56KANA"Les fous, les savantset les sages"(MVS Records/Anticraft distribution)Plutôt bien remis de ses déboiresagricoles (le plaisant hit " Plantation "de 2002), Kana revient avec cetalbum touche-à-tout. Une joliesurprise. S’affranchissant de sonétiquette "reggae français" mais nel’abandonnant pas totalement, legroupe fait de la "variété" (fautede meilleur terme) de haut calibrevenant s’inscrire dans l’honorablelignée "France métissée" <strong>des</strong> ManuChao, Lavilliers, Sergent Garciaet consorts avec rumba/calypsohybride ("Sin Amor", "Bailamas"),samba/<strong>du</strong>b décalée ("Colores dela Vida "), funk morriconien ("125thstreet Harlem"), plus quelques touchesalter, écolo et philosophie rasta,mais jamais dans le genre prisede tête. Tout dans la joie et la bonnehumeur. J.P.BSABA"JIDKA"(Riverboat Records/World Music Network/Harmonia Mundi)Incarnation vivante <strong>des</strong> bienfaits<strong>des</strong> mélanges, Saba, née de mèreéthiopienne et de père italien, signeun premier opus à cheval entre lesdeux continents où elle a grandi.Enregistré avec quelques musiciensouest-africains et pro<strong>du</strong>itpar Fabio Barovero (Mau Mau, LaBanda Ionica), cet album revendiquesa part de mondialisation.Chantés principalement dans undialecte somalien, les textes deSaba témoignent de la <strong>du</strong>reté de lavie en Afrique ("I Sogni", "Melissa","Je Suis Petite"...), mais saventaussi parler de plaisirs simples,instantanés ("Manta"), d’amour ou<strong>du</strong> lien qui nous unit aux ancêtres("Hanfarkaan"). Suffisamment passe-partoutpour être agréables, ces12 titres manquent toutefois d’unzeste de rugosité pour griffer la mémoire.SQUn joursur le 6 ème continent.Par SquaalyTour <strong>du</strong> <strong>monde</strong> en 24h <strong>des</strong> musiquesqui se moquent <strong>des</strong> maniaques<strong>du</strong> rangement et <strong>des</strong>hystéros de la petite boîte, cettesélection démarre en Autricheavec un groupe de ska balkanorusse<strong>du</strong> nom de Russkaja. Voussuivez ? Composé d’un batteuranglo-austro-hongrois, d’unvioloniste teuton, d’un bassisteukrainien, d’un trompettiste, d’unsaxophoniste et d’un guitaristeautrichiens, ce gang aux chemisesrouges n’est, comme leprécise la bio, vraiment bien chezlui que sur scène. Ce qui pourraitn’être qu’un mauvais gag façon"Licence 4" vire à la bonne surpriseà grand renfort de bonnesbrassées de cuivres étincelants,d’une énergie à toute épreuve etd’une bonne dose de vodka. Touty passe sur Kasatchok Superstar(Chat Chapeau/Nocturne), <strong>des</strong>lamentos, à vous rendre neurasthéniquetout un cabaret russe,au kasatchok, la célèbre danse<strong>des</strong> Cosaques.Toujours dans la périphoniebalkanique, les Grecs d’ImanBaildi sont déjà, eux, dans l’èreélectronique, samplant à tour deboucles <strong>des</strong> bribes de rythmesou de mélodies piochées sur <strong>des</strong>disques d’un autre temps qu’ilscouchent sur <strong>des</strong> poum tchipoum tchi élégants. Découvert enFrance lors <strong>des</strong> dernières Transmusicalesde Rennes, le groupea tout juste un album à son actif,signé l’an passé en Grècepar Capitol (EMI) et malheureusementpas encore distribuédans l’hexagone. Il le mériteraitd’autant plus que sur la dizainede plages, toutes celles où surnageune voix (qu’elle soit humaineou instrumentale) sont de bellesréussites qui peuvent faire penserpar leur traitement <strong>du</strong> son auxpièces de Gotan Project. Voisin luiaussi, quoique installé à Londresdepuis <strong>des</strong> lustres, le Turc Oojamia publié outre-Manche à la finde l’an passé Boom Shinga Ling,son troisième album aux stanceselectro’turco’muffin (disponiblesur www.oojami.co.uk). Dernieralbum : Arambol (Arambol Expérience/Pias)comporte deux CDset un DVD retraçant en images etmusiques l’aventure d’une bandede musiciens et pro<strong>du</strong>cteur baséeà Arambol (Goa) et désireuxde "faire de la musique de manièredifférente en loin de la pression<strong>du</strong> <strong>monde</strong> moderne" (sic). Aventureélectro-vivifiante qui laissepeu de place au final aux musiquesde la région, Arambol reflètebien quarante ans après larévolution beatnick, une espéranceprofonde d’un autre <strong>monde</strong>…qui sait, d’un 6 ème continent ?
Dossier inde - mondomix.com - 57Collection// Paris Jazz CornerTexte Philippe KrümmLe label Paris Jazz Corner sort six petitespépites extraites d’une mine incroyable :les catalogues EMI-Parlophone India <strong>des</strong>années 50. Responsable de cette collection,Jean-Baptiste Puyraud nous la présente.En route pour Bollywood !Jean-Baptiste Puyraud travaillait déjà dans le disque quand ilrencontra les Indiens qui avaient racheté le catalogue EMI ParlophoneIndia, abandonné par la major qui préférait développerles stars anglo-saxonnes. Aujourd’hui, cette société, SaregamaIndia, possède 90 % <strong>des</strong> musiques de film depuis le début <strong>du</strong>cinéma parlant… Jean-Baptiste met un an pour comprendre etsélectionner les titres de ses compilations. "J’ai écouté <strong>des</strong> dizainesd’heures de musique. J’ai travaillé à distance. Je ne suisjamais allé en Inde, l'Inde est venue à moi. Cela peut semblerbizarre ! Cela m’a un peu dérangé au départ, mais je me suis ditque les musiques de films, c’était fait pour voyager."Le choix chronologique est axé autour <strong>des</strong> années 50, car les spécialistesconsultés lui confirment que c’est l’âge d’or. "J’ai travailléau feeling avec mon goût de petit occidental parisien, pour uneoreille européenne", précise Jean-Baptiste. "Je n’ai pas cherché àfaire un travail d’érudit. Je voulais présenter d’une manière facile cequi est pour moi de la pop, de la world, de la comédie musicale."Jean-Baptiste a donné un thème à chacun <strong>des</strong> six volumes. Lesdeux premiers sont consacrées aux sœurs Lata Mangeshkar etAsha Bhosle. Les n°1 de cette époque. Imaginez qu'à elles deux,elles ont ven<strong>du</strong> plus de disques que les Beatles ! Bollywood Divas- le volume 3 et chouchou de notre compilateur - offre un panelde voix féminines : "J’aime beaucoup ce CD. Certaines de cesfemmes ont eu <strong>des</strong> <strong>des</strong>tins terribles après avoir été <strong>des</strong> déessesvivantes. Elles ont complètement disparu. Parfois, elles vivent toujoursalors qu’on les croit mortes ! Elles sont dans un dénuementtotal, recluses dans <strong>des</strong> ghettos à la périphérie <strong>des</strong> villes. C’est lecas de Chad Chad Begoum."Bien sûr, les hommes sont présents avec le volume 4, BollywoodCrooners, un patchwork de sé<strong>du</strong>cteurs à la voix de velours. Lafine sélection met aussi l'accent sur les <strong>du</strong>os avec le volume 5,Bollywood Duets. Pour Jean-Baptiste Puyraud, "c’est un peuStone et Charden, <strong>des</strong> moments romantiques ou parfois amusants".Pour clore ce splendide panorama, Bollywood Bizarro estun must : vos tympans vont croiser <strong>des</strong> yodels, <strong>des</strong> valses, de laguitare hawaïenne, <strong>des</strong> mambos... De l’exotisme pur jus vu parle prisme <strong>des</strong> goûts indiens ! "Si, en plus, ces disques pouvaientinciter les gens à voir les films, ce serait une belle victoire. Car lamusique est vraiment superbe, mais avec les images, on peutatteindre le sublime !"