32 - mondomix.com europe créationBretagne-Centre-<strong>du</strong> <strong>monde</strong>Ainsi formée, la petite bande s’est mise au travail. "Par étapes, en plusieurstemps de résidence, on a façonné notre répertoire. Je n’avaispas d’idée arrêtée sur le chemin que nous allions emprunter ensemble.On a pris le temps de chercher, d’expérimenter, en donnant parfoisnaissance à plusieurs moutures d’un même titre", explique-t-elle.A entendre le résultat, il ne fait aucun doute que cette aventure a ététrès riche : <strong>des</strong> chants traditionnels à danser (kan ha diskan) ou àécouter (gwerzioù et sonioù), ainsi que quelques récentes compositions,fruits de ces rencontres aussi heureuses qu’inatten<strong>du</strong>es. Sur"An Teod Miliget", première <strong>des</strong> "traces" de cet album, le souffle profondde l’harmonica bluesy d’Olivier Ker-Ourio accueille avec une délicatesseextrême la voix d'Annie au phrasé rythmé. Qu’ils dialoguent,comme ici, qu'ils échangent à trois ou débattent à quatre, comme sur"Perak Ma Zimeer Ma Mamm", un titre où le chant sautillant d’Annieest à la fois porté par la frappe nerveuse et aérienne de Bijan (soutenupar la guitare de Pierrick et prolongé par le souffle d’Olivier), le quartetne s’égare jamais dans <strong>des</strong> verbiages sans fin.// Annie Ebrel BretagneTexte Squaaly Photographie Sylvie Le ParcEnrichi par <strong>des</strong> musiciens d'horizons différents(Olivier Ker-Ourio, Bijan Chemirani, Pierrick Hardy),le nouvel album d'Annie Ebrel est un symboled'ouverture. Mais Roudennoù, qui signifie"empreintes", "traces", marque aussi sonenracinement aux traditions bretonnes.Rencontre(s)."J’avais envie d’harmonica sur cet album", se souvient AnnieEbrel, qui pense alors comme une évidence à Olivier Ker-Ourio, unharmoniciste réunionnais d’origine bretonne qui a travaillé avecJacques Pellen, Danyel Waro, Michel Petrucciani ou Didier Lockwood."C’est lui qui m’a parlé de Pierrick Hardy", ajoute la chanteuse repéréepour sa voix et pour son goût pour les collaborations (avec le contrebassisteRicardo del Fra, entre autres). Guitariste né à Dinan, Pierrickest aussi compositeur et arrangeur. "Il a eu en charge la cohérence <strong>du</strong>projet, régulant nos envies, nos trouvailles." Pour ce qui est <strong>du</strong> choix<strong>du</strong> percussionniste, le nom de Bijan Chemirani, benjamin d’une illustrefamille de percussionnistes iraniens, s’est imposé à eux. "Nous étionstous enthousiastes à l’idée de travailler avec lui.""Pierrick, qui a endossé avec une belle élégance le rôle de directeurartistique, a su aiguiser la liberté d’expression de chacun de nous,tant lors <strong>des</strong> séances de travail que pendant l’enregistrement, ouaujourd’hui pendant nos concerts", analyse Biran Chemirani depuisMarseille. Le percussionniste, quand il ne joue pas avec son père(Djamchid) et son frère (Keyvan) au sein <strong>du</strong> trio familial, propose ausein de sa formation (Oneira) une virée au cœur <strong>des</strong> musiques traditionnellesde Grèce et d’Iran. "Je suis un buvard. Forcément, ces momentsde rencontre, ces instants uniques me nourrissent", poursuitBiran, mercenaire <strong>des</strong> percussions perses (daf, zarb…) invité par lesplus grands. "C’est au contact <strong>des</strong> autres qu'on progresse. Même si,dans l’absolu, la frappe d’un joueur de djembé ou ses rythmes n’a rienà voir avec ce que je fais, j’ai beaucoup à en apprendre. Lors de cetterencontre, Pierrick, qui joue aussi de la clarinette sur cet album, m’aaidé à repenser l’espace, à donner à la musique toute sa place." Enregistréen studio en amont <strong>des</strong> concerts, cette dizaine de plages au sonlimpide, sans effet, continue d’évoluer à chacune de leurs retrouvaillessur scène. De quoi justifier, d’ici quelques mois, un enregistrement liveà même de compléter ce fraternel et touchant témoignage.LIENS"À suivre" sur <strong>Mondomix</strong>.comRetrouvez Annie Ebrel sur notre site : www.mondomix.comDehors... en concertsLe 7 juin à L'Haye les Roses (94)À écouterAnnie Ebrel Quartet, "Roudennoù" (Coop Breizh)"Je n’avais pas d’idéearrêtée sur le cheminque nous allions emprunterensemble. On a pris le tempsde chercher, d’expérimenter..."
Premier pas afrique mondomix.com - 33Le prix <strong>du</strong> chant// Mounira Mitchala TchadTexte Bertrand Bouard Photographie Pierre-René WormsLauréate <strong>du</strong> prix RFI Découvertes 2007, Mounira Mitchala insuffleà la musique traditionnelle tchadienne une énergie revigorante. Etcaresse le rêve d'ouvrir <strong>des</strong> portes aux artistes de son pays, qui ontbien <strong>du</strong> mal à exister. À suivre à Musiques Métisses d'Angoulême."J’ai toujours rêvé d’être chanteuse.Petite, lors de concours à l'école, j'imitaisWhitney Houston et je gagnais toujours",raconte Mounira avec un joli sourire.Son rêve est devenu réalité grâce à sonopiniâtreté : vivre de la musique au Tchadrequiert <strong>des</strong> trésors de volonté. Très peude studios ou de lieux pour se pro<strong>du</strong>ire,pas de pro<strong>du</strong>cteurs ou de managers. Sanscompter les a priori culturels : "L'artisteau Tchad est un peu considéré commequelqu'un qui ne vaut rien..." Mounira, dontla grand-mère est chanteuse de cérémonie,a pu heureusement s'appuyer sur sa famillepour briser les tabous. Son père, enseignanten linguistique, lui a fait découvrir dansson enfance les musiques <strong>des</strong> différentesethnies <strong>du</strong> Tchad, ainsi que le blues et lejazz américain.En 97, Mounira décide de devenirchanteuse, mais fait d'abord un détour parle théâtre pour vaincre sa timidité. Elle écriten 2000 sa première chanson ("d’amour",précise-t-elle en rougissant à moitié), puisintègre différents groupes afin d'acquérirde l'expérience. Elle côtoie alors les artistesinternationaux de passage à N’Djamena,dont Ismaël Lo et Tiken Jah Fakoly. Enpartant <strong>des</strong> mélodies qui lui viennent,Mounira finit par composer de nombreuseschansons, suffisamment pour un premieralbum. Au cœur de ses préoccupations,l’unité <strong>des</strong> Tchadiens, qui se retrouve defaçon très concrète dans sa musique. "AuTchad, il existe une division entre le Nord etle Sud depuis la guerre de 79, mais il nousfaut tourner la page. "Talou Lena", le titrede mon album, signifie : "unissons-nous","retrouvons-nous ensemble". Je chanteen arabe tchadien, qui est compris <strong>du</strong>nord au sud. Et je mélange les musiquestraditionnelles et modernes en prenant <strong>des</strong>rythmes de tout le pays. Il existe 200 ethniesau Tchad et <strong>des</strong> richesses culturellesextraordinaires. Au nord, le désert : lamusique se danse avec la poitrine. Ausud, les forêts : on danse avec les reins,alors qu'au centre, les montagnes, c'estpar le cou. Les rythmes et les instrumentschangent d’une région à l’autre."Synthèse très personnelle de toutes cesmusiques, le premier album de Mounira,enregistré au Tchad en 2006 en l'espace de8 mois, lui a permis de décrocher un contratavec le label Marabi un an plus tard, puisde remporter le concours RFI Découvertes2007. Une reconnaissance dont Mouniraa profité immédiatement pour appeler à lapaix dans son pays, elle qui ne ne connaîtque trop le tribut payé par les Tchadiens àla guerre (elle dût fuir au Cameroun avec safamille en février 2008, lors de l’avancée<strong>des</strong> troupes rebelles venues <strong>du</strong> Soudanpour renverser le gouvernement d’IdrissDéby). "Dans mes chansons, je parle demettre en valeur la culture, car la musiqueé<strong>du</strong>que et peut changer un pays. Il fautpenser à l'avenir <strong>des</strong> générations futures etleur préparer un terrain de paix."LIENS"À suivre" sur <strong>Mondomix</strong>.comRetrouvez le reportage sur Musiques Métissessur notre site : www.mondomix.com