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l'actualité des cultuRes du monde - Mondomix

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En couverture afrique mondomix.com - 35Rokial'exploratrice// Rokia Traoré MaliTexte Jérome Sandlarz Photographie BanjeeSur son quatrième album, Rokia Traoré flirteavec le blues et le rock tout en restant fidèle à lamusique malienne. Entre tradition et modernité,Afrique et Occident. Assurément, Tchamantché("équilibre" en bambara) porte bien son nom.En célébrant le mariage heureux entre le n'goni, tout petit luthd'Afrique de l'Ouest, et la guitare électrique Gretsch, instrument<strong>des</strong> orchestres américains de rockabilly <strong>des</strong> années 50 et 60,Rokia Traoré a réussi la synthèse parfaite. Une rencontre audacieusequi permet à sa voix, successivement cristalline, sensuelleet rocailleuse, de prendre son envol en bambara, français ou anglais.Sa version de "The Man I Love" de Billie Holiday - totalementmétamorphosée - est l'une plus belles surprises de cet album quiaurait pu s'intituler... "Des Racines et <strong>des</strong> Ailes", mais d'autres yont déjà pensé.Avec votre père diplomate, vous avez été amenée à beaucoupvoyager. Dans quelle mesure cela a-t-il forgé votre identité ?Je suis née au Mali, mais j'ai quitté mon pays dès l'âge de quatreans pour suivre mon père au gré de ses nominations en Europe,aux Etats-Unis et au Moyen-Orient. Nous passions en moyenneentre trois et cinq ans dans chaque pays et cette errance perpétuellen'a pas toujours été facile à vivre. C'est la musique quim'a finalement permis de me retrouver, d'assumer cette identitémosaïque et de la vivre comme une richesse. C'est à travers elleque j'ai exploré mon histoire. Aujourd'hui, je me sens à la fois profondémentmalienne, et en même temps, je cultive cette curiositéliée à mon enfance. Partout où je vais, je cherche à m'imprégnerde la culture locale, à vivre avec les gens, à saisir leur humour...Même si je n'ai pas grandi au Mali, j'en connais souvent plus surmes origines que certains de mes cousins ou cousines qui ontgrandi là-bas. Lorsqu'ils se demandent de quel village était notrearrière-grand mère, ils s'adressent à moi, parce qu'à un momentdonné, j'ai fait toutes ces recherches.Tchamantché semble un peu moins ancré dans la tradition queles précédents albums, avec notamment la présence de la guitareélectrique Gretsch qui apporte une couleur musicale plusrock, plus blues. Comment expliquez-vous cette évolution ?J'ai eu envie de me détacher de tout ce que j'avais développépendant dix ans pour revenir à ce qui m'avait initialement attirédans la musique, à savoir le rock, la guitare, le blues. Au début dema carrière, j'ai eu le besoin de renouer avec ma famille restée auvillage, dans la région <strong>du</strong> Bélédougou, au Nord-Est de Bamako.C'est lors de fêtes de mariages et de baptêmes, où j'allais avecma mère, que j'ai découvert un instrument comme le gros balafon,les chants et les orchestrations de chez moi. Le fait de travailleravec <strong>des</strong> instruments acoustiques traditionnels correspondait àce besoin de renouer avec mes racines. Cette démarche a <strong>du</strong>réune dizaine d'années, le temps de trois albums, et ça m'a faitbeaucoup de bien. Aujourd'hui, le fait de me savoir enfin à maplace me donne la liberté d'explorer d'autres univers musicaux,mais je n'ai pas vraiment l'impression d'aller vers le blues. Leblues est en moi. Lorsque j'ai commencé à chanter, j'étais justeaccompagnée de ma guitare, et puis n'oublions pas que legrand Ali Farka Touré, paix à son âme, disait que le blues est partid'Afrique.Vous revisitez "The Man I Love",grand classique de Billie Holiday.Il fallait oser...Ca peut paraître totalement inconscient,je le reconnais, mais j'adoretellement cette chanson que je nevoyais pas pourquoi je devrais mepriver de ce plaisir. Il ne s'agit évidemmentpas de se mesurer à BillieHoliday, mais tout simplement de luirendre hommage. En 2005, dans lecadre d'une tournée américaine quiréunissait Dianne Reeves et FontellaBass (égérie soul <strong>des</strong> années60, ndlr), j'ai été invitée à participerà Billie And Me, un spectacle consacréà la vie de Billie Holiday. Acette occasion, j'ai chanté en <strong>du</strong>oavec Dianne Reeves le morceau"Strange Fruit", qui fait référenceà <strong>des</strong> corps d'esclaves pen<strong>du</strong>s à<strong>des</strong> arbres dans le Sud. Rien qued'en parler, cela me donne <strong>des</strong> frissons...D'ailleurs, sans la présencede Dianne Reeves à mes côtés, jene me serais jamais autorisée à lachanter. Cette histoire, c'est avanttout la sienne, pas la mienne...L'an dernier, vous avez collaboréavec Peter Sellars pour la célébration<strong>du</strong> 250 ème anniversaire dela naissance de Mozart à Vienne.De quoi s'agissait-il exactement ?Peter est un metteur en scène quimonte beaucoup de projets, que cesoit autour de l'opéra, <strong>du</strong> cinéma oude la littérature. Il avait découvertBowmboï, mon disque précédent,et m'a proposé d'assurer la partiemusicale de cet événement. Au début,j'ai été totalement surprise, unpeu impressionnée aussi, puis il m'amise en confiance. J'ai donc imaginéune histoire située dans l'Empiremandingue au XIII ème siècle où Mozart,devenu Djelimady, était le griot<strong>du</strong> grand chef Soundiata Keita. Labande-son faisait se côtoyer FantaDamba N°2, Billie Holiday, Björk...bref, <strong>des</strong> tas d'artistes pour lesquelsj'ai beaucoup de respect. Ily avait <strong>des</strong> photos, l'histoire étaitlue par Romane Bohringer et DominiqueFarcas et c'est moi qui interprétaisles chansons. J'adore cegenre de collaboration inatten<strong>du</strong>e,comme ce fut aussi le cas avec leKronos Quartet.Dans la chanson "Tounka", vousabordez le thème difficile del'immigration clan<strong>des</strong>tine versl'Europe. Que pensez-vous de lapolitique française à l'égard <strong>du</strong>Mali ?Je suis effrayée par le mépris affichépar le Président Sarkozy dans sondiscours prononcé l'an dernier àl'université de Dakar. Selon lui, noussommes "à la marge de l'histoire",donc pas très intéressants en termesde collaboration économique.Je pense que France-Chine ouFrance-Inde a beaucoup plus <strong>des</strong>ens aujourd'hui. Je compte surl'esprit militant pour voir émergerd'autres avis que le sien, mais aussiet surtout sur nos dirigeants pourarriver à se faire respecter, parceque l'Afrique regorge de richesses.Notre continent sera respecté ounon en fonction de ce qu'il pèseraéconomiquement.LIENS"À suivre" sur <strong>Mondomix</strong>.comRetrouvez Rokia Traoré sur notresite : www.mondomix.comDehors... en concertsLe 10 juin à La Cigale à Paris (75)À écouterRokia Traoré, "Tchamantché"( Universal Jazz )Site web de l'artistewww.rokiatraore.net

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