ne l'avait jamaisenregistré avant. Pourquoi l'a-t-il fait là ? Je pense que c’était pour fermer <strong>le</strong> cerc<strong>le</strong>, il savaitque quelque chose allait se passer.Quels projets vous attendent ?TD : Le projet originel du Buena Vista SocialClub est fini à 90%. Il s'agit d'une rencontreéquitab<strong>le</strong> entre <strong>des</strong> grands maîtres cubainset maliens (ce que devait être <strong>le</strong> Buena VistaSocial Club initia<strong>le</strong>ment, NDR). On travail<strong>le</strong><strong>des</strong>sus depuis décembre 2008, ça va être untrès grand disque. Je suis aussi <strong>le</strong> présidentdu festival Ali Farka Touré 2010, qui aura lieuà Niafunké en décembre. P<strong>le</strong>in de musiciens,pas seu<strong>le</strong>ment maliens, viendront rendre hommageà Ali. Ali a un crédit envers nous tous,<strong>dans</strong> <strong>le</strong> sens où il n’a pas fait de la musiquepour son seul pays, mais pour <strong>le</strong> <strong>monde</strong> entier.Il a montré que <strong>le</strong> blues et <strong>le</strong> jazz venaient dechez nous. Aujourd'hui, il n'est pas là, il se repose,mais il continue de vivre par sa musique.Nous lui devons de l'écouter et de la comprendreencore davantage.n Ali Farka Touré & Toumani DiabatéAli and Toumani (World Circuit/Harmonia Mundi)n En concert : Toumani Diabaté avecVieux Farka Touré et M <strong>le</strong> 18 mai au Casinode Parisl www.mondomix.com/fr/tag/Toumanidiabaten°40 mai/juin 2010


MUSIQUESMusiques21Dhafer YoussefTexte Anne-Laure Lemancel Photographie Hassen SoufanAvec Abu Nawas Rhapsody, <strong>le</strong> chanteur-oudiste tunisien Dhafer Youssef s’appuie sur un triojazz piano-basse-batterie pour sublimer <strong>le</strong>s antagonismes sacré-profane. Un art audacieux quitranscende <strong>le</strong>s frontières, à déguster <strong>le</strong> 1 er mai sous <strong>le</strong>s pommiers de Coutances.Sur la pochette du disque, la peau deDhafer Youssef reflète la poésie d’AbuNawas, vers de lumières sur corpsreplié, antre de secrets. Depuis l’enfance,ce poète arabo-persan du VIII ème sièc<strong>le</strong>éclaire <strong>le</strong> chanteur-oudiste tunisien du feude ses mots : « La qualité de sa poésie mefascine comme cel<strong>le</strong> de sa provocation. Il ya plus de 13 sièc<strong>le</strong>s, un homme osait par<strong>le</strong>rvin, sexualité, masturbation, attaquait lasociété avec justesse. Aujourd’hui, je trouveIvresseDivine« Avec la globalisation, <strong>le</strong>s échanges,il n’y a plus qu’UNE SEULE musique »DHAFER YOUSSEFtimide l’audace, cet apanage <strong>des</strong> fous, <strong>des</strong>anormaux, <strong>des</strong> poètes. » Une provocationprofane <strong>dans</strong> un <strong>monde</strong> religieux, quicontenait en el<strong>le</strong> tout <strong>le</strong> sacré, tout <strong>le</strong> divin,quête de sens. Dans cette rhapsodie,succession décousue <strong>des</strong> expériencesfortes du poète, Dhafer ne saurait pourtanttrop s’appuyer sur la beauté littéraire : duverbe, <strong>le</strong> musicien fait sa pâte, prétexte àvocaliser à l’infini, à toucher <strong>le</strong> corps plusque l’esprit, matières sonores, abstractions.Et puis, il y a cet autre poète soufi, Ibn al-Farid (XIII ème sièc<strong>le</strong>, Egypte), auteur de verssomptueux sur la relation entre extase divineet ivresse du vin, qui lui donne l’inspirationde sa Wine Ode Suite, œuvre en trois actesd’improvisations méditatives avec <strong>le</strong> pianisteprodige Tigran Hamasyan. L’antagonismeprofane-sacré, une fois encore, constitue<strong>le</strong> fil conducteur de la musique de Dhafer,ancien muezzin : la voix, comme don de soi,sacrée, mais refus forcené de toute véritédogmatique.Une vie d’errancePour mener à bien cette aventure spirituel<strong>le</strong>,Dhafer relègue un temps ses escapa<strong>des</strong>é<strong>le</strong>ctro, pour revenir à la sacro-sainte formu<strong>le</strong>piano-basse-batterie. Entouré de jeunesmusiciens virtuoses (Mark Giuliana, ChrisJennings, Tigran Hamasyan), libres de touteentrave et bouffeurs de sons tous azimuts,Dhafer fait swinguer <strong>le</strong> sacré, ouvre <strong>le</strong>sportes de la poésie, rénove la langue jazzqu’il affectionne tant : peinture en réalisation,musiciens en train de vivre... Pourtant, malgréla liberté de sty<strong>le</strong>, <strong>le</strong> Tunisien nomade, épongerevendiquée de tous <strong>le</strong>s pays traversés,expériences vécues, personnes côtoyées, nesaurait se retrancher derrière quatre <strong>le</strong>ttres :« Avec la globalisation, <strong>le</strong>s échanges, il n’y aplus qu’UNE SEULE musique, confrontée àtes goûts. Comme <strong>dans</strong> la vie d’Abu Nawas,il y a de tout <strong>dans</strong> mon art : du sacré, duprofane, de la matière, du vide... Et l’audacedu bon chemin à trouver ». Une voie auxhorizons ouverts, donc, à l’image d’une viesans attache, partagée entre Paris, New Yorket Tunis. S’il vient d’acquérir une maison <strong>dans</strong>son pays natal, Dhafer n’a, durant trois ans,pas connu <strong>le</strong> sens du mot « rentrer » : « Jene pouvais pas m’instal<strong>le</strong>r. L’errance favorisema musique. Je crois encore avoir devantmoi une longue route de vagabond. »n Dhafer youssef Abu Nawas Rhapsody(Universal Jazz)n Concert <strong>le</strong> 13 mai à Jazz sous <strong>le</strong>sPommiers à Coutances (50) voir aussi p.71l www.mondomix.com/fr/tag/dhaferyoussefn°40 Mai/juin 2010


22<strong>Mondomix</strong>.comMusiquesKyrie KristmansonTexte et photographie Benjamin MiNiMuMA seu<strong>le</strong>ment 21 ans, la canadienne Kyrie Kristmanson impose un univers parfaitementmaitrisé. El<strong>le</strong> puise <strong>dans</strong> l’essence de la terre qui l’a vue naître et <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s mouvements duvoyage la riche matière de ses chansons. Rencontre.« Le Canada est unpays de fantômes »L’âme <strong>des</strong> fantômesDes yeux pétillants de malice et un sourirefranc et constant éclairent un visage lumineuxd’où l’enfance n’a pas encore effacé toutesses traces. Une tête bien faite, surmontée d’unchapeau de fourrure synthétique blanche quiprocure à sa propriétaire une allure d’oiseaujoyeux. Armée d’une voix élastique, d’un jeude guitare précis et d’une trompette sensib<strong>le</strong>,el<strong>le</strong> se revendique héritière <strong>des</strong> femmes troubadoursde l’époque médiéva<strong>le</strong> et assumel’héritage de ses glorieux compatriotes.Tu te définis comme nomade,pourquoi ?Kyrie Kristmanson : Quand j’étais enfant,je voyageais beaucoup avec ma famil<strong>le</strong>, dufait du travail de mes parents (Son père esthistorien du Canada, NDR). Aujourd’hui,je vis toujours un peu comme ça, et çam’inspire. En voyageant on se découvre eton découvre l’esprit d’un endroit, et c’est decet esprit que proviennent <strong>le</strong>s chansons.Comment qualifies-tu tes chansons ?KK : Une chanson est un petit univers quel’on construit comme on veut. Au Canada,<strong>le</strong>s paysages sont à perte de vue. On y estsouvent la seu<strong>le</strong> personne <strong>dans</strong> un espacecomplètement nu, la seu<strong>le</strong> chose vertica<strong>le</strong><strong>dans</strong> un univers horizontal. Comme on estseul, on peut chanter comme on veut, à p<strong>le</strong>inevoix. C’est un peu cette immensité que jecherche à exprimer.Tu viens d’un grand pays d’auteurscompositeurs,te sens-tu proched’eux ?KK : J’ai vécu <strong>dans</strong> une région où <strong>le</strong>s grandschanteurs canadiens comme Joni Mitchell,Buffy Sainte Marie ou Neil Young ont vécu.Quand on me dit qu’il y a <strong>des</strong> liens entre <strong>le</strong>ursmusiques et la mienne, ça me fait très plaisir,mais ça se comprend faci<strong>le</strong>ment. J’ai vu <strong>le</strong>smêmes paysages et j’ai vécu avec <strong>le</strong>s mêmesfantômes.Le Canada est un pays de fantômes, il y aune grande histoire inachevée et si l’on estun peu sensib<strong>le</strong>, on <strong>le</strong> ressent quand on sepromène <strong>dans</strong> la campagne. Et l’on se rendcompte que l’on n’a pas écrit une chanson,mais qu’on l’a trouvée.Quel<strong>le</strong>s furent tes influences <strong>dans</strong>l’écriture de cet album ?KK : Pendant la période d’écriture d’Origin OfStars, je lisais <strong>des</strong> textes très anciens et je mesuis rendu compte que <strong>le</strong>s questions relativesau <strong>des</strong>tin revenaient toujours. Sur ce disque,je pose ces questions de plusieurs manières.J’explore <strong>le</strong>s réponses que nous offre <strong>le</strong> sacré,mais aussi <strong>le</strong> profane qui est lié aux traditions,à ce qui est païen, qui vient de la terre. Je sonde<strong>le</strong>s deux discours, mais malgré mon nom,Kyrie qui signifie « seigneur » en grec, je penseque j’ai plutôt la tendance profane.C’est aussi la tradition du troubadour devraiment célébrer <strong>le</strong> profane. On peutl’entendre <strong>dans</strong> ma musique qui célèbre l’ici et<strong>le</strong> maintenant.n Kyrie Kristmanson Origin of stars(No Format/Universal)n En concert : 12 mai à Mulhouse, 13 àNimes, 14 à Toulouse, 15 à Perpignan, 20 àAntony, 25 à Paris (Café de la Danse)l MP3 : sur mondomix http://mp3.mondomix.com/kyrie-kristmansonn°40 mai/juin 2010


24<strong>Mondomix</strong>.comen couvertureVis ton rêve !TUMI & THE VOLUMEPropos recueillis par Anne-Laure Lemancel Photographies Youri LenquetteTrois ans après la ga<strong>le</strong>tte initia<strong>le</strong> qui avait propagé son flow ciselé jusqu’à nos oreil<strong>le</strong>s,<strong>le</strong> MC sud-africain Tumi revient avec son Volume(Dave, basse ; Tiago, guitare ; Paulo, batterie) et l’album Pick A Dream.Soit une succession de petits scénarios hétéroclites, cousus du fil blanc del’optimisme et d’un engagement à la douceur viru<strong>le</strong>nte. Rencontre.n°40 mai/juin 2010


En couverture 25et peut-être toi aussi as-tu voté pour ton gouvernement. Tu esresponsab<strong>le</strong> de ton <strong>des</strong>tin !n Vers quels chemins vous porte justement votre <strong>des</strong>tindepuis votre dernier album, en 2007 ?Tumi & Tiago : Nous avons tourné non-stop, et franchi <strong>le</strong>sportes du studio pour pouvoir continuer. Si ce disque capture<strong>le</strong> feu du live, il résume surtout la somme <strong>des</strong> sons col<strong>le</strong>ctésces trois dernières années. Nous avons sé<strong>le</strong>ctionné <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ursclichés et conçu notre album comme une fulgurance. Ledernier s’écoutait comme un long-métrage, celui-ci se vit avecl’énergie d’un film d’action !n Chacune de vos chansons raconte une histoire.Comment se passe <strong>le</strong>ur élaboration ?Tiago : Tumi construit ses chansons comme un réalisateur,avec un aspect cinématographique. Il donne un thème : unmec jaloux, une femme au foyer... On peint <strong>le</strong> background musical,puis il écrit <strong>le</strong>s paro<strong>le</strong>s, <strong>le</strong> script.Tumi : Quand j’écoute la musique, je me dis « ok, ça sonnetriste » ou « ok, ça sonne optimiste ». Puis j’écris, je peaufine<strong>le</strong>s détails, on mélange <strong>le</strong>s cou<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong>s nuances. Tel<strong>le</strong> chansonrévè<strong>le</strong> sa noirceur... mais avec une lueur d’espoir, ou l’inverse.Des affluents viennent nourrir <strong>le</strong> courant principal, pour créernotre propre rivière. Par exemp<strong>le</strong>, Through My Sunroof racontel’histoire d’un gars qui apprend <strong>le</strong> décès de sa copine. Et pendantqu’il conduit, au cœur de cette mégapo<strong>le</strong> qu’est Jo’Burg,un papillon vo<strong>le</strong> par <strong>le</strong> toit de sa voiture. Ce petit moment delumière, ce mirac<strong>le</strong> vécu, contient tout l’espoir, toute l’essencede la vie.n Tumi, <strong>dans</strong> tes textes, tu t’inspires de la vie couranteen Afrique du Sud... Comment vit-on, en tant que musicientrentenaire, <strong>dans</strong> ce pays ?n La pochette représente un hommes à la recherchede sa tête... Que signifie ce <strong>des</strong>sin ?Tumi : Il représente ce voyage sacré qu'est la vie, qui consisteà trouver sa tête : je veux dire « te trouver toi-même », <strong>le</strong> sensde ton existence. Ce <strong>des</strong>sin d’Hippolyte constitue une métaphorede cette quête. Comme l’indique <strong>le</strong> titre Pick a Dream(« choisis un rêve »), j’aime cette capacité à inventer ta vie, quidevient aventure fabu<strong>le</strong>use ou cauchemar, par la seu<strong>le</strong> force detes rêves. Tu ne dois pas subir, tu choisis. Tu vis !Tiago : Le « choix » constitue <strong>le</strong> fil conducteur. Un chemin àtrouver entre bon et mauvais, joli et laid : tu portes la tête quetu veux, mais tu t’impliques ! Beaucoup de gens accab<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>sautres pour ce qui <strong>le</strong>ur arrive : ma vie est rude parce que mongouvernement est pourri, parce que <strong>le</strong> <strong>monde</strong> entier révèrel’argent... Mais réfléchis : peut-être toi aussi aimes-tu l’argent,Tumi : C’est à la fois excitant, effrayant et injuste. Excitant,parce que la seu<strong>le</strong> chose que j’aie à faire en me <strong>le</strong>vant <strong>le</strong> matin,c’est d’ouvrir ma porte pour sentir, palper, goûter l’angoisse, <strong>le</strong>désespoir et <strong>le</strong>s aspirations d’un pays. Pour un artiste, l’Afriquedu Sud constitue une source d’inspiration fabu<strong>le</strong>use. En mêmetemps, c’est frustrant, car ton potentiel y est limité, voire censuré,par une société étriquée.Tiago : Il n’y a aucun endroit au <strong>monde</strong> qui ressemb<strong>le</strong> à cepays. Tu sors de chez toi pour al<strong>le</strong>r chercher une brique de lait,et tu vois aux a<strong>le</strong>ntours ces immeub<strong>le</strong>s immenses avec <strong>des</strong>barrières é<strong>le</strong>ctriques, cette fourmilière de voitures, ces gens quivendent <strong>des</strong> cigarettes au coin <strong>des</strong> rues... En fait, comme <strong>le</strong>dit Tumi, ce qui t’inspire pourrait te faire partir, mais t’incite àrester. Ta prison nourrit ton art, mais il faut savoir regarder audelà<strong>des</strong> murs.n Avec Asinamali, tu critiques l’omnipotencede l’argent, <strong>le</strong> libéralisme exacerbé...Dans tes rêves d’un <strong>monde</strong> meil<strong>le</strong>ur, penses-tu que <strong>le</strong>développement durab<strong>le</strong> puisse être une solution ?Tumi : Ecoute, je ne suis ni politicien, ni prêtre, peut-être entre<strong>le</strong>s deux, mais je ne veux ni juger, ni ordonner. Je penseque <strong>le</strong> changement commence au seuil de ma porte, par lafaçon dont j’élève mon gamin, avec <strong>des</strong> va<strong>le</strong>urs, une éthique.Je souhaite que mon environnement proche soit sain, quen°40 Mai/juin 2010


26<strong>Mondomix</strong>.coml’éco<strong>le</strong> du quartier soit assez bonne pour y envoyer mon fils.Donc je salue <strong>le</strong>s gran<strong>des</strong> initiatives – nous sommes <strong>le</strong> fruit deça en Afrique du Sud, de gens qui ont rêvé assez fort – mais<strong>le</strong> combat commence au niveau local. Pour ma mère, la luttec’était de travail<strong>le</strong>r dur pour donner à manger à ses enfants.Moi, j’essaie d’être responsab<strong>le</strong> par mon métier : la musique.De l’accomplir avec <strong>le</strong> plus d’exigence possib<strong>le</strong>, pour ouvrir lavoie à mes successeurs.« Je pense que <strong>le</strong> changementcommence au seuil de ma porte,par la façon dont j’élève mon gamin,avec <strong>des</strong> va<strong>le</strong>urs, une éthique » TUMITiago : Pour la planète, je ne sais pas, mais je peux te dire cequ’il y a de meil<strong>le</strong>ur pour l’Afrique : l’éducation. Les gens veu<strong>le</strong>ntdu profitab<strong>le</strong> tout de suite (un tee-shirt, de la nourriture...),et c’est ce qu’on <strong>le</strong>ur donne. Mais ils ne voient pas l’horizon :une libération qui passe par l’éducation. Dans notre pays, parexemp<strong>le</strong>, <strong>le</strong> plus riche du continent, <strong>le</strong> réseau internet, détenupar <strong>le</strong> gouvernement, est <strong>le</strong> deuxième plus cher au <strong>monde</strong>, et<strong>le</strong> plus <strong>le</strong>nt d’Afrique ! Seuls <strong>le</strong>s riches ont accès aux infos.n Votre succès au festival Sakifo et votre signature surSakifo Records vous rapprochent de la Réunion.Vous enregistrez d’ail<strong>le</strong>urs un titre, Tine Blues, avec <strong>le</strong>sorcier blanc du maloya, Danyel Waro...Tumi : Danyel me touche terrib<strong>le</strong>ment ! Désolé <strong>le</strong>s mecs, maisc’est mon musicien préféré de tout l’univers ! Un jour, il m’araconté cette histoire qui m’a chamboulé : il a commencé àchanter à 40 ans, non parce qu’il voulait devenir une ido<strong>le</strong>,juste parce qu’il <strong>le</strong> sentait. Il voit la musique comme une fonctionqui te conso<strong>le</strong> de tes tristesses, qui exprime tes joies.C’était donc une expérience intense – et très rustique !– d’enregistrer <strong>dans</strong> ce studio improvisé, la maison deSami, son fils !n Un mot sur la Coupe du <strong>monde</strong> :que va-t-el<strong>le</strong> apporter à l’Afrique du Sud ?Tumi And The Volume : Zizou, Beckham, Platini, <strong>le</strong> messieet <strong>le</strong> retour du pagne... on déconne ! On pense juste qu’àl’instar de la Coupe du <strong>monde</strong> de rugby en 1995 (voir Invictusde Clint Eastwood, NDLR), cet événement va fédérer toute unenation, unie <strong>dans</strong> la même direction, et gommer <strong>le</strong>s derniersdifférends qui divisent encore notre société.n Tumi & the volume Pick a Dream (Sakifo Records)n en concert <strong>le</strong> 20 juin à Rio Loco - <strong>le</strong> 21 à la Fête de laMusique Fnac - <strong>le</strong> 26 juin aux Solidaysl www.mondomix.com/fr/tag/tumi-and-the-volumeTéléchargersur mp3.mondomix.com30479n°40 mai/juin 2010


En couverture27TUMI et <strong>le</strong>s MC's340 ML, cul-sec !Propos recueillis par Anne-Laure Lemancel Photographies D.R.En marge de Tumi & the Volume, Paulo et Tiagoaffinent <strong>le</strong>ur amour du dub au sein de 340 ML.En l’an 2000, Demi-fina<strong>le</strong> du « Batt<strong>le</strong> of The bands », célèbre tremplin sudafricain.Quatre musiciens, dont Paulo et Tiago (futurs membres de TumiAnd The Volume) s’apprêtent à brû<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s planches. Problème : ils détestent<strong>le</strong>ur nom de groupe (Ils se nomment Green Cow Effect au début dela compétition, Fun With E<strong>le</strong>ctronics pour <strong>le</strong>s 1/4 de fina<strong>le</strong> puis Pre TunedSystem en demi-fina<strong>le</strong> ). En fina<strong>le</strong>, une canette de soda récupérée <strong>dans</strong> <strong>le</strong>frigo <strong>des</strong> loges livre la solution. Pourquoi pas 340 ML (sa contenance) ?Ce jour-là, s’ils ne remportent pas la compétition, un artic<strong>le</strong> dithyrambiquesalue « 340 ML », plaisanterie devenue porte-bonheur, et son revigorantcocktail dub-reggae-rock-latin.Tout avait commencé en Mozambique. Les quatre en culottes courtes chevauchentensemb<strong>le</strong> <strong>le</strong>urs premières bicyc<strong>le</strong>ttes, écument à l’ado<strong>le</strong>scence<strong>le</strong>s scènes de Maputo <strong>dans</strong> <strong>le</strong>urs bands respectifs, avant de déménagerà Jo’Burg pour <strong>le</strong>urs étu<strong>des</strong>. Dans la mégapo<strong>le</strong>, ils associent <strong>le</strong>urs ta<strong>le</strong>nts,puis sortent <strong>le</strong>ur premier album Moving en 2003, ga<strong>le</strong>tte remplie de bondub, humour et basses profon<strong>des</strong>. Cinq ans, <strong>des</strong> centaines de dates etun aveu de paresse plus tard, ils reviennent avec Sorry for the Delay (« Désolépour <strong>le</strong> retard »), second opus abouti, où ils développent plus avant<strong>le</strong>ur recette, et <strong>le</strong>ur son unique. Couronné de multip<strong>le</strong>s récompenses enAfrique du Sud, <strong>le</strong> disque sort sous nos latitu<strong>des</strong> en octobre prochain. Aécouter jusqu’à plus soif !Le 1 er avril, lors du formidab<strong>le</strong> concert de lancementde l’album Pick a Dream, deux jeunes MC'sont rejoint Tumi and the Volume <strong>le</strong> temps d’un morceau,sur la scène du Café de la Danse.Le franco-rwandais Gaël Faye a été couronnéchampion de slam lors d’un tournoi officiel en 2005,devant Grand Corps Malade. Edgar Sekloka, françaisd’origine camerounaise, est aussi écrivain. Sonpremier roman Coffee a été publié chez Actes Sud.Ces deux acrobates du verbe se sont rencontrésen 2004 autour d'un projet d’écriture slam sur <strong>le</strong>génocide Tutsi. Leur complicité s’est ensuite affermieau sein du col<strong>le</strong>ctif Chant d’Encre, expériencequi <strong>le</strong>s a poussés à monter <strong>le</strong>ur propre projet : MilkCoffee & Sugar. Les deux MC's y peaufinent unrépertoire où <strong>le</strong>s textes ciselés et engagés se posentavec légèreté sur <strong>des</strong> instrumentaux inventifset swinguants.Ils ont fait la connaissance de Tumi, Tiago, Paulo etDavid en juin 2008 à la faveur du Paris Jazz festival.Leur point de vue sur <strong>le</strong> <strong>monde</strong>, lucide mais nondéfaitiste, et <strong>le</strong>ur engagement commun pour un rapmusical et littéraire forgent une relation de respectmutuel entre <strong>le</strong>s deux formations. Lorsque <strong>le</strong>s MC'sfrançais entrent en studio alors que Tumi and theVolume transite par Paris, l’invitation est d’évidenceet donne Rise Up, hymne à l’espoir et clé de voûtedu premier album <strong>des</strong> très prometteurs Milk Coffeeand Sugar.B.M.n Milk Coffee & sugar Milk Coffe Sugar(6D Prododuction)n milkcoffeesugar.blogspot.comn 340 ML Sorry for the delay (Bi-Pol) parution en octobren°40 Mai/juin 2010


28 <strong>Mondomix</strong>.comThÉMACooperative Conacad - Republique Dominicaine - ratissage du cacao équitab<strong>le</strong> ©Max Havelaar Francen°40 mai/juin 2010


Théma / Vis ton rêve29Un nouveauMondeEn 1987, la commission <strong>des</strong> Nations Unies a rédigé « Our common future »,un rapport qui définissait <strong>le</strong> développement durab<strong>le</strong> comme la recherche d'unjuste milieu entre <strong>le</strong> progrès économique et social et l’équilibre naturel de laplanète. 23 ans et de nombreuses crises plus tard, politiques et citoyens ontpris conscience de vivre <strong>dans</strong> un <strong>monde</strong> où <strong>le</strong>s actes individuels ont <strong>des</strong> répercussionsdirectes sur l'écosystème de la planète et ses habitants.Si une volonté col<strong>le</strong>ctive de régu<strong>le</strong>r l'économie mondia<strong>le</strong> et de changer notrerapport à la nature semb<strong>le</strong> désormais exister, certains n'ont pas attendu <strong>le</strong>scrises pour agir.En mai, la France célèbre ainsi à la fois la 10eme édition de la quinzaine ducommerce équitab<strong>le</strong> et la journée mondia<strong>le</strong> de la diversité culturel<strong>le</strong>, deux piliersdu développement durab<strong>le</strong>. L'occasion pour nous de regarder de plus prèsces initiatives qui visent à construire un « nouveau <strong>monde</strong> », sinon meil<strong>le</strong>ur, dumoins plus juste.Au programme de notre théma :Retour sur <strong>le</strong> phénomène du commerce équitab<strong>le</strong> qui, en dix ans,a permis à 7 millions d'agriculteurs de sortir de la pauvreté.Rencontre avec Diébédo Francis Kéré, architecte burkinabé qui défendune approche solidaire et écologique de l’architecture, en transmettantaux pays en développement <strong>des</strong> métho<strong>des</strong> de construction adaptéesà <strong>le</strong>ur environnement.Enquête sur la diversité culturel<strong>le</strong> qui, à l’instar de la biodiversité,serait menacée par la mondialisation. L'Unesco a créé en 2003 <strong>le</strong> label« Patrimoine culturel immatériel » pour prévenir ce danger.Au risque de fossiliser certaines cultures ?Appliquer <strong>le</strong>s préceptes du commerce équitab<strong>le</strong> à la musique,une utopie ? Des artistes et <strong>des</strong> producteurs y ont réfléchi, avec plus oumoins de bonheur.Enfin, voyage <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong> <strong>des</strong> écolo-instruments, à la rencontrede la trompette en poivron, de la harpe de glace ou de l'orgue à feu…Entre considérations écologiques et besoin d’innovation,un vrai bouillon de culture !<strong>Mondomix</strong>n°40 Mai/juin 2010


30<strong>Mondomix</strong>.comCommerce équitab<strong>le</strong>Consolider la solidaritéTexte Nadia Aci Photographie Max Havelaar FranceDu 8 au 23 mai 2010, la 10 ème édition de la quinzaine du commerce équitab<strong>le</strong> en Franceaccueil<strong>le</strong>ra organismes, bénévo<strong>le</strong>s et curieux autour d’un enjeu commun :redistribuer <strong>le</strong>s richesses de la planète. Explications.Cooperative Banelino - Republique Dominicaineétiquetage <strong>des</strong> bananes equitab<strong>le</strong>s« L'économie a besoin de règ<strong>le</strong>sd'égalité d'accès aux richesses »Joaquin Muñoz,directeur de Max Havelaar-France.Né aux Etats-Unis <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s années 40, <strong>le</strong> commerce équitab<strong>le</strong>a connu un essor particulièrement fort ces dix dernièresannées. Lié aux préoccupations environnementa<strong>le</strong>s, <strong>le</strong> commerceéquitab<strong>le</strong> a pour idée première de développer un marchéavec <strong>le</strong>s pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, enproposant un prix d’achat au producteur qui lui permette unerémunération décente. Ce dernier peut alors investir <strong>dans</strong> lacommunauté à laquel<strong>le</strong> il appartient, au moyen d'une gestionpartagée et transparente.Une relation Nord-SudC’est lors d’un voyage en Amérique centra<strong>le</strong>, en 2000, queJoaquin Muñoz, actuel directeur de Max Havelaar-France, l’un<strong>des</strong> labels de commerce équitab<strong>le</strong> <strong>le</strong>s plus reconnus et <strong>le</strong>smieux distribués, a découvert ce principe : « Je suis tombé surune coopérative de café au Nicaragua qui travaillait selon <strong>le</strong>srèg<strong>le</strong>s du commerce équitab<strong>le</strong>. Ça m’a ouvert <strong>le</strong>s yeux sur laquestion de la justice socia<strong>le</strong> à travers <strong>le</strong> commerce : j’ai comprisqu’il y avait un décalage entre la qualité du travail fourni parcette coopérative et <strong>le</strong> cours catastrophique du café sur place.Ça m’a interpellé, j’ai voulu participer à l’aventure et redonnerune va<strong>le</strong>ur humaine à la notion d’exportation. Je me suis alorsimpliqué en tant que bénévo<strong>le</strong> pour l’association Fairtrade/MaxHavelaar-France, avant d’en devenir l’actuel directeur. »Sur place, <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s s’organisent, s’unissent, vendent <strong>le</strong>urproduit à une entreprise qui va <strong>le</strong> transformer aux normes dupays auquel il est <strong>des</strong>tiné. Le travail d'un label comme MaxHavelaar est de suivre <strong>le</strong>s étapes de cette chaîne afin devérifier que <strong>le</strong> produit est commercialisé <strong>dans</strong> <strong>le</strong> respect<strong>des</strong> règ<strong>le</strong>s établies. Si c'est <strong>le</strong> cas, l'entreprise peut apposer<strong>le</strong> tampon Max Havelaar sur son produit.Une mission socia<strong>le</strong>Ces normes diffèrent néanmoins d’une région à l’autre. «On travail<strong>le</strong> <strong>dans</strong> <strong>le</strong> respect <strong>des</strong> traditions déjà existantes,inévitab<strong>le</strong>ment ça crée <strong>des</strong> écarts selon <strong>le</strong>s zones, expliqueJoaquin Muñoz. Les coopératives ont toujours été présentesen Amérique latine, el<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong> fruit de luttes socia<strong>le</strong>s fortes.En Afrique, l’organisation <strong>des</strong> agriculteurs est différente. On sen°40 mai/juin 2010


Théma / Un nouveau <strong>monde</strong>31Le fonctionnement de ce système implique donc de nouveauxrapports commerciaux Nord-Sud, qui prennent en compte <strong>le</strong>snécessités loca<strong>le</strong>s et où la dimension humaine est présentegrâce à la participation active <strong>des</strong> cultivateurs. Avec en toi<strong>le</strong> defond, <strong>le</strong> véritab<strong>le</strong> défi : la lutte contre la pauvreté et la marginalisationde ces communautés : « 2 milliards de personnes <strong>dans</strong><strong>le</strong> <strong>monde</strong> travail<strong>le</strong>nt encore <strong>dans</strong> <strong>le</strong> domaine de l’agriculture et700 millions d’entre el<strong>le</strong>s vivent avec moins de 2 dollars par joursconstate Joaquin Muñoz. Près de 7 millions obtiennent <strong>des</strong> bénéficesgrâce au commerce équitab<strong>le</strong>. C’est bien, mais ce n’estpas assez ».Cooperative Conacado - Republique DominicaineChargement du cacao équitab<strong>le</strong>retrouve confronté à <strong>des</strong> col<strong>le</strong>ctivités qui paraissent similairessur <strong>le</strong> papier alors que tout dépend de la démocratie loca<strong>le</strong>, dela participation <strong>des</strong> femmes… »Pied de nez au capitalismeComme un pied de nez au capitalisme effréné, la crise qui pèsesur <strong>le</strong>s gran<strong>des</strong> puissances depuis l’hiver 2008 semb<strong>le</strong> une aubainepour ce commerce qui prône l’équité : « La crise financièrea été bénéfique à cause de ses effets secondaires note JoaquinMuñoz. On s’est rendu compte que l’économie avait besoin derèg<strong>le</strong>s d’égalité d’accès aux richesses. Aujourd’hui, <strong>le</strong> consommateurest prêt à intégrer une forme de citoyenneté <strong>dans</strong> saconsommation, ce qui met en va<strong>le</strong>ur <strong>des</strong> mouvements comme<strong>le</strong>s nôtres. »Pour fêter ce nouvel espoir économique, la quinzaine 2010 prévoit<strong>des</strong> expositions, <strong>des</strong> débats, <strong>des</strong> animations culturel<strong>le</strong>s.Tout un panel de manifestations festives et colorées pour cemarché éco-solidaire qui rêve de se démocratiser.l reportage Vidéosur la journée mondia<strong>le</strong> du commerce équitab<strong>le</strong> à suivre surwww.mondomix.comAu commencement était <strong>le</strong> Warana...Le commerce du Warana, plante sacrée <strong>des</strong> Indiens SatéréMawé, fait figure de modè<strong>le</strong> de développement durab<strong>le</strong> enAmazonie. Mais <strong>des</strong> menaces se profi<strong>le</strong>nt.Avant de devenir une espèce de soda consommé sur <strong>le</strong>s pistes de <strong>dans</strong>e, <strong>le</strong> guaranafut une plante sauvage, domestiquée par une tribu nichée <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s méandresdu f<strong>le</strong>uve Amazone.Le warana, pour reprendre la terminologie originel<strong>le</strong>, fait partie <strong>des</strong> mythes fondateursde la culture <strong>des</strong> quelques 10 000 Indiens Satéré Mawé. Un trésor qu’ilsentendent bien protéger et valoriser à <strong>le</strong>ur guise, à travers <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> d’alternativeéconomique développé avec la société Guyapi Tropical depuis bientôt vingt ans.Claudie Ravel, fondatrice et directrice généra<strong>le</strong> de cette société, a commercialisédès 1994, en accord avec <strong>le</strong> charismatique chef Obadias, 20 kilos de guarana sur<strong>le</strong> marché européen. Le début d’un partenariat en tous points équitab<strong>le</strong>s, dont <strong>le</strong>srevenus servent à financer entre autres <strong>des</strong> équipements col<strong>le</strong>ctifs et <strong>des</strong> boursesd’étu<strong>des</strong> pour la communauté.Aujourd’hui, la société Guyapi importe - à un prix jugé « raisonnab<strong>le</strong> » pour <strong>le</strong>sdeux parties - plusieurs tonnes d’une production certifiée « bio-éthique », qu’el<strong>le</strong>diffuse sur un réseau de commerce « alternatif » comme Slow Food, InternationalFederation Alternative Trade… Et désormais ce sont <strong>le</strong>s Indiens qui possèdent <strong>le</strong>uroutil de production. « Il s’agit d’un modè<strong>le</strong> exemplaire de développement écologique,social et politique » expliquent Bastien Beaufort et Sébastien Wolf, auteursd’un ouvrage sur ce partenariat. Lequel est désormais malmené par de grossessociétés, à commencer par AMBAV et Pepsi, qui se sont positionnées sur ce marchélucratif et se sont implantées non loin du sanctuaire <strong>des</strong> Satéré Mawé, avec labienveillance du gouverneur de l’état.Pour Florence Pinton, sociologue qui a beaucoup travaillé sur ces questions dedéveloppement durab<strong>le</strong> en Amazonie, « <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> suivi par <strong>le</strong>s Satéré Mawéconstitue une poche de résistance à la standardisation actuel<strong>le</strong> du commerce ».Jacques DenisLe noyau de guarana est <strong>le</strong>ntement séchépendant 6 joursn Plus d’infos : www.guayapi.comn A lire : Bastien Beaufort et Sébastien Wolf« Le guarana, trésor <strong>des</strong> Indiens Satéré Mawé » (Ed Yves Michel)n°40 Mai/juin 2010


32<strong>Mondomix</strong>.comDeveloppement durab<strong>le</strong>La possibilité d'une architecture solidaireTexte A<strong>le</strong>xis Munteanu Photographie D.R.« Si tu donnes un poisson à un homme, il se nourrira une fois. Si tu lui apprendsà pêcher, il se nourrira toute sa vie. » Fort de ce credo du philosophe taoïste chinoisHo-Kouan Tseu, <strong>le</strong> burkinabé Diébédo Francis Kéré défend une approche écologiqueet solidaire de l’architecture.Eco<strong>le</strong> de Gando en perspectiveLoin d’affectionner l’apprentissage pur et dur du savoir-faireoccidental <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s pays en sous-développement, DiébédoFrancis Kéré, lauréat 2009 du « Global Award for Sustainab<strong>le</strong>Architecture », préfère mettre en exergue <strong>le</strong>s qualités propresaux cultures loca<strong>le</strong>s. Dans <strong>des</strong> contrées où <strong>le</strong> mot architectepeut ne pas exister <strong>dans</strong> <strong>le</strong> vocabulaire, Diébédo Francis Kéréparvient à apporter <strong>le</strong> « bâtir durab<strong>le</strong> » aux peup<strong>le</strong>s en besoind’habitat.Axonométriede l'éco<strong>le</strong> de GandoL'architecturecomme vecteur de développementAprès avoir professé comme charpentier à Ouagadougou,Diébédo Francis Kéré a quitté <strong>le</strong> Burkina Faso pour rejoindrel’Al<strong>le</strong>magne en 1990. Le téméraire artisan s’engage alors <strong>dans</strong><strong>des</strong> étu<strong>des</strong> en architecture à la Technische Universität de Berlinjusqu’en 2004. Un parcours qui <strong>le</strong> mène à une véritab<strong>le</strong> réf<strong>le</strong>xionsur la responsabilité socia<strong>le</strong> de l’architecte.Face au casse-tête de la construction <strong>des</strong> infrastructures <strong>dans</strong><strong>des</strong> régions en proie aux difficultés financières et humanitaires,Diébédo Francis Kéré propose une méthode reposant surl’alliance d’une architecture respectueuse <strong>des</strong> conditions cli-n°40 mai/juin 2010


Théma / Un nouveau <strong>monde</strong>33matiques et la sensibilisation <strong>des</strong> autochtones aux matières premièresenvironnantes. Avec <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s traditionnel<strong>le</strong>s de la constructionen terre et quelques astuces techniques, l’architectepeut assurer une bonne aération et une séparation acoustiqueconvenab<strong>le</strong>. Point trop n’en faut pour faire de l’architecture résistanteet esthétique. Il suffit d’un peu de bonne volonté, cedont Diébédo Francis Kéré ne manque pas, pour réaliser <strong>des</strong>mirac<strong>le</strong>s <strong>dans</strong> <strong>des</strong> pays au climat sec et aux conditions diffici<strong>le</strong>s.Sensibilisation <strong>des</strong> habitantsMais l’initiative de Diébédo Francis Kéré ne s’est pas arrêtée là.Il s'agissait de motiver <strong>le</strong>s villageois à en devenir <strong>le</strong>s principauxparticipants. L'architecte a donc enseigné <strong>le</strong>s techniques <strong>des</strong>oudure et de construction de briques à l’ensemb<strong>le</strong> <strong>des</strong> habitantsde Gando. Les anciens, <strong>le</strong>s jeunes et <strong>le</strong>s femmes participèrentsans rechigner et parvinrent même à sou<strong>le</strong>ver <strong>des</strong> blocsqui nécessitent généra<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> travail d’une grue. Sans nuldoute, Diébédo Francis Kéré a compris que la participation estla meil<strong>le</strong>ure arme pour préparer <strong>le</strong> futur. En effet, <strong>le</strong>s villageois reproduisentmaintenant ce schéma <strong>dans</strong> l’ensemb<strong>le</strong> du village etcommencent à apprendre à lutter contre <strong>le</strong> danger climatique.Pour subvenir aux besoins en alphabétisation, Diébédo FrancisKéré s’est engagé <strong>dans</strong> <strong>des</strong> projets similaires en Inde et auYémen. La méthode continue de produire <strong>des</strong> prouesses architectura<strong>le</strong>s.Pied de nez aux promoteurs immobiliers <strong>des</strong> payspauvres qui dévalorisent <strong>le</strong> patrimoine urbanistique en important<strong>des</strong> concepts occidentaux, Diébédo Francis Kéré insuff<strong>le</strong>l’amour <strong>des</strong> cultures du <strong>monde</strong> à l’architecture.Diébédo Francis Kéré« L’architecte transforma une structurequi ne résistait pas à la saison <strong>des</strong> pluiesen un édifice durab<strong>le</strong> »Six ans après sa révélation au grand public lors de l’Aga KhanAward for Architecture en 2004, Diébédo Francis Kéré multiplie<strong>le</strong>s interventions <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong> entier. Mais il reste surtoutconnu pour <strong>le</strong> projet d’éco<strong>le</strong> primaire qu’il réalisa <strong>dans</strong> son villagenatal de Gando, au Burkina Faso en 1999, symbo<strong>le</strong> d'unearchitecture vecteur de développement. L’architecte transformaune structure qui ne résistait pas à la saison <strong>des</strong> pluies en unédifice durab<strong>le</strong>. La recette est <strong>des</strong> plus simp<strong>le</strong>s. Pour un peud’aération, il suffit de sou<strong>le</strong>ver un toit ondulé par une fine couchede terre et de prévoir <strong>des</strong> zones-tampons de ventilation entre <strong>le</strong>ssal<strong>le</strong>s de classes. Et pour éviter l’insolation, rien de mieux que<strong>des</strong> pare-so<strong>le</strong>ils pour abriter <strong>le</strong>s jeunes bambins.Projet d'éco<strong>le</strong> au YemenDéveloppement durab<strong>le</strong> :un problème de pays riches ?Alors que <strong>le</strong> développement durab<strong>le</strong> s'est imposé <strong>dans</strong> laconscience <strong>des</strong> pays industrialisés, il ne figure guère <strong>dans</strong> <strong>le</strong>spréoccupations <strong>des</strong> pays en développement.Garantir un mode de vie assurant <strong>le</strong>s besoins <strong>des</strong> générations présentes etfutures, tel est <strong>le</strong> crédo du développement durab<strong>le</strong>. Mis en place en 1987 par<strong>le</strong> rapport « Our common future » <strong>dans</strong> <strong>le</strong> cadre de la Commission <strong>des</strong> NationsUnies, la recherche d’un juste milieu entre <strong>le</strong> progrès économique et social etl’équilibre naturel de la planète reste une préoccupation occidenta<strong>le</strong>. Le Club deRome, réunissant dès 1968 l’intelligentsia mondia<strong>le</strong> autour de la problématiqueenvironnementa<strong>le</strong>, ne comptait en 1982 que onze membres du tiers-<strong>monde</strong>.Si <strong>le</strong> Sommet de la Terre de Rio de Janeiro en 1992 et la mise en place del’Agenda 21, plan d’action pour <strong>le</strong> XXI e sièc<strong>le</strong>, sont <strong>le</strong> symbo<strong>le</strong> d’une prise deconscience commune au Nord et au Sud, <strong>le</strong> succès de la révolution verte <strong>dans</strong><strong>le</strong>s pays en voie de développement reste relatif. Et que dire de l’échec de Copenhagueen 2009 qui condamne <strong>le</strong>s pays pauvres et émergents à un statu quolors de l’échéance du protoco<strong>le</strong> de Kyoto ?Outre la désertification, conséquence du réchauffement climatique, la surexploitation<strong>des</strong> ressources premières ne suscitent toujours pas de mobilisation contre<strong>le</strong>s changements climatiques <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s pays en développement, dont la dettegloba<strong>le</strong> avoisine <strong>le</strong>s 2800 milliards de dollars. Seu<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s initiatives individuel<strong>le</strong>set cel<strong>le</strong>s de quelques O.N.G. parviennent à provoquer un changement <strong>des</strong>mentalités, qui demeurent <strong>le</strong> fondement majeur du développement durab<strong>le</strong>.A.M.n°40 Mai/juin 2010


34<strong>Mondomix</strong>.comDiversité culturel<strong>le</strong>Intangib<strong>le</strong>s richessesTexte Anne-Laure Lemancel & Isadora Dartial Photographie D.R.Depuis 2003, l’UNESCO répertorie <strong>le</strong> patrimoine immatériel, ces trésors intangib<strong>le</strong>ssymbo<strong>le</strong>s d’une diversité culturel<strong>le</strong> affaiblie par la mondialisation.Une labellisation entre mise en lumière et risque de mise en cage.<strong>le</strong> batik indonésienTango argentinLe <strong>monde</strong> en marche vers une uniformisation accrue ? Si cecliché d’une « pensée unique » galopante se voit, <strong>dans</strong> unecertaine mesure, contredit par <strong>des</strong> exemp<strong>le</strong>s de métissagesheureux, facilités par la mondialisation, <strong>le</strong>s chiffres par<strong>le</strong>ntd’eux-mêmes : chaque année, <strong>des</strong> cultures disparaissent. Al’instar de la biodiversité, la diversité culturel<strong>le</strong> (6500 langues,7500 communautés) serait donc en péril. Depuis 2003, <strong>le</strong> PatrimoineCulturel Immatériel (PCI) de l’UNESCO répertorie <strong>le</strong>smanifestations de cette richesse pluriel<strong>le</strong>, parmi <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s lacalligraphie chinoise, la tapisserie d’Aubusson ou <strong>le</strong> batik indonésien...Une sacralisation <strong>des</strong> différences, qui tend à rééquilibrer<strong>le</strong>s trésors recensés entre Nord et Sud, pour honorer,selon Aimé Césaire <strong>dans</strong> son Cahier d’un retour au pays natal,« ceux qui n’ont construit ni châteaux ni palais, mais sans quila terre ne serait pas la terre. »Un recensement politique ?Le PCI se divise en deux listes : liste représentative et listede sauvegarde urgente. Chaque pays signataire de la Conventiondoit dresser un inventaire (quasi) exhaustif <strong>des</strong> pratiquesculturel<strong>le</strong>s sur son territoire. A charge ensuite, pour <strong>le</strong>sgouvernements respectifs, de proposer à l’UNESCO <strong>le</strong>s élémentsqui lui paraissent significatifs et/ou en péril. En Corse,Michè<strong>le</strong> Guelfucci, porteuse du projet d’inscription du « Cantun°40 mai/juin 2010


Théma / Un nouveau <strong>monde</strong>35James Thiérée improvise un archet <strong>dans</strong> Libertéin Paghjella » sur la liste de sauvegarde urgente, estime la traditionmoribonde : seu<strong>le</strong> une quinzaine de « gardiens du temp<strong>le</strong> » seraitaujourd’hui capab<strong>le</strong> de véhicu<strong>le</strong>r cette polyphonie masculine à troisvoix, incarnation chantée de la communauté, « tout un code etune interprétation du <strong>monde</strong> ». Une vision dramatique réfutée parJean-Claude Acquaviva. Selon <strong>le</strong> <strong>le</strong>ader d’A Fi<strong>le</strong>tta, cet art n’ajamais été autant pratiqué, même si <strong>le</strong>s générations actuel<strong>le</strong>sen transgressent l’orthodoxie. Première hésitation. Par ail<strong>le</strong>urs,chaque gouvernement doit obtenir l’accord <strong>des</strong> communautés.« Cette labellisation ne serait-el<strong>le</strong> pasune entrave à la création et à l’évolution naturel<strong>le</strong><strong>des</strong> cultures "vivantes" » ?qui est consacré. On ne va pas enfermer <strong>le</strong> maloya <strong>dans</strong> unmusée, mais simp<strong>le</strong>ment profiter de cette reconnaissance pours’affirmer, se valoriser, et diffuser nos créations ».Mises en lumière, ces cultures possèdent désormais <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong>à jouer sur <strong>le</strong> grand échiquier de la diversité. L’enjeu futur seracelui de l’accompagnement, de la transmission et de la sauvegardede cet équilibre fragi<strong>le</strong>, entre préservation et éternelmouvement.* Le patrimoine culturel immatériel – <strong>le</strong>senjeux, <strong>le</strong>s problématiques, <strong>le</strong>s pratiquesINFO :21 mai 2010 : journée mondia<strong>le</strong> de ladiversité culturel<strong>le</strong>Une participation obligatoire de la société civi<strong>le</strong>, qui dissimu<strong>le</strong> malquelques interrogations. Comme chaque pays choisit son moded’inventaire, celui-ci ne serait-il pas soumis à sa « subjectivité »politique ? Ainsi, comme <strong>le</strong> soulève Chiara Bortolotto, anthropologueà l’EHESS, spécialiste du PCI : « Un pays va-t-il soutenirl’une de ses minorités s’il n’en a pas l’envie ? La Convention peutouvrir, de la part <strong>des</strong> Etats, <strong>des</strong> interprétations différentes. » Onpourrait ainsi s’interroger sur la demande d’inscription par la Chinede l’Opéra Tibétain en 2009, alors même que <strong>le</strong> géant communisteéradique la culture de son voisin...Ces premières questions posées, <strong>le</strong>s cultures/communautésreconnues se réjouissent de cette « labellisation ». Ainsi,l’Argentine a célébré l’accession du tango aux rangs du PCI.« C’est un peu comme si tu obtenais un Award, plaisante EduardoMakaroff, membre du Gotan Project et fondateur du labelMañana. Cette récompense salue son renouveau, et ré-ancrece genre voyageur, interprété aux quatre coins du <strong>monde</strong>, sursa terre d’origine, Buenos Aires, et plus largement la région duRio de la Plata ». A la Réunion, l’inscription du maloya, premièreculture française d’Outre-Mer reconnue, résonne comme laconsécration d’une musique initiée par <strong>le</strong>s esclaves mozambicainset malgaches, expression d’une langue et d’une culturecréo<strong>le</strong> longtemps mises sous si<strong>le</strong>nce. A chaque pays, ensuite,de faire vivre ce « coup de projecteur » international, source depossib<strong>le</strong>s subventions : publications d’ouvrages, enseignement,promotions...Normer sans enfermerPour autant, cette labellisation ne serait-el<strong>le</strong> pas une entrave à lacréation et à l’évolution naturel<strong>le</strong> <strong>des</strong> cultures « vivantes », tisséesd’échanges, de rejets, d’ajouts, d’emprunts, de modifications etde confrontations ? Dans l’ouvrage col<strong>le</strong>ctif Le Patrimoine CulturelImmatériel *, Chérif Khaznadar, président de la Maison <strong>des</strong>Cultures du Monde, à Paris, prévient <strong>des</strong> possib<strong>le</strong>s dérives duPCI : « La convention pour la sauvegarde du Patrimoine CulturelImmatériel peut devenir un outil de muséification et de mort pour<strong>le</strong>s cultures et pour la diversité culturel<strong>le</strong> ». Une conséquencefâcheuse que l’UNESCO tâche d’éviter avec la plus grande vigilance.Ainsi, comme l’indique Céci<strong>le</strong> Duvel<strong>le</strong>, chef de la sectiondu PCI : « La définition même du patrimoine immatériel inclut uncaractère dynamique et subjectif, même si <strong>le</strong> terme "patrimoine"peut prêter à confusion ». Ni maintien artificiel d’une culture,donc, ni résurrection lorsque cel<strong>le</strong>-ci n’a plus de raisons d’être,ni enfermement <strong>dans</strong> <strong>le</strong> carcan de co<strong>des</strong> figés... Exemp<strong>le</strong> à laRéunion, avec <strong>le</strong>s propos de Françoise Vergès, directrice culturel<strong>le</strong>de la Maison <strong>des</strong> Civilisations et de l’Unité Réunionnaise :« Le PCI ne "norme" pas, car c’est un genre <strong>dans</strong> sa globalitéCalligraphie chinoisePoints Clés :- Depuis 2001, la Déclaration de l’UNESCO sur la DiversitéCulturel<strong>le</strong> reconnaît <strong>le</strong> pluralisme <strong>des</strong> cultures, « porteusesd’identité, de va<strong>le</strong>ur et de sens », comme un « patrimoinecommun de l'humanité, qui doit être affirmé au bénéfice <strong>des</strong>générations présentes et futures », soit l’un <strong>des</strong> fondements dudéveloppement durab<strong>le</strong>.- En 2003, l’UNESCO établit la Convention sur <strong>le</strong> PatrimoineCulturel Immatériel (PCI) ratifiée par 121 pays.- Le PCI se répartit en cinq catégories : traditions ora<strong>le</strong>s/artsdu spectac<strong>le</strong>/rituels/connaissances sur la nature/artisanat traditionnel.- Contrairement au Patrimoine Matériel (Convention de 1972)et à sa première ébauche, « <strong>le</strong>s chefs d’œuvre du patrimoineimmatériel », qui considéraient la va<strong>le</strong>ur esthétique comme critèreessentiel, <strong>le</strong> PCI consacre désormais la va<strong>le</strong>ur symboliqueet socia<strong>le</strong> d’une expression culturel<strong>le</strong> pour une communautédonnée (un Etat, une tribu, une famil<strong>le</strong>...).n°40 Mai/juin 2010


36<strong>Mondomix</strong>.comMusique équitab<strong>le</strong>Conscience musica<strong>le</strong>Texte François Mauger (co-auteur de la Musique Assiégée) Photographie www.ecocupAppliquer <strong>le</strong>s préceptes du commerce équitab<strong>le</strong> à la musique ?Des artistes et <strong>des</strong> producteurs y ont réfléchi… plus ou moins mûrement.Panorama <strong>des</strong> initiatives en cours.« Certaines structures del’industrie musica<strong>le</strong> vontjusqu'à adopter <strong>le</strong> statut decoopérative »Cet été, si vous vous rendez à un festival, comme aux Rencontresde Saint-Chartier, <strong>dans</strong> l'Indre, il est très probab<strong>le</strong> qu'unenavette ou un service de co-voiturage vous soit proposé. AuxMéditerranéennes, près de Perpignan, <strong>le</strong>s consommationsvous seront probab<strong>le</strong>ment servies <strong>dans</strong> <strong>des</strong> gobe<strong>le</strong>ts réutilisab<strong>le</strong>s,qui réduisent de 75% <strong>le</strong> volume <strong>des</strong> déchets.Réduction de la consommation é<strong>le</strong>ctrique, toi<strong>le</strong>ttes sans eau,affiches imprimées sur du papier recyclé avec <strong>des</strong> encres nontoxiques,<strong>le</strong>s festivals d'été, qui doivent chaque année renouve<strong>le</strong>r<strong>le</strong>urs installations, sont souvent à l'avant-garde de la réformeécologique. Les sal<strong>le</strong>s de concert <strong>le</strong>s suivent d'un pasplus <strong>le</strong>nt. Les producteurs de disques, eux, restent handicapéspar <strong>le</strong> CD qui, comme <strong>le</strong> viny<strong>le</strong>, est essentiel<strong>le</strong>ment constituéde pétro<strong>le</strong>. L'association FairPlayList tente de mettre sur piedun réseau de recyclage de CD ; de nombreux disques ne seprésentent plus que <strong>dans</strong> un emballage de papier et de carton,parfois recyclés. Mais cette évolution est freinée par la criseéconomique.www.ecocupn Plus d’infos : Rendez-vous du débat :<strong>le</strong> mardi 18 mai à 19 heures <strong>dans</strong> la Sal<strong>le</strong> <strong>des</strong> Fêtesde la Mairie du XVIII ème arrondissement.n A lire : Charlotte Dudignac-François Mauger« La musique assiégée » (L’échappée)l Voir : dossier musique équitab<strong>le</strong> à suivre surwww.mondomix.comMUTUALISATIONAutre effet de la crise ? Festivals, sal<strong>le</strong>s de concert et producteurscherchent à se regrouper. Depuis une dizaine d'années,<strong>des</strong> réseaux se créent ou se renforcent pour unir <strong>le</strong>s professionnelsd'un même département, d'une même région. Lesproducteurs de disques indépendants se sont dotés d'unestructure de diffusion commune, CD1D. Les structures parisiennesconcernées par <strong>le</strong>s musiques du <strong>monde</strong> partagent <strong>des</strong>outils au sein de Parismix. Mais certains vont plus loin, comme<strong>le</strong>s Auvergnats de Sirventès ou <strong>le</strong>s Grenoblois de Tchookar, etadoptent <strong>le</strong> statut de coopérative, si cher au commerce équitab<strong>le</strong>: <strong>le</strong>s artistes sont responsab<strong>le</strong>s de la structure, au mêmetitre que ceux qui <strong>le</strong>s entourent.UNE FILIERE TROUBLESur <strong>le</strong> front financier, en revanche, <strong>le</strong> commerce équitab<strong>le</strong>, quirecommande <strong>le</strong> pré-achat d'une partie de la production, n'apas fait d'ému<strong>le</strong>s. Pour preuve : Spidart, <strong>le</strong> premier site françaisà proposer aux internautes de produire <strong>des</strong> artistes, a déposé<strong>le</strong> bilan.La filière de diffusion <strong>des</strong> spectac<strong>le</strong>s ou de distribution <strong>des</strong> disquesest plus ou moins vertueuse. Si certains professionnelsvont jusqu'à pratiquer une forme de partage avec <strong>le</strong>s artistesqu'on peut qualifier d'équitab<strong>le</strong>, d'autres sont bien moins scrupu<strong>le</strong>ux.C'est ce manque de transparence, pourtant l'une <strong>des</strong> vertuscardina<strong>le</strong>s du commerce équitab<strong>le</strong>, qui donne tout son sens auquestionnement sur une musique plus « éthique », « responsab<strong>le</strong>» ou « durab<strong>le</strong> ». Les rencontres se multiplient pour nourrirce débat. <strong>Mondomix</strong> vous invite d'ail<strong>le</strong>urs à cel<strong>le</strong> qui aura lieuà Paris <strong>dans</strong> <strong>le</strong> cadre de la Quinzaine du Commerce Equitab<strong>le</strong>(voir ci-contre).n°40 mai/juin 2010


Théma / Un nouveau <strong>monde</strong>37Paris capita<strong>le</strong><strong>des</strong> musiques du <strong>monde</strong>Texte Benjamin MiNiMuMCarrefour <strong>des</strong> courants de pensée et<strong>des</strong> esthétiques, Paris tient un rô<strong>le</strong> àpart <strong>dans</strong> l'imaginaire urbain mondial.Par son patrimoine et son dynamisme culturels et par<strong>le</strong>s liens historiques qui la rapprochent de nombreuxpays d'Afrique, d'Asie ou d'Océanie, la capita<strong>le</strong> hexagona<strong>le</strong>n'a jamais cessé d'attirer artistes et musiciens.Ravi Shankar, Youssou NDour ou Cesaria Evora,combien de carrières se sont <strong>des</strong>sinées, consolidéesou confirmées <strong>dans</strong> la vil<strong>le</strong> lumière?Du 1 er au 21 mai, date de la «Journée mondia<strong>le</strong> de ladiversité culturel<strong>le</strong> pour <strong>le</strong> dialogue et pour <strong>le</strong> développement»,trois bou<strong>le</strong>vards parisiens vont se vêtir enl’honneur de cet aspect souvent tu de son histoire etproposer un parcours dédié aux musiques du <strong>monde</strong>.Plan du parcours <strong>des</strong> 75 portraits géants d'artistesUn guide papier gratuitaccompagne l’opération etprésente <strong>le</strong>s 150 concertsde musiques du <strong>monde</strong>qui se dérou<strong>le</strong>ront durant <strong>le</strong>mois de mai. Ce magazineest disponib<strong>le</strong> sur <strong>le</strong>s pointsde distribution habituels de<strong>Mondomix</strong>.75 portraits géants d’artistes affichés sur <strong>le</strong>slampadaires <strong>des</strong> bou<strong>le</strong>vards Sébastopol, Strasbourget Magenta sont autant de points d’écouteinteractifs grâce à <strong>des</strong> TAGS (co<strong>des</strong> barres àdeux dimensions) visib<strong>le</strong>s sur <strong>le</strong>s affiches et <strong>le</strong>sstickers apposés sur <strong>le</strong>s lampadaires.n°40 Mai/juin 2010


38<strong>Mondomix</strong>.comRecyclageDans <strong>le</strong> <strong>monde</strong> <strong>des</strong>écolo-instrumentsTexte Jérôme Pichon Photographie Anna StöcherTrompette en poivron, harpe de glace, orgue à feu…Ces authentiques instruments de musique sontcomposés par <strong>des</strong> passionnés à partir d’élémentsde notre environnement direct : légumes frais, déchetsà recyc<strong>le</strong>r, eau ou feu. Une tendance <strong>dans</strong> l'air dutemps, entre considérations écologiques et besoind’innovation.un musicien bat la mesureavec une aubergine coupée en deux,tandis qu’une jeune femme frotte<strong>des</strong> feuil<strong>le</strong>s de saladeVendredi 20 février. Un orchestre d’un genre unique s’instal<strong>le</strong>sur la scène de l’auditorium du Centre Pompidou : onze musiciensvenus d’Autriche, mais sans instruments. Et pour cause :ils <strong>le</strong>s fabriquent eux-mêmes à partir de légumes frais achetés<strong>le</strong> matin même au marché (voir interview ci-après).Fonction primitiveDe fait, <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong> offert frise <strong>le</strong> surréalisme. Des carottes évidéessont disposées sur scène, <strong>le</strong>s uns s’en servant de percussions,<strong>le</strong>s autres de flûtes ; un musicien bat la mesure avec uneaubergine coupée en deux, tandis qu’une jeune femme frotte<strong>des</strong> feuil<strong>le</strong>s de salade. L’ensemb<strong>le</strong> produit une musique organique,foisonnante et passionnante <strong>dans</strong> ses aléas et ses accidents(<strong>le</strong>s instruments explosent parfois en cours de route).Loin de l’expérience stéri<strong>le</strong>, la démarche <strong>des</strong> Viennoisramène l’instrument de musique à sa fonction primitive :cel<strong>le</strong> de produire un son à partir d’une matière premièreéphémère ou fragi<strong>le</strong>, d’origine végéta<strong>le</strong> ou minéra<strong>le</strong>. Biend’autres se sont récemment lancés <strong>dans</strong> l’aventure. Leurpoint commun : un rejet de la production industriel<strong>le</strong>, et<strong>des</strong> métho<strong>des</strong> qui épargnent soigneusement <strong>le</strong> <strong>monde</strong>animal.Le méconnu Winduino (voir encadré) est l’un modè<strong>le</strong>s du genre,tout comme <strong>le</strong>s instruments en glace rassemblés chaque hiverau Ice Music Festival en Norvège (voir ci-<strong>des</strong>sous). En France,Michel Moglia s’est pour sa part consacré à un phénomènephysique aux propriétés sonores peu exploitées : <strong>le</strong> feu. Sesexpériences <strong>le</strong> conduisent à créer <strong>le</strong> premier « orgue à feu » en1988. L’instrument, très imposant, est un assemblage modulab<strong>le</strong>de tuyaux en titane et en inox, <strong>dans</strong> <strong>le</strong>quel un brû<strong>le</strong>ur projette<strong>des</strong> flammes. Les sons produits (<strong>le</strong>s « chants thermiques »)vont du murmure au hur<strong>le</strong>ment. Ambiance gothique garantie !RecyclageParallè<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> <strong>monde</strong> <strong>des</strong> instruments artisanaux n’a paséchappé à la révolution du recyclage : <strong>des</strong> favelas du Brésil àla banlieue parisienne, <strong>le</strong>s ateliers de fabrication d’instrumentsà partir de produits recyclés f<strong>le</strong>urissent un peu partout. Citons,pê<strong>le</strong>-mê<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s Espagnols de Vertedero Sonoro, ou <strong>le</strong>s Françaisn°40 mai/juin 2010


Théma / Un nouveau <strong>monde</strong>39de Lutherie Urbaine, atelier très actif de Bagno<strong>le</strong>t travaillant uniquementà partir de déchets urbains. Côté détournement insolited’objets du quotidien, <strong>le</strong> vélo a visib<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> vent en poupe :la chanteuse espagno<strong>le</strong> Rosalia se sert du guidon comme d’uneflûte, <strong>le</strong> Français Rod a, lui, entièrement « tuné » son vélo pour enfaire une sorte d’orchestre ambulant.Sérieuses ou ludiques, ces initiatives ont toutes un énorme avantage: <strong>le</strong>ur coût modique. Un argument de tail<strong>le</strong> en ces temps decrise économique.n www.vegetab<strong>le</strong>orchestra.orgWinduino II© D.R.Adaptation é<strong>le</strong>ctronique dela harpe éolienne, célébrée àl’époque romantique, <strong>le</strong> Winduinoest un instrument entièrementécologique : il utilise <strong>le</strong>vent pour modu<strong>le</strong>r <strong>des</strong> sonsau moyen de capteurs, etfonctionne à l’énergie solaire.n Plus d’infos, sur <strong>le</strong> sitede son créateur,l’entreprise américaine FascinationWorkshophttp://fascinationworkshop.net/prototypes/winduino-ii/Questions à Ernst Reitermaier,membre du Vienna Vegetab<strong>le</strong> OrchestraPropos recueillis par Jérôme PichonComment avez-vous eu l’idée d’utiliser <strong>des</strong> légumesen guise d’instruments ?Ernst Reitermaier : C’était en 1998, ce devait être une performanceunique, mais on a découvert tel<strong>le</strong>ment de sons intéressantsavec ces légumes que nous avons continué…Beaucoup d’instruments traditionnels sont déjà fabriquésà partir de légumes. Quel<strong>le</strong> est votre spécificité ?ER : Nous n’utilisons quasiment que <strong>des</strong> légumes frais, achetés<strong>le</strong> matin même au marché. Nous fabriquons nos instrumentspour chaque concert, chaque répétition. Leur corps chargéd’eau produit <strong>des</strong> sons organiques, flous et changeants.Votre instrument favori ?ER : Il y a cette espèce de kazoo, en fait une carotte creusée etun embout fait à partir d’une feuil<strong>le</strong> de poireau. Le son produitest assez fort, unique.D’où vient ce rituel de la soupe servie à la fin duspectac<strong>le</strong> ?ER : C’est la façon la plus nob<strong>le</strong> et convivia<strong>le</strong> de recyc<strong>le</strong>r nosinstruments, mais aussi de reconnecter tous <strong>le</strong>s sens entreeux. L’ouïe et <strong>le</strong> goût.Ice Music FestivalCréé il y a 4 ans à peine, ce festival hivernal est l’œuvre deTerje Isungset, musicien norvégien spécialisé <strong>dans</strong> la confectiond’instruments entièrement à base de glace.n Plus d’infos, sur <strong>le</strong> site du festival :http://www.icefestival.no/en/n Très similaire, <strong>le</strong> festival transalpin all’Ice Festival accueillaitcette année Terje Isungset du 26 février au 7 mars.http://www.all-ice.no/l Pour en savoir plus sur Rosalia :http://mp3.mondomix.com/rosalia© D.R.n Le velophone de Rod-Bike,en écoute et en images sur son blog :http://velophone.over-blog.com/GRAND KALLÉn°40 Mai/juin 2010


Voyage MUSIQUES/ Colombie41VoyagesAUX SOURCES DE LA CHAMPETATexte Yannis Ruel Photographie DRProduit de la culture <strong>des</strong> sound systems colombiens, la champeta est l’une<strong>des</strong> dernières musiques nées <strong>des</strong> échanges entre l’Afrique et <strong>le</strong>s Caraïbes.« Un son hybride, une <strong>dans</strong>e et un nouveau folklore urbain,avec ses déclinaisons graphiques, vestimentaires et argotiques »Rendez-vous avait été pris au terminalde bus de Baranquilla. Moyennantune paire de viny<strong>le</strong>s de musiquenigériane et ivoirienne rapportésde Paris, Fabián Altahona s’offrait de meguider auprès <strong>des</strong> disquaires de cette vil<strong>le</strong>portuaire de la côte caraïbe colombienne,réputée pour être la Mecque régiona<strong>le</strong> <strong>des</strong>col<strong>le</strong>ctionneurs de ga<strong>le</strong>ttes tropica<strong>le</strong>s. Unmarché à l’amiab<strong>le</strong> passé sur internet via<strong>le</strong> blog Africolombia qu’Altahona consacreaux pépites discographiques africaines,antillaises et colombiennes. Un triang<strong>le</strong>d’or transatlantique dont <strong>le</strong> syncrétisme aaccouché, au sein <strong>des</strong> communautés afrocolombiennesde Cartagena et de Baranquilla,de la champeta.Le son <strong>des</strong> picósDepuis que la fée é<strong>le</strong>ctrique y a fait sonapparition, <strong>le</strong>s bals populaires de cette régionde Colombie sont animés par <strong>des</strong> discothèquesambulantes baptisées picós (del’anglais « pick-up »). A partir <strong>des</strong> années1970, <strong>le</strong>s plus célèbres de ces sound systemsont commencé à combiner <strong>le</strong>urs traditionslatines avec un éventail de rythmesen provenance d’Afrique et <strong>des</strong> Antil<strong>le</strong>s -highlife, compas, afrobeat, soca, soukous,zouk, etc. Suivant <strong>des</strong> techniques de mixageet de remixage comparab<strong>le</strong>s à cel<strong>le</strong>sde <strong>le</strong>urs alter ego jamaïcains, ce cocktailde sonorités panafricaines et caribéennesest créolisé à la sauce colombienne sousl’appellation de champeta. Un son hybride,une <strong>dans</strong>e et un nouveau folklore urbain,avec ses déclinaisons graphiques, vestimentaireset argotiques. Etroitement liéesà l’économie <strong>des</strong> picós, <strong>le</strong>s dernières tendancesde cette musique sont désormaisproduites à grand renfort de synthétiseurset de boites à rythmes.Grooves pour archéologuesAvant d’en arriver là, à l’origine du phénomènede la champeta, l’introductionde viny<strong>le</strong>s africains et antillais, dont <strong>le</strong>spremiers exemplaires ont voyagé <strong>dans</strong> <strong>le</strong>smal<strong>le</strong>s de marins mélomanes pour échouersur <strong>le</strong>s platines d’un picó, aura aussi eu unimpact direct sur la création <strong>des</strong> orchestresde l’époque. Parmi ceux-ci, la formationdu guitariste Abelardo Carbono, dont <strong>le</strong>scocottes sont calquées sur <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> du soukous; <strong>le</strong> groupe Son Pa<strong>le</strong>nque du chanteurJusto Valdez, qui a expérimenté une fusionde percussions afro-colombiennes et demusique africaine ; ou encore l’orchestreWganda Kenya du musicien de salsa Fruko,spécialisé <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s reprises de ce répertoireexotique. L’essentiel de cette production,restée confidentiel<strong>le</strong> en dehors de la côte caraïbe,se trouve archivée à Baranquilla, <strong>dans</strong>l’antre de la boutique Discolombia, maisonmère du label Felito Records qui en publiaquelques uns <strong>des</strong> meil<strong>le</strong>urs enregistrements.Son propriétaire écou<strong>le</strong> aujourd’huises stocks auprès d’archéologues dugroove venus de l’étranger, de plus en plusnombreux à s’intéresser à ce nouveau filondepuis la diffusion, sur <strong>le</strong> blog Africolombia,de trois versions colombiennes du classiqueShakara de Fela Kuti. « La Colombie est <strong>le</strong>premier pays qui a enregistré de l’afrobeathors d’Afrique », renchérit <strong>le</strong> producteurLucas Silva, qui s’est associé au label londonienSoundway pour sortir la premièrecompilation consacrée aux racines de cettemusique. Un embryon de revival qui, souhaitons-<strong>le</strong>,pourrait réveil<strong>le</strong>r <strong>des</strong> vocationschez <strong>le</strong>s pionniers du genre.n Compilation « Pa<strong>le</strong>nque, Pa<strong>le</strong>nque !Champeta Criolla & Afro Roots in CaribbeanColombia, 1975-1991 » (Soundway Records)n Blog : Africolombia :http://acbia.wordpress.com/n°40 Mai/juin 2010


42<strong>Mondomix</strong>.comVoyage / MUSIQUESMacédoineRock en SkopjeTexte et Photographies Benjamin MiNiMuMSouvenirs d’une virée à Skopje, la capita<strong>le</strong> de la République de Macédoine,où l’on s’attendait à croiser <strong>des</strong> fanfares survoltées et où l'on a trouvé unrock énergique, inventif et contestataire.L'horloge arrêtée de l'ancienne gare de SkopjeLes aiguil<strong>le</strong>s de l’horloge qui surplombe la porte del’ancienne gare ferroviaire de Skopje se sont arrêtéesà 6h16 <strong>le</strong> 26 juil<strong>le</strong>t 1963. Conséquence margina<strong>le</strong> dutremb<strong>le</strong>ment de terre de magnitude 6,9 qui détruisit lamajeure partie <strong>des</strong> bâtiments et infrastructures de la vil<strong>le</strong>et causa la disparition d’un millier de personnes. La gare,d’abord laissée en l’état pour entretenir <strong>le</strong> souvenir, futtransformée en musée d’histoire pour évoquer <strong>le</strong>s sp<strong>le</strong>ndeurspassées d’une vil<strong>le</strong> qui connut <strong>le</strong>s empires romain,byzantin et ottoman.Re<strong>des</strong>sinée peu après <strong>le</strong> séisme par un urbaniste japonaissous influence esthétique communiste, l’architecturede la capita<strong>le</strong> de la République de Macédoine s’est peuà peu dégradée au point qu'aujourd’hui, ses charmes nesautent pas aux yeux.Pour sentir battre <strong>le</strong> cœur de Skopje, il faut rencontrerses artistes. Ils défient la grisail<strong>le</strong> et l’ennui et ouvrentl’horizon caché par <strong>le</strong>s montagnes qui entourent la vil<strong>le</strong>.Chez la reine <strong>des</strong> GitansLe photographe Stanimir Nedelkovski tente de redonnerde la majesté à sa vil<strong>le</strong> à travers <strong>des</strong> clichés de paysagesurbains réalisés à l’aide d’appareils et de procédésdatant <strong>des</strong> débuts de la photographie. Le résultat <strong>des</strong>es longues expositions sur papier sensib<strong>le</strong> est ensuitecolorié à la main. Sous <strong>le</strong>s teintes pastels <strong>le</strong>s détails disparaissent,<strong>le</strong>s rues se parent d’une aura sans âge quitrompe <strong>le</strong> spectateur. Il croit voir <strong>des</strong> vestiges d’hier là oùil n’y a que <strong>le</strong> vertige d’un tour de passe-passe habi<strong>le</strong>.Esma Redzepova chez el<strong>le</strong>n°40 mai/juin 2010


MUSIQUES43Dans <strong>le</strong>s hauteurs, à quelques pas du musée d’art moderne,une grande maison carrée en brique abrite la reine <strong>des</strong> Gitans.Lorsqu’el<strong>le</strong> n’est pas en tournée à travers <strong>le</strong> <strong>monde</strong>, ou en voyagepour défendre l’une <strong>des</strong> nombreuses causes qu’el<strong>le</strong> soutient,Esma Redzepova réside ici avec quelques membres de son imposantefamil<strong>le</strong> aux 48 enfants adoptés. El<strong>le</strong> vit entourée <strong>des</strong> souvenirsd’une longue carrière, démarrée il y a plus de cinquante ans.Les portraits la représentant, <strong>le</strong>s médail<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s diplômes et autresrécompenses constitueront bientôt <strong>le</strong>s éléments d’un musée à sagloire aménagé <strong>dans</strong> ce même bâtiment. Couronnée reine <strong>des</strong>Roms en Inde en 1976, chanteuse gitan du millénaire en Russieen 2000, nominée deux fois pour <strong>le</strong> prix Nobel de la paix, Esma estla plus célèbre personnalité de Macédoine. La chanteuse, nomméeconseillère de la vil<strong>le</strong>, aime son pays. « Ici <strong>le</strong>s Gitans peuvents’exprimer <strong>dans</strong> <strong>le</strong>ur langue. La première chanson diffusée sur laradio nationa<strong>le</strong> était une chanson rom ». Une <strong>des</strong> siennes, bienentendu.commun partagé. La politique et la religion tentent de séparer <strong>le</strong>shabitants <strong>des</strong> Balkans, mais la culture peut <strong>le</strong>s rassemb<strong>le</strong>r. »Ces traditions inspirent autant <strong>le</strong>s anciens que <strong>le</strong>s jeunes musiciens.Nombreux sont ceux qui jouent avec ces co<strong>des</strong> pour inventerde nouveaux espaces. Composé de virtuoses, <strong>le</strong> septet Ljubojnas’inspire <strong>des</strong> musiques traditionnel<strong>le</strong>s, adapte de célèbrespoètes macédoniens et retraduit <strong>le</strong>ur message à la lumière d’unjazz rock emprunt de hip hop.Groupe phare du paysage underground de cette partie <strong>des</strong>Balkans, Foltin peaufine depuis 1997 une formu<strong>le</strong> sans frontière.Les instruments traditionnels et <strong>le</strong>s accessoires de théâtre yfont cause commune avec <strong>le</strong>s attributs du jazz, du rock, voire del’é<strong>le</strong>ctro. Le groupe tire son nom d’une œuvre posthume de KarelCapek, écrivain tchèque culte du XX ème sièc<strong>le</strong>, ennemi du III èmeReich et inventeur du mot robot. Pour autant, ces anciens peintresn’évoquent pas une prise de conscience post-industriel<strong>le</strong>. Ilsqualifient <strong>le</strong>ur musique d’élégiaque et revendiquent un éc<strong>le</strong>ctisme,poétique et aventurier, qu’on <strong>le</strong>ur reconnait faci<strong>le</strong>ment.« Au fond <strong>des</strong> clubs de Skopje, <strong>le</strong> mécontentement s’articu<strong>le</strong> au son<strong>des</strong> guitares é<strong>le</strong>ctriques acérées sur un rythme binaire audacieux »Kristina Gorovska du groupe Bernays PropagandaLe trésor partagé <strong>des</strong> BalkansLa Grèce voisine possède aussi une région nommée Macédoineet s’oppose fermement à l’entrée <strong>dans</strong> l’Europe de ce pays s’ilne change pas de nom. Le gouvernement refuse et préfère resterfièrement isolé, alimentant l’esprit de divergence.Durant notre séjour, l’hôtel Ambassador accueil<strong>le</strong> une rencontred’artistes traditionnels de culture macédonienne qui se moquent<strong>des</strong> frontières. L’un <strong>des</strong> organisateurs du congrès nous explique <strong>le</strong>point de vue <strong>des</strong> artistes. « Le problème est avant tout politique. Parexemp<strong>le</strong>, on retrouve <strong>dans</strong> différentes parties <strong>des</strong> Balkans <strong>le</strong>s mêmeschansons, avec <strong>des</strong> nuances. Le politicien dira qu’el<strong>le</strong>s nousont été volées, <strong>le</strong>s musiciens conviendront que c’est un patrimoineRock d’enferTous <strong>le</strong>s musiciens ne restent pas <strong>dans</strong> la parabo<strong>le</strong> ou<strong>le</strong> message d’espoir. Au fond <strong>des</strong> clubs de la vil<strong>le</strong>, <strong>le</strong>mécontentement s’articu<strong>le</strong> au son <strong>des</strong> guitares é<strong>le</strong>ctriquesacérées sur un rythme binaire audacieux.Bien que ne donnant aucune interview, <strong>le</strong> groupe BernaysPropaganda est devenu <strong>le</strong> porte-paro<strong>le</strong> de lajeunesse macédonienne. Leurs chansons post-punket <strong>le</strong> manifeste posté sur <strong>le</strong>ur myspace annoncent clairementla cou<strong>le</strong>ur : « Vous êtes-vous déjà demandépourquoi aucun d’entre nous n’avez jamais reçu decarte en provenance du paradis, juste <strong>des</strong> images del’enfer ? Le paradis n’a pas d’adresse, l’enfer en a une.Notez la : Planète terre, Europe, Amérique, Balkans,côte ouest, côte est. Je vous envoie une carte posta<strong>le</strong>de la république bananière de Macédoine – partielégitime de l’enfer. » Emmené par l’incisif guitaristeVasko Atanasoski et la charismatique chanteuse etprof de philo Kristina Gorovska, <strong>le</strong> groupe tient sonnom du principal ouvrage d’Edward Bernays, neveude Sigmund Freud et théoricien de la manipulation dusubconscient col<strong>le</strong>ctif. Ses travaux inspirèrent JosephGoebbels et sont toujours pris en compte par <strong>le</strong>s publicitaireset <strong>le</strong>s partis politiques. Bernays Propagandaen a fait <strong>le</strong> symbo<strong>le</strong> de ce qu’ils dénoncent avec énergieet énormément de groove.La jeunesse de Skopje ne se contente pas de p<strong>le</strong>urer<strong>le</strong>s dou<strong>le</strong>urs du passé. Pour el<strong>le</strong>, la vie ne s’est pasarrêté au tremb<strong>le</strong>ment de terre, ni à la guerre <strong>des</strong> Balkans. El<strong>le</strong>redoute de se voir vo<strong>le</strong>r son futur, mais se bat pour se faire entendre.n Plus d’infos, Tous <strong>le</strong>s artistes présentés ici participentau Printemps Balkanique à Caen, jusqu’au 28 maiwww.balkans-transit.asso.fr/l À VOIR sur mondomix portrait d’Esma Redzepova :vidéo du voyage en Macédoine : Cap sur Skopjen°40 Mai/juin 2010


44 PlaylistSmadjPropos recueillis par Benjamin MiNiMuM©Arnaud_Weiln Dis-moi ce que tu écoutes ?Pour Smadj, <strong>le</strong>s arcanes d’une carte-son n’ont pas moins d’intérêt que <strong>le</strong>s secrets harmoniquesdu luth arabe. Les BPM <strong>des</strong> clubs e<strong>le</strong>ctro ne sont pas plus excitants que <strong>le</strong> système modal dumâqam oriental. Entre passé et futur, culture du Nord et du Sud, <strong>le</strong> oudiste tunisien redistribue <strong>le</strong>scartes. Le festival Métis de Saint-Denis <strong>le</strong> met à l’honneur en trio, au sein de DuOud ou avec sesprestigieux amis (Natacha Atlas ou Ibrahim Maalouf) à la Basilique de la vil<strong>le</strong>.Dis-moi ce que tu écoutes en répondant à cette interview ?Rouicha juste avant de commencer.Quel est <strong>le</strong> premier disque que tu as acheté ?Je crois que c’était Rock it d’Herbie HancockLe disque <strong>le</strong> plus étrange de ta discothèque ?Le requiem de LigetiTrois pièces de oud incontournab<strong>le</strong>s ?Parfum de gitane ou l’épilogue du Conte de l’incroyab<strong>le</strong> amour d’Anouar Brahem.Yarimo d’Altonian (repris sur l’album Wild Serenade de DuOud)Tout Babylon Mood de Mounir BachirTes trois disques é<strong>le</strong>ctro favoris ?Squarepusher, Go plasticMassive Attack, ProtectionPhotek, Modus OperandiTrois disques de rencontres musica<strong>le</strong>s ?Ry Cooder et Ali Farka Touré, Talking TimbuktuJimmy Smith et Wes Montgomery, Jimmy and Wes, The Dynamic DuoBjörk et Talvin Singh, SensualityTa musique de film préférée ?Il était une fois en Amérique, mais il y en a tel<strong>le</strong>ment d’autres.Un film dont tu aurais aimé faire la musique ?Lawrence d’Arabie, Star Wars ou M <strong>le</strong> maudit.Un livre qui t’a inspiré une musique ?Alcools, d’Apollinaire.Un son naturel, domestique ou urbain qui t’inspire ?Les portes du métro parisien.Un son naturel, domestique ou urbain que tu trouves insupportab<strong>le</strong> ?Les marteaux piqueurs.Quel<strong>le</strong> est la sonnerie de ton téléphone ?Avant, c’était un son é<strong>le</strong>ctronique abjecte, dérangeant et fort pour que je puisse l’entendre.Maintenant, c’est un chien qui rigo<strong>le</strong>.Ta dernière découverte musica<strong>le</strong> ?BuikaLe disque idéal à écouter avant d’al<strong>le</strong>r se coucher ?Ça dépend de ce que tu veux faire : dormir ou faire l’amour.Pour faire l’amour : Pavane pour infante défunte, de Ravel, ou <strong>le</strong> Boléro pour un truc plussoutenu.Pour dormir : Kind of blue ou l’épilogue <strong>dans</strong> Conte de l’incroyab<strong>le</strong> amour d’Anouar Brahem.l www.mondomix.com/fr/tag/smadjn Festival Métis jusqu’au 7 juil<strong>le</strong>t www.festival-saint-denis.com/metis/> Voir aussi p 71n°40 Mai/juin 2010


AFRIQUESé<strong>le</strong>ctions45ChroniquesMONDOMIXVOUS OFFRELA POSSIBILITÉD’ACHETEREN MP3 LESMUSIQUESCHRONIQUÉESDANS LEMAGAZINE.Téléchargersur mp3.mondomix.comXXXXXPour cela,il vous suffitd’al<strong>le</strong>r sur http://mp3.mondomix.com/ et de saisir<strong>le</strong> numéro quitermine certainsartic<strong>le</strong>s du magazine<strong>dans</strong> <strong>le</strong> moteur derecherche, en ayantsé<strong>le</strong>ctionné l’option« Code magazine ».© Christina JasparsSchool of Life signe <strong>le</strong> retour de Faada Freddy et N’Dongo D. Re-baptiséDaara J Family au <strong>le</strong>ndemain de la séparation avec Aladji Man aux côtésduquel ils avaient débuté, <strong>le</strong> duo dakarois fait montre d’une bel<strong>le</strong> maturité.L’éco<strong>le</strong> de la vie <strong>le</strong>ur avait permis en dix-huit ans de carrière de devenir<strong>des</strong> acteurs majeurs du hip-hop mondial. Sans rien renier <strong>des</strong> préceptesoriginaux du genre, en <strong>le</strong>s valorisant même, <strong>le</strong>s deux complices retrouventici l’essence du hip-hop en nourrissant <strong>le</strong>urs compos de tout ce qui fait <strong>le</strong>ur univers musical. Lesbeats et flows hip-hop ont évidemment <strong>le</strong> <strong>des</strong>sus (l’interrogatif Oh Why ? sur fond d’ambiances debrousse, l’homonyme School of Life au riff de guitare rock en bouc<strong>le</strong>). Mais l’on trouve aussi de bel<strong>le</strong>senvolées voca<strong>le</strong>s et de délicats entrelacs percussifs mandingues (Bayi Yon), <strong>des</strong> riddims jamaïcains(Children), du funk façon “mégalopo<strong>le</strong>s” américaines (Ce<strong>le</strong>brate ou <strong>le</strong> très Princier Potu Nda), de lanu-soul cuivrée (Temps Boy) et <strong>des</strong> cor<strong>des</strong> mélancoliques (Gates of Freedom). Toutes atmosphèresqui cohabitent harmonieusement au fil <strong>des</strong> onze plages de ce quatrième opus.musiques et cultures <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeEn ouverture, Bayi Yon remet <strong>le</strong>s pendu<strong>le</strong>s à l’heure en rappelant l’histoire du continent noir (ce quel’Afrique a donné au <strong>monde</strong> et ce qu’on lui a pris), pour mieux scander « Africains et fiers de ce quenous sommes » <strong>dans</strong> un mix vocal qui évoque autant <strong>le</strong>s chants zoulous que <strong>le</strong>s épopées chantéespar <strong>le</strong>s plus grands griots d’Afrique de l’Ouest. Positif, titre chanté en français, rou<strong>le</strong> bilingue sur<strong>le</strong> refrain : « Tant que tu restes positif, rien ne pourra te stop now. Tant que tu restes positif, nul nepourra te flop now. » Messages de paix intérieure, de respect entre <strong>le</strong>s hommes et de solidarité afinde lutter contre <strong>le</strong>s démons du passé, <strong>le</strong> discours de nos deux anciens gamins de Dakar est chargéd’espoir pour l’Afrique, donc pour <strong>le</strong> <strong>monde</strong>.SquaalyDaara J Family"L’Eco<strong>le</strong> de la Vie"(Wrasse Records/Universal)res <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXNy Malagasy Orkestra"Ny Malagasy Orkestra "(Cinq Planètes/L’Autre Distribution)M'aimeTéléchargersur mp3.mondomix.com30972Toujours en première ligne pour défendre <strong>le</strong>smusiques traditionnel<strong>le</strong>s malgaches, <strong>le</strong> label CinqPlanètes ajoute une nouvel<strong>le</strong> pierre à un édificedéjà solide. Après <strong>le</strong> Malagasy All Stars, supergroupe réunissant quelques uns <strong>des</strong> plus grandsmusiciens de l’î<strong>le</strong>, sa nouvel<strong>le</strong> production s’appel<strong>le</strong>Ny Malagasy Orkestra.Cet ensemb<strong>le</strong>, dirigé par <strong>le</strong> maître de la valihaJustin Vali et <strong>le</strong> bluesman Tao Ravao, a vu <strong>le</strong> jourlors d’une de <strong>le</strong>urs tournées de Madagascaren 2007. Tout au long de <strong>le</strong>ur virée, <strong>le</strong>s deuxcompères ont écouté <strong>des</strong> musiciens locauxet sé<strong>le</strong>ctionné <strong>le</strong>s plus exceptionnels pour <strong>le</strong>sregrouper sous cette nouvel<strong>le</strong> identité. Uneplongée <strong>dans</strong> <strong>le</strong> patrimoine de l’î<strong>le</strong> rouge auxcôtés de gui<strong>des</strong> inédits. Résultat : énergie,découverte, virtuosité et musicalité.Arnaud CabanneTéléchargersur mp3.mondomix.com30065n°39 Mars/avril 2010


46AfriqueTéléchargersur mp3.mondomix.com29814Patrick Bebey"Oa Na Mba"(Sina performance / Safoul Productions)Ce qui frappe d’abord, c’est lavoix, si grave, si proche de cel<strong>le</strong>de Francis Bebey, <strong>le</strong> père dePatrick. Ensuite, la profondeur<strong>des</strong> morceaux, sifflotés, jazzés,scandés, qui sous une apparentelégèreté, racontent l’absence,l’amour et <strong>le</strong> souvenir. PatrickBebey <strong>des</strong>tinait cet hommageà son père de son vivant,mais sa disparition <strong>le</strong> 28 mai2001, a laissé <strong>le</strong> fils sans voix.Il laisse reposer <strong>le</strong> projet troisans et s’entoure de musicienscomplices comme Marc Bertauxà la basse ou <strong>le</strong> batteur brésilienLuis Augusto Cavani, <strong>des</strong> amisde plus de vingt ans, pourcomposer un requiem joyeux, à lagrandeur du disparu.Au fil du disque, l’hommagedevient passage de flambeauet Patrick, <strong>le</strong> garant de l’espritBebey. Doux voyage entre <strong>le</strong> jazzet <strong>le</strong>s ambiances équatoria<strong>le</strong>s(flûte pygmée et sanza), Oa NaMba jouit d’une subti<strong>le</strong> unité etde morceaux au groove magique.Eglantine ChabasseurSalim Halali"Trésors de la ChansonJudéo-Arabe "(Buda Musique/Socadisc)Quel <strong>des</strong>tin que celui de SalimHalali. Né Simon Halali en 1920 àAnnaba (Algérie) <strong>dans</strong> une famil<strong>le</strong>juive berbère, il fait un tabac à la fin<strong>des</strong> années 30 <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s cabaretsflamenco de France et d’Europe.Sauvé de la déportation par <strong>le</strong>recteur de la Grande Mosquéede Paris et porté par <strong>le</strong> succèsde ses chansons (Sidi Habibi,Dour Biha Chibani…) auMaghreb, il s’instal<strong>le</strong> à Casablancaen 1949 où il ouvre son cabaret,<strong>le</strong> Coq d’Or. Héros de la chansonjudéo-arabe, ce chanteur qui necachait pas sa préférence pour <strong>le</strong>shommes, osa même une repriseorientalisante du Ma YiddisheMama, la chanson fétiche <strong>des</strong>Juifs d’Europe de l’Est. Ce recueilau riche livret compi<strong>le</strong> ses plusgrands airs.SQ'Sierra Leone’sRefugee All Stars"Rise & Shine"(Cumbancha)Téléchargersur mp3.mondomix.com30406New Or<strong>le</strong>ans : voilà un exil plusdoux pour <strong>des</strong> musiciens que <strong>le</strong>camp de réfugiés guinéen où <strong>le</strong>sSierra Leone’s All Stars avaientenregistré en 2005 <strong>le</strong>ur premieralbum Living Like A Refugee,fuyant la guerre civi<strong>le</strong> de <strong>le</strong>ur pays !Cinq ans après <strong>le</strong> documentaireet <strong>le</strong> disque qui <strong>le</strong>s a consacrés,la bande de Reuben M. Koromaet de Francis John Langba aenregistré Rise & Shine à micheminentre Freetown et laNouvel<strong>le</strong>-Orléans, deux citésmiraculées, où la musiquereste <strong>le</strong> moyen <strong>le</strong> plus simp<strong>le</strong>de se raccrocher à la vie. Cettepulsation essentiel<strong>le</strong>, salvatrice,réussit à relier <strong>le</strong>s morceaux decet album produit par Steve Berlin(Rickie Lee Jones, AngéliqueKidjo…), parfois écartelés entre<strong>le</strong> reggae, <strong>le</strong> ragga, la rumbacongolaise ou <strong>le</strong> blues cuivré.E.C.Konono N°1res <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIX"Assume Crash Position"(Crammed Discs/Wagram)M'aimeQui a déjà pris un concertde Konono N°1 en p<strong>le</strong>ine facepeut imaginer à quoi ressemb<strong>le</strong>Assume Crash Position.Ces musiciens tricotent à l’aidede <strong>le</strong>urs likembés (pianos àpouce) é<strong>le</strong>ctrifiés une transeà vous couper <strong>le</strong> souff<strong>le</strong>.Rien n’arrête ce combo de labanlieue de Kinshasa, toujoursemmené par Mawangu Mingiedi,44 ans après sa création.Redoutab<strong>le</strong> machine de paix,<strong>le</strong> son du Konono N°1 a séduit<strong>des</strong> musiciens de tous horizons(Björk, Herbie Hancock, ThomYorke). Plus aérés au point qu’onpuisse presque parfois par<strong>le</strong>r dechansons, <strong>le</strong>s titres de ce nouvelopus n’anesthésient en rien <strong>le</strong>seffets libérateurs de ces musiquesqui combinent puissancehypnotique de la saturation etcomp<strong>le</strong>xité <strong>des</strong> constructionsrythmiques. Essentiel etaccessib<strong>le</strong> !SQ'n°40 Mai/juin 2010


<strong>Mondomix</strong>.comameriques47Abdou Day"Tous Egaux…"(Abdou Day)Sans distribution, mais disponib<strong>le</strong><strong>dans</strong> <strong>le</strong>s principa<strong>le</strong>s FNAC deFrance grâce à l’acharnementde son auteur, Tous Egaux est latroisième autoproduction grifféeAbdou Day (la dernière s’est écouléeà 8000 exemplaires). Originaire deMadagascar et installé à Metz, ceguitariste et chanteur a rappeléTimour Cardenas pour la productionde ce nouvel album enregistréavec la complicité <strong>des</strong> JamaïcainsEarl Chinna Smith, Kiddus I,Tyrone Downie, Dean Fraser,Ronald “Nambo” Robinson,Ineugus et du Malgache Jaojoby.Chanté en français, malgache etanglais, ces 14 titres de reggae auxlyrics conscious et aux accents dubflirtent délicieusement sur certainstitres avec <strong>le</strong> sa<strong>le</strong>gy, un 6/8 malgachetrépidant, ce qui n’est pas la moindrede ses qualités. SQ'AmeriQUEsD.R.The Chieftainsfeaturing Ry Cooder"San Patricio"res <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aime(Universal)Spécialiste de disques « conceptuels», tels <strong>le</strong>s ambitieux et soignésChavez Ravine (2005) ou My Nameis Buddy (2007), et co-producteur ducélèbre Buena Vista Social Club, RyCooder s'est associé cette fois à PaddyMoloney, <strong>le</strong> <strong>le</strong>ader <strong>des</strong> Chieftains. Avec<strong>le</strong> groupe traditionnel irlandais quinquagénaire, l’idée étaitd’évoquer l'histoire <strong>des</strong> Irlandais fuyant la grande famine de1845 et immédiatement enrôlés par l'armée américaine <strong>dans</strong><strong>le</strong> conflit américano-mexicain de 1846/47. Se sentant plusproches <strong>des</strong> Catholiques mexicains, certains désertèrent pourformer <strong>le</strong> bataillon Saint Patrick (« San Patricio » en espagnol),traitres pour <strong>le</strong>s Yankees mais héros toujours célébrés auMexique.Afin de conter en musique cette saga peu connue, Moloney etCooder ont rassemblé une bonne centaine de musiciens <strong>des</strong>trois pays (Irlande, Etats-Unis, Mexique), dont l'enthousiasme,la sincérité et <strong>le</strong> ta<strong>le</strong>nt sont manifestes. Vieux routiers du métissage(en particulier avec la country), <strong>le</strong>s Chieftains mê<strong>le</strong>nt<strong>le</strong>urs vieil<strong>le</strong>s mélodies irlandaises à la musique d'un escadrond'artistes américano-mexicains particulièrement re<strong>le</strong>vé,choisi par Cooder. On y retrouve la chanteuse mexicaineLila Downs, la star country Linda Ronstadt, ou <strong>le</strong>s groupesLos Camperos de Val<strong>le</strong>s et Los Folkloristas. Venus de l'étatde Sinaloa, los Tigres del Norte représentent la tradition <strong>des</strong>chants narratifs corridos, tandis que la harpiste de Vera Cruz,Graciana Silva, apporte <strong>le</strong>s accents cé<strong>le</strong>stes de son instrumentet la mythique chanteuse ranchera Chavela Vargas, 82ans, offre un grandiose Luz de Luna.Le côté « tour musical du Mexique » de ces 19 morceaux estloin d'être désagréab<strong>le</strong>, surtout assorti d'une si intéressante<strong>le</strong>çon d'histoire.Jean Pierre Bruneaun°40 Mai/juin 2010


AmeriQUEs49Joyce & Donato"Aquarius"(Far Out Recordings)Quand Joyce, l’une <strong>des</strong>chanteuses brésiliennes <strong>le</strong>s plusconnues au <strong>monde</strong>, rencontreJoão Donato, l’un <strong>des</strong> pianistes<strong>le</strong>s plus fins de sa génération,cela donne un bon album sanssurprise. Ensemb<strong>le</strong>, ils ne nousservent rien que du très classique,bien sûr parfaitement réalisé, maisqui aurait pu être enregistré <strong>dans</strong><strong>le</strong>s années 70 sans que l’on sentela différence. Les jolies bossas etsambas s’égrènent portées par<strong>le</strong>ur ta<strong>le</strong>nt respectif, du souriantAmor Nas Estrelas au tubeAmazonas, de l’inédit Xango eda Bae, sur <strong>le</strong>quel Joyce partage<strong>le</strong> chant avec <strong>le</strong> pianiste, audélicat Aquarius. Diffici<strong>le</strong> de jugercet album censé être nouveautel<strong>le</strong>ment il ne l’est pas. Pas defaute de goût, mais un disque unpeu plombé par un classicismeronronnant.A.C.Soft"Konfyans"(Aztec Musique/Rue Stendhal)Fred Deshayes, <strong>le</strong> <strong>le</strong>aderchanteur et guitariste de Soft,ne renonce pas aux chansons« poil à gratter » susceptib<strong>le</strong>s defaire débat. Après Krim Kont laGwadloup, <strong>dans</strong> <strong>le</strong> premier disqueKa<strong>dans</strong> a péyi-la (2005), il y aencore <strong>dans</strong> ce troisième albumun titre propice à faire sourire ougrincer <strong>le</strong>s dents, selon que l’onsoit ou non sensib<strong>le</strong> à l’ironie <strong>des</strong>on auteur. Scandées sur un raggacontrastant avec <strong>le</strong> swing soyeuxdu reste de l’album, <strong>le</strong>s paro<strong>le</strong>s -en créo<strong>le</strong> et français - de Revolutionsont tressées de verve caustique(« La Guadeloupe joue unka critique/Des contorsionsidéologiques/Tout <strong>le</strong> <strong>monde</strong>veut changer la société/Ouimais pas trop vite/Oui mais pastout de suite »). La pertinencede ses textes, chantés sur unemusique souriante qui croisejazz et rythmes caribéens(essentiel<strong>le</strong>ment ceux du gwoka),sa décontraction sur scène, font deSoft l’une <strong>des</strong> meil<strong>le</strong>ures choses quisoit arrivée à la scène antillaise cesdernières années. Patrick Labessemusiques et cultures <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeCasuarina"MTV apresenta : Casuarina"(RCA Victor/Sony Music)Dans <strong>le</strong>s méandres du quartierde Lapa (Rio de Janeiro), terred’é<strong>le</strong>ction de Casuarina, la sambarésonne fière et égaye <strong>le</strong>s rues <strong>des</strong>es syncopes, de sa nostalgie,de sa transe. Au firmament d’unenouvel<strong>le</strong> génération, portée par<strong>le</strong>s pas de <strong>dans</strong>e de ses aînés,<strong>le</strong> groupe joue cette traditionvive avec une parfaite maîtrisede ses co<strong>des</strong>, un art de lafougue et de l’irrévérence,qui ressuscite <strong>le</strong>s classiques<strong>dans</strong> <strong>le</strong>ur berceau. Sur unerythmique solide, <strong>le</strong>s cor<strong>des</strong>s’élancent (guitare 7 cor<strong>des</strong>,cavaquinho), ainsi que <strong>le</strong>s vents(flûte, saxophones), pour fairesonner en cou<strong>le</strong>ur ces morceauxtraditionnels, repris en chœurpar <strong>le</strong> public. Enregistré en live<strong>dans</strong> l’un <strong>des</strong> temp<strong>le</strong>s du genre,la Fundição Progresso, l’albumconvie <strong>dans</strong> la roda <strong>le</strong>s maîtreshistoriques, Wilson Moreira etRoberto Silva. Pura energia !Anne-Laure LemancelRaúl Paz"Havanization" (CD/DVD)(Naïve)Après deux années passéessur son î<strong>le</strong> nata<strong>le</strong>, RaúlPaz revient avec un albumenregistré entre La Havaneet Paris, deux vil<strong>le</strong>semblématiques de sesinfluences et de sa fusionmusica<strong>le</strong>. Le Cubain renoueici avec <strong>le</strong>s sonorités de Mulata(2003) et ses cuivres funky,comme en atteste notammentMejor. Malgré quelques balla<strong>des</strong>un peu mol<strong>le</strong>s ayant tendanceà tirer vers la variété, cedisque produit par Seb Marteldélivre de très bons moments,comme Gente, hommage auxhabitants de La Havane, Habanaet surtout Carnaval, sur <strong>le</strong>quelCamil<strong>le</strong> joue <strong>le</strong>s choristes. Uneparticipation à l’initiative de lachanteuse el<strong>le</strong>-même, preuve quela notoriété de Raúl Paz dépasseaujourd’hui <strong>le</strong> seul milieu de laworld music.Carène Verdonn°40 Mai/juin 2010


50<strong>Mondomix</strong>.comTéléchargersur mp3.mondomix.com30705CHOC QUIB TOWN"ORO"(World Connection)musiques et cultures <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeCurrulao, chirímia etaguabajo ? Plus besoin d’êtreethnomusicologue pour s’initier auxrythmes et sonorités traditionnelsde la côte Pacifique colombienne.Une région enclavée, connuecomme la « petite Afrique » deColombie, dont Choc Quib Towns’est fait <strong>le</strong> porte-paro<strong>le</strong>, puisant<strong>dans</strong> son folklore pour produireune fusion musclée de hip-hop,dancehall et de funk-pop latino.Outre son caractère éminemmentfestif, la formu<strong>le</strong> doit son succèsaux messages positifs véhiculéspar la charismatique chanteuseGoyo et <strong>le</strong>s MC Tostao et Slow,qui éping<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>s problèmes sociaux(De Dónde Vengo Yo), ethniques(Oro) et écologiques(Pescao Envenenao) qui,au-delà d’une région (SomosPacifico), touchent <strong>le</strong> pays toutentier. Consacré sur <strong>le</strong> plan nationa<strong>le</strong>t fort bien reçu aux Etats-Unis,Choc Quib Town débarque enEurope avec un disque sous formede best-of de ses deux premièresproductions, avant une tournéeestiva<strong>le</strong> qui sera l’occasion demesurer la formidab<strong>le</strong> énergiecommunicative du trio.Yannis RuelTHE CONGOS"BACK IN THE BLACK ARK"(Mediacom/Musicast)Que reste t-il du mythique studioBlack Ark réduit à néant par soncréateur, Lee Scratch Perry ?Des anecdotes invraisemblab<strong>le</strong>scertes, mais surtout <strong>des</strong> chefsd’œuvres immortels dont Heart OfThe Congos, au fil duquel Perrymenait un trio de jeunes Jamaïcains<strong>dans</strong> de hautes sphères de perfectionvoca<strong>le</strong>. Trois décennies plus tard, <strong>le</strong>smêmes décident de remettre de laganja <strong>dans</strong> <strong>le</strong> chalice en ressuscitantl’âme du studio perdu. Conservée<strong>dans</strong> son écrin d’origine, la magie<strong>des</strong> harmonies voca<strong>le</strong>s emmenéespar l’incroyab<strong>le</strong> falsetto de CedricMyron semb<strong>le</strong> inaltérée. Ceséternels jeunes hommes emportent<strong>dans</strong> <strong>le</strong>ur périp<strong>le</strong> <strong>des</strong> pointures deKingston (Horsemouth Wallace ouBoris Gardiner) tout en laissant à LeeScratch, <strong>le</strong>ur mentor, la primeur dequelques saillies au micro. Moinsà l’aise avec <strong>le</strong>s sons plus actuels,<strong>le</strong>s Congos n’en restent pas moinsun ardent fourneau à reggae roots,capab<strong>le</strong> d’augmenter <strong>le</strong> tirage pourfaire rugir à p<strong>le</strong>ins poumons <strong>le</strong> Lionde Judée.Franck CochonTFT"Terça Feira Trio"Buda Musique)Téléchargersur mp3.mondomix.com30983Un mardi (« terça feira ») parisien,Sergio Krakowski, FernandoCavaco et Ricardo Hertz décidentde croiser <strong>le</strong>ur virtuosité – unpandeiro arithmétique, uncavaquinho espièg<strong>le</strong>, un violonaudacieux – pour revisiter <strong>le</strong>patrimoine brésilien du choro.Des monuments de Pixinguinhaaux créations de Mayra Andrade,<strong>le</strong>s trois solistes gambadenten liberté sur <strong>le</strong>s gammesd’infinies nuances, repoussent<strong>le</strong>s frontières stylistiques poursavourer <strong>le</strong>urs jeux, explorent<strong>des</strong> contrées (dé)concertantes,contrepoints et arythmies hardies,<strong>dans</strong> <strong>le</strong>squels s’immiscent <strong>le</strong>sguests, Vincent Segal, SteveShehan, David Linx... Avec<strong>le</strong>ur son roots, acoustique, ilsrevigorent, repeignent de <strong>le</strong>urmusicalité <strong>le</strong>s paysages convenus,pour laisser libre cœur à <strong>le</strong>urliberté. Un beau premier disque.All.PABLO MOSES"THE REBIRTH"(Grounded Music/Socadisc)Quinze ans de si<strong>le</strong>ncediscographique, un délai qui peutvirer à la chute <strong>dans</strong> l’oubli total sil’on n’y prend pas garde. C’est <strong>le</strong>temps qu’aura attendu Pablo Mosesavant de redonner signe d’albumstudio. De quoi figno<strong>le</strong>r <strong>le</strong> travail àl’extrême ? Pas du tout. Terminésdepuis longtemps, la plupart<strong>des</strong> morceaux attendaientpatiemment <strong>le</strong>ur heure <strong>dans</strong><strong>le</strong>s cartons. Et el<strong>le</strong> est venue.Qu’avait donc Pablo en magasin ?L’essence même de l’album conformeau cahier <strong>des</strong> charges du reggaeroots : <strong>des</strong> textes axés sur <strong>le</strong>s gran<strong>des</strong>lignes directrices du genre (justicesocia<strong>le</strong>, conscience noire, rejet de lavio<strong>le</strong>nce et une dose d’amour aussiquand même !) et une interprétationmariant finesse et détermination.Arrosé de la louche de mysticismenécessaire et mis en musique avecjuste ce qu’il faut de sophisticationsynthétique, The Rebirth sonne <strong>le</strong>retour d’une pointure jamaïcaine pourqui chaque disque est une croisade.Une croisade sincère.F.C.n°40 Mai/juin 2010


Asie/Moyen-orient51D.R.res <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeVishwa Mohan Bhatt& Matt Mal<strong>le</strong>y"S<strong>le</strong>ep<strong>le</strong>ss Nights"(World Village/Harmonia Mundi)Musicien et luthier né à Jaipur(Rajasthan), Vishwa Mohan Bhattest un aventurier à qui l’on doitl’invention de la mohan vînâ. Guitareclassique européenne à laquel<strong>le</strong> ila ajouté <strong>des</strong> cor<strong>des</strong> sympathiqueset <strong>des</strong> bourdons, cet instrument hybridetrouve tout à fait sa place <strong>dans</strong> l’instrumentarium hindoustani.Aventurier, V.M. Bhatt l’est aussi par ses multip<strong>le</strong>scollaborations. A l’automne 92, il enregistra avec Ry Cooder<strong>le</strong> délicieux A Meeting by the River, un opus pour <strong>le</strong>quel <strong>le</strong>duo reçut un Grammy Award. Plus tard, il collabora avec <strong>le</strong>sguitaristes Taj Mahal, Jerry Douglas, <strong>le</strong> joueur de banjo BélaF<strong>le</strong>ck ou <strong>le</strong> oudiste Simon Shaheen. Cet ancien élève de RaviShankar est depuis <strong>des</strong> années un « pandit », un maître respectéet admiré. C’est d’ail<strong>le</strong>urs avec Matt Mal<strong>le</strong>y, l'un de sesélèves, que V.M. Bhatt a enregistré <strong>dans</strong> <strong>le</strong> studio de son discip<strong>le</strong>,il y a une paire d’années, ce nouvel album.Bassiste du groupe californien Counting Crows jusqu’en2004, Matt Mal<strong>le</strong>y est un féru de yoga qui, au contact deBhatt, fait preuve d’humilité, laissant à ce dernier toute la placeque requiert son art. Il ne se pose jamais en égal du maîtreà la différence <strong>des</strong> invités <strong>des</strong> précédents opus du musicienindien. Le fait que l'instrument de Mal<strong>le</strong>y dialogue davantageavec Subhen Chatterjee, <strong>le</strong> percussionniste, qu'il ne tricotede fines mélodies, nuance quelque peu l’idée de rencontretel<strong>le</strong> que l’a formulée V.M. Bhatt sur ses précédents opus.Quand il abandonne <strong>le</strong>s quatre cor<strong>des</strong> de sa basse pour <strong>le</strong>stouches noires et blanches de ses claviers, Matt Mal<strong>le</strong>y entrealors en parfaite concordance avec <strong>le</strong>s envolées cé<strong>le</strong>stes dujoueur de mohan vînâ et de son tabliste, irriguant enfin la tramemusical de cet album de ses propres fils colorés. Passé<strong>le</strong> dispensab<strong>le</strong> Rainbow in my Heart, qui ouvre cet album,laissez-vous enivrer par ces six longues plages, par ces nuitssans sommeil dont on sort miracu<strong>le</strong>usement ragaillardi !SQ'Ibrahim Keivo"Chants de la Djezireh"(Ministry of Sound)Téléchargersur mp3.mondomix.com30571La col<strong>le</strong>ction Inédit continue sonincroyab<strong>le</strong> travail de défense <strong>des</strong>traditions musica<strong>le</strong>s menacées<strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>. Ce nouvel actemilitant nous emmène en Syrie,<strong>dans</strong> la région de la Djezireh oùTéléchargersur mp3.mondomix.com30172Arabes, Arméniens, Assyriens,Chaldéens, Kur<strong>des</strong>, Syriaques etYezidi cohabitent depuis <strong>des</strong> milliersd’années. Et c’est aux côtésd’Ibrahim Keivo, barde d’originearménienne, que l’on part enpromenade avec, sous <strong>le</strong> bras, unbuzuq, un baglama, un jumbushet un oud (luths indispensab<strong>le</strong>s àl’expression de chacune de cestraditions). Sa voix virevolte quel quesoit <strong>le</strong> répertoire, invoquant en seizechants <strong>le</strong>s esprits de civilisationslumineuses et millénaires. Plusqu’un simp<strong>le</strong> disque, ce documenttémoigne de la diversité culturel<strong>le</strong> decette région du <strong>monde</strong>. A.C.n°40 Mai/juin 2010


52<strong>Mondomix</strong>.comres <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeMusique du Monde:Nouvel<strong>le</strong>-Calédonie, Voix <strong>des</strong>Rivages et <strong>des</strong> Montagnes(Buda Records/Universal)Fruit d’un col<strong>le</strong>ctage réalisé parFrançoise Degeorges et Char<strong>le</strong>s LeGargasson (France Musique) surcette î<strong>le</strong> longiligne du Pacifique, cenouveau volume de la col<strong>le</strong>ctionMusiques du Monde donneà entendre - in situ <strong>dans</strong> lamajorité <strong>des</strong> enregistrements -<strong>le</strong>s survivances <strong>des</strong> traditionsmusica<strong>le</strong>s <strong>des</strong> Kanaks, une <strong>des</strong>branches du peup<strong>le</strong> mélanésien.Véritab<strong>le</strong>s marqueurs sociaux, cesmusiques, ainsi que <strong>le</strong>s <strong>dans</strong>es,costumes et maquillages qui y sontliés, définissent l’appartenance àun clan, l’unité de base socia<strong>le</strong> etspatia<strong>le</strong> de la société kanak. Inspiréespar la nature (rumeur de la mer,bruissement <strong>des</strong> feuil<strong>le</strong>s…) et trèssouvent coutumières, el<strong>le</strong>s relatentaussi <strong>des</strong> faits historiques, rendanthommage au passage aux militantsindépendantistes disparus. SQ'res <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeOnEira 6tet"Si La Mar"(Helico)Imaginé entre Marseil<strong>le</strong> et Athènes,<strong>le</strong> projet initié par <strong>le</strong> percussionnisteBijan Chemirani rassemb<strong>le</strong> <strong>des</strong>musiciens grecs, occitans, françaisde souche ou d’origine iranienne,et n’aurait sans doute pas pu naîtreail<strong>le</strong>urs qu’en Europe. Mais ce qui estdécrit s’avère un continent plus ouvert que celui existant :la Provence caresse <strong>le</strong>s î<strong>le</strong>s grecques et libère l'Iran de cequi comprime <strong>le</strong> souff<strong>le</strong> libertaire de sa poésie. Oneira est unrêve de mers et de terres qui envoute sans nous perdre. C’estune épopée au sein d’une civilisation où tradition et moderniténe s’affrontent plus en un combat mortel et stéri<strong>le</strong>, maisfusionnent pour créer une musique boisée et liquide, agi<strong>le</strong> etmultidirectionnel<strong>le</strong>.Autour <strong>des</strong> voix <strong>des</strong> chanteuses Maryam Chemirani et MariaSimoglou, Bijan, tiers du trio familial Chemirani et musicienrecherché (Sting, Serge Teyssot-Gay, Juan Carmona) a réuni<strong>des</strong> amis experts en projets musicaux ambitieux. Le flûtisteney Harris Lambrakis est l’arrangeur de la chanteuse SavinaYannatou, <strong>le</strong> guitariste et joueur de zarb Kevin Seddiki a officiéauprès du bandonéoniste Dino Saluzzi ou du guitaristeAl Di Meola, <strong>le</strong> joueur de viel<strong>le</strong> Pierlo Bertolino fut <strong>le</strong> pilier dumythique groupe marseillais Dupain et accompagne <strong>le</strong> prometteurslameur originaire <strong>des</strong> Comores Ahamada Smis.Loin d’être l’argument principal de cette réunion, la virtuositéde l’ensemb<strong>le</strong> se plie en quatre pour laisser la musique respireret <strong>des</strong>siner de nouvel<strong>le</strong>s cartes de navigation. Fondés sur<strong>des</strong> airs et poèmes traditionnels perses ou helléniques et <strong>des</strong>compositions origina<strong>le</strong>s, Si La Mar célèbre l’union libre de cesextet d’amis et accueil<strong>le</strong> d’autres fortunés compagnons. Lesaxophoniste latino jazz Gil<strong>le</strong>s Grivolla joue <strong>le</strong> contrepoint dufulgurant chanteur occitan Sam Karpienia sur Hypnoviell<strong>le</strong>, et,ensemb<strong>le</strong> ou séparément, un trio de grecs et crétois raffinés(Stelios Petrakis et Socrates Sinopoulos aux cor<strong>des</strong> frottéeset pincées et Yiorgos Makris à la cornemuse gaida) apportentet partagent, eux aussi, <strong>le</strong>urs sciences du voyage.Roulis et mélancolie, vents favorab<strong>le</strong>s et euphorie, <strong>le</strong> sentimentmarin domine et <strong>le</strong>s embruns sculptent <strong>des</strong> paysages àla fois étranges et familiers.Benjamin MiNiMuMn°40 Mai/juin 2010


EUROPE53musiques et cultures <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeVicente, Paloma& Rafael Pradal"Herencia" (CD/DVD)(Accords Croisés/Harmonia Mundi)Herencia signifie héritage :celui qu’a reçu <strong>le</strong> ToulousainVicente Pradal, fils d’immigrésespagnols, à l’enfance abreuvéede mots de poètes (Lorca, Borges,Hernandez...). Héritage, aussi,du flamenco, art comp<strong>le</strong>xe, libre,sauvage. Vicente, orfèvre de notespour mots, ta<strong>le</strong>ntueux chanteurguitariste,transmet ces va<strong>le</strong>urs,cette science à ses enfants. Sur<strong>le</strong> sol flamenco et sur <strong>le</strong>s plus bel<strong>le</strong>spages de la poésie en espagnol,sa musique « clanique », « triba<strong>le</strong> »,s’éclaire de la voix aux mil<strong>le</strong> nuancesde sa fil<strong>le</strong> Paloma (17 ans), qu’épouseson propre chant, comme du swinghardi du pianiste Rafael Pradal (20ans). Un art qui suscite la symbioseet la complicité (révélée par <strong>le</strong>simages du concert au Triton), au gréd’apparitions tendres du « duende »familial.All.Davaï"Choum i Tararam"(La Grosse Lulu/Absilone)Un banjo, un violon, une percu, etc’est parti ! Mélange de compositionset de reprises réarrangées, <strong>le</strong> premieropus de Davaï retrace avec justesse<strong>le</strong>s différents aspects d’une traditionrusse et tzigane <strong>dans</strong> laquel<strong>le</strong> lachanteuse Svetlana Loukine trouveses origines. Pour raviver cescou<strong>le</strong>urs d’une teinte é<strong>le</strong>ctrique,<strong>le</strong> groupe a choisi de manier <strong>le</strong>stechniques instrumenta<strong>le</strong>s issuesaussi bien du jazz manouche quedu rock. Histoires de marin, politique,swing, pou<strong>le</strong>s et badauds… tout sechevauche au rythme d’un cheval augalop. Comme un gamin espièg<strong>le</strong> quivoit une troupe passer et la talonne deprès, on suit <strong>le</strong>s musiciens de Davaïsur <strong>le</strong>s routes d’Europe de l’Est avecune curiosité malicieuse au coin <strong>des</strong>lèvres. Invitation au voyage et joie devivre communicative assurées !Nadia AciTéléchargersur mp3.mondomix.com29803musiques et cultures <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeZiveli"La Peau de l’Ours"(ZN Production/L’Autre Distribution)Fanfare dont <strong>le</strong> nom signifie « à lavie », Ziveli réunit huit musiciensd’ici plus Suzana Djordjevic, unechanteuse serbe croisée sur <strong>le</strong> pavéberlinois. L'ensemb<strong>le</strong> a su prendreson temps avant de chercher àvendre sa Peau de l’Ours. Désormaissûrs de <strong>le</strong>urs faits après 3 annéesde concerts « tout terrain »,cette formation s’inscrit <strong>dans</strong> lagrande tradition <strong>des</strong> orchestresbalkaniques de mariage. El<strong>le</strong>emprunte <strong>le</strong> répertoire de sonpremier album aux airs traditionnelsserbes, aux compositions de l’illustreSaban Bajramovic (Kerta MangeDaje), ou de son collègue DejanPejovic (Suknjica), quand el<strong>le</strong> nebalkanise pas Les Amoureux <strong>des</strong>Bancs Publics de Brassens ouTombe la Neige d’Adamo. L’ours estbien mort, il est donc temps pourvous d’en acheter la peau.SQ'Rodrigo Leão &Cinema Ensemb<strong>le</strong>"A Mãe"(Difference/PIAS)Pilier de la scène musica<strong>le</strong> lisboète,Rodrigo Leão fonda au début<strong>des</strong> années 80 Sétima Legião,avant d’exploser aux claviers deMadradeus. En solo depuis 93,il nourrit ses orchestrations demélancolies douces-amères oùpointe naturel<strong>le</strong>ment la saudadedu fado.Rodrigo, qui ne manque pas decœur, dédie A Mãe à sa mèrepartie il y a un peu plus d’un an.Si la tristesse transperce ces 18plages enregistrées avec <strong>le</strong> CinémaEnsemb<strong>le</strong>, un imposant orchestreoù résonnent cor<strong>des</strong>, bois et cuivres,el<strong>le</strong> n’assombrit en rien <strong>le</strong> lumineuxpropos du musicien, propos quesubliment <strong>le</strong>s voix d’Ana Veira, NeilHannon (Divine Comedy), StuartStap<strong>le</strong>s (Tindersticks) et cel<strong>le</strong> deDaniel Melingo, <strong>le</strong> fanfaron du tango<strong>des</strong> faubourgs. Laissez-vous envahirpar Leão ! SQ'Téléchargersur mp3.mondomix.com30400n°40 Mai/juin 2010


Publi-rédactionnelLe coup de cœur de laFnac Forum...54EUROPEKolo BarstBidim Grace(JV Production)Kolo Barst a su donner une dimension historique à sa musique,en rappelant dès son premier album Lot Bo So <strong>le</strong>s souffrancesdu peup<strong>le</strong> martiniquais. Cette volonté d’éveil<strong>le</strong>r <strong>le</strong>sconsciences est <strong>le</strong> moyen <strong>le</strong> plus efficace pour Kolo Barst dedéfendre <strong>le</strong>s plus faib<strong>le</strong>s. Son souhait d'union <strong>des</strong> peup<strong>le</strong>s estune façon pour lui d'affirmer un humanisme qu'il développetous <strong>le</strong>s jours, en étant proche <strong>des</strong> gens. Infirmier et musicien,Kolo Barst soigne <strong>le</strong>s maux du corps comme ceux de l'esprit.A travers sa musique, il étonne, émeut et perpétue <strong>le</strong>s racinesde la culture afro-antillaise (Bélé, Mazurka). Musicien guitariste,grand défenseur <strong>des</strong> Libertés, Kolo présente sur ce deuxièmealbum une musique suave et troubadour, en résonance avec<strong>des</strong> faits d'actualité, pour notre plus grand plaisir.Joel SaxemardLa Fnac Forum et <strong>Mondomix</strong> aiment...La Caravane Passe"Ahora in da Futur"(Black Eye/Makasound)De vrais-faux mariagesen concerts plus « tradi », cesmusiciens originaires de P<strong>le</strong>chti(un village imaginaire <strong>des</strong> Balkans)ont joué à saute-mouton avec <strong>le</strong>sfrontières, se produisant depuisune décennie <strong>dans</strong> toute l’Europe.Sur ce troisième opus, ils défient<strong>le</strong> temps, projetant l’instantprésent <strong>dans</strong> <strong>le</strong> futur comme <strong>le</strong>dit si bien <strong>le</strong> titre <strong>dans</strong> un mélanged’espagnol et d’anglais. Leurtemps est celui de la fête, même<strong>dans</strong> <strong>le</strong>s pires moments. Quantà <strong>le</strong>ur <strong>monde</strong>, il est ouvert. Ony chante en français, anglais,serbe, espagnol, romani,al<strong>le</strong>mand et l’on y croise enhabits de guests, p<strong>le</strong>in de<strong>monde</strong>, et du beau : RachidTaha, R.Wan, Erika Serre, MarkoMarkovic, la fanfare Ziveli. Quandla caravane passe en studio, <strong>le</strong>schiens se taisent ! Respect !SQ'Téléchargersur mp3.mondomix.com30973Altan"25th AnniversaryCe<strong>le</strong>bration"(Naïade Productions)Après 25 ans de présenceinternationa<strong>le</strong> et une productiondiscographique majeure, quel<strong>le</strong>formation irlandaise pouvaitplus légitimement s’essayer àl’accompagnement symphonique ?Le temps d’un disque anniversaire,Altan invite l’orchestre de latélévision irlandaise pour unesession très aimab<strong>le</strong> autour <strong>des</strong>es standards. Sur <strong>le</strong>s balla<strong>des</strong>,en anglais et gaélique, lavoix radieuse de Mairéad NìMhaonaigh s’offre un écrindiscret de cor<strong>des</strong>. Sur <strong>le</strong>s airs de<strong>dans</strong>es, si certaines interventionsorchestra<strong>le</strong>s rappel<strong>le</strong>nt avecbonheur <strong>le</strong> son <strong>des</strong> Céilí Band,d’autres sont un peu plusampoulées et transforment <strong>le</strong>sdernières mesures de reels (<strong>dans</strong>etraditionnel<strong>le</strong>, NDLR) en codasd’al<strong>le</strong>gros romantiques. Tout dulong, même s’il passe parfoisproche de l’iceberg de la new ageceltisante, Altan tient la barre.Go maire tú an lá !Mathieu RosatiBuenos Aires"Une Nuit de Tango"(Accord Croisés) CD/DVDRodrigo LeãoA Mãe Dist(Difference/Pias)et aussi :n Oneira Si La Mar (Helico / Abeil<strong>le</strong> Musique)TalilaMon Yiddish Blues(Naive)Kamilya JubranWanabni(Harmonia Mundi)n Jacky Molard Quartet & Foune Diarra Trio N’Dia<strong>le</strong> (Innacor/HM)n El Hijo de la cumbia Freesty<strong>le</strong> de Ritmos (Ya Basta!)B<strong>le</strong>u So<strong>le</strong>il"Chansons Yiddish, ChansonsTziganes de Hongrie"(Au fil de l’Air/L’Autre Distribution)Démarche pédagogique etartistique proposée par <strong>le</strong> FestivalLes Temps Chauds, B<strong>le</strong>u So<strong>le</strong>ils’inscrit <strong>dans</strong> une col<strong>le</strong>ctionqui donne à partager auxenfants <strong>des</strong> éco<strong>le</strong>s de Bourgen-Bresse,la richesse <strong>des</strong>musiques du <strong>monde</strong> avecla complicité d’artistes depremier plan. Sur ce nouveauvolume, direction l’Europe de l’Estpour découvrir un répertoire dechansons yiddish ou tziganes deHongrie interprété par <strong>le</strong>s chœursd’enfants de l’Ain, <strong>le</strong> Dock <strong>des</strong>Mômes, Talila et <strong>le</strong> Teddy Lasry Trioet <strong>le</strong>s ensemb<strong>le</strong>s Sentimento etJag Virag. Travaillées sur toute uneannée, ces chansons trouvent unnouvel équilibre sur <strong>le</strong> fil de la voix<strong>des</strong> enfants, <strong>des</strong> voix qui rendentréel<strong>le</strong>ment hommage à la musiqueen en soulignant <strong>le</strong> caractèreuniversel.SQ'Darko Rundek& Cargo Orkestar"Live in Youth Club Belgrade"(Menart/Piranha/L’Autre Distribution)Il y a du Christophe, du Arno,du Goran Bregovic et du TomWaits chez Darko Rundek.Avant la guerre en ex-Yougoslavie,Darko était <strong>le</strong> <strong>le</strong>ader d’Haustor,un groupe rock qui faisaitfureur à Belgrade. C’est <strong>dans</strong>cette vil<strong>le</strong>, devenue capita<strong>le</strong>serbe, que cet exilé à Paris estrevenu <strong>le</strong> 24 mars 2007 pourun concert qui ne manque pasde ferveur, comme en témoignecet enregistrement. Reprenantavec son Cargo Orkestar,une formation cosmopolite,quelques adaptations de sessuccès d’antan et <strong>des</strong> piècesplus récentes issues de quatrealbums solo, Darko prouve quel’ouverture sur <strong>le</strong> <strong>monde</strong> est unevraie richesse dont on aurait tortde se passer.SQ'MONDOMIXCOMmusiques et cultures <strong>dans</strong> <strong>le</strong> mondn°40 Mai/juin 2010


6 éme continent55Jacky Molard Quartet& FounÉ Diarra Trio"N’Dia<strong>le</strong>"(Innacor)res <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeLe pays Wassoulou surgit du kame<strong>le</strong>n’goni. Allié au carignan, petit grattoirde métal, on dit qu’il est comme la puce qui ne te laissepas dormir, parce qu’il te fait <strong>le</strong>ver pour t’en al<strong>le</strong>r <strong>dans</strong>er.Le violon, lui, caresse l’harmonie, la bichonne, la ronronne,lui tourne un air de gigue ou de <strong>dans</strong>e bretonne. La voix deFouné Diarra évoque <strong>le</strong>s éclats de Nahawa Doumbia, pendantque l’accordéon diatonique s’essaye au pentatonique.On est où là ? Quelque part entre la Pointe du Raz etYanfolila… Dans l’univers imaginaire d’une rencontre rare.Déjà rompu aux airs d’Irlande et à la transe balkanique,Jacky Molard, l’un <strong>des</strong> plus ta<strong>le</strong>ntueux violons bretons,aime <strong>le</strong>s chal<strong>le</strong>nges. Ses doigts agi<strong>le</strong>s et son archet précisrappel<strong>le</strong>nt ici qu’il sait toujours conduire <strong>le</strong>s ron<strong>des</strong> defestou noz jusqu’au pur bonheur. Son long compagnonnageavec Erik Marchand a abouti à la fondation du label Innacor.Il en est la chevil<strong>le</strong> artistique, libre de donner à ses créationstoute <strong>le</strong>ur démesure, sans autre concession que cel<strong>le</strong> qu’ilnégocie avec lui-même.Si alléchante qu’el<strong>le</strong> soit, la proposition faite par Africolor <strong>des</strong>e frotter à la musique malienne est une fameuse gageure.Alors qu’il vient de réussir à agréger <strong>le</strong>s identités musica<strong>le</strong>spour un quartet de rêve, alliant la singularité du jazz à la forcede la <strong>dans</strong>e, convient-il de mettre cet équilibre fragi<strong>le</strong> endanger ? Jacky Molard en prend <strong>le</strong> risque et <strong>le</strong> résultat est àla hauteur de l’enjeu. Car si <strong>le</strong>s co<strong>des</strong> européens <strong>des</strong> musiquespopulaires relèvent tous d’une parenté plus ou moinséloignée, l’univers <strong>des</strong> musiques africaines est une sourceintense aux infinis secrets. Dès que l’on passe à la pratique,<strong>le</strong> plaisir de l’écoute se heurte à <strong>des</strong> systèmes de penséedont <strong>le</strong> différentiel est à l’aune de l’écart entre civilisations.En Afrique, la musique est la mémoire du temps. Mais <strong>le</strong>temps n’y est pas une ligne droite en travers de l’espace.« Rendez-vous à la coda », connaît pas ! Le présent <strong>des</strong>ancêtres est celui d’aujourd’hui et la seu<strong>le</strong> certitude du futurest de rejoindre <strong>le</strong>s ancêtres pour vivre <strong>le</strong> présent. Il fallaitreplonger <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s légen<strong>des</strong> celtiques de l’Ankou pour saisirla subtilité <strong>des</strong> rythmes wassoulou. Y accéder demandaitéga<strong>le</strong>ment la force de l’esprit de famil<strong>le</strong>, sans laquel<strong>le</strong> toutepénétration au sein de la « roue rythmique » africaine, commedit Ray Lema, est vaine. Ainsi <strong>le</strong> 4 et <strong>le</strong> 3 se sont fondusen 7, nous offrant une fusion onctueuse, p<strong>le</strong>ine <strong>des</strong> saveursde timbres acoustiques aux effluves exquis. Parfaitementréussi !François BensignorTéléchargersur mp3.mondomix.com30394n°40 Mai/juin 2010


566 éme continentmusiques et cultures <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeHadouk Trio"Air Hadouk"(Naïve)Aux comman<strong>des</strong> du vaisseauHadouk, Loy Ehrlich, DidierMalherbe et Steve Shehan nouspilotent vers <strong>le</strong>s <strong>des</strong>tinationsde rêves intérieurs et d’ail<strong>le</strong>urs.Leur musique assouvit <strong>le</strong>sdésirs de villégiature. Toujoursplus fin, plus riche en sonoritésnouvel<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>ur univers se distendà loisir <strong>dans</strong> la profondeur decette galaxie musica<strong>le</strong> qu’ilsinventent en ron<strong>des</strong> exploratoires.Le son s’y fait lumière. Despoussières de jazz s’agrègentaux particu<strong>le</strong>s élémentaires delangues musica<strong>le</strong>s inusitées.Dans ce voyage aléatoire entreize étapes soniques surgissent<strong>des</strong> harmonies de khen (orgue àbouche), <strong>des</strong> carillons de hangs(<strong>le</strong>s percussions qui chantent),<strong>des</strong> tremplins de gumbass(esprits <strong>des</strong> Bambara en jeu deprécision)… Ouvrez <strong>le</strong> flux etlaissez-vous porter : la musiquedu Hadouk chevauche la magie !F.B.Baco Hiriz Band"Kinky Station"(MVS/Anticraft)Ce musicien comorien habitantParis depuis <strong>des</strong> lustres,pratique un reggae urbaintrilingue, débonnaire et cultivé.En anglais, il évoque Mar<strong>le</strong>y, enfrançais, il invoque Gainsbourget Artaud, guest vocal souscontrô<strong>le</strong> patrimonial sur Art O,et en mahorais il représentebrillamment son î<strong>le</strong>. Alors que <strong>le</strong>Hiriz Band assure une chaloupeefficace aux rassurants arômesroots, il brosse, non sans ironie,<strong>des</strong> saynètes vues <strong>dans</strong> <strong>le</strong> métro(Kinky Station), entendues <strong>dans</strong><strong>le</strong>s bars (Ange ou Démone) oudépeint <strong>des</strong> émotions ressentiesdevant un écran (Mon Nom EstPersonne). Moins harangueurque la moyenne <strong>des</strong> reggaemenafricains, Baco est davantageporté sur la philosophie du bonsens : « Quand tombe la pluie, el<strong>le</strong>ne tombe pas que sur un seul toit», ou « Tout <strong>le</strong> <strong>monde</strong> a besoin detout <strong>le</strong> <strong>monde</strong> ». Sans prétendreà la révolution, Baco propose uncocktail qui se joue <strong>des</strong> clichéspour emmener l’auditeur vers <strong>des</strong>terrains rares.B.M.musiques et cultures <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeCibel<strong>le</strong>"Las Venus ResortPalace Hotel"(Crammed Discs/Wagram)Exilée volontaire <strong>dans</strong> <strong>le</strong>sbrumes londoniennes, la bel<strong>le</strong>Cibel<strong>le</strong> semb<strong>le</strong> faire vo<strong>le</strong>r enéclats <strong>le</strong>s arcanes <strong>des</strong> musiquesbrésiliennes pour s’immerger<strong>dans</strong> un univers musical fééricofolko-exotico-kitschtout à faitpersonnel. Accueillante, à lafaçon d’une meneuse de revue,Cibel<strong>le</strong> nous invite à la visite<strong>des</strong> 14 suites de son palace, <strong>le</strong>dernier resté debout après la findu <strong>monde</strong>. Ambiances forcémentétranges aux contours flous,divers mais toujours assumés,<strong>le</strong>s compos et reprises (<strong>le</strong> JamesBondien Mango Tree d’UrsulaAndress, <strong>le</strong> Lightworks du déluréRaymond Scott et <strong>le</strong> It’s Not EasyBeing Green popularisé à toutjamais par Kermitt du MuppetShow) affirment un refus <strong>des</strong>conventions. Cibel<strong>le</strong> est libre etrelibre, c’est sa rebel<strong>le</strong> attitudeà el<strong>le</strong> !SQ'Zap Mama"ReCreation"(Heads Up)Depuis la sortie d'Ancestry inProgress, l’entité Zap Mama,emmenée par Marie Daulne, a prisun virage Nu Soul au son peut-êtreplus formaté. Avec ReCreation, lacharismatique chanteuse livre unalbum inégal. On note avec plaisir<strong>le</strong> retour <strong>des</strong> anciennes, SylvieNawasadio et Sabine Kabongo,sur un Singing Sisters rappelant <strong>le</strong>sracines voca<strong>le</strong>s du groupe. On croisequelques invités prestigieux commeBilal, sur <strong>le</strong> joli duo The Way You Are,suivi d’une reprise dégoulinante deParo<strong>le</strong>s, Paro<strong>le</strong>s avec un VincentCassel susurrant en portugais. TonyAl<strong>le</strong>n et Meshell Ndegeocello passentaussi donner une petite <strong>le</strong>çon degroove sur African Diamond. Cetalbum ne laisse pas un souvenirimpérissab<strong>le</strong>, mais quelques mélodiespersistent agréab<strong>le</strong>ment.A.C.n°40 Mai/juin 2010


57Téléchargersur mp3.mondomix.com30086Gaudi"No Prisoners"(Six Degrees Records/Universal)Musicien italien installé à Londresdepuis une quinzaine d’années,Gaudi impose au fil d’uneproduction pléthorique initiée audébut <strong>des</strong> eighties, un son à lacroisée du reggae (du dub auragga) et <strong>des</strong> musiques du <strong>monde</strong>.Trois ans après Dub Qawwaliconsacré à ses remixes de NusratFateh Ali Khan, il revient avec NoPrisoners, un opus au tempoexplicite sur <strong>le</strong>quel featurent aumic Michael Franti, Dr Israël,Kenny Knots, Bunny Wai<strong>le</strong>rs…ainsi qu’une flopée de musiciens(Jef Stott au oud, Lorne Cousinà la cornemuse, Dub Gabriel auxprogrammations). Ces 11 titresqui marquent un tournant <strong>dans</strong>la carrière de ce producteur,délaissent avec plus ou moins debonheur la soup<strong>le</strong>sse féline duriddim pour l’arrogance rentrede<strong>dans</strong>du breakbeat. A découvrir !SQ'Groove Lélé& Ernst Reijseger"Zembrocal Musical"(Winter & Winter)La nouvel<strong>le</strong> rencontre du labelWinter & Winter réunit GrooveLélé, groupe formé par <strong>le</strong>s héritiersdu mythe réunionnais GranmounLélé, et Ernst Reijseger, violonistehollandais qui n’en est pas à soncoup d’essai <strong>dans</strong> <strong>le</strong> domaine<strong>des</strong> mariages multiculturels. C’estdonc après <strong>des</strong> expériencesmusica<strong>le</strong>s au Sénégal et enSardaigne que ce dernier estvenu se frotter au maloya <strong>des</strong>esclaves de l’Océan Indien.Enregistré lors du festival Hautsde Garonne 2009, cet albumoffre une ornementation singulièreaux chants traditionnels de l’î<strong>le</strong>.Ernst Reijseger écoute la musiquede Groove Lélé plus qu’il ne latransforme. Secondé par la voix duchanteur sénégalais Mola Sylla, ilne dénature en rien la puissancerythmique et évocatrice del’ensemb<strong>le</strong>. Excel<strong>le</strong>nt.A.C.res <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeres <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>Shashird Lao"Open The Box"(Le Chant du Monde/Harmonia Mundi)Trio azuréen donc forcémentun peu attaché à la note b<strong>le</strong>ue,Sashird Lao scate à tous <strong>le</strong>sétages de ce troisième opus.Méditerranéen, ce trio a enfermé<strong>dans</strong> sa boîte une bel<strong>le</strong> dizaine detitres inspirés par <strong>le</strong>s musiquesdu <strong>monde</strong>, <strong>le</strong> jazz et <strong>le</strong>s musiquesactuel<strong>le</strong>s, loopers à l’appui.Ça chante, ça beat-vox, çarappe même parfois, quand çane dérape pas par plaisir d’unsty<strong>le</strong> à l’autre. Magnifiquementcontrôlée, la trame musica<strong>le</strong>résonne du son <strong>des</strong> percusen terre, <strong>des</strong> cuivres ou d’uneflûte, laissant toute sa placeaux voix. Illustré de nombreusesphotos prises en Ethiopie, àMadagascar, en Australie, auBrésil, en Ouganda, par Fred,David et Yona, nos trois musictrotters,cet album bonne humeurest à humer sans fin.SQ'Téléchargersur mp3.mondomix.com30667Amparo Sanchez"Tucson-Habana"(Pias)MONDOMIXM'aimeAprès avoir incarné, 15 ansdurant, la voix du comboska-reggae-rock madrilèneAmparanoïa, cofondé avecManu Chao, la trucu<strong>le</strong>nte AmparoSanchez explore de sa voixsuave <strong>des</strong> terres solitaires.Seu<strong>le</strong> ? Non. Pour son périp<strong>le</strong>l’âme ouverte, el<strong>le</strong> s’entoure dugroupe US Ca<strong>le</strong>xico, qui colorede ses envolées mariachi, ladouceur intime d’une punkamoureuse ; quand <strong>le</strong>s méandresde son chant se mê<strong>le</strong>nt, sur untitre, à ceux précieux d’OmaraPortuondo. Enregistré entre<strong>le</strong> désert de l’Arizona et <strong>le</strong>smythiques studios EGREM de laHavane, ce premier disque grooveléger, mélancolique, intime, entregran<strong>des</strong> fresques américaineset chaloupes salsa, doué d’unvrai sens <strong>des</strong> mélodies et dela cou<strong>le</strong>ur. Une échappée bel<strong>le</strong>p<strong>le</strong>ine de promesses.All.n°40 Mai/juin 2010


586 éme continentMo<strong>le</strong>cu<strong>le</strong>" Besi<strong>des</strong>"(Underdog-La Ba<strong>le</strong>ine)Ukulélé Club de Paris"Manuia ! "(Frémeaux & Associés/Socadisc)« En outre »… « En plus »…Traduisez comme bon voussemb<strong>le</strong> <strong>le</strong> nom de ce nouvelalbum aux allures de face B(B side). Truffé de versionsalternatives de titres piochés <strong>dans</strong>l’album Climax (l’Isotroph Remixde Faluja, l’Ambush feat. ZigZag…) et d’une flopée de titrescomposés au fil <strong>des</strong> rencontresdu moment (Martina Top<strong>le</strong>y-Bird, Flox, Féfé ou Leeroy), cenouvel opus témoigne de latransformation du projet, centréautour d’une « molécu<strong>le</strong> » isoléeaux débuts pour devenir unvéritab<strong>le</strong> col<strong>le</strong>ctif. Emancipédu format dub stricto sensu,Mo<strong>le</strong>cu<strong>le</strong> s’impose comme unproducteur de premier plan, quipourrait bien venir prochainementchatouil<strong>le</strong>r l’ADN de la chansonfrançaise, voire de la variétéinternationa<strong>le</strong>.SQ'Souvent moqué - on <strong>le</strong> prendpour un jouet - <strong>le</strong> ukulélé,petite guitare <strong>des</strong>cendant ducavaquinho lusitanien, estl'instrument emblématique detoute la Polynésie, Hawaï inclus.Depuis que Marilyn et Elvis s'ensont emparés, <strong>le</strong> « uke » faitl'objet d'un culte grandissant<strong>dans</strong> nos contrées avec <strong>des</strong>formations comme l'Uku<strong>le</strong><strong>le</strong>Orchestra of Great Britain et cetUkulélé Club de Paris issu pourpartie <strong>des</strong> Primitifs du Futur deDominique Cravic et comprenant<strong>le</strong> maître incontesté de la chose,Cyril Lefevre. Déjà sorti chezUniversal en 2002, ce Manuia !réédité par Frémeaux, est un ovnidélicieux et irrésistib<strong>le</strong> qui vousemmènera d'Honolulu à Java,avec <strong>des</strong> esca<strong>le</strong>s décalées et trèsparisiennes comme A La Nouvel<strong>le</strong>Eve.JPBmusiques et cultures <strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>monde</strong>MONDOMIXM'aimeVoce Ventu& Mieko Miyazaki"Tessi Tessi"(Daqui)Ici se croisent <strong>le</strong>s traditionsmillénaires du Japon et cel<strong>le</strong>snon moins ancestra<strong>le</strong>s du chantpolyphonique corse. Sur <strong>le</strong> papier,l'affaire semb<strong>le</strong> improbab<strong>le</strong>. Unefois entendue, el<strong>le</strong> s'éclaircit.Les improvisations du koto seglissent <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s intersticeslaissés vierges par la progressionharmonique <strong>des</strong> voix ou segreffent naturel<strong>le</strong>ment à el<strong>le</strong>sen contre-chant. La musiciennejaponaise est aussi chanteuseet prend parfois <strong>le</strong> <strong>le</strong>ad, laissant<strong>le</strong> chœur d'hommes soulignerses mélismes. Complice du trioMiyasaki, <strong>le</strong> violoniste ManuelSolans élargit <strong>le</strong> spectre sonoreet enrichit la rencontre. Cet albumenregistré quatre années après<strong>le</strong>s prémices de cette aventureétonne parfois par son exotisme,mais séduit <strong>le</strong> plus souvent parson élan sincère.B.M.Orchestre Nationalde Barbès"Rendez-vous Barbès "(Le Chant du Monde/Harmonia Mundi)Creuset d’humanités, chaudronmusical, Barbès est bien plus qu’unsimp<strong>le</strong> quartier parisien. Alors quandson Orchestre National revientsur <strong>le</strong> devant de la scène aprèsun retour en demi-teintes (Alik) en2008, <strong>le</strong>s youyous sont de sortied’autant que ce nouvel album - <strong>le</strong>quatrième - n’a rien d’un rendezvousmanqué. Le combo y brasse<strong>le</strong>s musiques, passant d’un groovealaoui tonique (Sidi Yahia-bnetParis), à un ska cuivré interrogatif(Chkoun ?), un dub oriental (Chorfa),un reggae à la cool (Rod Ba<strong>le</strong>k) ouune tournerie gnawa (Laafou). RDVBarbès, <strong>le</strong> titre homonyme, chantéen français sur un motif enivrant,joue <strong>le</strong>s tour-opérators, organisantune ultime et salutaire visite avantque <strong>le</strong>s bulldozers n’aient finid’éventrer la « Casbah de Paris ».SQ'n°40 Mai/juin 2010


60 Se<strong>le</strong>ction / Col<strong>le</strong>ctionInnacorTexte François Bensignor« Le haut par<strong>le</strong>ur <strong>des</strong>cultures de Bretagneet du <strong>monde</strong> » : <strong>le</strong> labelInnacor célèbre cinq ansde musiques ancrées <strong>dans</strong>un terroir mais ouvertesaux quatre vents du globe.Portrait.Tout d’abord Innacor marque son territoireen p<strong>le</strong>ine oralité. Il faut entendre <strong>le</strong> nom dece label avec l’accent gallo pour goûtersa saveur ! L’écuel<strong>le</strong> est vide, <strong>le</strong>s boléessèches ? « Dame non ! Y’n’a ’core ! » ditla mamgoze (la grand-mère).Espace enchantéPour la musique, la Bretagne est un tonneau<strong>des</strong> Danaï<strong>des</strong>. Biniou, bombarde,kan-a-diskan irriguent encore <strong>le</strong>s festounoz.À Langonnet, <strong>dans</strong> <strong>le</strong> triang<strong>le</strong> Gourin(56) / Plouray (56) / Le Faouët (22), <strong>le</strong>s airsCulture de proximitéIl invente d’abord une saison culturel<strong>le</strong> itinérante<strong>dans</strong> <strong>le</strong> bocage du centre-ouestBretagne, Dre ar Wenojenn (DAW, quisignifie « par <strong>le</strong>s chemins ») : treize ansd’expériences fabu<strong>le</strong>uses. À l’affût <strong>des</strong>bons plans, certains politiciens comprennentqu’on peut faire de Carhaix <strong>le</strong>Woodstock breton… Bertrand, lui, estail<strong>le</strong>urs. Avec Le Plancher, structure fondéepar cinq associations qui bougent sur<strong>le</strong> même terroir, il œuvre pour l’ancragede la culture de proximité en proposantune programmation choisie et <strong>des</strong> artistesen résidence. Bertrand et ses amisJacky Molard, Erik Marchand et YannickJory mettent en pratique <strong>le</strong> concept 360°avant la <strong>le</strong>ttre, alors que l’industrie du disques’enfonce <strong>dans</strong> la crise. Déjà liés pourl’organisation <strong>des</strong> tournées et la vente <strong>des</strong>concerts, ils décident de franchir ensemb<strong>le</strong><strong>le</strong> pas jusqu’au label. Alors qu’el<strong>le</strong>fonctionne en interaction avec ses structurescousines (Ton All, <strong>le</strong> Plancher, Innacor,etc.), la Grande Boutique est d’abordun outil au service <strong>des</strong> créateurs, ceux quiont <strong>des</strong> idées, de la musique p<strong>le</strong>in la tête.« À Langonnet, <strong>le</strong>s airs du terroir prennent <strong>des</strong> accentsroumains, turco-tsiganes, abyssiniens ou soudanais »du terroir prennent <strong>des</strong> accents roumains,turco-tsiganes, abyssiniens ou soudanais.L’ancien hôtel, avec sa sal<strong>le</strong> de bal et banquet,est devenu un lieu de résidence.Douze ans que <strong>des</strong> artistes convergentvers cet espace enchanté, connu sous <strong>le</strong>nom de La Grande Boutique : une « fricheartico<strong>le</strong> » ! Après avoir seriné ses idées<strong>dans</strong> <strong>le</strong> cosmos <strong>des</strong> musiques actuel<strong>le</strong>s,Bertrand Dupont a décidé de <strong>le</strong>s vivre auprésent.Le lieu de création se transforme naturel<strong>le</strong>menten studio d’enregistrement et <strong>le</strong>sartistes s’engagent entièrement <strong>dans</strong> <strong>le</strong>sprojets de disques. En 2005, Gelibolu,l’album d’Hasan Yarimdünia, clarinettistetsigane turc et compagnon de routed’Erik Marchand depuis plusieurs années,inaugure <strong>le</strong> catalogue Innacor. Le dixièmevient de sortir : N’Dia<strong>le</strong>, qui témoigne dela rencontre initiée par Africolor entre <strong>le</strong>sMaliens du trio de la chanteuse FouneDiarra et <strong>le</strong> quartet de Jacky Molard.À quoi reconnaît-on un disque Innacor ?À la qualité origina<strong>le</strong> <strong>des</strong> musiques. À songraphisme léché, qui donne son identitéà la col<strong>le</strong>ction. À la prise de son de JackyMolard (excepté pour ses propres albums).À la vidéo, qui replace l’enregistrement<strong>dans</strong> son contexte et rend plus proches<strong>le</strong>s musiciens.Des projets ? Pas de doute : y’n’a ’core !n www.innacor.comn°39 Mars/avril 2010n°40 Mai/juin 2010


62FilmsPar delà <strong>le</strong> mytheTexte Bertrand Bouard©Courtesy of E<strong>le</strong>ktra RecordsAvec When You’re Strange, <strong>le</strong> réalisateurTom DiCillo dépoussière avec brio <strong>le</strong> mytheautour <strong>des</strong> Doors. Fils rouges : un film inéditde Jim Morrison et la voix off de JohnnyDepp.Un fameux précepte veut que la légende soit parfois plus bel<strong>le</strong> àimprimer que la vérité. Sur When You’re Strange, Tom DiCillo enprend l’exact contre-pied : alors que l’histoire <strong>des</strong> Doors a accédéau rang de mythe, notamment avec <strong>le</strong> film d’Oliver Stone en1991, <strong>le</strong> réalisateur new yorkais, repéré <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s années 90 avecça tourne à Manhattan ou Une vraie blonde, a choisi de s’entenir aux faits. « Ca peut paraître cliché, mais pour moi rien n’estplus puissant que la vérité. El<strong>le</strong> peut avoir un impact émotionnelincroyab<strong>le</strong>, sans besoin de l’exagérer… Le mot clé du film estdémystification, pas seu<strong>le</strong>ment de Jim, mais de l’ensemb<strong>le</strong> del’histoire ».Tournage <strong>dans</strong> <strong>le</strong> désertParmi <strong>le</strong>s abondantes archives <strong>dans</strong> <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s DiCillo a puisé,<strong>des</strong> images rares de concert, de séances studio, et surtout unevraie pépite : <strong>le</strong> film HWY-An American Pastoral de Jim Morrison,dont de nombreux plans articu<strong>le</strong>nt <strong>le</strong> film. « C’est un film de50 minutes que Jim a tourné <strong>dans</strong> <strong>le</strong> désert californien avec ungroupe d’amis en 1969. Quand je l’ai vu, je croyais qu’il s’agissaitjuste d’images de Jim et non d’un film, mais j’ai été frappé par lapuissance qui s'en dégageait et j’ai décidé d’en utiliser <strong>des</strong> passages: c’est comme si son esprit revenait pour nous emmeneren voyage à travers <strong>le</strong> film. Je n’ai pas utilisé son montage, mais<strong>des</strong> plans que j’ai remontés moi-même. »Déchirements de MorrisonWhen You’re Strange pose un regard neuf sur une épopéed’ombres et de lumières, en parfaite résonance avec son époque.Le film utilise au mieux <strong>le</strong>s chansons du groupe, d’une fascinantediversité. « Le groupe a produit tel<strong>le</strong>ment de bonne musique,s’enthousiasme DiCillo. Pour la séquence avec Riders Onn°39 Mars/avril 2010


Se<strong>le</strong>ction / Cinéma63The Storm, j’ai utilisé de magnifiques images du film de Jim, quej'ai intercalées avec <strong>des</strong> plans de la guerre du Vietnam. »Comme <strong>le</strong>s autres membres du groupe, <strong>le</strong> batteur John Densmorea vu <strong>le</strong> film et <strong>le</strong> juge fidè<strong>le</strong> : « On en était très satisfait, mêmesi on avait certaines divergences, <strong>des</strong> commentaires, mais riende décisif. C’est avant tout <strong>le</strong> film de Tom, s’il s’était trompé, on« Le film m’a rappelé<strong>le</strong> voyage étrange et créatifqui fut <strong>le</strong> nôtre »John Densmore, batteur <strong>des</strong> Doors<strong>le</strong> lui aurait dit ». Et <strong>le</strong>s souvenirs d’affluer ? « Ca m’a rappelé cevoyage étrange et créatif qui fut <strong>le</strong> nôtre il y a de nombreusesannées, et que je continue de revisiter chaque nuit. Notammentla passion <strong>des</strong> débuts : on était <strong>le</strong> groupe résident du Whiskey AGo-Go et on voulait en remontrer à tout <strong>le</strong> <strong>monde</strong>, Captain Beefheart,Zappa, Van Morrison... Après, l’auto<strong>des</strong>truction s’en estmêlée. » Sans faire l’impasse sur <strong>le</strong>s déchirements de Morrison,DiCillo ne s’y complait pas non plus - à l’image de l’évocationtrès sobre de sa mort. « Je n’étais pas intéressé par <strong>le</strong>s polémiques.J’ai voulu utiliser autant de faits que possib<strong>le</strong>, et si je n’enavais pas, je préférais ne rien dire. »n When you're strangeUn film de Tom DiCillo raconté par Johnny DeppDistributeur : MK2Sortie <strong>le</strong> 09 Juin 2010Tom DiCillo©Courtesy of Rhino/Strange Pictures2Performance (1970)Un film de Donald Cammell et Nicolas RoegDistributeur : Tadrart FilmsSortie <strong>le</strong> 12 mai 2010Attention, film culte. Lorsqu'ils s'attel<strong>le</strong>nt à Performance,<strong>le</strong>s réalisateurs Donald Cammell et Nicolas Roeg aspirentà une représentation réaliste du Swinging London<strong>des</strong> sixties (âge d’or de la pop anglaise). Leur brillanteidée sera de confronter ce dernier au <strong>monde</strong> de lapègre londonienne. Un gangster aux abois (James Fox)trouve ainsi refuge chez une rock star déchu (Mick Jagger),reclus avec deux femmes (Michè<strong>le</strong> Breton et AnitaPal<strong>le</strong>nberg). Débuté comme un polar, Performance vireà l'exploration hallucinée d'une époque et d'une utopie: sexe, drogues et rock'n'roll. 40 ans après sa sortie,<strong>le</strong> film demeure d'une indéniab<strong>le</strong> beauté plastique. Sonmontage aux nombreuses fulgurances traduit <strong>le</strong>s étatsmentaux <strong>des</strong> personnages, sous l'emprise de la drogueou de la paranoïa. Truffé de références, à Borges, Artaudou Robert Johnson, très ouvert <strong>dans</strong> son interprétationfina<strong>le</strong>, Performance bénéfice en outre d'une bande sonde premier ordre, avec <strong>des</strong> morceaux de Randy Newmanou <strong>des</strong> Last Poets et un score de Jack Nitzschebâti autour d'envoûtantes bouc<strong>le</strong>s de synthétiseurs. Séquencephare : l'interprétation de Jagger face camerade la chanson Memo from Turner, <strong>dans</strong> un proto-clip enp<strong>le</strong>in cœur du film. B.B.n°39 Mars/avril 2010


64 <strong>Mondomix</strong>.comEN SALLEUn transport en communUne comédie musica<strong>le</strong> de Dyana GayeDistributeur : Shellac SudSortie <strong>le</strong> 16 juin 2010Lieu de passage et de croisements anonymes, <strong>le</strong>s transports en commun sont aussipropices aux rencontres. C’est ce paradoxe que la réalisatrice sénégalaise Dyana Gayeexplore <strong>dans</strong> son moyen-métrage, Un transport en commun, fiction dépeignant <strong>des</strong> morceauxde vie en musique. A bord d’un taxi-brousse reliant Dakar à Saint-Louis, <strong>des</strong> voyageursque rien ne rapproche si ce n’est une <strong>des</strong>tination, vont apprendre à se connaître.Ils se dévoi<strong>le</strong>nt en chantant <strong>le</strong>urs vies, <strong>le</strong>urs espoirs ou <strong>le</strong>urs malheurs. Malick partageses envies d’ail<strong>le</strong>urs sur un twist quand Madame Barry narre ses regrets au son du blues.Dyana Gaye revisite ainsi la comédie musica<strong>le</strong> avec brio. Film original et plaisant, Un transporten commun sera projeté avec <strong>le</strong> dernier court-métrage de la réalisatrice, Deweneti.Sara Ta<strong>le</strong>bDVDs/ Festival Panafricain d’AlgerWilliam K<strong>le</strong>in(Arte vidéo)Alger, juil<strong>le</strong>t 1969. Pendant une semaine, une déferlantehumaine venue de tout l’Afrique s’abat sur la vil<strong>le</strong>. Le motd’ordre : affirmer la culture d’un continent dont plusieurspays sont encore colonisés. Dans une alchimie de sons,de cou<strong>le</strong>urs, de langues et de <strong>dans</strong>es, l’Algérie vit un momentunique de l’Histoire africaine : <strong>le</strong> 1 er Festival CulturelPanafricain d’Alger (Panaf). Photographe, peintre etgraphiste engagé, William K<strong>le</strong>in est présent. L’Américainde Paris a été chargé de coordonner la réalisation d’undocumentaire sur cet évènement révolutionnaire et festif.Son film méconnu est désormais disponib<strong>le</strong> en DVD.Le spectac<strong>le</strong> est d’abord <strong>dans</strong> la rue. Au plus près <strong>des</strong> corps, <strong>le</strong>s caméras de K<strong>le</strong>innous immergent <strong>dans</strong> la fou<strong>le</strong>. Des délégations de toute l’Afrique défi<strong>le</strong>nt <strong>dans</strong> l'exubéranceet l'euphorie. La vision de femmes algériennes voilées aux côtés de <strong>dans</strong>eusesghanéennes aux seins nus vaut tous <strong>le</strong>s discours. Musiciens (Miriam Makeba,Archie Shepp), intel<strong>le</strong>ctuels (Check Anta Diop, Amadou Hampaté Bâ), <strong>le</strong>aders <strong>des</strong>mouvements de libération africains (Amilcar Cabral, Agostinho Neto), tous se sontemparés d’Alger <strong>dans</strong> un sentiment de fête et d’espoir d’une Afrique libre, unieet fraternel<strong>le</strong>. Le film articu<strong>le</strong> instantanés de l’évènement et archives dénoncant <strong>le</strong>passé colonial du continent. Ce film sensib<strong>le</strong> et vivant est à voir absolument mêmesi, 40 ans plus tard, il laisse <strong>le</strong> gout amer d'un rêve panafricain largement déçu, quen’a pas réussi à réanimer la seconde édition de l’évènement en 2009.Hortense Vol<strong>le</strong>n°40 Mai/juin 2010


Se<strong>le</strong>ction / DVDs65/ Tom Zé/Dada BrasilClaude Santiago(Freedom now/la Huit)La Huit productions continue son exploration audiovisuel<strong>le</strong> <strong>des</strong> esthétiques musica<strong>le</strong>s transversa<strong>le</strong>scontemporaines. Après s’être notamment intéressé au guitariste américain Marc Ribot ou au col<strong>le</strong>ctifanglais Transglobal Underground, il est cette fois question d’étudier <strong>le</strong> cas Tom Zé. Filmé, par ClaudeSantiago, lors de sa venue en France pour <strong>le</strong> festival Banlieues B<strong>le</strong>ues en 2005, <strong>le</strong> trublion brésilien estfidè<strong>le</strong> à lui-même, ludique et brillamment déroutant. Dialoguant avec <strong>le</strong> journaliste Remy Kolpa Kopoul,il donne son point de vue unique sur la condition <strong>des</strong> femmes, l’égoïsme nécessaire de l’amour ou sesobjectifs d’artiste. « Je veux mettre plus d’informations <strong>dans</strong> une chanson, qu’el<strong>le</strong> aie plus de spermatozoï<strong>des</strong>» déclare-t-il ainsi. Sur scène, avec ses compagnons, il subjugue <strong>le</strong> public <strong>dans</strong> un show quiconjugue avec bonheur farce et avant-garde. Le seul défaut de ce document est sa brièveté (47mn), tant<strong>le</strong> sujet est passionnant. B.M./ Coffret Lionel Rogosin(Carlotta Films)Une fois de plus, <strong>le</strong>s éditions Carlotta Films restaurent trois films essentiels : ceux du cinéaste américainLionel Rogosin (1924-2000), « <strong>le</strong> plus grand documentariste de tous <strong>le</strong>s temps » selon John Cassavetes.On the Bowery (1956), son premier, évoque la vio<strong>le</strong>nce et l'alcoolisme qui touchent <strong>le</strong> quartier <strong>le</strong> plus pauvrede New York. Come back Africa (1959) s'attaque à l'apartheid à travers <strong>le</strong> <strong>des</strong>tin tragique d'un paysanzoulou sud-africain venu chercher du travail à Johannesburg. Tourné clan<strong>des</strong>tinement, Rogosin y décritavec poigne <strong>le</strong>s rapports de classe, <strong>le</strong> racisme, mais aussi la musique, mère libératrice célébrée <strong>dans</strong> larue, sur <strong>le</strong>s chantiers, ou par l'époustouflante Miriam Makeba <strong>dans</strong> une scène mythique qui lui coûtera unexil forcé de 31 ans. Good times, wonderful times (1965), élaboré en Ang<strong>le</strong>terre, dénonce férocement <strong>le</strong>shorreurs de la guerre, du nazisme et de la bombe nucléaire.Accompagné de bonus très éclairants, ce coffret tisse <strong>le</strong> portrait d'un homme dont l'engagement politiquesans concession demeure exemplaire.N.A.On the Bowery et Come Back Africa ont bénéficié d'une sortie en sal<strong>le</strong>s fin avril


66<strong>Mondomix</strong>.comLivresMahmoud Darwich,la valse de l’exilTexte Sara Ta<strong>le</strong>bSa poésie chantant la Pa<strong>le</strong>stine a bou<strong>le</strong>versé <strong>le</strong> <strong>monde</strong> arabe.Son activisme politique lui a valu une vie d'exils. Portrait d'unvéritab<strong>le</strong> humaniste, par-delà <strong>le</strong>s différences et <strong>le</strong>s frontières.© Michael Tierney« J’habite <strong>dans</strong> une valise ». Mahmoud Darwich résumait parcette formu<strong>le</strong> une existence placée sous <strong>le</strong> signe de l’exil. Il naîten 1941 en Galilée, où il vit avec <strong>le</strong>s siens jusqu’à la création d’Israël.Les Darwich se réfugient au Liban, premier déracinement.Ils n’y restent pas et reviennent en Israël, près de Haïfa. Le jeuneMahmoud emprunte alors <strong>le</strong> chemin de l’université, milite au PartiCommuniste Israélien et écrit pour la presse. Il publie en 1960un premier recueil de poésie, puis Feuil<strong>le</strong>s d’Olivier. Ce secondouvrage <strong>le</strong> fait connaître en dehors <strong>des</strong> frontières pa<strong>le</strong>stiniennes.Mais sa renommée et son activisme agacent <strong>le</strong>s autorités. Il estarrêté et emprisonné plusieurs fois et sera fina<strong>le</strong>ment assigné àrésidence en 1970. Le voyage forcé reprend, Darwich prend cettefois la direction de la Russie avant d’atterrir en Egypte.Mahmoud Darwich et Rachid Koraïchi à Amman en 1995« Obsédé par la langue,il la sublime pour en faireun remède à l’errance »A la croisée <strong>des</strong> cheminsAu Caire, <strong>le</strong> poète se fait journaliste. Ce qu'il sera aussi àson retour à Beyrouth où <strong>le</strong> Centre de recherche de l’Organisationde Libération de la Pa<strong>le</strong>stine <strong>le</strong> choisit commerédacteur en chef. La guerre du Liban pousse l’organisationà errer de capita<strong>le</strong> en capita<strong>le</strong>. Le Caire, Tunis, Paris,autant de vil<strong>le</strong>s qui rythment la vie de Darwich. Elu membreexécutif de l’OLP, il rédige <strong>le</strong> discours d’indépendancepour un Etat pa<strong>le</strong>stinien que déclamera Yasser Arafat. Lapolitique devient pesante pour celui qui ne souhaite pasy enfermer sa poésie. Les accords d’Oslo qu’il contestemarquent ainsi la fin de son engagement auprès de l’OLP.La poésie comme remède à l’erranceLe troisième et dernier acte de la vie de Darwich s’ouvre par l’arrivéeà Ramallah. Mais il estime que l’exil n’est pas fini. «Ce n’estpas ma terre. Les gens, <strong>le</strong>s paysages ne me sont pas familiers.C’est comme si j’étais encore en exil, mais chez moi » déclare-t-ilalors. Se consacrant à la poésie, il s’oriente vers <strong>des</strong> sujets plusuniversels, las d’être réduit au rô<strong>le</strong> de porte-paro<strong>le</strong> d’une cause.Le thème principal de son art est <strong>le</strong> <strong>des</strong>tin de la Pa<strong>le</strong>stine, maisson unique étendard reste la poésie. Obsédé par la langue, il lan°39 Mars/avril 2010


sé<strong>le</strong>ctions / Livres67sublime pour en faire un remède à l’errance. Nombre de ses créations seront mises enmusique, notamment par Marcel Khalifé. Darwich lui-même tentera l’aventure musica<strong>le</strong>en récitant ses poèmes sur <strong>le</strong>s mélodies du Trio Joubran. En sa compagnie, il fait sonultime apparition en public au festival <strong>des</strong> Suds, à Ar<strong>le</strong>s. Quelques jours plus tard, <strong>le</strong> 9août 2008, il meurt à Houston, au Texas. Les hommages qui lui sont rendus reflètentune notoriété mondia<strong>le</strong> acquise par ses textes pacifistes et ses va<strong>le</strong>urs humanistes,dont la poésie transcendait différences et frontières.l À VOIR : Mahmoud Darwich lors de sa dernière prestation surwww.mondomix.comA ma mère © Rachid KoraïchiLe poème de Beyrouth © Rachid KoraïchiMahmoud Darwich & Rachid Koraïchi"Une nation en exil, hymnes gravés"(Actes Sud)Sur <strong>le</strong> chemin de son exil à Tunis, <strong>le</strong> célèbre poète pa<strong>le</strong>stinien MahmoudDarwich croise l’artiste peintre et plasticien algérien, Rachid Koraïchi. Decette rencontre naît une amitié, l’aventure humaine se transformant trèsvite en une aventure artistique origina<strong>le</strong>, qui met en forme la puissantecharge poétique de l’œuvre de Darwich.Initié en 1981, Une nation en exil est une mise en scène de la langue arabe. Autour <strong>des</strong> poèmesde Darwich, <strong>le</strong>s gravures de Koraïchi et <strong>le</strong>s calligraphies d’Hassan Massoudy et de Kamel Ibrahim,véritab<strong>le</strong>s « sculptures de papiers », subliment <strong>le</strong>s textes et dépassent <strong>le</strong> simp<strong>le</strong> cadre de l’illustration.La <strong>le</strong>cture est magnifiée par tous <strong>le</strong>s signes qui incitent à chercher plus loin encore la signification<strong>des</strong> poèmes. Une nation en exil peint ainsi par <strong>le</strong>s mots et <strong>le</strong> <strong>des</strong>sin <strong>le</strong> <strong>des</strong>tin de la Pa<strong>le</strong>stine, série demalheurs transformée en puissance créatrice. Un livre indispensab<strong>le</strong> pour tenter de saisir <strong>le</strong> souff<strong>le</strong>sacré de la poésie. S.T.n°40 Mai/juin 2010


68<strong>Mondomix</strong>.com/ Roux-Fontaine ,Marlène Girardin(In Vivo/Critèreséditions)Comme son ami Titi Robin,Eric Roux-Fontaine est fascinépar l’univers gitan. Là où<strong>le</strong> caresseur de cor<strong>des</strong> explore<strong>le</strong>s sons de cette cultureprotéiforme et voyageuse,ce plasticien en capture <strong>le</strong>sombres et la lumière sur toi<strong>le</strong>,écran, objets ou papier photographique.Historienne et ga<strong>le</strong>riste, Marlène Girardin signe une monographiequi traverse <strong>le</strong>s différents paysages (re)créés par l’artiste,en quatre chapitres encadrés d’interviews et d’hommage. Silhouettede caravane qui se révè<strong>le</strong> <strong>dans</strong> <strong>des</strong> striures de matièrestourmentées, <strong>dans</strong>euse du Rajasthan (Gulabi Sapera)déliant son corps sur fond de feuil<strong>le</strong>s d’or, portraits de Gitansà tête de cheval (photomontage) ou toi<strong>le</strong>s impressionnistes dejung<strong>le</strong> luxuriante qui évoquent <strong>le</strong>s fresques délavées de temp<strong>le</strong>sindiens.Ses peintures invoquent <strong>le</strong> feu ou l’eau. Ses photos nous ramènentà la terre ou nous projettent vers <strong>des</strong> cieux souventnuageux. Roux-Fontaine exalte une réalité abrupte qu’illuminentla flamboyance et <strong>le</strong> rêve.B.M./ The RoughGuide to WorldMusicVol II Europe & Asia(Rough Gui<strong>des</strong>/Penguin)En anglaisVite devenu un ouvrage deréférence, <strong>le</strong> premier RoughGuide to World Music est paruen 1994, en un seul volume.Pays par pays, il détaillait toutce qu'il fallait savoir sur <strong>le</strong>smusiques traditionnel<strong>le</strong>s et populaires.La seconde édition, remaniée et étendue à deuxvolumes, a vu <strong>le</strong> jour en 2000. La troisième devrait à sontour gagner un volume : <strong>le</strong> premier, consacré à l'Afrique etau Moyen Orient, est paru en 2006, épais de 650 pages.Le second vient de sortir et est dévolu à l'Europe, à l'Asie etau Pacifique, fort de 820 pages répertoriant 60 pays avecbackground historique, contexte culturel, portraits de musiciens,évolutions et tendances nouvel<strong>le</strong>s, listes de CD et recommandationsde playlists pour Ipod. L'amp<strong>le</strong>ur et la comp<strong>le</strong>xitéde la tâche rendent toutefois incertaines, de l'aveude ses éditeurs, la sortie du troisième volume, censé traiter<strong>des</strong> Amériques et <strong>des</strong> Caraïbes. Il serait vraiment dommageque cette arme capita<strong>le</strong> contre l'ignorance reste inachevée.J.P.B.n°40 Mai/juin 2010


sé<strong>le</strong>ctions / Livres 69sé<strong>le</strong>ctions / Livres69/ Le si<strong>le</strong>nce <strong>des</strong> espritsWilfried N’Sondé(Actes Sud, 2010)Né en 1969 à Brazzavil<strong>le</strong>, Wilfried N’Sondé a grandi en banlieueparisienne et vit depuis 18 ans à Berlin. Résultat : il discuteau téléphone en kikongo avec sa maman, refait <strong>le</strong> <strong>monde</strong>en al<strong>le</strong>mand au café du coin, et écrit et chante en français. Lireson deuxième roman, Le si<strong>le</strong>nce <strong>des</strong> esprits, c’est vivre unerencontre. Cel<strong>le</strong> de « deux âmes délaissées de l’existence »,qui vont « glisser <strong>dans</strong> la folie d’aimer. »Ancien enfant soldat, « bourreau et victime <strong>dans</strong> une mêmeâme », Clovis a fui son pays pour vivre, tout simp<strong>le</strong>ment. Depuisplusieurs mois, il déambu<strong>le</strong> à Paris <strong>dans</strong> un « un cauchemarsans <strong>le</strong>ndemain ». Clovis est sans-papiers, clan<strong>des</strong>tin.Pour éviter un contrô<strong>le</strong> de police Gare de Lyon, il embarque auhasard <strong>dans</strong> un train de banlieue. Assise face à lui, Christel<strong>le</strong>.Une femme dont <strong>le</strong> cœur s’est fêlé dès l’enfance, alors qu’unmal inavouab<strong>le</strong> était à jamais incrusté <strong>dans</strong> son corps.Clovis et Christel<strong>le</strong> ont la mémoire meurtrie. Un passé qui <strong>le</strong>shante. Pourtant, ils ont choisi d’exister, malgré tout. L’espacede deux nuits, ils vont découvrir l’euphorie de se livrer tota<strong>le</strong>ment,sans retenue. Ensemb<strong>le</strong>, ils vont céder à « la magie, lafolie de croire à l’incroyab<strong>le</strong> » : une vie meil<strong>le</strong>ure.Wilfried N’Sondé signe un texte poignant, vif et sensuel. Unhommage à la vie, à la rage de vivre. Un roman qui nous rappel<strong>le</strong>que tout est possib<strong>le</strong>, lorsqu’on a encore la capacitéd’aimer. Hortense Vol<strong>le</strong>n°40 Mai/juin 2010


70<strong>Mondomix</strong>.comMONDOMIX AIME !Les meil<strong>le</strong>ures raisons d’al<strong>le</strong>r écouter l’air du tempsL’Afrique<strong>dans</strong> tous <strong>le</strong>s sensdu 4 au 9 maiParis, Corbeil-Essonnes,MontreuilCélébrant <strong>le</strong> cinquantenaire<strong>des</strong> Indépendances africaines,ce festival pluridisciplinairepromet cette année unvoyage au cœur de la musiqueet <strong>des</strong> arts africains.Avec notamment : Tipari etDavy Sicard <strong>le</strong> 4/ Patrick Bebey<strong>le</strong> 5/ Sam Tshabalala et Lu<strong>le</strong>ndo<strong>le</strong> 6/ Daby Touré <strong>le</strong> 8 et Nawal<strong>le</strong> 9www.lafrique<strong>dans</strong>tous<strong>le</strong>ssens.comQuinzainedu commerce équitab<strong>le</strong>8 au 23 maiParis, Lil<strong>le</strong>, Lyon, Nantes…Pour la journée mondia<strong>le</strong> ducommerce équitab<strong>le</strong>, <strong>le</strong> 8 maià Paris et <strong>dans</strong> de nombreusesvil<strong>le</strong>s de France et du<strong>monde</strong>, <strong>des</strong> brunchs géantset gratuits permettront <strong>des</strong>avourer <strong>des</strong> produits issusde cette filière. A Paris, cespremières 24 heures de laquinzaine du commerceéquitab<strong>le</strong> se termineront auCabaret Sauvage par un jolichape<strong>le</strong>t de concerts.Avec : Bazbaz, Orchestra doFuba, Rémy Kolpa Kopoul,Tarace Boulba et Blick Bassyhttp://quinzaine.maxhavelaarfrance.orgMusiques Métisses21 au 23 MaiAngoulêmeDepuis 35 ans, ce festivalpionnier permet, en musiquecomme en littérature, dedécouvrir de jeunes ta<strong>le</strong>ntstout en consacrant <strong>le</strong>s plusgrands. Cette année, suiteà une édition à Salvador deBahia en 2009, <strong>le</strong> Brésil est àl’honneur.Avec notamment : JackyMolard Quartet & Founé DiarraTrio, Youssou N’Dour, HindiZahra <strong>le</strong> 21/ Carlinhos Brown,Menwar, Mahmoud Ahmedet Angélique Kidjo <strong>le</strong> 22/ SalifKeïta, Les Tambours du Burundi,Naby et Amazigh Kateb etSly and Robbie <strong>le</strong> 23www.musiques-metisses.comParfums de Musiques5, 6, 12 et 13 juinRoseraie du Val-de-Marne,l’Hay-<strong>le</strong>s-RosesDurant deux week-ends, <strong>des</strong>sons droits venus d’Afriqueet d’Amériques vont se faireécho et se mê<strong>le</strong>r aux effluvesde la Roseraie du Val-de-Marne.Avec notamment : KamelEl Harrachi <strong>le</strong> 5/ BassekouKouyaté et Ngoni Ba et MusicMaker Foundation <strong>le</strong> 6/ Casuarina<strong>le</strong> 12/ René Lacail<strong>le</strong> et DizuPlaatjies <strong>le</strong> 13http://www.adiam94.orgVoir aussi page 11AgendaRetrouvez l’agenda comp<strong>le</strong>t, <strong>le</strong>s infos pratiques et <strong>le</strong>s dates <strong>des</strong> concerts, sorties, festivals, expo surwww.mondomix.com/fr/agenda.php !Laissez-vous guider par la sé<strong>le</strong>ction <strong>des</strong> évènements « <strong>Mondomix</strong> aime » !n°37 nov/dec 2009


sé<strong>le</strong>ctions / Dehors 71Festival Métisà Saint-Denis1er avril au 4 juil<strong>le</strong>tSaint-DenisC’est une variation autourdu oud et <strong>des</strong> musiques dela Méditerranée qui dominecette édition. 3 moisqui seront ponctués par denombreux concerts <strong>dans</strong>différents quartiers de la vil<strong>le</strong>et <strong>des</strong> créations origina<strong>le</strong>sprésentées <strong>dans</strong> la basiliquede Saint-Denis.Avec notamment : Margot,mémoire d’une reine de GoranBregovic <strong>le</strong>s 7 et 8 juin/ AïchaRédouane <strong>le</strong> 16/ Le oud selonSmadj – création avec Smadj,Ibrahim Maalouf, NatachaAtlas, Mehdi Haddab <strong>le</strong> 17/Angelo Debarre <strong>le</strong> 19/ HindiZahra <strong>le</strong> 2 juil<strong>le</strong>t/ Speed Caravan<strong>le</strong> 3/ Féfé <strong>le</strong> 4www.metis-plainecommune.com/Voir aussi page 44Jazz sous <strong>le</strong>s pommiers8 au 15 maiCoutances (Manche)Fidè<strong>le</strong> à son éc<strong>le</strong>ctisme, laprogrammation 2010 est unnouvel appel à sauter <strong>le</strong>sfrontières géographiques etesthétiques.Avec notamment : RoyHargrove Quintet, Naby, MelodyGardot <strong>le</strong> 8 mai/Cheikh TidianeSeck & Mamani Keita, Kouyaté& Neerman, <strong>le</strong> 12/ Dhafer Youssef,Omar Sosa & Trilok Gurtu<strong>le</strong> 13/John Mc Laughlin, PaoloFresu, Oreka TX <strong>le</strong> 14/IbrahimMaalouf, Vincent Segal <strong>le</strong>15www.jazzsous<strong>le</strong>spommiers.com/Voir aussi page 21Festival <strong>des</strong> MusiquesSacrées de Fès4 au 12 juinFès (Maroc)Sans limites confessionnel<strong>le</strong>sou géographiques, de divinesmusiques sacrées vonthanter <strong>le</strong>s lieux magiques dela Médina de Fez huit joursdurant. Une ballade mystiqueet sensuel<strong>le</strong> sur <strong>le</strong> thème duvoyage initiatique.Avec notamment : Le Bal<strong>le</strong>tRoyal du Cambodge <strong>le</strong> 4/Shahram Nazeri & MohamedBajeddoub <strong>le</strong> 08/ Camil<strong>le</strong>,Jordi Savall <strong>le</strong> 9/HariprasadChaurasia <strong>le</strong> 10/ Dhafer Youssefet Sabah Fakri <strong>le</strong> 11/ DavidMurray avec Gwo Ka Masterset Archie Shepp, The BlindBoys of Alabama <strong>le</strong> 12www.fesfestival.comVoir aussi page 21Joutes musica<strong>le</strong>sde printempsdu 21 au 26 maiCorrens (Var)Les Joutes musica<strong>le</strong>s mettentl’accent sur <strong>des</strong> créationsorigina<strong>le</strong>s, initient <strong>des</strong> rencontresferti<strong>le</strong>s entre créateursinspirés et traditions inspirantes.Un week-end intimiste etfestif au cœur de la Provence.Avec notamment : LaCompagnie Montanaro <strong>le</strong> 21/Rossé et Erwan Keravec, <strong>le</strong>Trio Mc Donnell et Oneira <strong>le</strong> 22/Hirstina Belova, Annie Ebrel etErik Marchand, <strong>le</strong> Trio Chemirani,A Fi<strong>le</strong>tta avec Paolo Fresuet Daniel di Bonaventura <strong>le</strong> 23www.<strong>le</strong>-chantier.com/Arabesques21 au 23 maiMontpellierLoin <strong>des</strong> clichés, Arabesquesest un de ces lieux où l’onaime réanimer la traditionà coups de modernité. Lesgrands noms de la culturearabe côtoient <strong>le</strong>s jeunesta<strong>le</strong>nts à travers la musiqueet différentes formes d'arts.Avec notamment : Kamel ElHarrachi et Marcel Khalifé <strong>le</strong>21/ Hasna El Becharia et Idir<strong>le</strong> 22/ Hindi Zahra et Nass ElGhiwane <strong>le</strong> 23Et aussi <strong>le</strong>s calligraphiesd'Hassan Massoudy,l’exposition « Gnawa »du photographe Algo, <strong>des</strong>conférences et <strong>des</strong> projectionswww.festivalarabesques.frJazz Nomade,la voix est libre20 au 22 maià ParisThéâtre <strong>des</strong> Bouffes du NordA la croisée <strong>des</strong> genres, cefestival singulier ose <strong>des</strong>mélanges risqués maistoujours réussis. Cirque,musique, poésie, chant ouphilosophie sont à la base<strong>des</strong> rencontres improbab<strong>le</strong>sde ce « manifestival »unique.Avec notamment : PatrickChamoiseau et Edouard Glissant,Eric Elmosnino et Serge Teyssot-Gay <strong>le</strong> 20/ La création Ora<strong>le</strong> etHardie avec la compagnie <strong>des</strong>musiques à Ouïr, Loic Lantoine,Brigitte Fontaine <strong>le</strong> 21/ La créationAcrobattants et Voltigistesavec Pascal Contet, Fantazio, IvaBittova <strong>le</strong> 22 à Paris et <strong>le</strong> 11 juin àBéthune /Touré <strong>le</strong> 8 et Nawal <strong>le</strong> 9www.jazznoma<strong>des</strong>.net/n°40 Mai/juin 2010


72 <strong>Mondomix</strong>.comn LES CYCLES PARISIENSMai et Juin vont encore plus loinEn cette période de célébration de la diversité culturel<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s gran<strong>des</strong> sal<strong>le</strong>s parisiennes répondent avecenthousiasme à l’appel. La Grande Hal<strong>le</strong> de la Vil<strong>le</strong>tte épouse la cause de l’Afrique du Sud et <strong>le</strong> Théâtre<strong>des</strong> Abbesses cel<strong>le</strong> de la <strong>dans</strong>e. Le Musée Guimet célèbre la rencontre du Japon et de la Corse. L’Inde està l’honneur à la Cité de la Musique De la tradition à Bollywood et au Quai Branly avec l’immense flutisteHariprasad Chaurasia.: 29/04 au 08/05/2010Récital Kuchipudi : création chorégraphique de Shantala Shivalingappa– Inde – Kuchipudi, <strong>dans</strong>e classique indienne – Théâtre <strong>des</strong> Abbesses: 03 au 05/05/2010Beautiful Thing 1 : création chorégraphique de Padmini Chettur – Inde –Danse – Musée Guimet: 07/05/2010Tenzin Gönpo – Tibet – Chants, <strong>dans</strong>es et musiques du Tibet – MuséeGuimet: 11 au 14/05/2010Umqombothi Kabar : création de la Compagnie Via Kat<strong>le</strong>hong et dugroupe Lindingo – Afrique du Sud, Î<strong>le</strong> de la Réunion – Musique Maloya et<strong>dans</strong>e sud-africaine – Grande Hal<strong>le</strong> de la Vil<strong>le</strong>tte: 11 au 15/05/2010Gnosis : création chorégraphique de Akram Khan – Inde – Danse Kathak– Théâtre <strong>des</strong> Abbesses: 18 au 22/05/2010Beautiful Me : création chorégraphique de Gregory Maqoma – Afrique duSud – Danse – Théâtre <strong>des</strong> Abbesses: 22/05/2010Vamar et Tuia – Cap Vert – Duo de guitares acoustiques – Musée du QuaiBranly: 22/05/2010Vusi Mahlasela, Eric Mouquet / Deep Forest « Football made in Africa »Johnny C<strong>le</strong>gg – Afrique du Sud – Musique – Grande Hal<strong>le</strong> de la Vil<strong>le</strong>tte: 28 et 29/05/2010Mieko Myazaki et Voce Ventu – Japon et Corse – Koto, chant japonais etpolyphonies Corses – Musée Guimet: 29/05/2010Mahotella Queens & Hugh Massekela – Afrique du Sud – MusiqueMbaquanga et jazz sud-africain – Grande Hal<strong>le</strong> de la Vil<strong>le</strong>tte: 29 au 30/05/2010Musiques du toit du <strong>monde</strong> - Tadjikistan, Afghanistan, Pakistan – Musiquetraditionnel<strong>le</strong> – Théâtre <strong>des</strong> Abbesses: 04 au 06/06/2010Pandit Hariprasad Chaurasia – Inde – Hommage et rencontre avec ungrand maître de la musique indienne – Musée du Quai Branly: 09 au 13/06/2010Natya – Inde – Danses sacrées de l’Inde, de l’Assam à l’Orissa – Danse –Musée du Quai Branly: 11 et 12/06/2010Anuj Mishra, Arjun Mishra et Smriti Mishra – Inde du Nord – DanseKathak – Musée Guimet: 17/06/2010Chants Sikhs et Qawwali – Inde – Chants épiques et de bravoure sikhs deSangrur – Chants traditionnels – Cité de la Musique: 18/06/2010Sizero Tabla Experience – Inde et Grande-Bretagne – Tabla, sitar, chants,<strong>dans</strong>e, Dj et VJ – Cité de la Musique: 19/06/2010Bhangra Diaspora – Grande-Bretagne – Dj-ing, Vj-ing et <strong>dans</strong>es traditionnel<strong>le</strong>sbhangra et gidda – Cité de la Musique: 19/06/2010Musique et cinéma en Inde : Tab<strong>le</strong> ronde et projection d’extraits du filmDilwa<strong>le</strong> Dulhania Le Jayenge de Aditya Chopra (1995, VOSTF) – Inde –Cité de la Musique: 25/06/2010Bollywood Flashback – Inde – Chants et <strong>dans</strong>e – Cité de la Musique: 26/06/2010Femmes artistes du Lac de Sebu (Communauté T’boli du col<strong>le</strong>ctifLemhadong) – Philippines – Salon de musique – Musée du Quai Branly


sé<strong>le</strong>ctions / Dehors 73n À LA LOUPEErikShantel© D.R.l Le 4 juin- à La Ciga<strong>le</strong> Paris© Daniel Woel<strong>le</strong>rl Le 21 mai- au Bataclan Paristumi & the volume© Youri Lenquettel Le 20 juin à Rio Loco -<strong>le</strong> 21 à la Fête de la Musique Fnac -<strong>le</strong> 26 juin aux Solidays/ Barbès l’africaine,<strong>des</strong> années 70 à nos joursDu 11 au 23 maiInitié par <strong>le</strong>s acteurs culturels de la Goutte d’Or, ce projet entend montrer sous unnouveau jour l’histoire de cette partie du 18 ème arrondissement parisien. Après« L’Algérie à la Goutte d’Or » en 2009, cette deuxième rencontre s’interroge surl’héritage de l’immigration africaine <strong>dans</strong> <strong>le</strong> quartier. Son influence et ses apports depuis<strong>le</strong>s années 1970 touchent de nombreux domaines, à commencer par la culture.Témoignages, expositions, projections, débats, visites, ateliers et concerts illustrerontcette thématique. Côté musique, du beau <strong>monde</strong> en perspective : Kélélé, JulienJacob, Konono n°1, Mahmoud Ahmed, Nuru Kane, Nash… Cet événement quieffectue un réel travail de mémoire est parrainé par Bintou Simporé, journaliste passionnéede musiques du <strong>monde</strong>.http://www.fgo-barbara.fr/143n°40 Mai/juin 2010


ABONNEZ-VOUS ÀMONDOMIXET RECEVEZ <strong>le</strong> dernier album deTumi & the volume "pick a dream"(sakifo records) <strong>dans</strong> la limite <strong>des</strong> stocks disponib<strong>le</strong>sOui, je souhaite m’abonner à<strong>Mondomix</strong> pour 1 an (soit 6 numéros)au tarif de 29 euros TTC.(envoi en France métropolitaine)NomPrénomAgeAdresseVil<strong>le</strong>Code PostalPayse-mailOù avez-vous trouvé <strong>Mondomix</strong> ?Voyagerail<strong>le</strong>urs,autrement© Delphine TomaselliRenvoyez-nous votre coupon rempliaccompagné d’un chèque de 29 eurosà l’ordre de <strong>Mondomix</strong> Service clients à l’adresse :<strong>Mondomix</strong> Service clients12220 Les AlbresTél : 05.65.80.47.73 Fax : 05.65.63.26.79contact@bopress.frHors France métropolitaine : 34 eurosnous consulter pour tout règ<strong>le</strong>ment par virement> Prochaine parutionLe n°41 (Juil<strong>le</strong>t / Août 2010) de <strong>Mondomix</strong> sera disponib<strong>le</strong> fin Juin.Retrouvez la liste complète de nos lieux de diffusion surwww.mondomix.com/papier<strong>Mondomix</strong> remercie <strong>le</strong> Ministère de la Culture pour son soutien et tous <strong>le</strong>s lieux qui accueil<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>magazine <strong>dans</strong> <strong>le</strong>urs murs, <strong>le</strong>s FNAC, <strong>le</strong>s magasins Harmonia Mundi, <strong>le</strong>s espaces culturels Lec<strong>le</strong>rc,<strong>le</strong> réseau Cultura, l’Autre Distribution, Staf Corso ainsi que tous nos partenaires pour <strong>le</strong>ur ouvertured’esprit et <strong>le</strong>ur participation active à la diffusion <strong>des</strong> musiques du <strong>monde</strong>.MONDOMIX - Rédaction144 - 146 rue <strong>des</strong> poissonniers – 75018 Paristél. 01 56 03 90 89 fax 01 56 03 90 84redaction@mondomix.comEdité par <strong>Mondomix</strong> Media S.A.SDirecteur de la publicationMarc Benaïche marc@mondomix.comRédacteur en chefBenjamin MiNiMuM benjamin@mondomix.comRédacteur en chef webJean-Sébastien Josset jean-sebastien.josset@mondomix.netConseil<strong>le</strong>r éditorialPhilippe Krümm philippe@mondomix.comSecrétaire de rédactionBertrand BouardDirection artistiqueStephane Ritzentha<strong>le</strong>r stephane@mondomix.comCouverture / PhotographieYouri Lenquette www.youri<strong>le</strong>nquette.comResponsab<strong>le</strong> marketing / partenariatsLaurence Gil<strong>le</strong>slaurence@mondomix.comtél. 01 56 03 90 86Partenariats / Relations aux publicsYasmina Bartova Zouaoui yasmina@mondomix.comtél. 01 56 03 90 86MONDOMIX RegieChefs de publicitéAntoine GirardMathieu Prouxtél. 01 56 03 90 88Ont collaboré à ce numéro :Nadia Aci, François Bensignor, Jean Berry, Bertrand Bouard, Jean-Pierre Bruneau,Arnaud Cabanne, Laurent Catala, Églantine Chabasseur, Franck Cochon, Isadora Dartial,Jacques Denis, Patrick Labesse, Anne-Laure Lemancel, François Mauger, A<strong>le</strong>xisMunteanu, Jérôme Pichon, Mathieu Rosati, Yannis Ruel, Sara Ta<strong>le</strong>b, Squaaly, CarèneVerdon, Hortense Vol<strong>le</strong>.antoine@mondomix.commathieu@mondomix.comTirage 100 000 exemplairesImpression Rotimpres, EspagneDépôt légal - à parutionN° d’ISSN 1772-8916Copyright <strong>Mondomix</strong> Média 2009- Gratuit -RéalisationAtelier 144info@atelier144.comtél. 01 56 03 90 87Toute reproduction, représentation, traduction ou adaptation,intégra<strong>le</strong> ou partiel<strong>le</strong>, quel qu’en soit <strong>le</strong> procédé, <strong>le</strong>support ou <strong>le</strong> média, est strictement interdite sans l’autorisationde la société <strong>Mondomix</strong> Média.<strong>Mondomix</strong> est imprimésur papier recyclé.

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