50Gabi Lunca"Sounds from a bygone agevol. 5"(Asphalt-Tango Records/Abbeille Musique)Délectons-nous encore de l’art <strong>des</strong>lautari, si méprisé en Roumanie autemps de Ceausescu ! Après le fabuleuxvioloniste Ion Petre Stoican,Romica Puceanu (la "Billie Holiday<strong>des</strong> Balkans"), Dona Dumitru Simicachanteur à l’incroyable falsettoandrogyne, et le grand maître <strong>du</strong>cymbalum Toni Iordache, un nouveautrésor s’ajoute à la collectionSounds From a Bygone Age (sonsd’une époque révolue) avec celleque l’on surnomme la "Tzigane <strong>des</strong>oie". Ce nom parvient-il à tra<strong>du</strong>ireentièrement la douceur voluptueuse<strong>du</strong> timbre de Gabi Lunca ? Àvous de juger avec ces onze perleschoisies avec un goût très sûr parHenry Ernst et Helmut Neumanndans un répertoire enregistré parla "divine" entre 1956 et 1978. Ceschansons font partie de ce que l’arttzigane roumain a pro<strong>du</strong>it de plusbeau.FBDulce Pontes"EL CORAZON TIENETRES PUERTAS"(Ondeia/Le son <strong>du</strong> Maquis/Harmonia Mundi)Somptueux digipack (2 CDs et1 DVD), ce "cœur à trois portes"est celui d’une femme à la voixpure. Derrière <strong>des</strong> allures de diva,la Portugaise Dulce Pontes libèrela tradition musicale <strong>du</strong> "Finistèreibérique" Bien sûr, en écoutantDulce Pontes, on pense aux gran<strong>des</strong>âmes, aux gran<strong>des</strong> damesqui ont marqué l’histoire <strong>du</strong> fado,cette nostalgie poétique populaireapparue au début <strong>du</strong> XIX ème siècleet véhiculée de taverne en taverne,avant que la radio et le phono neprennent le relais. Mais on penseaussi aux jeunes pousses qui,depuis une quinzaine d’années,naviguent dans son sillage avecrespect et amour. Sur le DVD, outreun "live" à Istambul, <strong>des</strong> imagesde l’enregistrement dans une églisesans public, vous trouverez une interviewde la chanteuse en portugais(sous-titrée en espagnol).SQTomatito"Anthology"(Universal Jazz)Prolongement de l'instrument,Tomatito se fond avec sa guitare :un <strong>du</strong>o créatif et inspiré par l'âmeflamenca, dont il explore toutesles couleurs, <strong>des</strong> bulerias auxsoleas, <strong>des</strong> tangos aux rumbas.L'anthologie revient sur les dixdernières années (1998-2008) etsalue l'art de cet ambassadeur <strong>du</strong>flamenco moderne, aux dix doigtssolidement ancrés dans la tradition.Les collaborations qui jalonnèrentsa route éclairent le double-album :le mentor Camaron de la Isla, dontil fut l’accompagnateur - <strong>des</strong> titresbizarrement issus de l’album Paris87 ! - ou encore le cantaor Diego ElCigala. Réunion d'extraits d'albumset de lives, Anthology retrace bienla palette hétéroclite d'un musicienaussi à l'aise dans son art quesur <strong>des</strong> reprises de Chick Corea,Carlos Gardel ou Astor Piazzolla,en <strong>du</strong>o complice avec le pianistede jazz dominicain Michel Camilo.Restent bien sûr son jeu virtuose,son génie de la "toque", ses notesron<strong>des</strong> et savoureuses, son charisme,son sens inouï <strong>des</strong> envoléesmélodiques. Une parfaite intro<strong>du</strong>ctionà sa musique en particulier etau flamenco en général. AllGABRIEL YACOUB"DE LA NATURE DES CHOSES"(Le Roseau /Harmonia Mundi)La foisonnante saga de GabrielYacoub, musicien historique dela scène folk française (pardon,aujourd’hui dites "world") et surtoutvéritable "songwriter", continueavec ce nouvel album. Lescompositions de Yacoub, portéespar sa voix particulière, sont toujoursempruntes de tendresse, derêves, d’histoires qui rapidementnous emportent l’esprit dans detroublants vagabondages. Les arrangementssont aussi riches demusiciens aux univers pluriels qued’instruments divers : vielle, banjo,harmonium, "pedal steel guitar",autoharpe, celesta, bugle, tuba…Le premier titre donne le ton : "Toutest là qu’on se le dise/et qu’on necherche pas plus loin/le bonheurest ici à portée de main/à l’intérieurde nos cœurs au fond <strong>du</strong> jardin".Pour nous, tout est déjà là dans cedisque... P. K.
51Kabbalah"Shlomo"(Kabbalah Music/Mosaïc Music)Enfin disponible à l’international,c’est-à-dire au-delà <strong>des</strong> frontièresmarseillaises à l’intérieur <strong>des</strong>quellesvit et répète Kabbalah, ce Shlomo,comme tout premier album, traceses propres limites. Si ici le territoirecirconscrit est délibérément klezmer,le propos <strong>du</strong> quintet se joueà la périphérie. Un pied dedans, unpied dehors ! A cheval sur le mur !Territoires libérés <strong>des</strong> contraintes,même si encore un peu soushaute surveillance, ces dix plagestaquinent gentiment la mystiquejuive, courtisent le jazz et flirtent <strong>du</strong>bout <strong>des</strong> lèvres avec le hip-hop.Rapports protégés qui, depuis leurenregistrement, ont gagné assezen assurance sur scène pour fairevoler le "kappelé" noir, ce couvrechefaux formes arrondies lancé ensigne de contentement. SQR-Wan"Radio Cortex 2"(2T3M/Pias)R-Wan, l’un <strong>des</strong> fondateurs deJava, continue son exploration d’unrap à l’humour réjouissant et sansfrontières musicales. Radio Cortex2 sé<strong>du</strong>it d’abord par l'inventivitéde sa matière sonore, toujoursadaptée au propos : <strong>des</strong> violonsde "Pro Log" à l’accordéon <strong>du</strong>grivois "Coulis Sur L'Ananas", enpassant par le piano boogie rétro etla clarinette de "Long Song Single",R-Wan parvient le plus souvent àconcilier humour et commentairesocial, comme sur "Coin Coin",narrant les mésaventures d'un employéde Disney déguisé en Donald,ou "Quand On Est Riche", sur lequelun orgue très lounge seventies soulignel'ironie <strong>des</strong> paroles. "Demain",en <strong>du</strong>o avec Winston McAnuff, démontreque R-Wan ne perd rien <strong>des</strong>on talent lorsqu’il adopte une tonalitéplus grave. Bertrand BouardMostar SevdahReunion"Café Sevdah"(Snail records)Il suffit de reposer le disque sur laplatine pour être aussitôt emporté,encore une fois, par la magie<strong>du</strong> Mostar Sevdah Reunion (sansMustafa Santic, le fabuleux accordéonistequi rythmait les premierspas internationaux de ce All StarBand bosniaque il y a maintenantcinq ans, ni la voix chaude d'IlijazDelic). Seul maître <strong>des</strong> lieux désormais,le guitariste Miso Petrovic,épaulé de son fidèle rythmeur SandiDurakovic. Il n'empêche. Les voix,plus variées, chœurs féminins parfois,restent justes et poignantesdans un écrin d'une rare finesse.Swinguant et chaleureux, commeles cafés sarajéviens auxquelsil rend hommage non sans unecertaine nostalgie. Brûlant, épaiset doux. Un régal. Jean-StéphaneBrosseSanta MacairoOrkestar"Paparazaï"(New Speed/Pias)Pour son troisième album, le SMO,quintet survolté <strong>du</strong> Maine-et-Loire,offre une vaste palette de morceauxinspirés de l'esprit alternatif, <strong>des</strong>Balkans, de la tradition klezmer,jusqu'aux fanfares louisianaises.Reverend Krug de Mardi GrasBB est invité sur quatre titres qu'ildécline sur un deuxième CD deremixes. Cette générosité touche,mais trouve aussi ses limites dansla formule un peu monotone quiconsiste à tout conjuguer à l'énergie<strong>du</strong> live, <strong>des</strong> cuivres aux voix, sanstrop de place pour s'évader enterritoire inconnu. C'est le schématypequi nous emmène aujourd'hui<strong>du</strong> No Smoking de Kusturica àquantité de groupes tzigano-rockhexagonaux. Une certaine écoledonc, sûrement plus lassante surdisque que sur scène. JSB