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LIGUE DE I/ENSEIGNEMENÏCercle d'AlgerCONFÉRENCESSURL'HYGIENEPAR LED'R. ANDREINIFévrier,Mars et Avril 1872ALGERTXPOGRAPHIE DE L'ASSOCIATION OUVR1ÈRE V . AILLAUD ET O1872


M. \i * ''^"•O*4;. 3? ii.A JEAN MACEFONDATEUR DE LA LIGUE DE L ENSEIGNEMENT EN FRANCED'R. Andrelni.


—6-poursuit depuis quelques années en Fronce par laLigue de l'enseignement : répandre l'instruction etvulgariser la science.Je ne reviendrai donc pas sur ce qui a été dit,compris, adopté. Je vousraconterai simplementune histoire, un apologue, si vous aimez mieux,qui, bien que de date ancienne, ne manque pasd'être toujours vrai.La conclusion qui ressortira de cet apologueest due à une femme. C'est donc un moyen de recevoir avec courtoisie les Dames qui nous ont fait lagracieuseté de venir s'asseoir parmi nous. Et c'estheureux ; car une œuvre d'instruction ou d'éducation sans le concours de la femme est une œuvreimpossible.Voici l'apologue :Des captifs, les uns prisonniers de guerre, lesautres enlevés par les pirates, étaient entassés dansune galère grecque de Ténédos ; le maître de la galère cinglait vers un port de l'Italie ou Grande-Grèce, où ii allait les vendre. Au milieu de la nuit,les captifs réussissent à briser leurs liens et à s'emparer de l'équipage. Ce fut une grande fête, unefête générale, bruyante, indescriptible ; l'Océan.n'avait jamais entendu de dta-eils cris de joie.Le lendemain matin, unf femme, écoutez bien,la seule femme qui se trouvait parmi les captifs,voyant que le même vieillard de la veille tenaittoujours le gouvernail,gnons et leur dit :s'approcha de ses compa« Une chose pourtantm'inquiète, c'est de voirque vous laissez le gouvernail entre les mains decelui qui était chargé de nousché. »•conduire au mar» Bah ! répondirent les captifs en— allégresse,


—7 —ne voyez-vous pas ma chère amie,que ce veillardregarde dans les nues et qu'il ne cherche qu'à nouspréserver de tout danger? Auriez-vous peur dece bâton vermoulu dans ses mains tremblantes?Allons donc ; c'est de la folie, vous avez besoin—d'hellébore. Du reste, il nous faut, bon gré malgré, nous rapporter à lui ; aucun de nous ne seraitcapable de gouverner vers les Iles Fortunées, où nousvoulons aller jouir de notre liberté. »Ainsi, ils—renvoyèrent la sage conseillère et continuèrent gaîmentle voyage.Cependant, le vieillard, toujours souriant, ne quittait pas le gouvernail et tenait ses yeux fixés sur uneétoile. Il se guida si bien qu'en rasant un rivage,d'un seul coup de timon, il mouilla le vaisseau dansle port. C'était le port de Tarente, fameux entretous pour la vente des esclaves.En un moment, les marchands qui attendaientla cargaison se précipitent armés sur les captifs,leur rendent les chaînes et les amènent. La joie—insouciante de la délivrance fut chèrement payéepar les misères,par les larmes de l'esclavage.—Faut-il vous développer la morale de ce récit ?Je ne le pense pas. Nul de nous n'ignore que c'estl'instruction qui gouverne le monde, et lant quechacun ne saura pas ce qu'il fait, ce qu'il peut, cequ'il demande, où il va, on n'abordera jamais à ceslies Fortunées vers lesquelles navigue notre imagination, aussi bien que celle des captifs de Ténédos.La femme qui se trouvait parmi eux avait raison ; sa crainte était juste, c'était la sagesse même :il ne fallait pas se confier aveuglément a 1 instruction de ce vieillard qui faisait route pour Tarente, ilaurait fallu avoir étudié les étoiles, surveillé samarche et dirigé la galère vers les Iles Fortunées.


— 8-J'arrive à l'Hygiène.L'Hygiène est l'art de conserver la vie et lasanté.Son nom, en effet, vient du grec et signifie sain.Dans la famille des sciences médicales, l'hygièneest, par conséquent, celle qui ne cherche qu'à faireau médecin praticien autant de loisirs qu'il est possible. Son but spécial esl de prévenir les maladies ; elle embrasse toutes les règles à suivre dansl'usage des choses internes ou externes, qui noussont nécessaires pour vivre toute la vie, pour jouirde toute la santé et pour produire tout le travaildont notre organisme individuel est Capable.Chacun comprendra facilement combien est gran—de et générale l'importance de l'hygiène : vivrele plus longtemps possible est le désir de presquetous les hommes ; vivre en bonne santé constituele bonheur le plus réel de la vie privée et la basede la prospérité publique ; écarter autant qu'on lepeut le médecin et les médecines, c'est éviter lessouffrances des maladies et les misères qui s'ensuivent, surtout pour les pauvres.Il serait bon peut-être de s'arrêter à ces considérations et de les développer pour vous faire mieuxapprécier et vous faire Smer davantage l'étude del'hygiène. Mais, comme nous seronsforcé d'y revenir à chaque moment et de les mettre en évidence à chaque cas particulier, et pour ainsi direà chaque chapitre, je préfère vous dire aujourd'huiquelque chose de général sur le passé, sur le présent et sur l'avenir de cette science.L'importance de l'hygiène pour l'homme et pourla société a été cause que son origine se perd dansl'obscurité des temps. Elle est antérieure à l'histoire et à l'apparition de l'homme lui-même sur


—9 —la terre ;car les animaux ont leur hygiène, et lesanimaux qui ont précédé l'homme en avaient une .Les mammouths, les éléphants, les ours, appartenant aux espèces éteintes aujourd'hui, qui se disputaient dans l'habitation des cavernes un abricontre les rigueurs du temps avant l'homme, suivaient déjà une règle hygiénique générale.Mais laissons ces réflexions anté-hietoriques pourarriver à l'histoire de l'hygiène.Tous les peuples, tous les législateurs, plusieursphilosophes, les prophètes eux-mêmes se sont occupés d'hygiène. Les Védas, les Avestas, la Bible,le Koran ;—Socrate, Pythagore, Lycurgue, Solon,Numa, Mohamed, Moïse, Contucius, Zoroastre,nous présentent les exemples les plus évidents deleurs préoccupations hygiéniques. Les premiers instituteurs de l'humanité allèrent si loin, qu'ayantà faire à des peuples primitifs ou demi-sauvages,ils voulurent s'assurer de l'observance exacte deleurs lois hygiéniques par la sanction religieuse.C'était un lien, un moyen d'obéissance à des prescriptions jugées nécessaires et utiles. Ainsi, les lotions, les ablutions, les liains, les immersions, lespurifications, les jeûnes, les mortifications, les abstinences, les séquestrations, la défense de toutesles viandes, k proscription des viandes impures,l'interdiction du vin, le ramadan, la circoncision,le carême et tant d'autres pratiques religieuses nesont en réalité que des règles d'hygiène, que l'on amises sous le nom de Brahama, de Manu, de Boudah,d'Ormuz, de Jéhova, ou de l'Ange Gabriel.A ces époques lointaines, les peuples ne possédant pas encore des règlements de police intérieureassez perfectionnés pour comprendre les prescriptions de salubrité publique, on les intercalait


—O-10—dans le code religieux. Elles devenaient dogmes.Dans l'Inde, le dogme de la transmigration desâmes avait été imaginé dans le but d'empêcher l'alimentation par la viande,alimentation que l'onconsidérait comme nuisible.La doctrine religieuse de l'Inde passa en Egypte.Ici les oignons et les navels prirent la place de laviande et des dieux, de sorte que le poète satiriquede Rome put djre des Egyptiens : O vous bienheuqui trouvez dans vos jardins de pareilles direux !vinités !nascun-sanctas génies, quibus hœctur in hortis numina.Ce qu'il y a de plus curieux à ce propos, c'estque les Juifs, arrivés dans le désert de Sin, se plaignirent amèrement à Moïse de ne pouvoir pasytrouver les concombres, les melons, les poireauxet les ails qu'ils avaient en Egypte. Moïse les apaisaavce le miracle des cailles ; mais cette nourritureproduisit parmi eux une telle mortalité, que le lieu,dit la Bible {Nombre XI, 54), fut appelé Sépulcrede concupiscence, Chibrot-Taava. Cela justifieraitla proscription hygiénique de l'alimentation par laviande en Asie.La métempsycose de Pythagore n'est autre choseque le dogme indien âtansporté par ce philosophed'Egypte en Grèce et ne Grèce en Italie, pour établir et pour faire adopter son régime hygiéniqued'alimentation exclusivement légumineuse ou végétale, qu'il croyait, en sa qualité de médecin, plusfavorable que tout autre à la tranquillité de 1 esprit et contraire aux passions.Les Chaldéens, d'après Sanconiaton, avaient faitune large place aux lois hygiéniques.Les Persans mettaientbeaucoup de méthode àils habituaient les enfants àélever la jeunesse ;


—Orandum-ii —toutes les privations et à toutes les fatigues ; on lesnourrissait d'eau, de pain et d'une espèce de cresson.Personne n'ignore le ranget l'extension queLycurgue accorda dans ses lois à l'hygiène et plusles femmesspécialement àla gymnastique. A Sparte,prenaient part à lous les exercices des hommesjusqu'au mariage. Le nouveau-né était plongé dansle vin ; l'enfant était habitué k la douleur, à la faim,à la soit, au froid. Les jeunes gens, filles et garçons, étaient élevés dans la sobriété, les privations,les travaux les plus pénibles et dans le mépris dudanger. Pour préserver les citoyens contre l'ivrognerie, on enivrait les Ilotes, leurs esclaves ;pourles garantir contre la débauche,on obligeait les jeunes filles à venir lutter nues dans l'arène, ou à sebaigner dans l'Eurota.Grecs et Romains mirent l'hygiène dans l'Olympe, au milieu de leurs divinités. Elle s'appelait ladéesse Hygie, fille ou femme d'Esculape, le dieu deia médecine.Les Romains comme les Grecs s'occupèrent beaucoup d'hygiène. Horace, Properce et Juvénal recommandaient de demander aux dieux la santé ducorps et la santé de l'intelligence :estmagisut sit mens sana in corpore sano. Leurs —trats donnaient beaucoup de temps à la salubritépublique ; les vivres, les maisons, les théâtres, lescirques, les aqueducs, le défrichement des terres,les dessèchements des marais, les égouts étaientsoumis à leur direction ; la cloaca maxima, égoutprincipal de la ville, est aujourd'hui encore un desplus beaux monuments de l'architecture étrusque.Mais, alors que de la putréfaction de la République romaine, germa l'empire, la ville entière de


—iî—Rome devint un grand, un immense cloaque, oùtous les vices et toutes les infamies, a écrit Tacite,affluaient et grossissaient. L'hygiène elle-même semétamorphosa en fléau. Les habillements, les bains,les jeux, la gymnastique, les repas dégénérèrent ensystème de luxe et de corruption, de boucherie etde débauche. Les matrones vinrent s'asseoir dansle cirque poury goûter la volupté du sanget desangoisses des gladiateurs ; les thermes se transformèrent en monuments grandioses de luxe effrénéde mollesse et de dégradation; les repas prirentde telles proportions, que l'on dut prédisposer l'estomac par une série de remèdes que nous nousdispensons d'énumérer ici et que l'on décora dunom barbare de Syrmaïsme. Si l'on eût découvertl'élégant mécanisme hygiénique de nos jours, ilest probable qu'on lui aurait réservé une place au—festin en le couronnant de roses et en le remplissant deFalerne !...Est-ce là l'art de la sauté? Est-ce là de l'hy—giène?— Non.Il n'ya qu'erreurs et préjugés, superstitions etimpostures, exagérations et —absurdités, ou toutau plus tâtonnements et empirisme, qui accusentl'enfance et l'imperfeolton de notre espèce.Le mérite d'avoir classé l'hygiène parmi les sciences médicales et d'avoir tracé les premières lignesde sa sphère d'action revient incontestablement àGalien. Depuis vingt siècles sa classification estcelle qui est le plus généralement suivie et qui sebase sur la diversité des fonctions de l'organismeanimal . C'est la division que nous suivrons nousmême.Oribase, Aëtius, Paul d'Egine, Alexandre deTralles, Boërhaave, hygiénistes distingués de diffé-


—Oui-13 -rentes époques, ont tous suivi et continué l'œuvredeGalien. Mais de Pythagore à Galien, de Galienà Boërhaave, de Boërhaave à Manlegazza, l'illustrehygiéniste contemporain d'Italie, les étapes sontlongues, les différences sont grandes.La méthode philosophique de Bacon produisitune révolution dans toutes les sciences physiques.Elles sont devenues expérimentales. Aujourd'hui iln'y a plus de dogmatisme indiscutable, ou d'empirisme pur : à la parole absolue et autoritaire dumaître on a substitué l'empirisme rationel, l'étuderaisonnée des faits et l'induction. Aujourd'hui,grâce à Bacon, la source de la science est l'observation. De nos jours, il n'ya plus une science quiobserve, pèse, mesure, analyse, raisonne, déduit ouinduit—et, d'autre part, une science qui prétendimaginer, deviner, révéler : une science qui n'affirme que ce qu'elle voit, touche et démontre,—et une science qui affirme tout ce qui lui convient,en dogmatisant, sans rien démontrer.L'hygiène ne peut donc se fonder que sur l'observation et sur l'expérience. Sur ce terrain, l'invention du thermomètre et de l'hygromètre, les loisde la transpiration et de la circulation, les analyseschimiques et surtout les progrès récents de la physiologie ont ouvert à 1 hygiène un horizon infini,une ère nouvelle.A ce propos, l'on m'a demandé : —«est-elle réellement une science ? »L'hygièneL'hygiène est l'art de la physiologie,c'est-à-dire, l'application de la science de la vie,car, vous ajouterai-je en passant, la physiologie estla science des actes de l'organisme et du mode de laproduction de ces actes.Prenons un exemple entre mille :La salubrité


—u —des habitations sous le rapport de l'air. La physiologie démontre que l'air respirable doit contenirenviron 21 parties d'oxygène, 79 parties d'azote,3 centièmes d'acide carbonique ; elle ajoute que l'airrespiré contient 5 %en plus d'acide carbonique eten moins d'oxygène.5 °/„« De là, dit Huxley, la nécessité d'une quantitéd'air suffisante et de ventilation pour tout êtrehumain. Pour respirer un air qui soit dans un étalde pureté suffisant, chaque homme doit avoir aumoins 22 mètres cubes pour lui seul d'un espacelibrement accessible à l'air atmosphérique, directement ou indirectement. Une chambre de 2ra 50 entous sens ne mesure que 15m 60 d'air. Il faut donc habiter une chambre qui ait au moins 3 m. par personnes, pour être dans de bonnes conditions. » (p. 116].Cependant l'application de l'hygiène à l'économiedes forces vitales, c'est-à-dire, au fonctionnementrégulier et utile de l'organisme entier,exigerait quela physiologie fût une science complète. Or, la physiologie est une science qui date pour ainsi dire deà lui faire unenotre siècle ; l'on travaillebeaucoupplace parmi les sciences exactes et positives, capable de réduire ses principes à des formules mathémathiques,mais le chAin est long, pénible, obscur.lie mystère de la vie est encore couvert d'un voileépais. On avance pourtant et chaque jour on fait unpas de plus. Comment pouvait-on dicter des loishygiéniques pour la respiration d'air pur,pendantque l'on ignorait la composition gazeuse de l'air,ou le besoin incessant qu'ont nos poumons d'inspirer, de brûler l'oxygène ? Comment pourrait-ondicter aujourd'hui l'hygiène économique du cerveau, puisque nous ignorons encore le mode deproduction de la pensée dans le labyrinthe des


-15-cellules nerveuses? Ainsi Auguste Comte avait tort,k mon avis, d'écrire une hygiène cérébrale,etFeuchtersleben avait un tort plus grand encore dedicter une hygiène de l'âme.Malgré ces difficultés, je vous ai dit que chaquejour on fait un pas en avant ; presque chaque jour,en effet, on détruit une ancienne erreur et on metà sa place une nouvelle conquête scientifique. Ladoctrine que les forces vitales étaient renferméesdans les corps organique ,comme l'eau dans uneéponge, est tombée. Les expériences modernes elcelles de Rumfort surtout nous ont appris que l'onpeut transformer de la chaleur en actions mécaniques, de la lumière en chaleur et de l'électricité onmouvement. On est près d'affirmer qu'un seul etunique mouvement éternel se modifie et se transforme de mille façons en ehaleu:, lumière, électricité, magnétisme, pensée peut-être. Bischoff etVoit ont déjà donné le nom d'aliments dinamogénétiques,ou créateurs de force, aux aliments plastiques ou toniques de Liébig.Les forces vitales n'ont été ainsi appelées quepour indiquer qu'elles appartiennent aux corps vivants ; mais rien ne nous autorise k affirmer qu'ellessont différentes des forces qui appartiennent auxcorps que nous désignons sous la dénomination decorps morts. La simplicité ou la complexité desphénomènes ne peut pas changer les lois fondamentales de la genèse des forces physico-chimiques dela matière. Quelles qu'elles soient, elles sont toujours le résultat de changements moléculaires. Sanschangement de forme ou de composition, sans destruction comme l'on dit, ou sans oxydation d'unecertaine quantité de matières animales, on neproduit ni mouvement, ni pensée.


———16-Dans les milb compositions et décompositionschimiques de notre organisation,nous avons undéveloppement de forces multiples et diverses quel'on peut dénommer et classer d'après leurs aptitudes et leurs effets. On peut les comprendre toutes dans un nombre limilé de catégories généraleset grouper toutes les forces de la vie, d'après la proposition de Mantegazza, en :Force végétative,musculaire,reproductive,—intellectuelle.Ce qui nous manque, ce que l'on n'a pas pu obtenir, ce qui reste toujours à l'état de desideratum,est l'analyse scientifique des forces vitales.Pour faire cette analyse, il faudrait posséder lebilan du corps humain, avoir réduit en chiffres lasomme de ses déments anatomiques et de ses composants chimiques. Une quantité donnée de carbone, d'hydrogène, d'oxygène, de nitrogène, de calcium, de phosphore, sous forme d'une quantité déterminée de cellules nerveuses, de fibrilles musculaires, d'épitellium, doit produire tant de chaleur,de mouvement et de pensée. La sortie doit êtreégale à la rentrée, la fcoduction égale k la consommation.La mesure des forces est le premier pas pour arriver à leur analyse et k leur connaissance. Mesurez, augmentez de quelques degrés l'électricité,vous verrez de suite l'économie sociale tout entièrechanger de face, vous verrez la locomotive reléguéeparmi les vieilleries du XIXe siècle.Malheureusement, les lorces vitales, par cela même qu'elles sont les moins connues, sont aussi lesmoins mesurées. Il n'ya que la force musculaire


-il-qui peut être mesurée par un dinamomètre. Cetinstrument grossier et sans précision, sert pourtantk donner le type de la moyenne de la force musculaire, et k permettre de classer les hommes en faibles, forts, très-forts, etc.Les physiologistes ont tenté de mesurer indirectement la force végétative ou force d'assimilation,c'est-k-dire, la force de la chimie organique qui esten réalité, la source de toutes les autres forces vitales. Ils ont analysé et pesé les excrétions de l'organisme, l'acide carbonique, l'eau, l'urée, etc. Maisla plus petite variation dans l'état de santé bouleverse tous les calculs physiologiques ; la fièvre brûleou détruit autant de matière vivante que l'enthousiasme intellectuel.La mesure de la force intellectuelle peut paraîtreplus que téméraire, sacrilège. Cependant, pour savoir au juste la force individuelle de mémoire quepossèdent dix personnes, on n'a qu'à leur faire apprendre dans une heure de temps, le nombre devers qu'elles pourrontrépéter;puis les leur faire répéter de nouveau un mois après. A la suite de cesdeux épreuves on pourra classer chacune de cespersonnes selon sa force d'assimilation et selon saforce de rétention des connaissances acquises.A des forces si peu étudiées et si peu connues, ilesl donc bien difficile d'assigner une législationéconomique. Par conséquent l'hygiène comme artde la physiologie, ne peut être qu'imparfaite. Pensons néanmoins que l'arl devance quelquefois lascience et que nous possédons le télégraphe sansconnaître l'électricité.Déjà l'on peut dire que l'économie des forces vitales ne consiste pas dans l'avarice de la vie. J'aiannoncé plus haut que les forces ne sont pas, ainsi3


—18—qu'on le croyait, renfermées dans le corps commel'eau dans une éponge. Elles s'y développent ; onne peut pas créer les forces qui manquent, mais onpeut augmenter celles qui existent, au moyen d'unexercice bien entendu et bien distribué. L'exerciceou la gypnastique des organes peut être savammentréglé par plusieurs moyens ; les Milanais les comprennent éloquemment tous dans les deux motsavoine et fouet (avena e frusta) ,ce qui veut direaliment et excitation.Comme aliment de notre cerveau nous avons lestrésors accumulés par nos sens et les trésors déposés dans les volumes des hommes qui vécurent ettravaillèrent avant nous. C'est de cela que nouspouvons alimenter notre force intellectuelle et bâtirune ruche pour y fabriquer notre miel. Mais le caféet l'ambition, la faim de l'estomac et la faim de labourse sont autant d'excitations ; la symétrie del'éducation routinière, les dogmes des écoles classiques et les heures de bureau sont les plus funestes ennemis de la pensée et du plaisir.Pour son malheur, l'homme connaîttrop l'art deréveiller des sensations artificielles qui simulent lebesoin et usent les organes. On emploie beaucoupplus le fouet que l'aine. Cette excitation artificielle de nos forces vitales est la source la plus féconde de nos malheurs ; c'est nne lime sourde de lavie du plus grand nombre des hommes ; aussidoit-on compter parmi ceux qui se suicident, nonseulement les individus qui emploient le fer, leplomb ou le poison, mais ceux aussi qui détruisent,par une mauvaise administration de leur organismeun grand nombre d'années de vie et des trésors deforce.De cet abus découle le préjugé vulgaire, qu'un


-*9 -travail intense doit être suivi d'un repos absolu. Unetelle opinion est contraire aux lois de notre grandmère,la nature. Une machine dans l'exercice detoute sa force de mouvement ne peut pas être arrêtée tout d'un coup. Helmhotz a calculé que s'ilétait possible d'arrêter instantanément la terre, laforce vive de son mouvement se transformerait enchaleur, qui la chaufferait à 100 ou 150 mille degrés, de sorte qu'elle serait fondue et vaporisée.En général l'on peut affirmer : que l'hommeabuse du cerveau, de l'estomac et des organes reproducteurs ;qu'il exercetroppeu les poumonset les muscles.Maintenant si nous ajoutons à ces difficultés d'établir des règles qui puissent diriger l'économiecomplète des forces vitales, la nécessité que l'on ade tendre les bras à presque toutes les sciences etde les mettre k contribution, on n'aura pas depeine k apercevoir la distance immense que Fhy—giène a devant elle pour* arriver au bout. Malgrémon intention de me borner à des notions élémentaires et telles qu'elles puissent être à la portée detout le monde, j'aurai beaucoup de difficulté à mepasser complètement d'histoire naturelle ou dephysique, de chimie ou de physiologie, d'anatomieou d'histologie.Devons-nous pour cela désespérer de notre entreprise? Y renoncer peut-être? Jamais. Avec—le travail et la volonté on surmonte d'immensesobstacles. Travaillons; cherchons à nous connaîtrenous-mêmes un peu mieux. Lk où nous ne pourronspas parvenir, parviendront nos fils, les fils de nosfils, ou les générations futures, dans lesquelles nouscontinuons, pour ainsi dire, à vivre, grâce à notreforce de reproduction. Si l'on ne peut pas encore


—20—rendre tousles hommes heureux, c'est-à-dire,sains et actifs, on les rendra toujours un peu moinssouffrants.Je disais de plus, en commençant, que l'hygièneavait pour but la conservation de la vie et de lasanté. Or, vie et santé ne sont pas des abstractions ;ce sonl des faits. En langage vulgaire, on appellesanlé la force végétative,assimil;:trice ou chimiquede chaque individu ; on l'évalue selon le nombred'années vécues sans douleurs el en plein exercicedes forces vitales.L'hygiène peut donc prendre pour sujet de sonapplication ou de sa législation les phénomènes dela vie dans l'individu et dans l'espèce, dans l'homme et dans la société. L'hygiène peut régler ou surveiller le fonctionnement des organes vitaux ; ellepeut s'occuper de la vie et de la santé des peuples,aussi bien que de celle des individus selon les lieux,les temps, les races, les constitutions, les tendances.Les deux mots que l'on a jetés au premier Adam—croissez et multipliez-vous — résument lesdeux grands moments de la vie :se nourrir et engendrer.Dès qu'un corps oiganisé a reçu la vie, il n'arrête plus son mouvenÇnl de formation et de transformation; il arrache au monde qui l'entoure toutce qui lui est nécessaire pour se nourrir, grandir etse mouvoir ; il renvoie à la matière brute sesexcrétions. Cela ne se fail qu'à deux conditions :la destruction et la mort. On ne vit pas sans dévorer, on ne vit pas sans mourir. Le Struggle for- lifede Darwin, c'est-à-dire la lutte pour la vie, où legros poisson mange le petit, est la loi essentiellede tout le monde organique, de toute la matière.


—21 —La vie, sur notre planète au moins,n'esl que leconcert harmonieux d'un carnage éternel.Tout ce qui vit, meurt. Rien n'est plus exactement vrai que la sentence du poète italien « S'incominciaa morir quando si nasce » (on com—mence à mourir lorsque l'on naît.) El c'est jusle !Nous venons de dire que la vie n'est qu'un vol, unemprunt violent fait k tout ce qui nous entoure.Or ce capital qu'on a volé ou emprunté k Yaima parens,à la grand'mère nature, il fautle rendre. Lanature est un cimetière immense d'où sort la vie.En compensation, elle nous a accordé la sublime faculté de donner la vie à d'autres individuspareils k nous-mêmes. Bien que placé parmi lesanimaux les moins féconds, l'homme peut, avant demourir, engendrer une armée d'enfants. 11 esl vraique l'on peut vivre sans engendrer, mais celte viesort du type de la nature et de la santé, c'est unevie pathologique.De la naissance à la mort, laligne n'est pasdroite. O.i ne naît pas robuste et complet ; on nemeurt pas de mort naturelle tout d'un coup. Lavie parcourt une parabole. Le nouveau-né devientenfant, l'enfant adolescent, d'adolescent jeunehomme, le jeune homme homme mûr, l'hommevieillardetle vieillard tombe, commeon dit, dans unenouvelle enfance, qui s'appelle extrême vieillesseou décrépitude. De l'enfance k la maturité, l'hommemonte, là ri s'arrête, après il descend.Voila la courbe que l'hygiène doit nous appprendreà parcourir lentement et gaiement,sans prétendre allonger d un seul jour la vie qui nous eslassignée, mais avec la volonté de la vivre tout entière. Celui qui voudra montertrop vite, descendraaussi plus vite la pente qui mène à la mort. L'i-


déal est de vivre tout le temps qui nous est accordé par notre organisation individuelle et de levivre en pleine santé.Or, l'homme étant l'animal le plus compliqué leplus délicat et le plus libre qui habite la terre, ils'ensuit que l'hygiène de l'homme est la pluscomplexe et celle qui a plus besoin d'un très grandnombre de lois particulières.Chacun possède pour ainsi dire ses propres loishygiéniques. L'hygiène ne peut donc tracer qu'unnombre restreint de lignes générales. Là où elledevient féconde en applications et en enseignements utiles c'est dans les détails minutieux de lavie journalière, soit privée, soit publique.C'est sur ce terrain que nous nous placerons.Nous nous occuperons de l'hygiène des fondionsdans l'individu et dans l'espèce, et de l'hygiène del'homme dans la société.En attendant, pour clore cette course rapide àtravers l'histoire de l'hygiène et la question trèsimportante mais fort obscure des forces vitales, ilne sera pas inutile de se rappeler quelques-unesdes déductions générales que notre auteur Manlegazzaa tirées, sous forme d'aphorismes, de ses études sur la vie:^APHORISMES HYGIÉNIQUESun'1"Chaque homme reçoit en naissant capitaldifférent de forces qu'il doit user pour l'exercice desa vie ;2°Celui qui use vite son capital raccourcit la viepar prodigalité ;3°Celui qui ne se meut pas ou ne travaille pas


—23—par crainte de la fatigue, raccourcit la* vie par avarice ;4' Les organes sont usés par l'abus, comme lesoutils dont on se serttrop ;5°Les organes s affaiblissent par suite du repos,comme le fer qu'on n'emploie pas se rouille ;6° L'exercice qui ne fatigue pas les organes, lesrend plus vigoureux et plus parfaits ;7"Mesurer ses forces avec précision et les employer à propos, telle est la base de l'hygiène, dela santé et du bonheur ;8°Chaque homme a sa sphère d'action ; il doits'ymouvoir à son aise sans pénétrer dans la sphèredes autres ;9°La volonté humaine est presque toute puissante, mais elle ne peut créer rien ;10°Perfectionnez ce que vousavez, sans jamaisavoir la prétention de vous donner des facultés etdes dispositions que la nature vous a refusées ;11°Une méthode dévie, lors même qu'elle serait la plus parfaite, ne peut servir que pour unseul homme : chacun doit avoir la sienne ;12°L'état de notre santé se compose de la somme de noire organisation, augmentée par un bonexercice, ou diminuée par des excès ;15°Dans la vie tout est sujet à addition et à soustraction : quelques excès amènent la punition toutde suite, d'autres fort tard ;14°Pendant l'enfance on fabrique la jeunesse ;pendant l'âge mûr on édifie la vieillesse ;15°Les ennemis les plus funestes de la santé sontl'amour propre et l'ignorance.16°Les forces les plus précieuses pour vivre bienet longtemps sont l'instruction, la tempérance etla continence.


-34-dedeCes aphonsmes tracent les quelques lignes générales que l'on peut prendre pour règle dans l'exercice de la vie. Si vous vous en souvenez, ils pourront vous servir d'engrenage à l'art de bien vivre.De plus, si entre l'une et l'autre de ces pierres milliairesvous placez dans le parcours de votre carrière vitale vos idées et vos méditations, vos étudeset vos expériences, votre mode de sentir, d'agir,de vouloir, d'être en un mot, vous arriverez probablement à enrichir la science et à féconder letravail d'aulrui, en vous rendant utiles à vous-mêmes et aux autres dans cette immense mosaïquedont se compose la vie sociale.Ma plus grande satisfaction sera d'avoir, enquelque sorte, contribué à vous faire apprécier elsuivre avec amour l'étude de l'hygiène. J'en auraiune preuve dans votre assiduité, surtout dans l'assiduité des dames qui m'ont fait l'honneur d'assister à cette premièrecauserie, car, ainsi que je vousl'ai dit, rien n'est possible en fait d'éducation sansle concours des mères.Lundi prochain nous entrerons en pleine hygiène pratique. Nous nous occuperons de l'hygiènedes fonctions alimentaires, par conséquent de lafaim, de la soif,—desa%nents la mastication—et de l'hygiène de la bouche, la digestion et del'hygiène de l'estomac Si le temps nous le permetnous examinerons les tristes effets de l'alcoolisme—et de la plaie locale, l'absinthisme.f *L%9.


—et en hygiène de l'homme dans la société. —-SSIIMesdames, Messieurs,Dans notre première conversation,nous avonsdit que l'hygiène est l'art de conserver la vie et lasanté ; que les grands actes de la vie se réduisentk se nourrir et à engendrer; que les forces vitales peuvent se classer en : force végétative, forcemusculaire, force intellectuelle et force reproductive. Nous sommes convenus de diviser l'hygiène enhygiène des. fonctions de l'individu et de l'espèce,La première aura pour objet les lois particulières àchaque ordre de fonctions de l'organisme humain ;la seconde s'occupera des lois générales qui doivent guider la société.Une pareille division n'est pas celle que l'on suitordinairement, ce n'est pas la division classiqued'hygiène privée et d'hygiène publique. J'espèrepourtant qu'elle sera la meilleure pour nous, hommes et femmes, jeunes et vieux,pas ici à l'école, mais en famille.Nous commenceronsqui ne sommespar l'hygiène des fonctions, que je vous ai groupées par catégorie dans unTABLEAU SYNOPTIQUE DES FONCTIONSde l'individude FespèceDigestion.Circulation.Fécondation (homme).Respiration.Nutrition.Conception.)Sensations.Parturition. [(femme).Mouvement. Allaitement. )Parole.Pensée.


—26 —Examinons d'abord ce qui a été établi- dansnos préliminaires, c'est-a-dire :que la vie n'estqu'un concert harmonieux d'un éternel carnage etque notre organisme ne peut exister sans arracherau monde qui l'entoure tout ce qui lui est nécessaire, pour se nourrir, grandir, se mouvoir, sentir, penser, parler, engendrer, etc.Nous avons affirmé que l'on ne. vit pas sans dévorer.Les naturalistes, en effet,ont classé les animaux en herbivores, frugivores, insectivores, carnivores, c'est-à-dire en mangeurs d'herbe, de—fruits, d'insectes, de viande. L'homme a étéappelé omnivore, ce qui signifie, qu'en sa qualitéde Roi, il dévore tout. La nature l'a armé à cette—fin d'instruments nécessaires pour inciser, couper,mordre, déchirer, lacérer, broyer, moudre tout cequi lui tombe sous là dent.L'homme est donc l'animal qui prend ses alimentsdans les trois règnes de la nature, Ou qui, pour senourrir', a besoin de substances minérales, de substances végétales et de substances animales. La physiologie, du reste, comme l'anatomie, justifiel'adoption universelleMue le genre humain a faitede ce régime mixte, m les aliments de toute espèce contribuent à sa nutrition.La nature, d'autre part, qui est toujours une mèrebien prévoyante, a accordé k l'homme, en outredes instruments, les appareils qu'il lui fallait pourun tel régime. L'alimentation végétale a besoin degrandes modifications chimiques avant d'être assimilée et de devenir nutritive ; les aliments animaux, au contraire, n'ont besoin que de modifications"très légères pour se transformer tout de suite


—27—l'Américainenchair, en nerfs, en viscères. Les herbivores ontpar conséquent un tube alimentaire très long, lescarnivores l'ont par contre très court. Le tigre,Carnivore par excellence,■n'a qu'un tube alimentaire trois fois pluslong que son corps ; le mouton,type des herbivores, a un appareil digérant qui mesure vingt-huit fois la longueur de son corps.L'homme est tigre et mouton. Remarquez que j'enparle au point de vue de l'alimentation ; l'hommedonc, qui est tigre et mouton, a un canal gastrointestinal de onze mètres, c'est- k-dire six ou septfois pluslongque sa taille moyenne.Le phénomène le plus curieux à ce sujet est celui des crapauds, des grenouilles et d'autres bêtesqu'on appelle batraciens. Tant que ces bêtes restent dans l'âge de l'enfance ou à l'état transitoire detêtards, ce sont de petits reptiles k grosse tête, klongue queue, herbivores, possédant un tube intestinal très long; lorsque les mêmes bêtes entrentdans l'âge adulte, c'est-k-dire qu'elles deviennentcrapauds, grenouilles'ctc, elles perdent la queue,gagnent des pattes, se font carnivores et changentleur tube intestinal très longcontre un canal digérant très court.En somme, malgré le goût que l'Océanien peut—avoir pour«les fourmis de la Floridepour le chien l'Arabe — pour les sauterelles et le—Chinois pour les nids d'hirondelle l'homme eslet doit être omnivore. Le régime mixte de viandeset de légumes, est le système le plus hygiéniqued'alimentation, tant sous le rapport de notre organisation anatomique, que sous le rapport des loisphysiologiques qui régissent nos organes digestifs.Nous voilà arrivés aux :


—28 ——Mastication.Faim, soif :Fonctions digère», j ZgjgS*" *— "—HygièneAliments :gastronomiqueEn débutant par ces fonctions nous commençonspar le commencement, c'est-à-dire par le point dedépart de toutes les fonctions de notre organisme.Nous savonsdéjà, ou nous l'avons admis, quela force végétative ou force d'assimilation et de désassimilationest la base de toutes nos forces vitales.C'est elle qui s'approprie tous les éléments dontnotre organisme a besoin pour vivre, se développer,fonctionner et réparer ses pertes; c'est elle quipousse continuellement les animaux à cette luttepour la vie, où le ver est mangé par l'insecte, l'insecte par le bec-lin, le bec-fin par l'épervier,l'épervierpar le chacal, le chacal par la panthère, lapanthère par l'homme.Dans la société humaine, dit Mantegazza, il y aeubeaucoup de réformes violentes que l'orgueilhumain a décorées dutaom de révolutions politiques et qui n'ont réelrlment été que des «évolutionsfaméliques. Ici, enAlgérie, dans le cours de quatreannées, nous avons vu se produire un phénomènetout opposé; le reuple qui s'est insurgé l'année»dernière et qui s'est fait tuer pour une mystification politique, s'est laissé mourir de faim en 1867sans même penser à se procurer, par des moyensviolents, de quoi vivre! . . .La faim naturelle ou physiologique exprime lebesoin que nous avons de suppléer avec les aliments


29à la matière que nous usons et que nons rejetonscontinuellement de notre corps.Chez l'adulte un tiers dès aliments qu'il prenddans les 24 heures se perd avec l'air expiré, un tierss'en va en urine et l'autre tiers sort du corps sousforme de sueur, de perspiration, de larmes, de mucus, etc .De cette façon,longtemps le même poids.notre corps peut garder pendantCependant les alimenlsintroduits auront produit du calorique, du mouvement, de la pensée, et la faim devrait être en raison directe de la transformation organique et de laIbrce engendrée.Voilà pourquoi tout exercice qui augmente laconsommation de la matière organique, augmentela faim. Voilà pourquoi, en hiver et dans les paysfroids,où l'on a un plus grand besoin de chaleuret où la combustion vitale est plus activera faimest plus forle qu'en été et que dans les pays chauds.Permettez-moi de vous décrire brièvement k cepropos quelques modes d'alimentation des habitants des rivages de l'océan glacial arctique. Lemot d'Esquimaux dérive de l'indien Eskimantsikqui veut dire, mangeurs de nourriture crue. Eneffet, les tribus septentrionales de cette race ontl'habitude de manger la viande sans la cuire. Nousdevons nous rappeler, pour être justes envers eux,que plusieurs de nos expéditions européennes dansl'Océan arctique ont adopté la même coutume,laquelle semble effectivement,selon le capitaineKane, fort utile à la santé sous ces latitudes. Cesdescendants d'Adam, chassés plus loin que nousdu paradis terrestre, sont forcés,en hiver, de bâtirleurs maisons avec la glace et la neige ; celles deglace sont belles et presque diaphanes, si bien que,


-30 -même à quelque dislance, on voit ce qui s'y passedans l'intérieur ; mais elles sont plus froides quecelles de neige. Au-dessous, il ya une vaste cavedestinée à conserver les provisions pour l'hiver. SirE. Belcher estime la quantité de viande de rennes,de baleines, de morses, de veaux-marins, de cygnes,de canards, etc., entassée dans une seule de ces caves à 71 ,424livres.Les Esquimaux aiment nécessairement beaucoupla graisse qui est un aliment très combustible, ainsique la moelle. Les tribus du sud trouvent quelquesbaies pendant l'été, mais les tribus du nord n'ontguère d'autre nourriture végétale que celle qu ilsretirent à demi digérée de l'estomac du renne, etils la regardent, selon le capitaine Ross,commeune grande friandise. Les Esquimaux de l'extrêmenord, étant incapables de tuer le renne, en sontmême privés. Pour boisson ils n'ont que le sangel de l'eau de neige fondue à la chaleur d'unelampe.Kooilittuck, raconte le capitaine Lyon, dans sonjournal (p. 181), me fit connaître un nouveau genred'orgie des Esquimaux. Il avait mangé jusqu'à cequ'il fût ivre, et à chaque moment il s'endormait,le visage rouge ethfûlant, la bouche ouverte; kcôlé de lui était assise Arnalooa, sa femme, quisurveillait son époux, pour lui enfoncer, autantque faire se pouvait, un gros morceau de viande àmoitié bouillie dans la bouche en s'aidant de sonindex ; quand la bouche était pleine, elle rognait cequi dépassait les lèvres.Lui mâchait lentement, et à peine un petit vides'élait-il fait sentir, qu'il était rempli par un morceau de graisse crue. Durant cette opération, l'heureux mari restaitimmobile, ne remuant que les


—31 —mâchoires el n'ouvrant pas même les yeux : maisil témoignait de temps à autre son extrême satisfaction par un grognement très expressif, chaque foisque la nourriture laissait le passage libre au son.La graisse de ce savoureux repas ruisselait en telleabondance sur son visage et sur son cou, que jepus aisément me convaincre qu'un homme se rapproche plus de la brute en mangeauttrop qu'enbuvant avec excès. Les femmes, tout en donnantde leur mieux la pâtée à leurs maris, jusqu'à cequ'ils soient complètement endormis, ne se négligent pas elles-mêmes, et le tableau devient ainsicomplet !C'était une orgie, a soin de nous dire le capitaineLyon, mais une orgie fondée sur les lois hygiéniques de nos frères les Esquimaux. Quand même ilsauraient du bois, il est évident qu'à cause de lanature de leurs demeures, ils seraient privés del'usage du feu. Or, comme la température de leurcorps est presque la même que la nôtre, et que l'air,a basse température, contient,sous le même volume, une plus grande quantité d'oxygène que l'airchaud, il leur devient indispensable d'avaler unemasse de nourriture animale el de graisse. Qu ils'agisse de produire de la chaleur par la combustionvitale, c'est-à-dire par la digestion ou par la lumière, la matière calorifique est la même, savoir : lagraisse de viande, de poisson ou de baleine .A propos de baleine, il ya d'autres sauvages quifont bien mieux, je voulais dire bien pis que les Esquimaux.Quelques peuplades indigènes de l'Australie sontaussi friandes et aussi affamées de substances grasses que les Esquimaux, mais elles sont incapables,dit Sir Lubbok (p. 348,), de tuer des baleines. Lors-


qu'un de ces cétacés vient s'échouer sur le rivage,comme cela est arrivé "quelquefois sur le rivaged'Alger, c'est une véritable aubaine,un festinsomptueux que la mer leur prépare.On allumeaussitôt des feux pour répandre la bonne nouvelledu joyeux événement.Hommes et femmes arrivent de tous les côtés oùl'on a pu apercevoir les feux,bêle,non pas pour voir lacomme nous avons fait en pareille circonstance, mais pour prendre part au festin.Les hommes se frottent d'abord de graisse toutle corps et font subir la même toilette à leurs épouses favorites. Après, ils s'ouvrent un passage à travers le gras jusqu'au maigre, jusqu'à la viande de labête, qu'ils mangent tantôt crue, tantôt grillée surdes bâtons. A mesure que les convives- arrivent aufestin, leurs mâchoires se mettent à exercer la faculté Carnivore dans la baleine, et on les voit grimper de çà et de là sur la puante carcasse, à la recherche des fins morceaux, ainsi que j'ai vu quelquefois toute une fourmillière s'abattre sur lecadavre d'une pauvre caille que le chien avait misquelques minutes à trouver. Pendant des jours entiers, les indigènes de l'Australie restent près de lacarcasse, enduits de graisse fétide,gorgés de viande pourrie, portés *la colère, engagés dans desrixes continuelles pour se disputer cette nourriturede haut goût. « Il n'ya pas de spectacle au monde,s'écrie le capitaine Grey, plus dégoûtant et plus repoussant, que celui de voir une jeune indigène auxformes gracieuses,sortir de la carcasse d'une baleineen putréfaction. »Je vous demande pardon, Mesdames, de m'êtrepermis de eiler l'exemple d'une Arnalooa, bourrantde viande pourrie la bouche et le gosier de son


-33-—Vousbiën-aimé Kooilittuk — et l'aspect d'une gracieusejeune fille de l'Australie sortant de la carcasse d'unebaleine.Pauvre Eve ! pauvre Adam ! pauvres images deDieu 1 !...Revenons à la faim .—En outre dit froid, les bains, les promenades, lagymnastique, les frictions, l'étude, tout espèce detravail ou d'exercice non excessif et la bonne hu—meur augmentent la faim . L'enfant el le jeunehomme qui grandissent rapidement,- se complètentet se fortifient, ont plus de faim que l'adulte. L'adulte qui doit maintenir en équilibre le budgethygiénique des recettes et dès dépenses,a plus defaim que le vieillard. Le vieillard, comme le malade, détruit son capital, digère mal, ne balanceplus l'entrée avec la sortie, marche à une liquidation avec sa créancière la nature.—La femme,qui est moins puissante et moins active que l'homme, a, en général, des besoins d'alimentation moins exigeants.A Pise il y a, ou il y avait, une tour appelée latour de la faim, parce que l'archevêque Roger y fitmourir d'inanition le comte Ugolin de la Gerârdescaavec ses quatre enfants.savez quemourir d'inanition veut dire mourir de faim.Dante qui n'était pas seulement un poète, maisXIIIeun observateur, Connaissait parfaitement ausiècle cette loi hygiénique de la faim, et lorsqu'ildécrit la mort horrible des cinqvictimes de la vengeance archiépiscopale, il fait mourir d'abord auquatrième jour de jeûne le fils Gaddo, le plus jeunedes quatre ; les trois autres, un peu plus âgés, lecinquième et le sixième jour ; ensuite le malheureux père Ugolin, déjà devenu aveugle, phénomène5


disent-34—physiologique précurseur de lamort par la faim,continua encore pendant trois autres jours à appeleret à chercher à tâtons chacun de ses enfants, jusqu'à ce qu'au neuvième jour, la faim l'emportât surla douleur : « Poscia piu che'l dolor, potè 'l digiuno.»La faim dont nous nous cccupons maintenant estla faim naturelle ou physiologique, la faim véritable, celle qui devrait régler nos repas, nos ravitaillements nutritifs. Elle ne devrait obéir à aucune autreloi, qu'à celle de.la satisfaction. — « Manger quandon a faim, boire quand on a soif et dormir quand on—a sommeil, les Italiens. » Comme enfantstoujours dévoués à la mère nature, les Italiens ontpeut-être raison ; mais la vie sociale el la vie defamille, la civilisation et la routine, la convenanceet nos occupations individuelles ne nous permettentpas de nous soumettre à chaque moment aux exigences de la faim. Il ya donc la faim de convention, la faim des repas, c'est-à-dire la faim habituelle. Par les raisons que j'ai données plus haut,dans l'âge adulte et plus encore dans la vieillesse,l'on peut, sans graves inconvénients et sauf quelquesexceptions, accepter les habitudes de la familleet les exigences de k vie sociale. Le jeune homme,au contraire, et l'enpnt ont droit, ont même besoind'en être exemptés, sinon toujours, sinon complètement, quelquefois et en partie au moins.La faim k heures fixes n'est pas la règle hygiénique de tous les âges. En outre, la vie physique estplus irrégulière el capricieuse que nos habitudes ; jedirai mieux, elle est plus rationnelle : après unbon repas,après une noce, par exemple, la naturese plaît à oublier le déjeuner ou le dîner du lendemain. Ceux qui ont imaginé le Carême ont eu pro-


-35-cellebablement l'intention de faire reposer l'estomac desexcès du carnaval, qui signifie à juste titré abus dechair. Mais ils ont manqué le but,car 40 joursd'abstinence, après 40 ou 30 jours d'abondantesmangeailles ne constituent que deux absurditéshygiéniques. Le Ramadan est encore plus contraire à toute règle d'hygiène. Il serl, me disait unjour un Maure, à purifier le corps et à habituer àla tempérance. Erreur, grande erreur. Le Ramadanne sert qu'à soumettre les malheureux qui l'observent, à un jeûne douloureux et nuisible, à transformer la nuit en jour, à multiplier les festins eiles orgies,et k priver l'économie organique du bienfait du sommeil.Il ya enfin la faim artificielle, celle que l'onprovoque k dessein, celle que les Romains préparaient avec leur système de syrmaïsme, ou de purges, de vomitifs et d'autres moyens semblables,celle que l'on a eue peut-être en vue, en prescrivant le jeûne de nos grandes fêtes,—quel'on excite journellement k Alger k coups de fouet,c'est-a-dire par les verres de vermouth ou d'absinthe.Les excitations artificielles de la faim sont déplorables ; elles ne servent qu'à dépenser inutilement nos facultés, k user les organes, k raccourcirla vie ou k la rendre malheureuse. Les personnesqui se laissent aller k ces nuisibles habitudes appartiennent k la catégorie tic ceux qui, comme je vousle disais lundi dernier, se suicident par d'autresmoyens que par le fer, le plomb, ou le poison. Usse suicident par la liqueur dite extrait d'absinthe.L'absinthe n'entre pas, ou presque pas dans cettecomposition ; pourtant on la dit amère, tonique,apéritive, stomachique. Bon nombre d'Algériens


—36 -ne sauraient prendre leurs repas sans les faire précéder d'un verre» ou de plusieurs verres d'absinthe.L'habitude arrive ; on renforce la dose, on diminue de plus en plus la quantité de l'eau, on arrivek en prendre toute la journée. A la place de l'appétit on voit alors survenir des tremblements nerveux, la main devient vacillante, la vue faiblit, lesyeux larmoient, la figure se bourgeonne, la mémoire se perd, l'intelligence se trouble, l'estomacsouffre dedouleurs acres, brûlantes, intolérables,la digeafîbn se ralentit, et cet appétt que l'on prétendait exciter, disparaît. Pour le réveiller, on augmente de plus en plus l'usage du fameux apéritif,mais l'appétit ne reparait pas ; paraissent, au contraire, des gastralgies opiniâtres des ramollissements de la muqueuse gastrique, des diarrhées, desmaladies du foie, des hydropisies et, enfin unemort misérable !Je suis de l'opinion de ceux qui disent que l'absinthe a fait plus de mal à l'Algérie que la fièvrepaludéenne—et je vous le demande à vous-mêmes :quelle différence faites-vous entre l'Algérien quis'empoisonne avec une liqueur qui contient souvent du verl-de-gris, et l'Esquimaux qui se laitbourrer par sa femmÉde viande crue jusqu'à ce quecette nourriture lui sorte de la bouche?...Eu règle générale, je crois que l'on peut admettre les aphorismes suivants :1°L'homme doit manger pour vivre bien, maisnon pas vivre pour manger ;2°L'homme sain qui n'a pas une grande faimdoit manger peu ;3° L'homme sain qui n'a pas faim ne doit psmanger ;4°L'homme malade qui n'a pas faim ne doit pasmanger;


—37-5°L'homme malade qui a faim, lors même quecette faim serait violente et insupportable, doitconsulter le médecin avant de la satisfaire.Et si, parmi nous, il y avait un médecin, je mepermettrais de lui conseiller de ne s'opposer jamaissystématiquementtrop à ces manifestations de besoins impérieux, surtout lorsqu'il s'agit déjeunesmalades.SOIFUn moyen de diminuer les souifrances horriblesde la faim que l'on ne peut pas satisfaire, consistek boire.Mohamed connaissait si bien cette espèce de compensation alimentaire, que,voulant soumettre sesfidèles au jeûne du Ramadan, il leur a défendu nonseulement de manger quoi que ce soit, mais ausside boire une seule goutte d'eau.A Toulouse,on a vu un condamné à mort vivre64 jours, en buvant à volonté, sans manger.Mais ce n'est pas là de la soif.La soif physiologique ou naturelle est l'expression du besoin que l'on éprouve d'introduire dansl'organisme des liquides qui remplacent l'eau quenous perdons par la voie de la peau, des reins etdes poumons dans la transpiration, dans l'urine etdans l'air expiré. La soif exprime aussi le besoind'aider la digestion, de diminuer la chaleur, de remplacer le sérum du sang perdu par hémorrhagie, oula sérosité sortie par l'intestin.La soif peut devenir plus impérieuse, plus terrible même que la faim.Tous ceux qui ont suivi les expéditions de l'arméesavent par expérience que le plus horrible tour-


Sant'—38-menl est la soif, et qu'il est impossible d'empêcherun soldat de se jeter sur la première eau qu'il rencontre, lorsqu'il a soif, quels que soient les dangers qu'il peut encourir. Il ya à peine quelquesannées, qu'un régiment nouvellement débarqué, enmarche pourDouera, arrivé à Dély-Ibrahim, seprécipita sur la fontaine ; les hommes altérés par lachaleur du pays burent l'eau en si grande quantitéqu'ils furent atteints de dysenterie, et le choléravint une fois encore faire sa lugubre visite à la villed'Alger. Dans l'Uruguay, le général Urquiza, unjour de marche forcée, décréta la peine de mortcontre celui qui se serait arrêté pourboire ; plusieurs soldats préférèrent perdre la vie que de passer sans boire k côté des lacs du pays. A la journéede Antonio, dans l'est du même pays, les soldats de Garibaldi allèrent jusqu'à boire 'l'urine icfroidiedans des cornes de bœuf. Ici tous ceux quichassent peuvent affirmer que leur plus grandepréoccupation est d'avoir ou de trouver de quoi sedésaltérer.Les Esquimaux dont nous parlions à proposde la faim, se meurent de soif. Le capitaineParry dit qu'ils demandent toujours de l'eau elqu'ils en boivent de téjes quantités qu'il était impossible de leur en fournir la moitié de ce qu'ilsauraient avalé, si l'on ne s'y était opposé.Il peut sembler étrange que des gens qui habitent des maisons de neige ou de glacela privation d'eau ; mais la somme de chaleur nécessaire pour faire fondre la neige, le manque demoyens de laire du feu el la nécessité impérieusede conserver le matériel des habitations peut fairesouffrent demourir de soif au milieu des régions polaires arctiques ou glaciales, tout aussi bien qu'au milieu du


—39-Sahara. « Toute tentative directe, dit le capitaineKane, pour se rafraîchir à l'aide de la neige, amenait le sangaux lèvres el k la langue ;on étaitbrûlé comme par un caustique. »Les bêtes éprouvent autant que l'homme le besoin de boire ; elles l'éprouvent même davantage,parce qu'elles n'ont généralement à leur dispositionqu'un seul liquide,—l'eau et nous savons tous quesans l'organisation spéciale du chameau, que l'on aappelé le navire du désert en considération de sonCinquième estomac qui lui sert de citerne ou deréservoir, les caravanes auraient de bien plus grandsobstacles devant elles pour accomplir leurs voyage-La chaleur, l'élévation au-dessus du niveau dela mer, la parole, tous les exercices gymnastiques,le régime animal, les aliments trop salés, la peuret la colère, toutes les «motions augmentent la soifhygiénique. Malheureusement, le besoin et le plaisir de boire peut, plus facilement encore que lebesoin et le plaisir de manger, dégénérer en abus.La soif habituelle et artificielle se sontbeaucouptrop généralisées.Nous voyons tous, hélas ! bien souvent, les tristeseffets de l'ivrognerie,—et nous en parleronsplus spécialement lorsque nous nous occuperonsdes boissons. En attendant, je vous signalerai uneexagération en sens contraire, c'est-à-dire la prétention de faire de l'hydrothérapie une panacée, unremède universel. J'aurai à vous parler des bainset des douches, des lotions et des ablutions, et jevous ferai remarquer leur utilité hygiénique ; quantà présent, je vous dis simplement que le systèmequi prétend guérir toutes nos infirmités par l'eau àl'intérieur et à l'extérieur, n'est qu'une aberrationde l'esprit humain.


Mais,-.40 _MASTICATIONLa première fonction par laquelle nous satisfaisons le besoin de manger est la mastication. Cetacte s'accomplit dans labouche, principalementpar les dénis. La cavité de la bouche offre un plafond voûté, solide fixe, formé par le palais et parun plancher mobile constitué par la mâchoire inférieure el la langue qui remplit l'espace comprisentre les deux branches de la mâchoire. Les bordsarrondis des deux mâchoires présentent 32 dents,16 en haut, autant en bas ; chaque demi-mâchoireest garnie d'avant en arrière de 2 dents incisives,de 1 canine et de 5 molaires. En dehors des dents,la clôture de la cavité buccale se complète parles joues sur les côtés et les lèvres en avant.L'appareil de la mastication se complète par les glandessalivaires qui se trouvent placées dans l'intérieurde la bouche.Pardonnez-moi de vous exposer ces notions analomiques,elles sont, à mon avis, nécessaires et jeserai bientôt forcé de vous en exposer quelquesautres.Je vous aidit que la mastication s'accomplitprincipalement par «s dents, c'est-à-dire par 52dents. Cela suppose Ta dentition complète, la den—tition de l'adulte. puisque je vois, k magrande satisfaction, que les Dames continuent às'intéresser à nos entreliens, puisque je vois devant moibeaucoup de mères et même quelquesenfants, je vous demande la permission de faire unecourse, de piquer, comme l'on dit, une pointe dansl'hygiène de l'enfance. Permettez-moi de vous direquelques mots sur


—41 —LA PREMIÈRE ET LA DEUXIÈME DENTITIONLa première dentition commence vers le sixièmeou le septième mois après la naissance ;compose de vingt dents, huit incisives*nines èl huit molaires, divisées par Trousseauquatre groupes :elle sequatre caLe premier groupe est formé par les quatredents incisives médianes inférieures, suivies de lasortie des quatre incisives supérieures. Celle sortieest complète environ à 1 1 mois ;Le second groupe est formé des quatre premières dents molaires et des deux incisives latérales inférieures vers le 17e mois ;Le troisième groupe est formé par les quatredents canines ou dents de l'œil,qui ne poussent quedu 20e au 24e mois ;Le quatrième groupe est formé par les quatre dernières grosses dents molaires de la première dentition qui finit vers l'âge de 30 mois.Entre la sortie de deux groupes de dents la nature a sagement disposé un temps d'arrêt presqueconstant,qui permet à l'enfant de réparer les forcesque la sortie du groupe précédent lui avait faitperdre.Du reste, il esl inutile de vous dire que cetteclassification est. artificielle et par conséquent inconstante. La nature s'en écarte souvent. Et voussavezque voulant peut-être nous faire comprendre que Louis XIV devait être un grand roi, unroi à dentition précoce, elle le fit naître avec deuxdents.Guersant déclare que la dentition n'est pas plusune maladie que la puberté; il a raison, mais celan'empêche pas que cette époque très-remarquable6en


fièvre,'-42-de l'ossification est souvent critique et fort dangereuse pour les enfants, surtout dans les pays chaudsou en été. Or, les causes des dangers étant fréquemment le résultat de mauvaises conditions hygiéniques, je vais vous indiquer quelques règles deconduite pour les éviter.Le premier moyen d'éviter les accidents dange—reux de la dentition diarrhée, congestioncérébrale, convulsions est, en général, l'allaite—ment naturel par la mère, le seui que j'appelleraivraiment naturel. C'est presque toujours k la suited'une mauvaise alimentation, ou d'un écart de régime que l'on voit se manifester les phénomènesles plus graves. Trousseau considère l'indigestioncomme cause des convulsions.Le second moyen consiste à régler hygiéniquementl'allaitement, car l'indigestion n'est pas seulement la conséquence de la quantité ou de la qualité du lait, mais elle peut être aussi le résultat del'habitude prise de présenter le sein à l'enfant àchaque heure du jour et de la nuit, ou de lui faireattendretrop longtemps ses repas.Le temps qui doit s'écouler d'un repas à l'autren'est pas facile à fixtf", mais l'on peut dire que l'enfant prendra de bontés ou de mauvaises habitudesselon la fermeté et l'intelligence de la mère, et quecelle-ci doit toujours se reposer davantage la nuit.Pendant le jour, des repas à deux ou trois heuresde distance l'un de l'autre doivent suffire; ils doivent être éloignés en raison directe de l'âge de l'entant et devenir moins copieux lorsque la dentitionle rend malade.Un troisième et excellent moyen pour les enfanUde la ville est celui de les transporter, toutes lesfois qu'on le peut, à la campagne.


—43—Enfinle quatrième et souverain moyen pourcombattre la dentition laborieuse et ses dangers estl'incision, ou mieux encore le grattage des gencives. Hunter, de Haën, Moriceau, Wasserberg,Armstrong, Brunner et tant d'autres médecins quise sont occupés de la dentition, sont d'accord à cesujet. Le Monnier, voulant étudier l'évolution desdents dans les alvéoles fit un jour une incision profonde sur les gencives d'un enfant laissé dcpuisquelquesheures pour mort par suite de convulsions.Eh bien, Mesdames, par cette simple opérationle docteur Le Monnier a renouvelé de nos jours lesmiracles des prophètes Elie et Elisée pour les enfants de la veuve de Sarepta et de la femme deSunem. L'enfant laissé pour mort revint à la vie!Malheureusement cette petite opération effrayebeaucoup les mères et même quelques médecins ;il s'ensuit qu'on ne l'accepte pas, ou bien qu'onl'accepte quand c'esttrop tard. Or, ce qui peutla remplacer avantageusement, sans même faireintervenir le médecin, c'est ce que j'ai appelé etque j'appelle le grattage de la gencive, à l'endroitoù la dent ou les dénis ont de la peine à sortir.Cette opération doit être faite par la mère, kl'aide de l'ongle d'un de ses doigts, aussitôt qu'elles'aperçoit que la gencive esl enflée et que l'enfantsouffre ; elle doit faire saigner la gencive, mettre àdécouvert la couronne et répéter deux ou trois foispar jour l'opération jusqu'à ce que la dent soit biensortie.Par ces moyens et surtout par ce dernier, soyezcertaines, Mesdames, que l'on sauvera beaucoupd'enfants des dangers de la première dentition.Voyons maintenant, l'acte de la mastication àdentition complète.


—44 —Avant d'introduire les aliments dans là bouche ilest bon d'examiner s'ils ne contiennent pas de corpsdurs ou aigus qui pourraient blesser les organespar lesquels ils doivent passer : œsophage, estomac,intestins. Une portion d'intestin, qui s'appelle cœcum, parce qu'il forme une espèce de poche ou decul-de-sac,situé dans la fosse iliaque droite, unpeu au-dessus de l'aine, est munie d'un appendice,dont on ignore l'usage. Cet appendice cœcal, vermiformeou vermicuiaire, a la longueur de 4 à 5centim., la grosseur d'un tuyau de plume et une ouverture qui communique avec l'intestin. Un noyaude cerise, de prune, d'olive, de datte, de jujubepeut traverser l'œsophage, l'estomac, l'intestingrêle, mais arrivé dans le cul-de sac formé par lecœcum il n'est pas rare de le voir descendre dansl'appendice vermicuiaire et produire la mort. En1869, j'ai assisté à l'autopsie d'un enfant de 7 à 8ans qui nous révéla un cas de ce genre.Il faut surtout surveiller les enfants, afin qu'ilsn'avalent pas les noyaux des fruits, les arêtes despoissons, les esquilles d'os et les corps durs ou aigus, qui peuvent produire d'autres accidents pathologiques plus ou moins nuisibles. Les pépins deraisiû, les peaux de* haricots et d'autres légumesne sont pas aussi dangereux, mais tout ce qui nenourrit pas et n'est pas digéré, fatigue.Tout le monde,enAlgérie, connaît les gravesinconvénients qu'entraîne l'accumulation dans lesintestins d'une tropgrande quantité de graines defigues de Barbarie.Ce préambule,pour ainsi dire, de l'alimentationachevé, on entre en plein exercice de mastication.La mastication et l'insalivation constituent une opération très importante pour la digestion.


—45-Durand Fardel a dit avec beaucoupde raison quetoute personne qui mâche mal ou incomplètementn'a presque jamais bon appétit. En oubliant cettevérité, quelques médecins donnent des médicaments dans le but d'exciter l'appétit à certains malades, auxquels il faudrait donner des dents ou deshabitudes de mieux mastiquer.Les aliments féculents, tous ceux qui contiennent beaucoup d'amidon, comme le pain, tes pommes de terre, etc., ont besoin de beaucoup de salive pour être digérés ; donc la mastication doit enêtre lente el complète. Il s'ensuit que les vieillardset les enfants digèrent mal les aliments féculentsou farineux par faute d'insalivation.Je vous disais l'autre soir que l'art précède quelquefois la science ; que nous avions le télégraphe—avant de connaître I électricité. Ici les nourri-ces ont connu ce besoin d'insalivation pour les enfants bien avanl la science, bien avant les physiologistes et les hygiénistes du monde entier. Leurmoyen e-t sale, dégoûtant, dangereux même, j'enconviens avec empressement, cependant il esthygiénique.Pour écarter le pain mâché par la nourrice,Mia-Ihe a conseillé de mettre dans la soupe des enfantsde la diaslase ou de l'orge germée. Pressât et Blancont adopté le conseil de Mialhe pour l'alimentationîles fous à l'aide de la sonde œsophagienne. Labouillie de Liébign'est en somme qu'une application du même conseil.La mastication des substances animales ou desd'albuminesubstances qui contiennentbeaucoupn'est pas aussi importante parce que la salive neles modifie point. Elles sont dissoutes dans l'estomac par le suc gastrique.


—46-peut sans danger mâcher—Conclusion. L'onbeaucoup le pain, les les aliments farineux,les viandes, mais l'on doit mâcher les féculents oulégnmineux. Ceux, par conséquent, qui mangenttropvile fatiguent l'estomac et digèrent mal.HYGIÈNE DES DENTS ET DE LA BOUCHE.Si la mastication peut avoir lant d'influence surla digestion, i! s'ensuit que l'hygiène des dents etde la bouche est de la plus grande importance pourla vie el pour la santé.La bouche peut facilement devenir un moyend'empoisonnement et de contagion, un siège de—gangrène mortelle. Les huiles essentielles, l'opium, le laudanum, la créosote, l'acide phém'queque l'on introduit dans la bouche en cas de cariedes dents peuvent occasionner des accidents graves. Un simple baiser devient parfois contagieux elcommunique des maladies graves. Un autre moyende contagion peut être l'habilude qu'ont les indigènes de vous offrir du couscouss ou de la confiture,ivec une cuiller qui passe d'une bouche k l'autre.Ce que je dis de celte coutume des Arabes doit s'étendre aux de n'importe qui de se servircouluma|de la même cuiller^de la même fourchette, de lamême lasse, de la même pipe entre plusieurs personnes.Tous les vermifuges au calomel, administrés parune personne qui ne connaîtrait pas la médecine,peuvent déterminer des gangrènes mortelles de labouche. Dans ma pratique j'en ai rencontré deux ou—trois exemples : Mais, monsieur, disait la pauvremère, je n'ai donné qu'une pastille par jour. Ehbien ! c'est précisément à cause de cela que l'acci-


-47—dent était arrivé ; si elle avait donné une dose plusélevée de calomel son enfant aurait vécu. Si le calomel ne produit pas fréquemment la gangrené, ildétériore souvent les dent? et les gencives à—lout jamais.Les belles et les bonnes dents sont une belle etbonne fortune. Elles contribuent, en aidant lesfonctions digeslives, à nous faire vivre longtempselgaiment. Les dents sont la seule partie du corpshumain qui ne contient pas de sel ; leur émail estle tissu le plus dur de tout notre organisme, en lefrappant avec l'acier on en fait jaillir l'élincellecomme du silex. Elles peuvent pourtant se gâter.Les meilleures dents ne sont pas les plus blanches, mais celles qui tirent légèrement au jaunâtre ;les plus mauvaises sont celles qui ont une couleurlégèrement bleuâtre.A ce propos la mère nature paraît être en mêmetemps mère et marâtre.Les Nègres, les Arabes, les Indiens ont en général de belles dents. L'année dernière, j'ai eu l'occasion d'examiner des squelettes d'Etrusques, enterrés depuis plus de trente siècles et j'ai constaté qu'iln'yavait pas une seule dent gâtée.Pouvons-nous en dire amant en ce qui nousconcerne?Pour ma part,si quelques dents restent attachées k mon squelette, l'on constatera qu'il n'y ena pas une seule île bonne. Dans toute l'Amérique,où les Nègres et les Indiens conservent toujoursleurs belles dents, les Européens et les Européennesont des dents détestables. C'est triste, mais c'estvrai, et il faut convenir que notre génération et notre race n'ont pas les dents des Nègres d'Amérique,des Etrusques de Bologne, ou des Arabes de l'Algé-


-48 —pourquoi*rie. Je constate depuis longtemps qu'un grand nombre de nos enfants ont de mauvaises dents dès lapremière denlition. ,Est-ce à croire que celle inégale répartitionn'est qu'une injustice, ou un caprice de la nature?Je ne le pense pas. Je crois plus volontiers quecela est dû à nos mœurs, à nos habitudes, à nosaliments, à l'influence de certaines maladies et decertains remèdes. Je crois à l'influence de l'héréditéel je pense que les parents lèguent à leurs fils aussibien de mauvaises denl6 que des os fragiles ou tordus.Les parents, les mères surtout, doivent s'occuperbeaucoup de la seconde dentition, de la denlitionpermanente qui commence après la septième année.Les dents, en effet, peuvent être mauvaises parleur structure ou par leur altération, mais ellespeuvent aussi devenir nuisibles par leur place et parleur direction. Pour que les dénis soient bien placées il faut que, sans être ni trop serrées, nitropéloignées les unes des autres, les incisives et lescanines supérieures dépassent ousurmontent unpeu les inférieures ; les molaires petites et grossesdoivent tomber lesfcnes sur les autres. Vous comprenez leles unes rendissent l'officede ciseaux, les autres l'office de meules.Il faut donc veiller attentivement à ce que la chute des dents de lait ne devienne pas une cause dedéviation de nouvelles dents permanentes. Aus—sitôt que la dent nouvelle paraît, il faut faire tomber l'ancienne. Ce matin même, j'ai visité un enfant qui a les deux dents incisives supérieures mésuperposées les unes aux autres ; ladianes doubles,gencive en est malade et maintenant on aura des


-49—difficultés à faire disparaître cette fâcheuse anomalie. La responsabilité en retombe sur les parents.Si le placement ou la direction anormale desdents a eu déjà lieu, il convient de s'adresser à undentiste intelligent. J'ai fait arracher plusieurs foisdes dents mal placées à des jeunes personnes de 12,13 ou 14 ans et j'ai vu repousser les dents arrachéesjusqu'à deux- fois. En toute circonstance, il vautmieux avoir une dent de moins, que de l'avoir placée de manière qu'elle blesse les lèvres ou qu'ellegêne la mastication.Pour ceux qui ont la fortune de posséder de bonset de beaux râteliers, l'hygiène des dents est trèssimple.Le soin principal consiste k se rincer la bouchetout de suite après chaque repas avec un peu d'eauqui ne soit nichaude,ni froide.rincebouchesestL'usage desexcellent, mais il présente quelquesincommodités et il rencontre quelques antipathies.L'habitude de se laver la bouche k la toilette dumatin est bonne ; cependant, elle laisse séjournerentre ou sur les dents les restes de la masticationtoute la journée et toute la nuit et elle ne vautpas l'habitude de les enlever par une ablution aprèschaque repas.L'emploi des cure-dents est en général mauvais ;cependant les cure-dents en tuyaux de plumes élastiques peuvent devenir utiles pour les dents écartéesl'une de l'autre.11 est très-nuisible de manger ou de boire, dessubstancestrop chaudes ou trop froides ; il est encore plus pernicieux de passer instantanément desaliments bouillants aux boissons glacées. Cela suffitpour crevasser l'émail des dents.C'est un caprice très-pernicieux que celui qui7


—50—consiste k casser les noyaux et les os ;c'est ce quiuse le plus les dents des sauvages et des chiens.Les pipes en plâtre, en terre de Valence, pu lesbouts de pipe en bois et en os usent les dénis etproduisent fréquemment le cancer des lèvres, qui amérité le nom caractéristique de cancer des fumeurs. Le bout de la substance hyaline ou vitrée que l'on appelle ambre, est le seul qui soitinolfensif.Ceux qui ont l'hygiénique habitude de se laver etde se frotter souvent les dents ne doivent se servirni de brosses, ni de poudres, ni d'eaux aromatiques. De l'eau pure et le bout d'un doigt remplacentavec avantage les mille et un spécifiques toujourscoûteux,souvent nuisibles des parfumeurs.Lorsque les dents sont attaquées par celle substance phosphato-calcaire qu'on appelle tartre dentaire et qui finit par en allérer la surface si l'onn'a pas le soin de l'enlever, il devient indispensablede se servir de la brosse. Choisissez, dans ce cas,la brosse la plus douce possible el faites les frictions de haut en bas pour les dents supérieures, etde bas en haut pour les dents inférieures. S'il devient nécessaire d'ajouter à l'action de la brossecelle d'une poudre dentifrice, employez le charbonvégétal très-finemem pulvérisé. Et si les dents ontune grande disposition à la carie, c'est-à-dire à segâter, faites infuser la poudre de charbon dans unesolution de bi-carbonate de soude, et faites sécherensuite. Cette poudre aicalinée par la soude sert kdiminuer l'acidité du mucus de la bouche, qui estune cause de l'altération des dents. C'est k cela quel'on doit l'usage moderne assez répandu de la cendre de cigare qui, contenant de la potasse, remplacel'action chimique du bi-carbonate de soude.


Le—51-Lorsque l'altération des dents est compliquée del'altération de gencives rouges, molles, spongieuses, enflées, saignantes, je vous propose une poudreainsi composée :Charbon végétal pulvérisé, 16 grammes.Quinquina id. 12—Sucre id. 6—Chlorate de potasse 15 décigrammes.Essence de menthe 4 gouttes.Les Anglais font usage de poudres composées decraie ou de magnésie, de laque carminée et decamphre.On peut en outre faire un usage avantageux dequelques plantes alimentaires de la famille des crucifères, que l'on appelle anti-scorbutiques par suitede l'huile acre volatilequ'elles contiennent. Ce sont :le cresson, le raifort, la moutarde.Faut-il vous parler de la cigarette de camphre,maintenant qu'elle a élé presque enterrée avec lecholéra? Le camphre est un bon remède contre laputréfaction et la gangrène,mais selon l'école deSalerne il possède aussi une action anaphrodisiaque.Je ne vous expliquerai pas cette action ni levers latin qui la décrit. Je veux plutôt vous signaler et vous faire connaître les pastilles de cachouaromatiques de Bologne. Ces petites tablettes, trèsagréablesau goût, peuvent réellement rendre quelques services aux personnes qui ont l'haleine forteet aux fumeurs, et aider, en général, à l'hygiène dela bouche.Je vais clore la séance par la grosse question,par la terrible question qui nous a lait verser à toitstant que nous sommes plus ou moins de larmes—en notre enfance. sucre gâte-t-il les dents ?—Les mamans disent oui, elles le répéteront plus


-52—que jamais dorénavant à cause du nouveau blocusque le second empire nous à légué. Mais est-cebien vrai ? Le sucre fait-il mal ou ne fait-il pas malaux dents? Des savants, tels que Spiess et Reich,se sont occupés de la question ; mais nous avonsJean qui rit et Jean qui pleure : Reich, a dit non—Spiess a dit oui.Le célèbre Moleschott s'est mis lui aussi de lapartie, et s'est fait le défenseur éloquent du sucreet des gourmands, en citant l'exemple des nègresdes Antilles qui travaillent dans les haciendas, fontun usage énorme et continu du sucre sous toutesles formes et conservent malgré cela des dents trèsbelles et très bonne.Mantegazza a constaté lui-même ce fait au Brésil, au Pérou, à Salla, au Tucuman.Mais pour notre auteur, ce fait n'est pas concluant ; d'après lui, Nègres et Indiens ont des dentsdifféremment organisées que les nôtres. Il a doncvoulu mettre la question au clair, el, à l'aide de sonami Labus, il a fait des expériences très minutieuses à ce sujet ; voici quel en est le résultat :1°Le sucre n'exerce aucune action chimiqueasur les dents ;2°Le sucre n'altaie les dents que lorsqu'il asubi la fermentation ;3° L'acide lactique, le vinaigre et le jus de citronattaquent l'émail des dents qui n'ont pas une bonneorganisation ;4° La sécrétiontropacide de la muqueuse buccale est la cause la plus certaine et la plus clairedes maladies des dents ;o°II est probable que l'abus du sucre et des douceurs peut rendre plus acide le mucus de la bouche et par conséquent altérer d'une manière indi-


—S3 —recle l'émail des dents, mais cela n'esf pas encoreprouvé.En sommes, si vous avez de bonnes dents et sivous avez soin de les entretenir par la très simplehygiène que je vous ai indiquée, ne craignez ni lesucre, ni le vinaigre, ni le citron.111Mesdames et Messieurs,Nous nous sommes séparés en carnaval et nousnous retrouvons en carême. Quelqu'un de nousaura entendu peut-être résonner une fois de plus—à ses oreilles le funèbre mémento etc., « Rap-» dras poussière. »La science s'incline devant ce matérialisme un» pelle-toi que tu es poussière et que lu redevien-anthropologistes,naturalistes, hygiénistes tout lepeu brutal. Chimistes, physiologistes,—monde,est d'accord k ce sujet avec la Bible. La science nepeut s'occuper que de matière, de poussière, outout au plus de poussière réduite k l'état de gaz.A l'aide de l'air, de l'eau el des substances organiques mêlées k la terre, les plantes fabriquentsilencieusement dans le mystère de leurs digestionsde l'albumine, du sucre, de la graisse. Le lièvre,—en rongeant les herbes, en les digérant dans le laboratoire très étendu de son tube intestinal,prépare sachair. L'homme mange le lièvre et s'assimile lessubstances alimentaires que l'animal et le végétals'étaient réciproquement prêtées. Puis l'homme,devenu vieux, meurt, rentre dans la terre, rend


—54—aux plantes, aux animaux et au règne minéral lapoussière qu'il avait empruntée. C'est le cercle—éternel de la matière dans l'alimentation de la vie.Les chimistes qui s'occupent spécialement dechimie organique et les physiologistes ont rencontré beaucoup d'obstacles à classer scientifiquementles aliments ; leurs classifications diffèrent l'une del'autre. Cela veut dire, comme vous le savez, quechimie et physiologie ne sont pas encore des sciences exactes et complètes. Quant à nous qui causons d'hygiène et des fonctions végétatives au pointde vue pratique etjournalier, la difficulté n'est pasaussi grande.Nous avons dit que l'homme prend ses alimentsdans les trois immenses départements de son royaume; il meta contribution la minéralogie, là flore,la faune de la planète qu'il habite.Distinguons donc d'abord les aliments en alimentsinorganiques et aliments organiques ;divisons lesorganiques en aliments toniques, calorifiques, nerveux; ajoutons a la iorme des aliments les pluscommuns de ces catégories les principes caractéristiques de leur composition chimique. Nous verronsd'un coup d'œil qnaUes sont les substances alimentaires et les corps cwimiques qui produisent principalement la force, ia chaleur, Ou l'excitation nerNous pourrons en outre facilement comveuse.prendre les aliments proprement dits ou les aliments solides dans les deux catégories des alimentstoniques et caloritiques, el les aliments liquides oules boissons dans celle des aliments nerveux .Dans le tableau synoptique que nous avons sousles yeux, nous voyons classées d'après la distinctionque nous venons d'adopter les principales substances alimentaires.


ALIMENTSORGANIQUESINORGANIQUESTONIQUES CALORIFIQUES NERVEUXForme physique Comp» chimique Forme physique Comp. chimique Forme physique Comp. chimiqueSel.Viande. Albumine. Graisses. Stéarine. Vin. Alcool.Viscères. Fibrine. Huiles. Liqueurs.Sang. Globuline. Beurre. Butirine. Café.Lait. Caséine Fruits. Thé. Alcaloïdes véEau. Œufs. Légumes. Amidon. Cacao. gétaux.Froment. Gluten. Pommes de Guarana.Pain. terre, etc. Sucre. Mate.Lentilles, etc. Légumine.Opium.Tabac.Haschich.Coca.Cât. Essences.Cannelle.Poivre, etc.


—56 —ALIMENTS INORGANIQUESSEL.Les aliments inorganiques ne sont pas nombreux ; strictement parlant, ils sont deux : \'eau etle sel.Le sel de cuisine, que tout le monde connaît,est principalement formé de chlorure de sodium.Il est fourni par les montagnes et la mer, mais lesel marin est préférable au sel gemme, parce qu'ilcontient une plus grande quantité de chlorure demagnésium qui aide k la digestion.Nous avons déjk énoncé que les dents sont la seule partie du corps humain qui ne contient pas desel. Le sang, au contraire, est la partie qui en contient le plus, C'est k cause de cela peut-être queles Samoïèdes mangent la viande sans sel, parcequ'il ne la font pas saigner. Du reste, il est facilede vérifier que la viande des animaux étouffés aplus de goût que celle des animaux égorgés.Ici la lune de miel de la Science avec Moïse estfinie. Il ya lettre de divorce pour toujours. Moïse—dit au nom du Seigneur : « Vous ne prendrezpour votre nourriture du sang d'aucun animal,—tant des oiseaux fcue des troupeaux. Toutepersonne qui aura mangé du sang, périra au milieu—de son peuple. » (Lévitique VII, 26 et 27). Défendre de manger du sang, c'est-à-dire de la viandenon saignée et sanctionner cette prescription par lapeine de mort,—me parait exorbitant. L'Hygièneet le Pentateuque ne pourront plus faire bon ménage ensemble.Par cela même que toutes les parties de notreorganisme contiennentbeaucoup de sel et que nous


—57-—en perdons continuellement dans le mucus, lasueur, les larmes etc . l'introduction du sel dans l'ali,mentation devient indispensable à notre santé.Non-seulement le sel est un aliment, mais il aideà la digestion des corps albumineux et de la graisse ;il augmente la sécrétion de la salive et du suc gastrique pour la dissolution des aliments.Le sel, disait Vauban, est une manne donnée àl'homme par le ciel. Burgrseve a tellement exagérél'importance du sel,qu'il n'a pas hésité à affirmerqu'avec l'usage médical du sel l'on pourrait régénérer la race humaine.Le sel est aussi utile à la nourriture et à l'élevage des bestiaux; tous les colons devraient serappeler ce qu'a écrit Fawtier : « Le sel rend l'alimentation plus saine, plus économique, soutient lesforces digestives, diminue les chances des maladies et de mortalité, et par son concours l'engraissement est plus profitable. Le bœuf, le mouton, leporc s'engraissent mieux, plus promptement et àmoins de frais, lorsqu'ils reçoivent le sel ; leurviande est plus savoureuse et de meilleure qualité. »Les personnes qui voyagent dans le Paraguayn'oublient jamais la saveur exquise de la viande desbœufs qui ont pâturé dans les champs salés dupays.Pour l'homme, je le répète, le sel a été de touttemps si nécessaire que son histoire se confond avecl'histoire de l'humanité. On a fait à l'égard de ceprécieux aliment, ce que nous disions dans notrepremière conversation :on l'a entouré de la sanction religieuse. Les salines des Scandinaves étaientsacrées ; le premier rite des Chrétiens s'accomplitavec les deux substances alimentaires dont nousparlons: l'eau et le sel.8


—58-Hélas-Faut-il maintenant examiner quels sont les inconvénients de la diminution ou du manque absolu dusel dans l'alimentation ? Faut-il parler de la pâleur,de la faiblesse générale, de la langueur d'estomac,de l'absence d'appétit, de la formation de vers intestinaux, de l'albuminurie et de la plus grandemortalité qui s'ensuivent?non! Nous nel'avons que tropappris k nos dépens par les siègesde Strasbourget de Paris!...Attila, ce type des conquérants, connaissait sibien l'importance du sel pour l'ennemi, qu'arrivé enBavière, sa première œuvre fut celle de détruire lesriches salines de Reichenhall, près de Salzbourg,le pays du sel.que les enfants et les adultes salent lesDonc,mets à plaisir ; ceux qui l'aiment beaucoup sonlceux qui en ont le plus besoin. Si vous avez des enfants lymphatiques, scrofuleux, rachitiques ou prédisposés à la phthisie, faites leur prendre l'habitude,lorsqu'ils ne l'auraient pas, de mettrebeaucoup desel dans leurs aliments ; préparez leurs mets abondamment salés. Il est bien entendu que l'abus, l'excès en tout ne peut que devenir nuisible. Ainsi nousconnaissons les immenses avantages que l'on retirede l'action anti-siptique ou anti-puiride de cettesubstance pour la salaison et la conservation desviandes, des poissons, des légumes, mais nous savons aussi qu'une alimentation prolongée et exclusive par les aliments salés devient aussi dangereuseà la longue que l'alimentation qui manque de sel.Adoptons cependant pourconclusion, sans crainte de nous tromper, le proverbe populaire allemand : Salz und Brod machen die Wangen roth.—Le sel et le pain font les joues rouges.


—59 -d'oùEAU.L'eau esl le sang de notre planète, l'Océan enest le cœur ; les nuages remplacent les veines etles Ueuves en sont les artères qui, descendant desmontagnes, distribuent la vie partout,aux planteset aux animaux. Sans eau — pas de digestion, pasde sang, pas d'excrétions, pas de vie. Mohamed aécrit : « L'eau est le liquide par excellence dans cemonde et dans l'autre ; c'est le mets qui plaît augoût, c'est la guérison de la maladie. »Les Grecs n'étaient pas tous des Spartiates, dessoldats sans peur et sans cœur, tels qu'ils ont étési bien peints par notre collègue Vico. Après-demain il nous parlera, j'espère, d'une autre variétéde cette espèce du genre humain : il nous fera connaître la ville des arts et ses habitants, Athènes et—les Athéniens. Les Grecs, en somme, étaient desguerriers et des artistes, des mithographes du beau.Ils entourèrent l'aliment aqueux dont nous parlonsd'une foule de divinités du sexe féminin. En général, elles s'appelaient Nymphes ; puis particulièrement Napées, Dryades, Oréades, Naïades, Oceanides,Néréides, en Scandinavie,— —Ondines jolies déesses sous forme de jeunes filles qui voltigeaient autour des fontaines, des sources, des lacs,—des rivières et des Ilots sortait enfin ——étincelanle, inondée de beauté la Vénus anadyomène.Cette armée de nymphes, ces 50 filles de Nérée,chargées de secourir les matelots dans les tempêtes, nous montrent l'importance que les Grecs donnaient à l'eau.En effet, notre corps préparé k sec perd les 2/3de son poids; le sang contient 75 pour 0/0 d'eau.


—L'hygiène-60—Or,nous devons entretenir continuellement cesproportions en remplaçant par les boissons la quantité d'eau que nous perdons dans nos excrétions.La soif se charge, ainsi que nous l'avons dit, denous prévenir du besoin que nous avons de boire.doit nous apprendre k boire de labonne eau.L'eau est une combinaison de 89 partiesd'oxygène avec H parties d'hydrogène. Pour être potable elle doit être limpide, incolore, inodore, aérée,fraîche, agréable, dissoudre entièrement le savon,cuire facilement les légumes. Elle ne doit produireni la réaction acide, ni la réaction alcaline. Elle—doit être à l'abri de tout soupçon, plus encoreque la femme de César.Une eau excellente ne doit pas contenir plus de5/10,000"de matières fixes, plus de 1 /1,000e desulfate de chaux, plus de 5/10,000 de bicarbonalede chaux.Une eau de bonne qualité peut contenir de 1 a 5décigrammes de principes fixes par litre,et par,nices principes fixes de 5 a 15 centigrammes de carbonate de chaux.On ne doit pas croire que les eaux les plus puressoient les meilleures. Une absence absoluede chaux,ou de carbonate de^iaux, peut amener le ramollissement des os.Les eaux qui contiennenttrop de plaire ou desulfate de chaux et qui ne cuisent pas les légumeson les dit crues ou dures.—Eau de pluie. 11 ya des pays qui manquentde puits, de sources et de rivières et où l'on esl, parconséquent, forcé de se servir de leau pluviale.C'est une eaudistillée, mais heureusement moinspure que celles de nos alambics.


—Un—61 —L'eau des premières pluies est toujours trop sale ;celle qui est recueillie sur des toits, dans des récipeut dissoudrepients ou par des tuyaux en plomb,ce métal en assez grande quantité et devenir unpoison lent.Amsterdam et Harlem nous ont appris k nous garder contre de pareilles imprudences : la famille deLouis-Philippe eut légèrement k souffrir, en 1849,de ces accidents pendant son séjour k Garemont.citernes où l'on conserveEau de citerne. Les —l'eau pluviale doivent être construites de- façon kne pas laisser dissoudre de la chaux; elles doiventêtre entretenues en état de propreté avec le plusgrand soin.Roubya en outre proposé de faire passer l'eau de pluie k travers des couches de cailloux,de sable, de craie et de débris de fer avant de lafaire entrer dans les citernes. L'eau de citerne, eneffet,aurait presque toujours besoin d'être filtrée.De plus, les citernes dans l'intérieur des maisons,ainsi que les; avaient les Maures d'Alger, présentent l'inconvénient d'attirer les moustiques et d'occasionner quelquefois ou d'entretenir la fièvre intermittente.Eau de puits. Je passe sur l'eau de neige.—L'eau de puits est de qualité différente selon les caractères du terrain qui a été creusé. Plus les puitssontprofonds, moins ils sonl exposés a donner accèsaux matières corrompues el malsaines qui parcourent le sous-sol des maisons et des villes. En toutcas les puits doivent être faits en bonne maçonnerie et vidés, nettoyés, réparés aussitôt que le besoins'en fait sentir.Eau de source. préjugé vulgaire donne lapréférence aux eaux de source. Cependant, depuis


Les—62—Hippocrate, on peut lire dans l'excellent petit livreDe l'air, des eaux et des lieux, que l'eau de sourcepeut être bonne ou mauvaise, selon la nature desterrains et des roches qu'elle traverse. L'empire àcertainement contribué à remettre à la mode leseaux sales, ou minérales. Ce sont cependant des eauxde source. Je n'entends pas jeter avec cela un blâme absurde sur toutes les eauxminérales, telles,par exemple, que les eaux d'Hammam Rira oud'Hammam Meskoutine, en Algérie, mais je veuxdire qu'ilya des eaux de source détestables et quebeaucoup de personnes feraient mieux de boire del'eau potable que d'aller aux eaux....—Eau de rivière. savants, parcontre, onltrop loué les eaux de rivière parce qu'elles sontplus aérées que les autres et presque naturellement filtrées. Or, il ya en fait des eaux de rivièrequi sont très-insalubres. Ea outre, l'eau de certaines rivières de l'Amérique est plus salée quecelle de la mer. Le Rio de Plata au contraire quireçoit les eaux du Salado et du Saladillo, costserveune eau douce, excellente. En somme,les eauxcourantes prises loin des grands centres de population sont salubres et de digestion facile. Les eauxdes lacs de montagne se rapprochent de celles desrivières. \Il n'ya pas besoin de dire que ia pire des eauxest l'eau stagnante, de marais, de fossé, etc. ;colons onttropnosappris à leurs dépens que c'est unvrai poison.Un moyen de rendre potables et salubres les eauxtroubles, impures ou malsaines consiste à les filtrer. Laissons de côté, pour ce soir, les grandsfiltres et les divers systèmes de filtrer les eaux quisont destinées à l'usage d'une ville. Parlons des


—63—filtres domestiques et commençons par les filtresde campagne.A la campagne il est plus facile que l'on ne pense de se créer un bon filtre ; on prend une bordelaise, un tonneau, un baquet ou un autre récipientde ce genre ; on met au fond une couche de sable, puis une couche de charbon végétal ou aninjial,puis une autre couche de sable et l'on fait passerl'eau à travers. Le charbon ou mieux encore lenoir animal doit être employé à la dose de 4 kilog.pour 100 litres d'eau. Lorsqu'il n'est pas renouvelésouvent, il n'agit plus comme corps dépurant,maiscomme corps filtrant ; il a l'inconvénient de dépouiller l'eau de l'air, mais k cela on remédie endécouvrant le récipient et en agitant l'eau de tempsk autre.Pour clarifier l'eau trouble, il s'y a qu'à l'agiteravec un morceau d'alun attaché à un bâton que l'onrelire aussitôt qu'elle commence k devenir claire.Un moyen d'empêcher la putréfaction de l'eau estcelui de la tenir en contact et de l'agiter avec desmorceaux de 1er.Quant aux filtres d'usage domestique, l'on peutchoisir selon son goût et ses besoins entre ceux quisont en vente dans les magasins de quincailleries.Ou a aussi imaginé un filtre de voyage qui pourrait être fort commode s'il était vraiment utile. IIse compose d'un morceau de grès ou de charbon,à travers lequel on aspire l'eau au moyen d'un tubeélastique en caoutchouc. Mais il a l'inconvénientde laisser dans l'eau les matières organiques qu'ellecontient, il se salit vite et ne vaut plus rien.Dans les villes il est, je dirais presque nécessaire,que l'eau pour l'usage domestique soit élevéejusqu'aux étages supérieurs.


—64 —Nous espérons que tôt ou tard la commune denotre bonne ville d'Alger, voudra bien nous gratifier de ce progrès de la mécanique, appliquée àl'hygiène.Pour que l'eau potable soit agréable et qu'elledésaltère, il faut qu'elle soit fraîche. Elle est fraîche à une température de 6° à 10° centig. et enété même de 10° à 14°. L'eau chaude est toujoursune véritable médecine.Les moyens de rafraîchir l'eau sont aussi variésque ceux de la filtrer. Nous possédons dans lesgargoulettes un simple et bon moyen de maintenirl'eau fraîche et nous n'avons pas besoin d'en chercher d'autres.Prêtres et laïques, c'est-à-dire médecins et profanes,exagèrent peut-être le danger de boire del'eau froide quand l'on est en transpiration.Pour propager en France celte horreur de l'eaufraîche, on a raconté que le dauphin, fils de FrançoisIer, mourut en quatre jours pour avoir bu un verred'eau en venant de jouera la paume et au momentoù il se trouvait en transpiration. Il faut ajouterque son écuyer, le comte Montecuccoli avoua l'avoir empoisonné... J.-J. Rousseau avait à ce propos raison de met%e en ridicule l'habitude quel'on a de faire manger du pain aux enfants qui ontsoif et qui sont en transpiration avant de leur donner k boire : « Donnez-leur donc à boire, disait-il,quand ils ont faim. » — Lesglaces sont en toutcas moins dangereuses que l'eau glacée, parcequ on les prend et on les avale peu à peu.11 est certain que, quelquefois, boire tout d'uncoupune grande quantité d'eau froide lorsque l'estomac esl vide et le corps en transpiration peutproduire de graves accidents, surtout si l'on reste


—-65-immobile et exposé à un courant d'air. En général, l'eau excite la sueur, la rend plus abondanteet plus facile. Le précepte vulgaire de boire chauden élé et froid en hiver, me parait contestable.—Vous pouvez donc boire froid même quand vousavez chaud, si vous continuez à jouer, à courir, àtranspirer ou à danser.ALIMENTS ORGANIQUES.Tonique*VIANDES.LAIT.—OEUFS.PAINS.Du règne minéral nous passons au règne végétalet animal, où nous prenons ou empruntons nos aliments proprement dits.Nous causerons un peu ce soir des alimentssolides, c'est-à-dire de ceux que nous avons appelés toniques. J'ai dit que nous en causerons un peuseulement,attendu que pour en parler autant qu'ilfaudrait, la besogne seraittrop longue et nos organes intellectuels s'en fatigueraient, car vous vousrappelez l'aphorisme : « Les organes sont usés parl'abus, comme les outils, dont on se sert trop. »Les aliments que nos appelons toniques ont étéappelés plastiques, parce qu'ils donnent lëplasma,la forme à notre organisme ; azotés, parce qu'ilscontiennent l'azote, substance que je vous ai ditfaire partie de l'air respirable ; dinamogénétiques,parce qu'ils engendrent laforce. Ce sont, en unmot, les aliments indispensables aux fonctions végétatives, les éléments fondamentaux de la nutrition et de la vie.9


—LaeslLa—66VIANDELe père de la viande, le roi de la viande, le dieu——de la viande Apis, le dieu-gras symboled'Osirisl principe du bien ou du bon. Les boucherségyptiens ne le promenaient pas en ville, parce queles prêtres de Memphis l'avaient placé sur les au—tels de leurs temples où le dieu-bœuf Apisétait nourri, engraissé, adoré pendant 25 ans ;puis, l'on faisait semblant de le noyer, on l'honole pleurait purait de funérailles magnifiques, onbliquement, on l'avalait en secret et on le rempla—çait par un autre.L'homme peut manger la viande de tous les animaux sansvertébrés, excepter, hélas !sa proprechair ! seule exception qui existe est celle dufoie de Tours blanc et de quelques poissons de mer,qui produisent, selon Mme Kent-Kane, des vertigeset un espèce d'empoisonnement.—viande descarnivores est généralement forte, fétide, dure, insalubre ; ce sont les herbivores qui ont l'honneurfatal de nous fournir les chairs les plus hygiéniques-.Celle du bœuf a lé privilège de contenir tous lesprincipes albumineux, graisseux, salins qui suffisent à entretenir lAvie humaine. Comme toutesles autres bêtes, les ifœufs" engraissés donnent uneviande non-seulementbeaucoup plus savoureuse,maisbeaucoupplus nutritive. Lawes et Gilbert ontdémontré qu'elle contient le double des matièresalimentaires qui nous sont fournies par les bêtesmaigres.Les Américains, habitués à manger des énormesquantités de viande de leurs bœufs sauvages et maigres, sont fort étonnés de voir qu'en Europe l'onpeut se contenter d'une quantité bien moindre.


-67—Les viscères des ruminants, foie, cerveau,rognons, gras-double, riz de veau,sont des alimentsde digestion très-facile et convenables surtout aurepas du matinLa viande d'agneau est très-bonne et fournit unebonne nourriture ; celle de brebis, de chèvre ou demouton est plus indigeste et moins nutritive.La viande de chameau, de cheval, d'âne, de muletest de peu inférieure à celle du bœuf. Il existait etil existe encore contre elle des préjugéstrop répandus. Des saints et des papes s'en étaient mêlés :saint Boniface en proscrivait l'usage, comme unusage barbare; Grégoire III l'avait absolument déSaint-Hilaire avait tâché de défendue. Geoffroymontrer que les saints peuvent se tromper el quetous les papes ne sont pas infaillibles, mais il afallu la guerre épouvantable de 1870-71 pour nousfaire comprendre qu'il avait raison. Et sans faireappel aux souvenirs du siège de Paris, je peux vousdéclarer que tout en croyant de manger de la langue de bœuf fumée, de Strasbourg ou de Zurig,vous mangez souvent de la langue de cheval et vousla trouvez bonne.Decroix, vétérinaire à Mustapha, avait soutenul'hippophagie. Le curé de l'endroit qui était devenureçut à ce sujet une lettre deun de ses partisans,l'évêque d'Alger, à la suite de laquelle il se suicida.Ainsi, même l'hippophagie a eu son martyr !Le cerf, le chevreuil, la gazelle, le chamois, lelièvre, le lapin ont une viande maigre, savoureuse,liès-riche en créatinequi est un principe alimentaire fort nutritif. Lorsque ces bêtes ont élé luéesaprès une longue course, leur viande est encoreplus tendre et plus digestive.—Je cite le porc en dernier lieu à dessein. La


-68 ~viande de porc a un bon goût, mais elle esttropgrasse et un peu indigeste. Son influence sur l'économie animale varie, selon les lieux, la saison etselon la qualité de nourriture que l'on a donnée àla bête. Dans les pays chauds et en été il est certain que l'alimentation par la viande porcine n'estpas salubie. Mais lorsque la bête a été nourriespécialement de glands ou de châtaignes, lorsqu'ellea élé tuée pendant l'hiver, qu'elle a été bien préparée et que l'on n'en abuse pas sa viande fournit—une quantité de mets appétissants, que l'on peutmanger sans crainte.Croire que l'usage de la viande de cochon produità la longue la lèpre et des dartres, admettre quecelte viande est, en général, farcie de trichines, deces vers microscopiques qui envahissent les muscles et détruisent la vie ou la santé, c'est tout aumoins une exagération. La viande de cochon sauvage ou de sanglier a peut-être moins d'inconvénients encore que celle du porc domestique.Mohammed en inspirant k ses prosélytes, d'unemanière absolue et inexorable, une horreur sacréede la viande de cochon, a fait preuve de cette intolérance qui inspiiÉcn général les législateurs religieux.Le Lévitique qui défend aux Israélites de manger du chameau, parce qu'il n'a pas la corne dupied fendue, le lièvre el le lapin,qui ruminent,dit-il, mais qui n'ont pas la corne du pied fendue,le pourceau parce que, bien qu'il ait la corne dupied fendue, il n'est pas ruminant (XI, 4-7), démontre que l'auteur, quel qu'il soit, ne connaissaitpas bien son histoire naturelle sur laquelle il—avait la prétention de se baser.Parmi les oiseaux domestiques, les poules, le


—69-dinde, la pintade, les pigeons,tonique excellent, tant sous le rapport de la nutrioffrent un alimenttion que sous le rapport de la digestion. Le canardet l'oie ont l'inconvénient de contenir trop degraisse.Le gibier volatile tel queperdrix, faisan, bécasse, bécassine, canards, poules d'eau, etc., représente dans celle famille alimentaire la viande ducerf, du chevreuil, de la gazelle, du lièvre, dans lafamille des quadrupèdes.Les canards domestiques ou sauvages, l'oie toutspécialement, représentent le porc et le sanglier.Cela est si vrai que les Juifs de Ferrare consomnenlet mettent en commerce pour leur usagealimentaire des mets préparés avec l'oie engraisséequi sonl analogues de forme et de goût k h charcuterie : jambons, saucissons, saucisses, mortadelles,etc. Vous voyez ainsi que l'analhème de Moïsecontre le cochon a fait perdre de vue la raisonhygiénique et qu'on le remplace par l'oie, dont laviande est équivalente, sinon plus insalubre.La viande de poisson est fort riche d'eau, elle encontient 4/5 de son poids; elle esl riche aussi d'albumine soluble, mais cette albumine est de digestion difficile à cause de la quantité de graisse phosphorée,avec laquelle elle se trouve combinée. Lespoissons maigres conviennent à tout le monde ; lesJohn Davy qui s'est beaucoupgras à quelques personnes, ou à certains peuples.Les Ethiopiens et Moïse les ont rejeiés parmi lesanimaux impurs.Les huîtres crues et fraîches sont très-facilementdigérées; les langoustes ont une chair très nutritive, mais de digestion difficile.occupé d'ichthyologie,c'est-à-dire de ce qui regarde les poissons, a


—70-prétendu attribuer à leur viande la précieuse qualitéde nous préserver de la funeste maladie que l'onappelle vulgairement maladie de poitrine. Mais celaa besoin d'être prouvé ; si les pêcheurs de Plymouth en sont généralement exempts, ce n'estpeut-être pas l'alimentation par les poissons qui enest la- cause unique.Dans les mers de la zone torride, ainsi oue danscelles de la zone glaciale arctique,on trouve quelques poissons venimeux,qui ont été étudiés parBerkowsky, Fonssagrives et quelques autres hygiénistes.Les saucisses, les boudins et autres mets semblables peuvent de même empoisonner si on les laissetomber en putréfaction.En Russie, je citerai les terrines de foies gras,mets exquis, très-nutritif et de digestion facile, sil'on n'en abuse pas, mets qui fait le plus grand honneur à l'art culinaire français. En Algérie, entreFrançais, je ferai connaître le Caviar, mets national de Russie. Le vrai caviar russe, le caviar desseigneurs se fait avec les œufs des esturgeons del'Oural, de la grosseur d'un petit pois, transparents,avec une petite t"iche«risâtre. Le caviar que je vousprésente est celui diPcommerce que l'on fabriqueavec les œufs d'un autre poisson plus petit que l'esl'irgeon;de couleur noirâtre, d'odeur forte, de saveur piquante et prononcée, il esl de prime abordpeu séduisant ; mais une fois que les yeux, le nezcl le palais se sont soumis au jugement de l'estomac, on l'aime beaucoupet l'on en devient gourmand. Il excite l'appétit et facilite la digestion, onlui donne la préférence sur les sardines, les anchois,les harengs, le ton mariné, etc.Les viandes salées sont toujours moins nutritives


Appert,-71—que les viandes fraîches ; ce défaut est en partiecompeusé par une plus grande solubilité de la fibrine des muscles.Les conserves sont de digestion plus difficile que les viandes fraîches. Dans la conservationdes substances alimentaires animales je crois que laglycérine, principe des corps gras, est appelée àjouer un grand rôle.Cependant, plus que Gannal, plus que Verdeil,plus que Dall'us,—mort en 1840,est kce titre un bientaileur de l'humanité. Ses boîtessont un véritable triomphe de la science Sur l'œuvre de putréfaction qui tend k détruire, c'est-k-direk décomposer tout ce qui a vécu : elles nous présentent au milieu de l'Océan, des perdreaux ou. deslièvres aussi frais que si l'on venait de les acheter—au marché. Des boîtes d' Appert, préparées enAngleterre, furent envoyées aux Antilles, puisembarquées sur le Fury pour le pôle nord. Le Furynaufragea. Le capitaine Ross envoyé à la recherchedes débris du naufrage, put recueillir quelquesboîtes que les ours blancs avaient roulées sur lesglaces sans les casser, et il a présenté k la reineet k l'Amirauté d'Angleterre, ensuite k l'Académiedes science de Paris, des viandes excellentes quicomptaient 16 ans de conservation.L'extrait de viande de Liébiget les tablettes debouillon sont aussi de bonnes inventions pour lesvoyageurs surtout.Manger des viandes pourries c'est un goût dehyène ou de corbeau. C'est la débauche du goût.Sentez les émanations de votre appareil digérantaprès avoir mangé un bécasse bien faite, commel'on dit, une bécasse gardée pendant 15 jours dansdes endroits que l'on ne nomme pas et vous me di-


—72 —rez si l'on ne sent pas le cadavre en putréfaction, lafosse commune des cimetières.. .Ervald et Kolb nous ont donné la moyenne dela consommation annuelle de la viande par les habitants de différents pays ou de différentes villes del'Europe.La voilà en chiffres entiers pour laisser de côtéles fractions :En Russie17 kilog.En France 20—En Saxe 21—A Baden 26—A Munster 26—A Magdebourg 48——A Darmstadt 50—A Berlin 57A Paris 59—A Munich 65—A—Coblentz 70—A Vienne 75A Francfort 76—A Bâle 77—A—Genève 117Enfin, les viandAies plus communes, considéréessous les rapports de la digestion et de la nutrilion,se classent de la manière suivante :Digestion.Nutrition.1°Pigeon.l»Poulet.2° Poulet. 2° Pigeon.3°Veau . Z" Bœuf.4° Bœuf. 4Chevreuil.Mouton. 5» Mouton.6° Chevreuil. 6° Veau.7° Poisson. 7°. Porc.8°Porc. 8° Poisson.


-73—LAIT,OBUVS.Passons a d'autres aliments toniques du règnelait est le prototype des aliments ; ilanimal.—Leest aliment et boisson, il esl, a-l-on dit, une chairliquide, car il contient l'eau, la caséine qui remplace l'albumine, le beurre qui renferme de la graisse, le sucre de lait et les sels du sang.Le lait de femme contientbeaucoup de sucre ;celui de vache le double de caséine que celui detemme ; la jument et l'ânesse donnent un lait quiest fort doux et qui ressemble au lait humain ; lelait de brebis est très gras,celui de chèvre n'estguère différent. Brition ya trouvé 1 p. 0/0 de fer,que l'on peut augmenter en administrant auxchèvres le laclale de fer.D'après l'analyse de Becquerel, on peut classerles laits les plus en usage de la manière suivante :1. Vache,2. Anesse,3. Chèvre,4. Jument,5. Brebis.Le lait est surtout un excellent aliment pourlespelils enfants et pour les adolescents. La crème delait formée par les globules de beurre qui viennentà la surface du lait en repos, convient aux personnes dont l'organisme a besoin de graisse ; le petitlait, au contraire, qui est le lait dépouillé de graisse et de caséine, est une boisson excellente pour lespersonnes qui ont besoin de substances rafraîchissantes.Lorsque l'influence de la chaleur oua changé le sucre de lait endes oragesacide lactique et quecelui-ci a fait coaguler la caséine, ou tourner,10


-74-~comme l'on dit, le lait,, Je même lait n'est pasgâté, ni mauvais. Il suffit d'yajouter un peu de bicarbonate de soudé et de le faire bouillir pour luirendre ses qualités ordinaires.La manière plus simple et la meilleure pour conserver le lait est celle de le faire bouillir une foispar jour et de le tenir au frais.Quelquefois et chez quelques personnes, le laitest indigeste ; il produit des aigreurs, des coliques,la diarrhée. Dans ces cas, si le thé, le café, le chocolat, ou un peu d'eau de menthe, ne suffisent pas kle rendre digestif, il faut l'abandonner.Les œufs nous fournissent un aliment agréable etnutritif. Les œufs de poules sont les plus employéset les meilleurs parmi ceux des oiseaux domestiques. Les Romains préféraient ceux du paon, maisil paraît que les œufs les plus délicats sont ceux deperdrix.Les œufs sont un trésor pour la cuisine et pourl'hygiène. La France en exporte des quantités incroyables; elle en consomme plus que tout autrepeuple d Europe. On a cherché à établir un certainrapport entre le goût pour les œufs et la galanterieproverbiale des descendants des Gaulois. Mais...qu'en dirons-nous?Il faudrait, peutÈtre consulter un ancien algérienqui n'est plus en Algérie, le spirituel Toussenel,auteur de l'Esprit des bêtes.FROMENT.—PAIN. LENTILLES, ETC.Les céréales empruntent leur nom à Cérès, ladéesse fille de Cybèle ou de la terre, la protectricedes colons de Grèce, de Rome et plus spécialementde Sicile,qui l'honorèrent de la plus belle couronneque l'on puisse porter, la couronne d'épis.


LesÎSLès céréales les plus en usaigéet les plus nutritivessont .1.2.3.4.5.Froment.Orge.Seigle.Avoine.Maïs.6. Riz.Le prince des céréales est le froment. Le riz enest le paria, à cause de sa pauvreté d'albumine ôtde sa richesse d'amidon.Le riz est l'anneau qui joint la série des alimentstoniques à la série des aliments que nous avons appelés calorifiques.Un mode très-simple d'analyser les céréales etde connaître leur valeur nutritive est la suivante :Mettez une poignée de farine dans un morceau detoile et manipulez-la sous l'aclion d'un tout petitjet d'eau. Quelque temps après il restera dans lesachet une matière élastique, gluante, agglulinative,que l'on appelle gluten, glutine, ou triticine, e'qui représente l'albumine végétale.Au fond de l'eau qui a servi k laver la farine, ontrouvera une matière blanche pulvérulente qui est-l'amidon. céréales qui contiennent la plusgrande quantité de gluten sonl les meilleures : letrament en donne de 15 k 18 p. 0|0, le riz 7.Outre ces deux substances fondamentales de lanutrition, les céréales renferment aussi delà dextrine,un peu de graisse et les sels que l'on rencontredans notre corps. Le maïs est la céréale la plus riche en graisse.Dans les cellules les plus extérieures des céréaleson trouve plus de gluten et plus de graisse quedans les cellules intérieures. L'orge perlée et le


nous-76—riz mondé perdent ainsi leur valeurnutritive ; parcontre, le pain bis, celui qui contient une certainequantité de petit son est plus salubre et plus nutritif que le pain blanc et le pain de luxe.Les Romains donnaient le pain bis aux athlètes etaux gladiateurs—en nourrissons les soldais.Le pain est synonyme d'aliment. Je ne vousapprendrais rien en vous décrivant sa fabrication.C'est une pâte composée de farine, d'eau, de selet de levain. Cette pâte fermeute, devient acide .forme une combinaison albumineuse spéciale quichange le sucre en alcool, lequel se volatilise enacide carbonique, qui reste emprisonné dans lestrous du pain, en le rendant léger et savoureux.La cuisson change une autre partie d'amidon endextrine et en sucre ; l'albumine soluble se coagule et l'alcool s'évapore. Au dernier moment de lacuisson, il se développe dans la croûte une matièrebrune, un peu amère el aromatique qu'on appelleasamère et que les chiens n'aiment pas.1"Le pain léger est le pain préférable : parcequ'il est bien fermenté et bien manipulé ;parce3u'il contient une grande quantité de gluten qui aonné lieu, par une cuisson régulière, k un emprisonnement d'acide%arbonique.Le pain rassis est plus facile k digérer que le painfrais, mais il n'est pas vrai que le pain chaud soitinsalubre. Il peut nuire auxdents, il ne nuit pas àl'estomac. On grille le pain que 1 on donne auxmalades, afin qu ils soient forcés de le mâcher elde l'insaliver davantage et qu'ils puissent le digérerplus facilement.Le pain des Arabes ne peut-être que mauvais.parce qu'il est fait de farine mal moulue, mal pétrie, mal fermentée et mal cuite.


Il-77-La galette aussi, que les Juifs mangent pendantla semaine avant Pâques, est un mauvais pain.C'est un pain indigeste, parce qu'il manque de levain et n est pas lermenté.Le pain est moins nutritif que la viande ; il necontient que la moilié environ des substances alimentaires de la viande de bœui'. Le pain est aussimoins digestif que la viande, parce que le glutenavant de se transformer en sang et en chair, etl'amidon qui doit se modifier en graisse, exigent delongues opérations chimiques.Le pain moisi, aigri par un excès de levain oude fermentation, ou mal cuit peut devenir nuisible,—insalubre. peut empoisonner et donner lieuk des vomissements, à des convulsions, à la gangrène et à la mort lorsqu'il contient de la farine degraine d ivraie ou d'ergot de seigle. Dans le mauvais pain de maïs, dans l'alimentation par la polentapeutêtrele principe toxique qui fait succomber lesdevenue dîne, moisie el acide ee rencontrepauvres paysans de la Lomhardie, le paradis terrestrede l'Italie, k la pellagre.Fn France on lait le pain avec la farine de blé oude seigle ; en Italie avec les farines de blé, de seigle, de maïs ou de châtaignes. Dans l'Inde on faitdu pain de riz. Aux îles Canaries on se sert de l'herbe cristalline. En Laponie et en Islande on emploieles lichens. Dans l'Océanie, en Maiaisie, aux Antilles, k Taiti on a l'arbre à pain, la rima, qui donne des lruits pulpeux et amylacés de 50 k 40 kilos,que l'on cuit et que l'on mange comme du pain.Pour terminer b. série des aliments toniquesnous dirons deux mots des légumineux et nousprendrons pour type les lentilles, qui coûtèrent aumalheureux Esaû son droit d'ainesse, el qui for-


- 7*-Les légumes tels que lentilles,haricots, fèves,petits pois, pois chiches, etc.,mériteraient dé prendre place dans la hiérarchie gastronomique entre laviande et le pain — en considération des principesàlbumineux qu'ils contiennent en abondance.mênt la base, le secret de là prodigieuse Révalescière.Molescholtles appelle avec raison la viande du peuplé,car ils renfermentbeaucoup de légumine, beaucoupd'amidou et tous les sels du salig. Les haricots contiennent 18 ou 19 parties de légumine et 5 ou 6 degluten, les lentilles 32 parties de légumine et kpeu près une d'albumine végétale.La révalenta ou revalescière n est qu'un anagramme d'Eroum Uns qui est le nom botanique dela lentille. Avec Un mélange de farines légumineuses, le plus souvent avariées, où prédomine la farine de lentilles, quelques charlatans ont mis en commerce une farine miraculeuse qui doit guérir toutesles maladies» et qui nous a conserve la vie précieusedu Saint-Père, disent les journaux payés pourbattre la grosse caisse. Fiickhïuger déclare que toutcela n'est qu'un affreux mensonge, et je suis un peude son avis. *La Farine mexicmne aussi, cette rivale de la Revaiescière,n'a, k mon avis, qu'une valeur analogueà celle del emprunt mexicain. Or, vous savez lotitde suite à quoi vous en tenir sur ces souvenirs d**! expédition du Mexique.


BEURREFRUITS—79En—IVMesdames et Messieurs,Dans notre dernier entretien sur la classificationdes aliments,nous avons signalé les difficultés queles chimistes, les physiologistes et les hygiénistesrencontraient à ce sujet. Nous avons dit que cesdifficultés provenaient de ce que ces sciences, »mcherchant k pénétrer dans les mystères de la vie,sonl encore loin d'être complètes ou exactes.En continuant ce soir k parler des aliments,nousmaintenons sous nos yeux la classification que nousavons jugée la plus convenable k notre point de vuepratique, et nous signalerons la lutte qui eut lieu, ily a 20 ans, entreLiébig et Moleschotl. —Liébig,dans ses Lettres sur la chimie, avait divisé les aliments en plastiques et respiratoires ; Moleschott,dans ses lettres sur la circulation de la vie expliquad'une autre manière le cercle, le mouvement éternel de la matière, et dit que les corps alimentairesse classaient naturellement en corps albuminoides,définitive,—adipogènétiques, gras et en sels.Vlulder avait déclaré, en 1838, que, herbivores etcarnivores se nourrissent d'albumine, avec la seuledifférence que les uns l'empruntent aux plantes, lesautres aux animaux.Alimenta calorifiquesHUILE ——— LÉ&UMES FRAIS--POMMES DE TERRE, ETC.Les aliments organiques que nous avons appeléscalorifiques, ont-aussireçu fa dénomination d'ali-


—80—ments hydrogéno-carbonatés .parce qu'ils contiennent beaucoupplus de carbone et d'hydrogène queles toniques ou azotés. On les a, de plus, désignéssous le nom d'aliments respiratoires, parce qu'ilsprennent une grande part k la respiration ; combustibles, parce qu'ils concourent à la combustion ;thermogénétiques, parce qu'ils produisent de la chaleur ; enfin adipogènétiques, parce qu'ils consistenten aliments gras ou contenant les principes nécessaires pour fabriquer de la graisse.Donc, les aliments calorifiques nous lournissenldes substances combustibles et des substances nu—tritives. Notre corps possède de la graisse sousla peau, dans les muscles, aulour de plusieurs viscères, dans le cerveau el dans les nerfs. Unhomme qui a faim et ne peut pas manger dévoresa graisse ; le chameau qui voyage sans manger senourrit aussi de sa graisse et sa bosse disparaît.Le comte Ugolin que je vous disais avoir étécondamné à mourir de faim par l'archevêque Roger, s'en nourrit pendant 9 jours, d'après Dante ;d'autres auteurs plus récents prétendent que l'onpeut même arriver k 13 et à 14 jours. L'hommemalade va plus loin encore, mais lorsqu'il se lèvenous le trouvonsJiien maigre Il a mangé sagraisse.Au moyen de ces mêmes corps gras, ou propresà fabriquer de la graisse, il se forme dans notrecorps une espèce de foyer de chaleur interne quel'on a appelé combustion, combustion respiratoire,combustion lente, oxydation.Par combustion on entend en chimie une combinaison de deux ou plusieurs corps qui dégage dela chaleur et de la lumière. Vulgairement on ditque ces corps brûlent, qu'il y a du feu et qu'il n'ya pas de fumée sans feu.


— 81 —Nous avons cité, l'autre soir, l'exemple de labougie qui brûle par la combinaison de la stéarineavec l'oxygène de l'air.Notre chimiste Lauras nous a montré la combustion au soufre, du phosphore, du charbon et dufer avec l'oxygène pur.Dans notre cas et lorsqu'il s'agit de nos fonctionsorganiq'ies, il ne faut pas prendre à la lettre cesmots combustion, calorique, lumière, feu, etc.La stéarine de notre graisse ne brûle, pas commecelle de la bougie, elle ne produit pas lumière etcalorique ; cependant, il ya un développement dechaleur sans feu. Le corps gras spécialement en setransformant en eau et en acide carbonique aumoyen de l'oxygène absorbé par la respiration, lesautres substances alimentaires en se transformantau moyen d'autres oxydations en urée, en ammoniaque et en acide carbonique, développent de lachaleur, qui, bien qu'elle ne soit pas évidente,n'estpas contestable.Voilà la combustion et la calorification animales ;voilà le rôle hygiénique pour nous des substancesgrasses ou calorifiques.En effet, indépendamment des agents externes,aux Indes Orientales et en Angleterre, par exemple, la chaleur interne dans la bouche de l'hommene varie, selon John Davy, que d'un demi degré auplus, ou de 37° à 370 et demi, et la températurepériphérique de notre corps ne varie que de 34° à33° degrés ; il faut donc nécessairement, comme l'aaffirmé Liébig,que nous ayons un foyer de chaleurinterne entretenu par les aliments calorifiques ourespiratoires.En somme, ce qui développe la chaleur internede noire corps ce sont, en partie au moins, les ali-14


et-«-—ments jgras, ce mouvement éternelles transformations continues de la matière, enfin cesfoectionsvégétatives qui forment la source de k vie etdont nous nous occupons maintenant.Mme Sand nous a renseignés sur ce phénomènedans un de ses jolis romans, le Péché de M. Antoine. Elle nous apprend que certains pâlies saventdormir dans les prairies et à la belle étoile pendantles nuits froides d'hiver en se metlant successivement à la place où était couché un bœuf. Celaprouve que malgré le froid et l'humidité de l'atmosphère, la chaleur dn bœuf réussit à sécher et à réchauffer la terre.Nous ne devons cependant pas croire que lesgraisses on les fruits soient les seuls aliments capables «l'entretenir la respiration et la calorificatTOnde notre corps. Jetons les yeux sur le tableau, souvenons-nous de ce que nous avons déjà appris surles céréales et nous verrons que le froment ou lepain, contiennent non-seulement le gluten, principe tonique, mais aussi de l'amidon et du sucre,principes calorifiques, et de l'alcool, principe nerveux. En somme, tous les corps sont composésprincipalement de carbone, d'oxygène, d'hydrogène et d'azote, ma|i selon la prédominance d'unede ces subtances sur les autres, les aliments appartiennent plus à une catégorie qu'à une autre. Lesuns sont plus toniques, les autres plus calorifiquesles troisièmes plus nerveux. De là, selonl'âge, lasaison, le lieu, le climat, les habitudes et les besoins hygiéniques ou artificiels les différents modesd'alimentation.Lorsque j'ai parlé de la voracité des Esquimauxet des Australiens pour les graisses et pour lesviiandes, il a pu paraître à quelqu'un de vous que


—83—C çtait là des scènes d'imagination. Eh bien, non !-ir Si nous voulons tenir compte et du froid deleurs latitudes, et du manque de feu, et de l'accumulation de l'oxygène dans l'air qu'ils respirent,et du besoin d'entretenir la température internedu corps à 37° environ, on ne sera plus étonné dubesoin physiologique et hygiénique qu'ils éprouvent de manger autant de viande crue et de graissequ'ils peuvent eu avaler.Je n'ai certainement pas assisté, comme le capitaine Lyon, au repas de Kooilittuck, bourré deviande par sa femme bien aimée Arnalooa ; ni à lasortie d une jeune fille d'Australie des lianes d'unebaleine jetée morte par la mer sur la plage. Je merappelle pourtant avoir vu, je dis vu, des soldatsautrichiens campés à Bologne, improviser du bouillon gras pour la soupe,en passant des chandellesdans de l'eau bouillante, sans jamais oublier de savourer voluptueusement la mèche qu'ils en retiraient...Ce que nous ne compterons jamais parmi lesphénomènes physiques ou exceptionnels ce sont lesprodiges de la force nutritive de Zoroastre, qui vécutpendant 30 ans, dit-on, de fromage seulement, oules miracles de la force musculaire du saint anachorète Simon, Stylite célèbre entre tous les Stylitesde la Thébaide, qui se tint pendant les dernièresannées de sa vie debout, jour et nuit, sur une colonne de trois pieds de diamètre, entourée d'unepetite balustrade, d'où il donnait ses consultationsau peuple !!....En disant l'autre soir que l'eau était le sang denotre planète, que sans eau il n'y avait ni plantes,ni animaux,ni digestion, ni vie, nous n'annoncions qu'une vérité connue de tout le monde.—


En soutenant cesoir que la chaleur est la viemême, nous répétons une vérité connue de tousles peuples.Promélhée, le premier homme qui eut l'audacede révéler à l'humanité la puissance du feu, fut enchaîné par les Dieux, disent les anciens prêtres, àun rocher et condamné à avoir le cœur rongé parun vautour.Les Arias, les Chaldéens, les Perses, les Egyptiens avaient mis au-dessus de toutes leurs divinités le Soleil, foyer évident de la chaleur. Tous lesrites ont adopté pour symbole le feu ; la combustionfigure sur tous les autels, les costumes et les objetssacrés en sont les emblèmes. Héliopolis fut sa métropole. Le bœuf gras, le dieu-bœuf Apis n'était àMemphis que le symbole du bon principe fécondépar le Soleil. Le peuple d'Israël, fuyant d'Egypte àtravers le désert, avait pour guide Jehova sous forme de colonne defeu. Zoroastre poussa si loin lavénération du feu, qu'il exclut des peines infligéesdans son enfer aux méchants, la peine du feu.Les feux des Arias passèrent d'Asie en Grèce ;—on les appela Pyrées. A Rome, on confia la garde du feu sacré aux Vestales ; on ensevelissait vivante la malheureuse jeune fille qui le laissait éteindre ; on interdisait! aux proscrits l'eau et le feu.—Les prêtres chrétiens avaient et ont l'usage d'apporter dans les maisons pendant les derniers joursde la semaine sainte l'eau bénite et le feu sacré. —Enfin, chaque fois qu'il y a une fêle, on allume descierges ; chaque fois que la mauresque va demander une grâce au marabout, elle apporte un cierge ;—et plus les cierges sont nombreux, plus la fête estsolennelle ; plus le cierge est gros plus l'invocationest puissante...Passons aux graisses.


-85-GRAISSESLes graisses animales sont généralement plus digestivesque les huiles ; cependant cette règle estsubordonnée au cl mat et aux productions du sol,de sorte qu'on leur donne alternativement la préférence,selon que l'on se trouve en pays froid ouen pays chaud, là où il ya beaucoup de bétail, oubien beaucoup d'oliviers et de graines huileuses.Les graisses deviennent indigestes lorsqu'on enmange entrop grande quantité, parce qu'elles nesont pas digérées par l'estomac, mais par les intestins. L'estomac les laisse librement passer k condition qu'elles ne viennent pas gêner la sécrétion dusuc gastrique.Smith a démontré que les graisses et les substances graisseuses augmentent l'activité de la circulalion.Vingt minutes après les avoir mangées,on éprouve une sensation de plénitude de cœur etde satisfaction interne. Cela est encore pins sensible si les aliments gras sont associés aux alimentsk l'amidon .amylacés c'est-k-dire —Avant Smilh et avant tous les physiologistes,nos cuisinières ont si bien compris celte loi hygiénique que, le plus souvent, elles combinent ensemble les graisses et les farineux.Le beurre est la graisse qui mérite d être préférée aux autres. Le beurre doit, paraît-il, l'originede sa fabrication aux Russes, les Scythes du temps—des Romains, lesquels, k cause peul-êlre de cela,ou parce qu'ils se trouvaient k côté de l'Etrurie, quiproduit la meilleure huile du monde,appelaient lebeurre un aliment de barbares.Le beurre est une combinaison de butirine, d o-léine, de margarine, de caséine, de glycérine, et


-«s~d'acides. En hiver, il contient un tiers d'oléine etdeux tiers de margarine ; en été, l'oléine forme lesdeux tiers environ de son poids, total. Voilà pourquoi le beurre esl moins solide et moins agréableen élé et dans les pays chauds.Une manière de conserver le beurre consiste kle laire fondre k une petite chaleur, en lecumantau fureta mesure qu'il se recouvre de substancesimpures ; il yun autre moyen, c'est de le saler Lesel neutralise la caséine, qui en devient sans cela leferment.La graisse de porc est toujours moins digestiveet moins agréable que le beurre.Huiles. Par les quelques mots que nous venons—de dire sur les graisses animales, on aura comprisque l'Algérie doit plutôt être un pays à huiles, etqu'eu Algérie l'huile est plus digestive et plus hygiénique que la graisse.La meilleure huile est l'huile d'olive. Elle con^lient les 3/4 de son poids d'oléine. Après, viennentl'hujle de sézame, de noix, de lin, de colza, d'arachi—des, etc., mais elles sont toutes l'une plus quel'autre de qualité inférieure et de digestion moinsfacile.L'huile de foie de morue n'est pas un aliment,mais un médicameÊt forl désagréable à prendre àcai^ de son odeur forte et nauséabonde, Cettehuile, pourtant, si elle était bien fabriquée avec dessubstances moins pourries, pourrait entrer dans lalimeniationhygiénique de certains enfants, et rendre,à mon avis, des services. Ainsi administrée, elleponi rail devenir un aliment prophylactique contrele rachitisme, la scrofule, la phthisie et autres affections consécutives au lymphatisme. Je suis convaincu que si l'huile de foie de morue était mêlée à


—«5 _certains aliments, sans l'intervention dn médecin etsans que l'enfant sache qu'on lui donne un médi•cament, il s'y habituerait, comme je l'ai pu obtenirquelquefois, très-facilement.FECULENTS.Pommes déterre, etc. — Lesracines, les tubercules, les fécules, en général sont des mets excellents, lorsqu'ils servent k encadrer de beaux morceaux «de viandes, lorsqu'ils sont accompagnés delégumes et de pain, lorsqu'ils sont arrosés debon vin. Mais si les aliments féculents, racines outubercules, deviennent la seule ressource de la nutrition, ils constituent une mauvaise alimentation.Nous avons dit que le riz était le paria des céréales et qu'il servait, pour ainsi dire, de trait d'union entre les aliments toniques et les calorifiques.Le riz et le maïs sont cependantbeaucoupplus riches en albumine que tontes les racines iéculenteset «contiennent quatre fois plus d'amidon qu'elles.Les féculents et les adipogènétiques ne contiennent pas les principes nécessaires à la vie ; ils nedonnent ni albumine, ni graisse phosphorée pour lecerveau, ni fibrine pour les muscles.engraisser, rendre obèses les individus qui en fontun usage presque exclusif ; mais l'obésité se développe en général au dépens de l'activité et de l'inUs peuventtelligence : les peuples qui en mangent avec excès,les peuples qui ne mangent que du riz et des pommes de terre sont sûrs de subir le joug de ceux quise nourrissent de viande et de pain.Le premier Européen qui donna à mangera sesmatelots des pommes de terre fut le capitaine Hawkins,marchand d'esclaves, en 1565. Six ans après,


L'enthousiasme—88—Drake l'introduisit en Europe, et l'amiral Raleighen transporta une grande quantité de Virginie enIrlande en 1586.Parmentier, attaché en 1757, en qualité de pharmacien, à l'armée de Hanovre et fait cinq fois prisonnier par l ennemi, fut presque fatalement amené, pour ainsi dire, à étudier les propriétés du tubercule américain qui était déjà acclimaté au Hanovre. Eu France il ne servait qu'à la nourrituredu bétail. Aussitôt que Parmentier fut nommé pharmacien des Invalides en 1774, il s'efforça immédiatement d'étendre l'emploi de la pomme de terreà l'alimentation de ses compatriotes. 11 s'occupaen même temps du maïs, de la châtaigne, de lamouture économique des grains et de la préparationdu biscuit de mer. Cela prouve que Parmentieréiait animé des meilleurs sentiments envers sessemblables el préoccupé surtout d'amoindrir lesmisères de ceux qui supportent les souffrances dela fa m ! ... . Honneur à Parmentier !La fécondité de la pomme de terre, même dansles terrains stériles, la fit hautement louer par lessavants et les poètes, par les riches et par les pauvres. Ceux-ci croyaient qu'on leur avait apportédu Noureau-Moinp lacontre la lamine.—manne, un remède certainétait général ;on voulut élever des statues à Parmentier.J'admire, je vous le répète, la bonne œuvre,l'excellente tentative du citoyen de Montdidicr ;pourtant,soyons calmes, opérons comme les savants d'aujourd'hui :examinons, analysons, rai—sonnons Lorsque la pomme de terre enlre dansune alimentation mêlée de viande el de légumes,de graisse et—d'huile, de vin ou de bière, lorsqu'elle a été cultivée dans le Nord ou dans les ter-


—89-rains frais et légers, lapomme de terre est unbon aliment respiratoire ou calorifique, parce qu'ellecontientbeaucoup d'amidon et beaucoup d'hydrogène. Mais si la pomme de terre doit servir d'aliment unique ou quasi unique, vous n'avez qu'àjeter un regard de compassion sur la malheureuseIrlande, et à donner un peu d'attention à l'analyseque Grouven en a faite, en se servant de pommesde terre de première qualité. La —voilà :Eau.. 76,40Amidon 14,17Corps albuminoïdes 2,17Dextrine 2,34Sucre 0,15Graisse 0,29Matière extractive 1,70Fibres ligneuses 0,99Sels 1,00Total 99,21A cette misérable combinaison de principes nutritifs,ajoutez que la maladie de la pomme de terre, venue d'Amérique en Europe depuis 1845, larend généralement plus mauvaise ; et qu'enfin, appartenant à la famille des solanées, lorsqu'elle entre en germination et devient verte, la pomme detei re peut empoisonner à caus^ de la solanine quise développe en pareille circonstance.LÉGUMESLes légumes sont presque tous des substancesalimentaires encore plus pauvres de principes nutritifs que les racines ou les tubercules féculents .42


— 90-Cependant les légumes doivent entrer dans un bonrégime hygiénique, parce qu'ils modèrent la propriététrop tonique des viandes, rafraîchissent,comme l'on dit, le sang,augmentent quelquefois lasécrétion des reins, rendent plus digestif et plusagréable le gros ravitaillement de la nutrition.Les asperges, les haricots, les épinards, leschoux, l'oseille, la laitue contiennent des acidesorganiques, dé la soude, de la potasse, de la chaux.Les légumes qui ont une odeur forte comme l'oignon appartiennent à la catégorie des aliments nerveux.FRUITSLes fruits que l'homme civilisé est allé chercherdans toutes les parties du monde, ont fourni peutêtrele premier aliment à l'homme sauvage, àl'Adam de notre espèce. Pourquoi donc les croitonsi dangereux, si nuisibles à l'homme de notreépoque, à l'enfant surtout, le petit sauvage de chaque génération ? Bien souvent j'ai fait cesser avecplaisir les larmes de ces petits êtres en leur accordant quelques cerises où quelques tranches d'oranges, que les parants regardaient comme du poison....Les fruits peuvent se diviser en :1»Aigres-doux :pêches, poires, pommes, raisins, cerises, groseilles, melons, pastèques, oranges, bananes, ananas, etc.;2° Huileux : Amandes, noix, pignons, noisettes,cocos, etc.;3° Féculents :châtaignes, glands, fruits de l'arbre à pain, etc.La première de ces catégories, celle des fruitsai-


de—dedede—91--etgres-doux, donne une alimentation très-pauvre, insignifiante pour fabriquer de la chair et du sang. —Fresenius a trouvé que pour remplacer la propriéténutritive d'un œuf de poule de 45 grammes, quicontient 5 grammes de corps albuminoïdes — ilfaut ;Or,500 grammes de cerises,—600 raisins,1 .000—1.200—2 0005.3O0 grammes.fraise»,pommes,poires.nous savons que ces fruits ne sonl pas faitspour fabriquer delà chair et du sang,—mais del'eau et de la graisse tout au plus. A cette fin, ilscontiennent de la cellulose, de la dextrine, du sucreet différents acides. Leur rôle est celui de rendreplus facile et plus agréable la digestion des substances toniques. Ils conviennent surtout aux enfants etaux femmes.Les fruits huileux sont les plus indigestes. C'estl'accusation portée contre eux depuis Dioscoride.Ils sont même un peu narcotiques. Cependant, lelait de coco est une boisson très salubre, dont l'onpeut abuser impunément, c'est un bonheurpour les habitants des pays chauds. On y trouve :85 parties d'eau,•—11 d'amygdaline,de dextrine et quelques parties de sucre2—Avec les graines de plusieurs "fruits de cetteespèce, on peut se fabriquer soi-même une boissonà peu près semblable au lait de coco. Pilez, par—exemple, les graines de melon dans le mortier,


Je—92 —Avecpeu deÎilacez— les dans une passoire,versez peu à—Vous ferez.'eau fraîche, puis sucrez à volonté.ainsi une boisson très agréable et très rafraîchissante pour l'été.Les fruits féculents sont les plus nutritifs. — Lachâtaigne contient 18 parties d'amidon et 8 desucre. Les Grecs les appelaient les glands de Jupiter. Xénophon nous raconte que les habitants descôtes de la Mer-Noire faisaient du pain avec de lafarine de châtaignes, comme l'on en fait à peu prèsaujourd'hui en Italie.Si l'on s'en rapporte à Pétrarque, les Romainsmangeaient anciennement les glands de chêne,comme l'on mange aujourd'hui en Espagne et en—Portugal les glands doux. la poudre deglands amers, bien rôtis, on peut faire un café assez bon, stomachique, salubre, agréable, qui n'excite point les nerfs.En Algérie, c'est-à-dire k Alger même,on acherché à utiliser les glands dans ce but. La basedu carifé n'est autre chose que la poudre de glands—torréfiés. ne vous dirai point du carifé ce quej'ai dit de la révalescière et de la farine mexicaine;je crois au contraire qu'il vaut mieux que tous cesmélanges de chic«rée, d'orge, de haricots ou depoischiches, que Rm vous vend pour du café.—Conclusion. Les fruits n'empoisonnent personne, à condition qu'ils soientfrais, mûrs, bienchoisis et mangés e» quantité discrète. N'en privezpas les enfants, surtout dans les pays chauds. LesNapolitainsde fruits et ils nemangentbeaucoups'en trouvent pas mal. Surveillez seulement qu'ilsn'avalent pas les peaux, les graines et surtout lesnoyaux, pour les raisons que nous avons déjà indiquées en parlant de la mastication.


—PourPar- 93-Au milieu de notre arsenal alimentaire, les fruits— —sont le complément du bon : le beau, la—partie esthétique, séduisante, d'un repas surl'herbe, ou d'un dîner en ville. Par quoi Paris—couronna-t-il la beauté de Vénus?unepomme. Pourquoi Eve fut-elle chassée du paradis—terrestre avec Adam? A cause d'une pomme. — .Cependant, à ce propos, je vous prie de vousrappeler la légende védique que Serpaggi nous lutl'autre soir : selon les Indiens, celui qui convoitales fruits qui élaient de l'autre côté du détroit deCeylan, fut —Àdima, l'homme, le mari d'Heva. Ilme paraît, par conséquent, que le premier hommeet la première femme ont aimé, tous les deux, la—pomme, les fruits.Mesdames, Messieurs,L'idée d'aliments nerveux, indiquée mais nonformulée par Van der Corput, a été introduite dansla science tout récemment par notre auteur Mantegazza; elle est déjà presque acceptée par Bouchardat,l'hygiéniste de Paris.Dans le tableau que nous avons eu sous les yeux,nous avons vu que cettecatégorie d'aliments estimmense. Elle renlerme les boissons et les condiments ; elle réunit les produits du règne végétal àceux du règne animal ; on les mange, on les boit,on les mâche, on les fume, on les prise, on les aspire. en parler avec extension, il nous faudrait trop de temps ; nous nous occuperons de


-94 -ceux qui sont le plus en usage et les plus importants :vin, café, tabac, coca.Les aliments aromatiques que l'on a aussi appelés aphrodisiaques, condiments, épices, etc., appartiennent presque tous au règne végétal ; le musc cependant se trouve dans le règne végétal et dans lerègne animal ; l'ambre dans le règne animal seulement. L'ambre véritable ou aromatique, dit ambregris, est une substance concrète, ayant la consistance de la cire et une couleur cendrée tachetée dejaune et de noir, qui répand une odeur forte, suavepour quelques-uns. Il se présente en masses arrondies, flottantes sur la mer, aux environs de Madagascar, de Coromandel, des Moluqueset du Japon ; aujourd'hui on le regarde comme une excrétion morbide du cachalot, analogue aux calculs biliaires de l'homme, parce qu'il contient un principequi ressemble k la cholestérine.» La science ne possède aucun caractère certain,absolu qui établisse une limite bien tranchée entreles champignons comestibles et ceux qui sont vénéneux. Il est cependant possible de rendre inoffensifs les champignons les plus dangereux en les faisant bouillir dans l'eau pendant un quart d'heure.Le vinaigre, l'alc»l, l'eau salée ou alcaline enlèvent complètement, par macération le principetoxique. Enfin, dans le Nord, où l'on conserve leschampignons dans l'eau sake, on fait usage indifféremment de toutes les espèces. Pour chaque 500grammes de champignons coupés de médiocre grandeur, il faut un litre d'eau acidulée par 2 ou 3cuillerées de vinaigre, ou 2 cuill. de sel gris. Dansle cas où l'on n'aurait que de l'eau à sa disposition,il faut la renouveler deux ou trois fois. On laisseles champignons macérer pendant, deux heures en-


-95 -tières ;puis on les lave à grande eau. Ils sont alorsmis dans l'eau froide, qu'on porte à l'ébullition, etaprès une demi-heure, on les retire* on les laveencore, on les essuie et on les apprête comme metsspécial. » (Littré, Dict. de Nysten.)Les caractères qui distinguent les aliment» nerveux des autres substances alimentaires sont lessuivants :1. Ils agissent presque toujours en petite quantité ;2. Ils sonl presque exclusivement employés parles hommes ;3. Dans les différents âges de la vie leur consommation est toujours en proportion directe destravaux nerveux ;4. L'homme civilisé en a plus besoin que le sauvage ;5. L'estomac en ressent une satisfaction immédiate et se révolte contre la privation ;6. Ils sont promptementabsorbés, portés dansle torrent de la circulation et distribués à tous lesdépartements du système nerveux ;7. Ils contribuent à rendre la vie plus gaie etmoins pénible ;8. Ils exercent tous une action générale excitante, mais leur action spéciale change de l'un kl'autre ;9. Ils diminuent en général le besoin de l'alimentation ordinaire.En abordant cette catégorie d'aliments, l'on pourDante descendant auxrait presque s'écrier avecenfers :Per me si va nella ciltà dolente,Per me si va nello eterno dolore,Per me si va fra la perduta gente !


excepté—96 —Effectivement nous allons entrer dans le domainede l'ivresse et de la folie, des maladies et des douleurs, des misères et de la dégradation au-dessous—de la brute lele singe, le perroquet,chat et l'éléphant qui s'enivrent comme l'hommeavec des aliments nerveux aromatiques.Par bonheur, cela ne se rapporte qu'à l'excèsdes boissons alcooliques. Commençons donc parparler de leurs propriétésphysiologiques, hygiéni—ques et bienfaisantes lorsque l'on en use avecmodération.VINA tout seigneur tout honneur. Le vin est le primate des alcooliques.La Bible nous raconte avec une naïveté divine,que Noé est le père de la vigne et des ivrognes.—« Noé s'appliquant k l'agriculture,commença à la-» bourer et à cultiver la terre el il planta une vi-» gne ; et ayant bu du vin, il s'enivra... (Genèse,IX, 20-21 »)Cependant, l'alcool n'existe pas en nature ; aprèsou avant Noé, l'homme est allé le chercher partout : dans les rtjsins et dans les palmiers, dans—l'asphodèle et dans la jument, oui, dans le laitde jument, avec lequel on fait le Koumiss.Le vin contient de l'eau, de l'alcool, du sucre,de la dextrine, des matières colorantes, du tanin,des acides, des éthers, de la cire, etc.Nous ne nous occuperons pas des proportionsparce qu'elles varienttrop d'un vin k loutre, 1 alcool surtout estycombiné en quantités bien diffé—rentes : dans le Marsalla et le Xérès on en trouvede 16 k 24 parties pour 0/0, dans les vins de Bor-


—Les—97 -deaux et du Rhin de 6 à 12. Quelques vins contiennent très-peu de sucre, d'autres 8 parties pour—O|0. La cire donne l'éclat au vieux vin du Rhin.Le vin blanc en général est moins alcoolique elplusdigestif; il contient une substance colorante spéciale, et un éther peu étudié qui exerce une actionnarcotique lente.La série des vins est presque illimitée et peucommode à classer. Nous les diviserons en vins secs,d' ur, de repas el mousseux.d'alcool et deLes vins sncs contiennentbeaucoupsucre, les meilleurs sont les moins doux : Marsalla,Porto, Madère, Xérès elc. On ne doit jamais en abuser ; il faut les boire à la fin des repas.Les vins dtmx contiennentbeaucouppas de principes amers: Lunel, Frontignan, Syrade sucre etcuse, Malaga, etc. On les digère mal ; on les boit audessert et les dames leur donnent la préférence. Lemoins mauvais est le vin de Chypre vieux et clair.Les vins de repas, astringents, aromatiques, ouamers — sont les meilleurs, surtout s'ils sontclairs : Languedoc, Bordeaux, Mâcon, Bourgogne.On peut en boire k tout repas et ils conviennent ktout le monde. Leur saveur, un peu âpre au commencement, se change, avec le temps, en un bouquet délicieux. Ils contiennentbeaucoup de taninet sont toniques. Le Languedoc et le Bourgogneont plus de force et de chaleur que le Bordeaux.vins proprement dits aromatiques — parcequ'ils contiennentbeaucoup d'arômes, peucool et très peu de matière colorante,d'alcomme le vin—du Rhin, sont diurétiques, digestifs et peu enivrants. Le vin de Bordeaux est le prince des vinsde repas.Les vins mousseux : Champagne, Asti, etc., ne


Ilsont pas de bons Vins, surtout s'ils sont doux. Cependant, ils donnent beaucoup de gaieté, de vivacité, d'entrain,Champagne, qui contient beaucoup d'acide carboniet ne gênent pas la digestion. Lesybaritismeque* est pour ainsi dire, la machine k vapeur dumoderne : une fois que le train gastronomique esl complet, le Champagne se charge duresteEn Algérie, on n'est pas encore parvenu à donner au vin du pays des qualités supérieures. Engénéral, c'est du gros vin plat, qui ne se conservepas longtemps, qui ne peut voyager et qui est mê—me indigeste. ne faut pas croire pour cela queles vins de l'Algérie resteront toujours les mêmes ;déjà, dans diverses localités, l'on trouve des vinsexcellents, qui peuvent prendre place enlre leMar-ou entre le Sauterne et le Chamsala el le Xérès,pagne. C'est une élude œnologique à faire. Le vindont s'enivra Noé ne pouvait pas être du Chambertin.Lorsque l'on aura bien choisi les terrains el lescépages de vignes, lorsque*en abandonnant ou enmodifiant les procédés de fermentation qui conviennent à la France, à l'Italie, à l'Allemagne ou kl'Espagne, l'on aura trouvé les systèmes de vinification qu'exigent notre climat et notre sol — lesvins de l'Algérie d^iendront aussi importants queles céréales et les huiles... et on ne verra plus notre quai encombré de bordelaises de vin d'outremer....Le vin ne convient jamais à jeun, peu le matin,davantage à la fin du repas et.après. On doit lemêler à beaucoup d'eau, surtout en été et dansles pays chauds, Il faut presque absolument éviterde changer de vin quand on mange ; un grand luxede César fut, une fois, de servir quatre vins dansun repas.


—Elles-99-Les médecins ont généralementtroppeu étudiél'action hygiénique des vins. Dans cette boisson onpeut trouver une série abondante de toniques eld'amers bien meilleurs que le fer et le quinquina .Le vin est un véritable remède contre la malaria,c'est-a-dire contre la fièvre intermittente, surtoutlorsqu'il est associé à une bonne nourriture.Le vin et l'alcool diminuent le besoin de manger ; nous l'avons déjà fait remarquer et tout lemonde répète que les buveurs mangent peu. Newton écrivit un de ses ouvrages remarquables en nese nourrissant que de pain trempé dans le vin.Selon Liébig, le vin nourrit directement ; selonMoleschott, l'alcool, introduit dans l'économie del'organisme, se change en acide carbonique et eneau, en enlevant de l'oxygène. Cette diminutiond'oxygène dans le système circulatoire ralentit lavitesse de sécrétion et d'excrétion, et c'est ainsique le vin s'oppose à la manifestation de la faim.Considérées dans leur ensemble, les boissons alcooliques arrêtent ou ralentissent l'usure organique, de sorte qu'elles contribuent a notre alimentation, lors même qu'elles ne nous apportent pasdirectement des matériaux pour le renouvellement des tissus. Elles augmentent les mouvements du cœur et la sécrétion des sucs digestifs,en favorisant de la sorte la dissolution des aliments.diminuent la sensibilité, excitent la fantaisie, réveillent les souvenirs vivaces, disposentau rire et k la gaieté ; elles augmentent la satisfaction de la vie, l'expansion, la vigueur et la forcemusculaire.Voilà pourquoi les alcooliques conviennent plusà l'homme qu'à la femme, plus à l'ouvrier qu'àceux qui ne se servent pas continuellement de leur


—100boissonVinum-force musculaire. Nuisibles aux enfants, superflusau jeune homme, les alcooliques sont utiles kl'homme adulte, indispensables aux vieillards.L'on peut vivre longtemps sain et robuste sansalcool, sans vin ; l'on peut boire de l'eau, être—abstème et heureux mais k la condition d'avoirune nourriture excellente, de respirer un air trèspur, de ne jamais rien laire de fatiguant, d'exercer son cerveau sans l'aiguillon du besoin ou del'ambition.L'alcool est donc le contre-poison des ennuisde la vie sociale ; il est l'avoine et le fouet pourl'homme qui traine après lui avec peine la charge del'existence.Entrons maintenant dans le domaine du démon,—car Saint Chrysostome a été une véritable bouche d'or en disant: « Le vin est l'œuvre de Dieu,—l'ivrognerie est l'œuvre du diable. dei,ebrietas opus diaboli est. »L'ivrognerie, nous l'avons déjà annoncé, fait descendre l'homme plus bas que la brute. Cependanttous les peuples anciens et modernes ont donné oudonnent le lamentable spectacle de ce vice. LesEgyptiens s'enivraient avec le Pelusianum, les Romains avec le Fa%ne, les Spartiates enivraient lesIlotes* tous les Grecs portaient Bacchus en procession k cheval sur une bordelaise....En Europe, nous nous enivrons dans la mêmejournée avec l'absinthe, le vin, la bière, le cidre,le café, le thé, le tabac. L'Arabe se narcotise avecle tabac, l'opium, le hachisch, l'ambre; le Péruvienavec l'huile de maïs mâché et la coca ; le Chinoisavec l'esprit de riz fermenté ; l'Abyssinien avec lecât—; le Tartare avec le koumiss, alcoolique qu'il fabrique avec le lait de jument fermenté.


—LesIl-101In—Pendant les cinq journées de Milau, en 1848,les Croates, ayant pénétré dans un amphithéâtre,burent l'esprit de vin, où trempaient des morceauxde cadavre. vétérans russes préposés k lagarde du musée d'anatomie de Saint-Pétersbourg,buvaient l'alcool des bocaux, de sorte que l'on aété obligé de mettre en leur présence un morceau—d'arsenic dans chaque bocal. Les habitants deKamtchatka se plongent dans une ivresse déliranteavec l'amanila muscaria que les reins distillent ;—leurs serfs, ne pouvant pas se régaler de ce champignon musqué, s'enivrent le lendemain avec sesproduits physiologiques. . .L'ivresse a ses degrés et ses variétés ; elle a aussiun avantage elle nous dépouille de l'hypocrisie,——elle nous fait dire la vérité. vino veritas. —Un auteur anonyme anglais du temps d'Elisabeth afait assez bien l'histoire naturelle des espèces du—genre ivrogne. y a, dit-il, l'mogne-singe, quisaute, chante et danse ; l'ivrogne-Zion, qui casse,brise, blesse et tue; l'ivrogne-joorc, lourd, bête,endormi, mendiant, qui se couche n'importe où ;l'ivrogne-mowton, qui se croit savant sans pouvoirprononcer un mot comme il faut ; l'ivrogne-cftoÊ,qui vous embrasse et vous câline en vidant le verrequi est. devant vous ; l'ivrogne-renarrf qui est rouéet ne sait bien faire ses affaires qu'en état d'ivresse ;l'ivrogne-ftowc qui fait le galant; et l'ivrogne-torluffe,qui fait le sobre et prêche la tempérance.Dans l'Amérique du sud et en Asie il ya aujourd'hui des populations indiennes qui disparaissentcomplètement par la seule influence de l'eau-de-vie.Everest rapporte que, dans l'espace de 10 ans,l'alcool a donné aux Etats-Unis les résultats suivants :


- 102-Il a absorbé une dépense de 5 milliards ;Il a tué 300,000 personnes ;U a engendré 100,000 enfants trouvés ;Il a fait aller en prison 150,000 personnes ;Il a rendu fous 1,000 individus ;Il a fait commettre 1,500 assassinats ;Il a occasionné 2,000 suicides ;Il a fait incendier ou détruire pour 50 millions.Il a rendu veuves 200,000 femmes et orphelins100,000 enfants.En Angleterre,où le vin est une un luxepour ainsi dire, la classe ouvrière dépense près de3 milliards de francs par an en boissons spiritueuseset paye à la mort un tribut de milliers d'individus qui succombent à l'ivrognerie.A Paris, la consommation de l'eau-de-vie de 1854k 1864 avait doublé ; k cette époque on en consoit 28 litressommait 300,000 hectolitres par an,par personne.A Marseille, de 1858 k 1871, cafés, débits de liqueurs et débits de vin ont presque triplé. Le 12mai 1871 on en comptait 1585.En Algérie, où la statistique n'est pas encoreon éctoppe à l'accusation terrible desacclimatée,chiffres.Cette habitude invincible, celte fatale passion del'ivrognerie exerce malheureusement ses ravages—autant sur le physique que sur le moral. « EnFrance, s'écrie If- docteur Despine, de Marseille,dans son excellente brochure, Le démon alcool, enFrance, sur mille attentats k la vie, 237, d'après lesrelevés statistiques de Deguerry, sont occasionnéspar l'effet des boissons alcooliques. A Charenton,sur 176 aliénés, entrés pendant une année, 60


—103Jede—étaient devenus fous par l'abus des spiritueux. EnAngleterre, où cet abus est plus grand, les malheursÎn'il occasionne sont également plus nombreux.•'après les calculs publiés par le gouvernementanglais, l'ivresse et les désordres qu'elle provoque,tuent chaque année 50,000 habitants. La 1/2 desfous, les 2/3 des indigents et les 3/4 des criminelssont des individus adonnés à la boisson. Crang,juge aux Etats-Unis, a reconnu, d'après les relevésde la statistique, que les trois quarts des criminelsde ce pays ont été conduits au crime par l'ivrognerie. »Pour remédier à cet épouvantable fléau, les Américains de Baltimore fondèrent les Sociétés de tempérance ou d'abstémie qui, dès 1829, furent transportées en Angleterre, en France, en Allemagne,au Canada, au Cap, dans la Nouvelle-Ecosse, dansle Nouveau-Brunswick et ailleurs. Ces sociétéscomptent à présent quelques millions de prosélytesabstemes, c'est-à-dire de personnes qui ne boiventni vin, ni liqueurs ; elles ont des journaux et desmoyens puissants d'action.Ont-elles été efficaces? Est-ce là un remède—contre l'ivrognerie ? ne le pense pas. Mo—hammed qu'a-t-il obtenu en forçant ses fidèles ks'abstenir du vin ? Us se narcotisent avec l'opium,le hachisch, la coca, le cât. Quand ils échappent kl'abstention, ils se jettent, nous le voyons, dansl'abus. En outre, ils épuisent, ils liment leur systèmenerveux et leur cerveau avec le café, le musc, l'ambre, les fleurs, de façon qu'ils ont fait de la ville lamieux située de l'Europe, de la reine de l'Orient,—comme l'appelait l'autre soir Vico, Constantinople,enfin, la métropole des chiens errants !...Le gouvernement russe eut un jour, il n'ya pas


—104—Que—longtemps, une idée toute contraire. Le monopolede l'eau-de-vie, dit Wyrouboff, fut détruit ; toutle monde put faire el vendre de l'eau-de-vie, enpayant patente. Tout changea donc d'aspect commepar enchantement ; la concurrence s'établit, l'eaude-viebaissa de prix dans une proportion énormeet des cabarets furent organisés partout. Je me rappelle le jour où le nouveau régime fut inauguré :c'était le 1" janvier 1863 ; j'étais à Moscou. Laville avait un aspect sinistre, on l'aurait crue à laveille d'une émeute ; en face de mes fenêtres, àl'endroit où deux rues se croisaient, il yavait quatre cabarets, littéralement assiégés par une foulecompacte qui ne pouvait pas entrer. Il n'yavait pasmoyen de sortir, lant il yavait d'individus ivresles postes de police regorgaient d'hommespartout ;et de femmes ramassés dans les rues, moitié morts,souvent morts, gelés sur la neige... »Et bien, Beuschen a constaté l'autre jour dansun rapport lu devant l'Institut que l'ivrognerie n'a—pas augmenté en Russie depuis 1863. Qu'estceque cela signifie ? la misère du peuplerusse est la cause principale de l'ivrognerie et quecette passion avait atteint chez lui le maximum.Ainsi ni les fociètès de tempérance ne peuveut—réussir à éteindra la soif de l'alcool ; ni la libertéde commerce de l'eau-de-vie n'a pu en augmenterles ravages.Cela nous démontre la grande loi hygiénique :qu'il faut toujours tenir compte des habitudes, desbesoins el des causes qui les produisent. Il n'estpas nécessaire d'être médecin pour savoir que l'onne doit jamais supprimer lout d'un coup le vin kl'ivrogne, et que l'on ne peut pas empêcher celuiqui manque de nourriture tonique et calorifiqued'abuser de l'eau-de-vie.


de—de—105-soutient—estduRappelons-nous donc que l'usage du vin et de—l'alcool développe la sociabilité, excite la fantaisie, engendre les plaisirs —; dispose à la bien—veillance et k la générosité ; rend facile et commun le courage —; mène à l'héroïsme et au sacrifice de soi-même —; stimule le travail muscu—laire et la digestion ; contre les imtempérieset les miasmes ; — console les douleursphysiques et morales ;gne pour l'organisme. (Moleschott.)une caisse d'épar—L'abus du vin el de l'alcool : devient caused'homicides et de crimes contre les personnes, la—pudeur, l'honneur et la propriété ; de la haiue—delà vie et du dégoût du travail ; suicide eldela fainéantise ; la stérilité et de l'impuissanceprécoce ;—detransmission de maladies aux en—fants ; maladies de l'eslomac, des intestins,des reins, du foie, des centres nerveux ; de dé—mence, d'idiotie, de monomanie, de dehrium tremens,de vie courte et de mort violente.Conclusion : Les causes de l'ivrognerie consistentspécialement dans la misère et dans le désœuvrement, dans un besoin poussé jusqu'à la passion etdans l'ignorance ou l'insouciance des ravages physiques et moraux que cette déplorable passion produit. Les remèdes les plus puissants en seront :l'instruction générale et celle du peupîe en particulier,— puis des améliorations sociales hygiéniquesqui puissent donner à tout le monde le goût dutravail et mettre le nécessaire à la portée de chacun.—En Italie, où de mon temps la vie était facile etle vin à très bon marché, il n'yavait presque pasd'ivrognes.Ne pouvant pas changer tout d'un coupl'écono-14


-106—mie sociale, tâchons donc au moins de nous instruire,et d'instruire ; souvenons-nous toujours dubilan de l'actif el du passif, du bien et du mal dudémon-alcool !CAFÉ.C'est toi, divin café, dont l'aimable liqueurSans altérer la tête, épanouit le cœur !A peine j'ai senti ta vapeurodorante,Soudain de toi) climat la cha'eur pénétranteRéveille tous mes sens, sans trouble, sans chaos ;Mespeosers plus nombreux accourent * grands flots ;Mon idée était triste, aride, dépouillée,Elle vit, elle sort richement habillée ;Et je crois, du génie éprouvant le réveil,Boire dans-chaque goutte un rayon de soleil.Nous venons d'entendre l'apothéose que Delillea gracieusement faite du café.Rousseau écrivait : < Voici un.parfum que j'aimebeaucoup ; quand on en brûle dans mon escalier,j'ai des voisins qui ferment leur porte, moi j'ouvreaussitôt la mienne. C'est tout ce que j'aime deschoses de luxe, les glaces et le café. »Voltaire qui vécut 84 ans, avait raison de direque si le café étaiffcin poison, il empoisonnait lentement.Zimmermann s'écriait : Le café me débêtise, pManlegazza l'appelle l'aphrodisiaque du cerveau.Les Arabes, au contraire, l'ont nommé : Un nègrequi vole le sommeil et l'amour.Nous nous apercevons déjà que le café a eu sesamis el ses ennemis,tions :dirait Manzoni.ses apothéoses et ses persécuDue volte vella polvereDue voile sugli altar.


j'allais107—Oui le café a élé calomnié, accusé, poursuivi,—proscrit, excommunié, presque dire fusillé !... En 1511, le café, avait déjà été introduiten Egypte et on l'accusa violemment d'enivrerauprès du nouveau gouverneur du Caire, l'émirMimar-Bey. Le gouverneur convoqua une assemblée de savants pour décider si le café était,ou n'était pas une boisson enivrante. Un accusateurdes plus enragés affirma qu'il enivrait,et que lecafé avait produit sur lui-même des effets plus prononcés que le vin. Malgré ce témoignage, l'assemblée des juges n'osa pas condamner le café et secontenta de décréter la bastonnade à celui qui venait d'avouer qu'il avait violé les lois du Koran ens'enivrant. On fit appel aux tobibs ou médecins ;—ceux-ci déclarèrent que le café était un poison. Legouverneur ordonna sa proscription.Le Sultan, par bonheur, fît savoir que ses médecins avaient affirmé que le café était une boissonhygiénique, amie de Dieu ; il cassa l'arrêté du gouverneur. Vous voyez qu'en Egypte, au commencement du XVIe siècle, les sultans, les gouverneurs etles médecins se contredisaient souvent et volontiers.Sous le règne de Soliman le Grand, en 1554, lecafé fut importé à Constanlinople. On y établit deuxboutiques comme celles, supposons, que les Mauresd'Alger fréquentent aujourd'hui. Les poètes, lesécrivains, les talebs et même les pachas y accoururent en foule. Ce fut un scandale. On appela cesboutiques écoles de science Ce mot de science produisit Peffet d'un coup de siroco dans les yeux desdévots. On rédigea un pamphlet et on l'adressa auMufti pour le convaincre, au moyen d'un syllogisme,qu'il lallail aviser, et prévenir à la violation de la loireligieuse Le syllogisme était celui-ci : Le Koran


—1Q8—défend de mangertoute; espèce de charbon ; le caféest une espèce de charbon, donc il est détendu deboireT'infUsion de café. Le Mufti ne fit pas attendresa réponse, elle ne fut pas longue, jl dit :Anathemqsit. ... Le café est excommunié. Iles boutiques furentfermées, la boisson du café fut interdite de la partdu Prophète et du Mufti à tous les Musulmans deConstantinople.Mais les Muftis ne sont pas infaillibles ; chacund'eux interprète la loi à sa .chacunguise, prononcese&fetvas, ses décisions personnelles, que les Sultanssuivent religieusement. Au Mufti qui avait excommunié le café succéda un Mufti qui déclara que lecafé n'était pas du charbon et que son infusion pouvait être bue par les fidèles les plus fervents de Mahomed.Cependant, les boutiques à café se multiplièrentet l'on se permitd'y parler beaucoup et d'y parlerun peu de tout. Alors on accusa le café de se mêlerde politique et le grand-vizir Kopruli, pendant laminorité de Mohamed IV, ferma une seconde fois—les boutiques à café. Peine inutile ! L'habitudeétait déjà invétérée. On prit l'expédient de vendrele café aux passants sur les places et les voies publiques ; puis le fils de Koprûli, arrivé au pouvoir,malgré l'exemple dËson père et les prédications dudervis Wani, rouvrit les portes des boutiques etdu Koran au café.Ce n'est là que l'histo're politique et religieuse—du café : faisons maintenant son histoire naturelle, sa physiologie, son analyse et son hygiène.La graine de café (cafier, coffea arabica de Linnée)était déjà connue en Perse dans le IXe siècle.Un manuscrit arabe de la bibliothèque nationale deParis, dit que le Mufti d'Aden l'introduisit des


—La~109-côtes de la Mer Rouge dans toute l'Arabie ; de là,on en transporta la plante en Egypte et en Turquieen 1567. Le nom arabe kahwe ou kahoua, signifie,selon Wellsted, éveillant, boisson qui tient éveillé;selon Alpino, vin, boisson qui remplace le vin.Les Arabes disent que c'est une boisson du ciel etque le tabac en est le sel, parce que le café et lafumée de tabac se marient bien ensemble.Les Vénitiens transportèrent le café d'Orient chez—eux en 1615. En 1650, des marchands turcs enportèrent à Marseille : on ouvrity le premier café àla Bourse en 1671 .En 1679, la Faculté de médecined'Aix chargea le docteur Columb de prononcer unephilippique contre la nouvelle boisson d'Arabie,dans la grande salle de l'Hôtel-de-Ville de Marseille. Malgré la harangue du docte orateur et laprésence des magistrats, l'usage et le commerce ducafé ne firent qu'augmenter.—Soliman agha, apporta le café à Paris, en 1669 ;il en présenta une tasse à Louis XIV et en offrait àtous ceux qui allaient lui faire visite. Cela suffit aucafé pour devenir à la mode auprès des Parisiens.première boutique fut ouverte en 1672;—peu de temps après le Sicilien Procope ouvrit lecafé que Voltaire, Rousseau et d'aulres hommescélèbres rendirent ensuite historique.Dès lors, malgré les oppositions, les .diatribes,les impôts et la peine de la bastonnade —en Allemagne,, le café devint d'un usage commun dans toutede sorte que, en 1852, Kolb calcula qu'enl'Europe :Hollande chaque habitant en consomme 6 kil. paran, en Belgique plus de 4 1/2, aux Etats-Unis4 1/2, en Suisse 3, en Allemagne 2, en France 3/4—et Paris 5 millions de kilog.Le principe actif, l'aliment nerveux du calé est la


de—110—caféine. Schrader en a trouvé 17.5 dans le café cru,12.5 dans le café torréfié. Robiquet et Boutron enont constaté :0,85 dans 500 grammes de Saint-Domingue.—1 ,06 de Cayenne.—1,26 Moka, Java.—1,79 de Martinique.La caféine est la substance qni distingue les variétés d'aliments nerveux alcaloïdes que nous appelons caféiques. On l'a trouvée dans le thé, dans lematé et dans le guaranâ. Dans le cacao on a découvert une substance analogue, mais plus riche enazote, que l'on a appelée téobromine.Tous ces aliments ont pour caraclère commund'exciler l'intelligence et d'augmenter la sensibilité.Ils diminuent le besoin de manger, ils s'opposent à1'ab.us des alcooliques et à leur sinistre influence.—Le café est l'antidote de l'opium.L'infusion de café surtout rend plus actif le cerveau, plus facile le travail intellectuel, plus fécondelimagination II nous soutient dans les chagrins, ilnous encourage dans les dangers, il combat lesommeil etdiminue la faim.Le café ne favorise pas comme l'on croit la digestion. S'il semble »roduire cet effet chez quelquespersonnes, on dort l'attribuer à l'habitude, ou à lachaleur qu'il introduit dans l'estomac. Quelquefois,surtout s'il esttrop fort, il produit même une cuisongastrique pénible.Lorsque l'on prend du café entrop grande quantité, on éprouve une espèce d'ivresse toute. particulière qui esl spécialement ressentie par les personnestrès sensibles. Une petite quantité suffitquelquefois pour produire des symptômes nerveuxet convulsifs, spécialement chez les femmes.


—111 —Cependant l'abus du café produit rarement desinconvénients graves, tels que palpitations, agitation, insommie, inappétence, tremblements, irritations de la moelle épinière, etc. A Venise et enOrient, on arrive jusqu'à boire 15 ou 20 tasses decalé par jour.Le café convient plus le matin que dans la journéeou le soir. Il nuit aux enfants. Il faut le donner enpetiies qualités aux adolescents et aux femmes : auxparce que ce n'est pas l'âge des travauxintellectuels, aux secondes parce qu'elles sont plussensibles et plus nerveuses que les hommes.Le café est une excellente compensation alimentaire pour les travailleurs qui ne peuvent pas digéles mineursrer une grande quantité d'aliments ;de la Belgique s'en trouvent très bien. L'introductiohdu café dans le régime de l'armée d'Afriqueet plus tard dans celui de toute l'armée française,a été un véritable triomphe pour l'hygiène du soldat.Dans les localités basses et humides le café convient mieux que dans les localités élevées et sèches.Le lait concentre l'arôme du café ; le café au lait,lorsqu'il est un simple mélange de bon café, debon lait et d'un peu de sucre, est un alimenthygiénique pour tout le monde, un déjeuner excellent.Il est bien entendu que nous n'avons presque pasparlé jusqu'à présent du café que l'on nous sertdans les établissements qui en ont usurpé lenom.Celle décoction de chicorée oud'orge, mêlée àdu café et clarifiée avec l'ichthyocolle ou colle depoisson, qui lui donne une saveur fort désagréable,n'a rien k faire avec la boisson caféique des Turcs et


—m—des Vénitiens.—L'ichtbyocollegélatineuse que l'on fabrique enest une substanceRussie avec lamembrane interne de la vessie natatoire dn grandesturgeon le même poisson qui fournit les œufs—pour le caviar.Pleischel dit avoir découvert un moyen de rendrele café meilleur et plus aromatique : ce moyen consiste à ajouter à l'infusion 5 ou 10 centigrammesde carbonate de soude. Les maures d'Alger, pourle rendre plus parfumé, et peut-être pour lui ôlerla propriété de voler l'amour, le prennent dans deslasses préparées avec un morceau d'ambre gris autond. Tout cela peul être vrai et les gourmets l'affirment. Cependant, pour faire de bon café, il sh4-lit de mêler ensemble les graines de diverses qualitées,par exemple de Moka, Java et Martinique, deles faire brûler au point voulu, de les moudre aufuret k mesure que l'on veut s'en servir, puis detaire son infusion à la manière arabe ou vénitienne,ou au moyen d'un filtre en grès.Ceux qui ressententtrop l'influence du café surles nerfs peuvent y ajouter, surtout le soir, quelques goulles de rhum ou de cognac;—mais celuiun rayon dequi veut boire, comme dit Delille,soleil pour son cœfcr ou pour son cerveau, doit boirele eafé pur avec pen de sucre.TABAC .Chez les Musulmans, la légende sur l'origine dutabac est gracieuse et même exacte au point de vuede son action. Seulement nous devons remarquerque du temps de Mohamed, aussi bien que du—temps d'Adam, les serpents parlaient. Commeil s'agit de légendes, nous n'en considérerons quela morale.


—NeH3Donc, Mohamed, voyageant en hiver,rencontraune vipère gelée. Pris de compassion pour ce reptile il le mit dans sa manche et la chaleur le fit revenir à la vie. L'animal ingrat sortit alors sa têteet dit au prophète :—Prophète, je veux te mordre.—Donne-moi une bonne raison de cette penséeque tu as et je te laisserai laire.—Ton peuple tue toujours mon peuple, ta raceest en guerre avec la mienne.—Ici il ne s'agit pas de notre race : la questionest maintenant entre toi et moi, elle esl en ma faveur, parce que je t'ai fait du bien.—Je te mordrai afin que tu ne me tasses pas demal.sois pas ingrate.—Je le veux; je l'ai juré au nom du Dieugrand, très-grand, je le veux.A ce mot de Dieu, le prophète ne fit plus d'opposition à la vipère et la pria de le mordre au nomd'Allah. Le serpent mordit la main sacrée du prophète qui, saisi de douleur, lâcha la vipère sans luifaire de mal. Puis, Mohamed appliqua ses lèvres àla blessure, enleva le venin à l'aide de la succion etle cracha à terre. De cela naquit l'herbe miraculeuse qui a l'amertume du venin de la vipère et ladouceur de la salive du prophète.(Walpole.)—En résumé, le tabac est un poison et un agréablepasse-temps.L'histoire vraie du tabac est la suivante :En 1496, un compagnon de Colomb, PierrePane, parla le premier aux Européens du tabac etl'appela cohoba.En 1519, les Espagnols découvrirent leau Mexique.ISprès de Tabasco,tabac


114En 1559, Fernand de Tolède introduisit le tabacen Europe.En 1560, Nicot, ambassadeur français à Lisbonne, envoya à Paris de la graine de tabac.En 1574, le tabac est cultivé en Italie.En 1601, on commence à fumer du tabac enEgypte.En 1616, les colons cultivent le tabac dans laVirginie.En 1624, Urbain VIII excomunie tous ceux quipriseront du labac dans les églises.En 1634, le gouvernement établit à Moscou untribunal contre les fumeurs.En 1661, à Berne, on inscrit le 11' commandement : Tu ne fumeras pas.En 1691, Innocent XII, excommunie ceux quipriseront du tabac dans l'église de St-Piérre.En 1719, le Sénat de Strasbourg défend la culture du tabac.En 1724, Benoit XIV révoque la bulle d'Innocent XII.En 1840, Coke dit qu'aux Étals-Unis, 1,500,000personnes étaient occupées soit à la culture, soit àla manufacture du tabac.En 1854, Louis de Beaudicour calcula qu'enAllemagne on conswimail 90 millions de kilos detabac, en France 21 millions, en Turquie 14 milen Italie 12 millions.lions,Et de nos jours, Johnston a affirmé que sur notreglobe, il ya 800 millions de personnes qui fontusage du tabac.Le principe alcaloïde, nerveux ou narcotique dutabac est la nicotine, découverte par Vauquelin etobtenue à l'état de pureté par Posset et Reimann.C'est elle qui a donné lieu au procèstrop fameux


-115 ——du vicomte Bocarmé. Les tabacs qui en contiennentsont ceux des départele plus, d'après Schfosing,ments du Lot et du Lot-et-Garonne, en France,et de la Virginie, en Amérique ; d'après Henry etBoutron, ce sont les tabacs du Nord et d'Ile-et-Vilaine en France, et de Virginie en Amérique.Le narcotisme, c'est-à-dire l'effet physiologiqueproduit par le tabac et surtout par la nicotine surle système nerveux et le cerveau, est le frère germain de l'alcoolisme, et a, comme lui,pour résultatfinal la stupidité. Il commence par un calme, unassoupissement plus ou moins profond ,qui peutarriver à un engourdissement général, aux vertiges,aux nausées, à l'ivresse, au délire, à la dilatationde la pupille, au gonflement des yeux, à la cécité,ou à l'abêtissementaux convulsions, à l'apoplexie,incurable, chronique, permanent.Zimmermann avait raison de dire que le café ledébêtisait, car le café est le véritable contre poisondes narcotiques.Pourquoi donc tait-on usage des narcotiques tels—que l'opium et le hachisch ? Pourquoi fumet-onle tabac?On fume, parce que les narcotiques sont les calmants par excellence ; on fume, parce que letabac calme l'irritation nerveuse et met du baumesur les blessures de l'âme ou du cœur —; on fume,pour endormir la sensibilité —; on fume pourtuer le temps et l'ennui, parce que l'on est oisif ;—on fume, parce que l'on voit fumer et parce quenous vivons dans le siècle de la vapeur et de la fumée ; — on fume, parce que l'on regarde le mondeextérieur et le monde à venir à travers un nuagede fumée odorante et tourbillonnante ;—on fume,enfin, par une espèce d'accommodement avec la


-116 —etconscience : on ne travaille pas et l'on n'est pas—sans rien faire on fume. . . .Les aveugles ne professent pas cette doctrine demodération entre le travail et il dolce far niente—les aveugles ne fument pas.Bacon, avec son esprit sévère et logique,affirmait que le tabac délassait le corps, raffermissait laraison et avait l'avantage de procurer le sommeil.Molière, le type le plus fin et le plus perçant de lasatire française, divinisa le tabac : « Qui vit sanstabac n'est pas digne de vivre, il réjouit et purgeles cerveaux humains et il instruit les âmes k lavertu. » Vous connaissez tous les vers de Sganarelle:Quoi qu'en dise Aristote et sa docte cabale,Le tabac est divin el n'a rien qui l'égale.Malgré Molière et malgré Bacon, nous sommescependant bien heureux d'avoir vu disparaître la—tabatière des mains de nos dames de ne lavoir plus sortir que rarement de la poche des hommes qui ne peuvent pas fumer.Nous ne parlerons point de l'usage affreux demâcher le labac : tela ne peut se faire que sur mer,au milieu d'un peuple muet, tel que celui des poissons.La fumée de tabac ne conserve pas les dents, ellen'en calme pas les douleurs ; au contraire, elle lesnoircit, les salit, les use et les gâte, ou contribue àles faire se gâter.L'usage du tabac diminue la laim, la — sécrétionde l'urée et l'expiration de vapeurs aqueuses ; il eslun modificateur profond du systèmenerveux etfavorise l'excrétion intestinale!. L'habitude devientvile et facilement passion : Antonil déclarait que


—117 -les habitants du Brésil ne pouvaient pas vivre sansce 5B —élément. Les soldats allemands ne marcheraient pas sans leur ration de tabac. En 1843,—les détenus d'Epinal s'insurgèrent à ce cri : Dutabac ou la mort !.. .Il faut aussi se souvenir que la culture, le commerce, l'industrie et la consommation du tabac,sont entrées aujourd'hui dans le budget de l'économie sociale pour une somme très considérablequi fait vivre des millions d'individus.L'abus du tabac — affaiblit la sensibilité et parconséquent les sources des forces vitales : les bateliers des régales en Angleterre, s'abstiennent defumer ; on a remarqué qu'à l'Ecole polytechniqueles élèves qui ne fument pas sont ceux qui se distinguent le plus aux examens. L'abus du tabacaffaiblit les organes de la digestion : selon Fenn, letabac est spécialement pernicieux en temps d'épidémies ou de fièvres typhoïdes."L'abus du tabac peut produire, d'après Sieberl,spasmes bronchiques,toute espèce de névroses :palpitations, douleurs cardiaques, coliques, vomisse—ments, irritations de la moelle épinière. L'abusdu tabac prépare ou augmente l'asthme et la phthisie.— L'abus du tabac retarde ou gêne la puberté;il diminue les forces reproductives. L'abus du—tabac peut occasionner le cancer des lèvres ou desfumeurs; uneespèce de cécité, que Sichel etWoodsworth ont nommée amaurose des fumeurs.Enfin l'abus du tabac, en affaiblissant tout l'organisme, diminue la volonté et la pensée, le travail etla moralité ; il conduit à l'oisiveté et à l'ivresse ; ilaugmente le budget individuel d'une grosse dépense ; il introduit dans l'atmosphère une évaporationdésagréable qui peut devenir nuisible aux


—H8——ilpersonnes délicates ou malades;légitimes et hygiéniques ;il diminue les joiesraccourcit la vie.Conclusions :Le tabac n'est jamais nécessaire.Employé avec modération, il peut convenir auxhommes gras, robustes, irritables, ou à ceux quisont bien malheureux, ou qui mangenttrop peu.Il nuit toujours aux enfants, aux jeunes gens, auxpersonnes faibles, à tous ceux qui sont prédisposésaux maladies de poitrine.La pipe est moins nuisible que le cigare, et lacigarette plus nusible que le cigare et la pipe.COCA,KAAD.Un proverbe italien dit :Bacco, tabacco e VenereRiducon l'uomo in tenere.Nous venons de parler du tabac et du vin. Cen'est pas ici le lieu de nous occuper du troisièmecoéficient de l'incinération de l'homme; il ne faitpas partie des aliments.Nous dirons plutôt quelques mots de la coca eldu kaad, autres nnotiques moins communs, quipeuvent rendre quelques services à l'hygiène.La coca est un arbrisseau originaire du Pérou,de la famille des bois rouges ou erythroxilons deLamarck, que Mantegazza a introduit en Europe—depuis 1858. « Ea feuille de cette plante, ditnotre auteur, est en usage en Bolivie, au Pérou,dans la République argentine, au Tuccuman, auprès de tous les peuples de la grande nation desIncas. Elle forme le trésor et les délices des indiens purs. Ils la portent toujours avec eux et ils


-119 -Imaginezsaluent avec elle le lever et le coucher du—soleil, leur ancien Dieu'. La coca leur sert d aliment et d'excitant, elle leur donne le courage pourlutter contre les éléments et pour soutenir les trades hommes devaux les plus pénibles. —petite taille ayant des pieds très petits et un thoraxfortdéveloppé, contraints de vivre avec des aliments très mauvais à une hauteur qui varie de7,500 à 15,000 pieds au-dessus du niveau de lamer. Eh bien, l'Indien vit dans ces régions en fatiguant continuellement. Il sert de guide à pied au—voyageur, qui est presque toujours monté sur unebonne mule et trotte de bas en haut sur les montagnes des Andes. Il travaille dans les mines d'argent en cassant le matin la glace avec ses pieds etil sue le reste de la journée, en travaillant dansune température ambiante qui fait grelotter lesplus robustes. Ces — prodiges, il les accomplit àl'aide de la feuille de coca ; sans elle il se révoltecontre le maître ou contre sa propre existence.» L'infusion de coca excite le cœur quatre foisplus que le thé et deux fois plus que le café. Ahaute dose elle produit une augmentation de chaleur et de respiration, une véritable fièvre.» Une infusion de 2 ou 3 grammes de coca dansun verre d'eau chaude est le thé le plus digestif quel'on puisse prendre ; elle est toujours agréable et réconfortante; elle ne nuit jamais à personne.» Mâchées à la dose de 3 à 20 grammes, lesfeuilles de coca nous font éprouver un calme suave,soutiennent nos forces musculaires et rendent facilele jeûne. Grâce à cet aliment, on peut résister aufroid, à l'humidité et aux travaux excessifs. Lesouvriers mineurs, les voyageurs, les courriers peuvent rester un et deux jours sans prendre d'autresaliments solides ou liquides.


Ne—140—» Avec deux onces de coca, dit enfin Mantegazza,j'ai pu rester 40 heures sans rien mangeret sans ressentir la moindre faiblesse. »Le principe actif alcoloïde de la coca a été appelécocaïne. Il est amer, soluble dans l'alcool et dansl'éther, mais peu dans l'eau.Celle plante pourrait, à mon avis, s'acclimaterfacilement parmi nous et se rendre utile au moinsaux voyageurs de l'intérieur du pays. Elle est acclimatée en Italie, en Allemagne et en Suisse, maispas en France, que je sache ; du moins on ne latrouve pas dans notre Jardin d'Essai.Kaad.—pouvant vous faire voir la coca, jeveux vous montrer le kaad ou cât, qui s'en rapproche beaucoup, soit par sa forme, soit par souaction alimentaire excitante sur le système nerveux.Le kaad est un arbrisseau originaire de l'Abyssiniequi a été spécialement étudié par Botta, danssa relation d'un voyage dans l'Yémen, en 1837,pour le Muséum d'histoire naturelle de Paris.L'arbrisseau a été appelée Celastrus edulis ou celastrusmangeable et ressemblebeaucoupau cavalier.« Cet arbre, dit Botta, forme la culture la plusimportante du Mont Saber, et c'est lui qui attiretous les soins des%tbitants. On en mange les bourgeons et les feuilles les plus tendres ; elles ont unepropriété excitante, légèrement enivrante même,reposent de la fatigue, ôtent le sommeil et fontque l'on aime à passer la plus grande partie de lanuit dans une tranquille et sociable conversation ;ainsi n'ya-l-il pas d'hommes qui dorment aussi peuque les Yéménites ; et cependant leur santé ne paraît pas en souffrir, car les exemples de longévitésont communs dans le pays. »


—iai—L'action stimulante ou nerveuse du kaad est telleque les messagers pressés d'arriver à destinationmarchent souvent plusieurs jours et plusieurs nuitsde suite sans prendre d'autre nourriture, ni soutienque les feuilles de cette plante .Comme les Péruviens le font pour la coca, les Abyssiniens en apportent toujours un paquet avec eux.Le baron Maltzan s'en est occupé tout récemment. Il confirme que le kaad fraîchement coupé,enivre fortement, mais d'une ivresse passagère,agréable, loquace, gaie, fantasmagorique Le seulinconvénient qu'a le kaad est celui d'éveiller, chezceux qui en usent, un besoin irrésistible d'enprendre toujours.D'après Amalek, avant l'introduction du café enArabie, on prenait l'infusion d'une herbe qui s'appelait kaad ou chaad. C est de ce mot probablement que l'on a formé celui de kahoua ou dekahwéchez les arabes et de café chez nous. Entre la—France qui a acclimaté le kaad et l'Italie qui a acclimaté la coca, on pourrait facilement faire unéchange et cultiver sur un°i grande échelle, en Algérie surtout, les deux arbrisseaux du Pérou et del'Abyssinie.Maintenant que le café et le sucre vont atteindredes prix et des dépenses que toutes les bourses nepourront pas supporter, qui de nous pourrait direet affirmer, que la coca et le kaad ne sont paspropres à remplacer le café et le thé, à soutenir lesforces des soldats et des voyageurs, à diminuer lebesoin de dormir qui se tait tant sentir dans lespays chauds, et à faciliter la digestion sans les coupsde fouet de l'absinthe et des alcooliques ?. . .16


nous-m —VIHYGIÈNE GASTRONOMIQUEMesdames et Messieurs,Pour terminer la bromatologie, c'est-à-dire lapartie de l'hygiène qni traite des aliments, il nousfaut maintenant nous occuper de la gastronomie.C'est la méthode que nous avons adoptée en commençant : après avoir parlé de la soif et de la faim,nous nous sommes un peu arrêtés sur la mastication et sur l'hygiène de la bouche. A présent quenous avons examiné la classification des substancesalimentaires, leurs principes nutritifs, leur rôle respectif dans le fonctionnement des organes, leurinfluence sur la force, la chaleur et l'innervationde notre corps allons les embrasser dans—leur ensemble pour savoir quelle est la méthode la plus hygiénique à suivre dans l'alimentation.Mais, avant d'entrer dans la cuisine ou de nous—mettre k table —En imagination, disons quelques mots de la aéglutïlion, du mécanisme parlequel on avale les aliments, et de sou anatomie.Derrière la base de la langue, se trouvent lelarynx et la trachée, constituant le canal destiné àrecevoir l'air qui eutre et qui sort de nos poumons ;ce canal occupe la partie antérieure du cou, et lelarynx est situé dans la région où se trouve ceque l'on appelle la pomme d'Adam.Cette espèce d'entonnoir, dont nous aurons ànous occuper plus lard quand nous parlerons de


Dans-123Derrière-l'hygiène de la respiration et de la voix, a en hautune ouverture qui s'appelle glotte, laquelle se terme complètemeut à l'aide d'une soupape qui secontinue avec la base de la langue et qui a été—nommée êpiglotte. le larynx et la trachée, entre celle-ci et la colonne vertébrale, estplacé unautre organe constitué par le pharynxet l'œsophage, véritable conduit alimentaire destinéà saisir le bol et à le pousser de l'arrière bouche—dans l'estomac. la partie inférieure dupharynx, il n'y a pas moins de six ouvertures ;quatre en deux paires latérales et deux orificessimples sur la ligne du milieu.Les deux paires sont : en avant, les ouverturespostérieures du nez et près d'elles les orifices destrompes d'Eustache, petits conduits qui aboutissentaux oreilles ; les deux orifices simples sont l'ouverture postérieure de la bouche entre le voile dualais et l'épiglotte, et l'ouverture supérieure dulaarynxou glotte.Le bol alimentaire placé sur la base de la langueest transporté en arrière vers le pharynx. Souscette pression le voile du palais se soulève, fermeles ouvertures nasales, tandis que le mouvement enarrière de la langue fait baisser l'épiglotte sur laglotte, de façon à former une espèce de pont, audessus duquel le bol peut passer sans risque depénétrer dans le canal de l'air. En même temps,le voile du palais qui défend l'entrée des cavitésnasales dirige le bol vers la partie inférieure dupharynx. Lk, il est saisi et rapidement lancé dansl'œsophage par un mouvement de contraction deslibres musculaires supérieures, qui coïncide avec unrelâchement des fibres inférieures ; les parois musculaires de l'œsophage, continuant ce mouvement


—124 -de contraction et de relâchement,poussent le bolen dedans jusqu'à ce qu'il arrive k l'estomac.Les liquides sont absorbés tout à fait de la mêmemanière. Cen'est pas par leur poids seulementde l'œsophagedans l'estomac ; chaque gorgée est saisie et transportée par une action des muscles. C'est pour celaque des saltimbanques peuvent boire la tête en bas,qu'ils tombent de la gorge et le longet qu'un cheval ou un bœuf boivent avec la gorge—plus basse que le pharynx et l'œsophage ce quiserait impossible si les liquides obéissaient simplement à l'action de la pesanteur.Malgré cet appareil de déglutition si ingénieux,il peut arriver et il arrive, en effet, de temps à autreque, par suite d'une surprise, d'une frayeur, ou d'unmouvement brusque de la gorge, les aliments vontde travers, c'est-à-dire que, liquides ou solides, ilspassent quelquefois dans les fosses nasales, et dansles trompes d'Eustache, ou pénètrent même par laglotte dans le larynx, dans la trachée et jusque dansles bronches, qui sont les diramations de l'arbreaérifère.Lorsqu'il arrive que les aliments pénètrent dansle nez ou dans les conduits eustachiens, l'accidentn'est pas grave ; iL est simplement désagréable etles enfants en sorH quittes pour recevoir dans ledos quelques coups de poings maternels assez doux,dans l'intention de faire descendre parcontre-couples substances fourvoyées. Mais lorsque ces substances tombent par la glotte dans la trachée, l'accident devient très grave et souvent mortel, si uneqninte violente de toux n'expulse pas immédiatement le corps étranger qui est pénétré dans lesvoies de la respiration.Je puis vous citer à ce sujet un cas fortsingu-


—125-lier que j'eus l'occasion de constater, il ya une—dizaine d'année. Un petit enfant de trois à quatre ans mangeait une châtaigne crue à côté d'ungrand bassin plein d'eau ; un de ses frères eut lamauvaise idée de lui faire peur en feignant de lejeler dans le bassin. L'enfant saisi de frayeur jetaun cri. Le lendemain il était malade ;la maladieprit les caractères d'une grave fluxion de poitrinedu côté gauche, qui le mit en danger de mort etdura plus d'un mois.Au bout de ce temps l'enfant cracha tout-à-coup,avec d'autres matières, un morceau de châtaigne,qui avait dû pénétrer dans le larynx au moment oùil avait jeté un cri de frayeur, en croyant reuversédans le bassin. C'est à cet accident queêtre—l'on devait attribuer la maladie qui avait mis endanger l'existence de l'enfant et à laquelle il auraitsuccombé, si la nature n'avait pas trouvé un moyenfort rare de le sauver.Donc, afin d'éviter les accidents qui peuvent survenir dans l'acte de la déglulation, il ne faut pas :Parler ou faire parler, rire ou faire rire quand l'onmange ;Effrayer, surprendre, frapper ou déranger d'unemanière quelconque ceux qui sont eu train de manger.Nous pouvons après cela, entier de plain-pieddans la cuisine, en dresser l'inventaire et faire unpeu de chimie culinaire.La cuisine est un amphithéâtre où Ion voit forcecadavres d'animaux et cadavres de plantes, poissons?[ui se débattent dans les convulsions de l'agonie elruits violemment arrachés à leur mères, qui atten—dent quoi—? de revenir à la vie, d'alimenter


—126—des corps vivants, parlants et pensants, d'en fairepartie intégrante, élémentaire, fondamentale, indispensable de devenir homme. — —Oui,la cuisineest un vrai laboratoire de chimie gastronomique,d'hygiène alimentaire, et en même temps de transmigration et de métempsycose, de transformation etde métamorphose, où la mort devient l'élément dela vie, que les diverses combinaisons de la matièreentretiennent à l'aide de leur éternel renouvellement.Ce fut dans un de ces laboratoires gastronomiques, ce fut dans une cuisine de Bologne, en 1780,que l'on découvrit le phénomène le plus curieux etfe plus intéressant peut-être de l'électricité. Cependant Thaïes avait eu quelque idée de l'électricité,600 ans avant notre ère. Je vous dis à dessein qu'ondécouvrit, parce que le mérite d'avoir parlé del'électricité animale revient à Galvani, et le galvanisme n'a pas encore dit son dernier mot ; la véritéest pourtant que le phénomène des contractions dela grenouille morte et écorchée, ne fut pas observétout d'abord par lui dans l'amphithéâtre d'analomie,mais dans sa cuisine, par sa propre cuisinière, quien l'annonçant à son maître ne se doutait certainement pas qu'elkallait lui décerner l'immortalité.Un homme peut vivre avec une quantité biendifférente de nourriture et plier, réduire, pour ainsidire, l'estomac aux exigences du climat, de l'âge,de la fortune, de la volonté, de l'habitude, des circoustanceset de la misère.Plusieurs de nous ont pu voir le portefaix napolitain qui mangeait 8 ou 10 kilog. de macaroni etautres aliments, sur une table du café de la Bourse—d'Alger. Les cosaques de la Sibérie avalent de


—1*7 —5à 6 kifog. de viande par jour. — Carpenter cite unIndien qui mangeait à lui seul une brebis. — Mantegazzaa vu quatre Indiens de la campagne argentine dévorer un mouton. Nous — ne parlerons plusde l'orgie de l'Esquimau Koolittuck ; mais le capitaine Parryaffirme avoir vu un autre Esquimaumanger devant lui 35 livres de viande et quelques—chandelles La livre anglaise équivaut k 450grammes environ.D'un autre côté, l'Arabe traverse le désert avecun petit sac de dattes et de figues sèches. — L'Indien du Pérou marche plusieurs jours et plusieursnuits avec quelques onces de feuilles de coca et unpeu de mais rôli ; l'Abyssinien avec, des feuilles de—kaad. Newton, nous l'avons dit, vécut quelquetemps de pain trempé dans le vin. On cite le cas—de Johana Nauton qui vécut 78 joursavec du jus decitron seulement. Enfin, le eélèbre hygiéniste—Cornaro, de Venise, arrivé à ses dernières années,ne mangeait plus que deux jaunes d'œuf par jour etpossédait la plus grande lucidité et activité d'esprit,de sorte que de sa 86e k sa 95° année, il publiaquatre traités d'hygiène.En disant que l'estomac se proportionne, pourainsi dire,aux habitudes qu'on lui impose, nousommes restés dans la stricte vérité. En effet, il sedilate ou se rétrécit, selon les circonstances.—Vous devez vous souvenir du repasseur bolonais,qui mangeait des quartiers de mouton, et mourutd'une indigestion d'un panier de cerises, en laissantau Musée de pathologie un estomac qui présente 4ou 5 fois les dimensions d'un estomac ordinaire. —Par contre, les indigènes du Paraguay, lorsqu'ilsn'ont pas de quoi manger, font réellement ce quenous disons en plaisantant : ils se serrent le ventre


—128 —avechamacs. Les Kirghis se compriment l'épigastre avecdes planchettes et les nomades du Sénégal se serventde moyens semblables.La règle hygiénique à suivre est celle de mangerpour vivre et pour bien vivre, en évitant toujours deune écharpe el ils se balancent dans leursvivre pour manger.Nous avons déjà fait remarquer que les peuplesqui mangent du pain et de la viande, domineronttoujours ceux qui mangent des pommes de terre etdu riz ; nous pouvons ajouter que ceux qui mangentdavantage, sont les plus actifs et les plus entreprenants.Parmi les peuplesd'Europe, la différence de l'alimentation, par rapport à la quantité,est considérable. Ceux qui mangent davantage sont les Allemands, puis les Anglais, les Russes, les Scandinaves,les Hollandais et les Français. Après eux viennentles Italiens, les Grecs, les Portugais. Ceux quimangent le moins sont les Espagnols.Le maximum de l'alimentation est indéfini :Balzac, dans sa Physiologie du goût, a avancé qu'ungastronome opulent mange quarante fois plus quele nécessaire. Le minimum peut et doit être déterminé par la science ; c'est elle qui doit fixer laquantité et la qualité des aliments qui sonl nécessaires au travailleur, au collégien, au soldat, au prisonnier, k chacun, pour réparer hygiéniquementla perte quotidienne que subit l'organisme.La moyenne de celte perte pour l'homme adultea été évaluée k 15 grammes d'azote et 300 grammes de carbone — Leminimum de nourriture quipeut réparer un peu plus que cette perte moyenneest représenté par la ration du soldat français decavalerie. Il reçoit :


—Cedoivent—1-29—285 grammes de viande,—270 de pain de munition,— —516 pour la soupe,—200 de légumes,qui correspondent k 22 grammes d'azote et k 400grammes de carbone.Bérard constata que dans trois grands collèges deFrance, la quantité de viande que l'on donnait auxélèves internes était insuffisante ; le ministre Fortoulla fit augmenter de 50 grammes par ration.L'entant, l'adolescent, le jeune homme, le travailleur, ies habitants des pays froids et des endroitsélevés, ceux qui ont un tempérament nerveux et qui—dorment peu manger plus que l'adulte,le vieillard, les femmes, les célibataires, les bureaucrates, les personnes grasses, celles qui habitent les pays chauds ou qui dorment beaucoup.En hiver, on doit généralement se nourrirmieux qu'en été, a la campagne mieux qu'enville.En Algérie, l'Arabe est sobre. Le Koran a dit :« Mangez, buvez, mais sans excès. —L'excès denourriture altère la santé. » (ch. 7, v. 29.) L'alimentation ordinaire des arabes n'est pas des meilleures. Une mauvaise galette mal cuile et imbibéed'huile d'odeurinfecle,du couscoussouavec du beurre rance, du riz, quelques figues sèches et quelquesolives, des fruits malsains ; par fois, mais rarementun peu de mouton ; puis de l'eau et du petit laitpour boisson, constituent leur arsenal alimentaire.qui les sauve, c'est le café, le tabac et, plusque toule autre chose, l'inertie.Cela suffit pour que ce peuple, mis en contactavec un conquérant qui mange et travaille beaucoup plus, soit fatalement condamné k disparaître.17


—L'Hippocrate—130-L'Arabe cependant, lorsque l'occasion sesente, mange beaucouppréet étonne même pir sa gloutonnerie. C'est presque le système de celui qui règleson régime d'après la fortune et qui devenant richetout d'un coup, multiplie à l'excès le nombre desplats. Ce système, il n'ya pas besoin de le dire, estdes plus nuisibles. Pétrarque, le chantre de Laure,dans un de ses accès de colère poétique contre lesdébordements de la Cour d'Avignon, s'écriait :qu'étant pauvre elle se nourrissait d'eau et de glandset que, devenue riche et puissante, en appauvrissantles autres, elle lait bombance avec le vin, les platset autre chose encore. .Personne ne doit vivre d'eau et de glands ; maispersonne non plus ne doit s'abrutir dans îles festinscomme ceux de la Cour papale d'Avignon,—lorsqu'il parvient à la richesse.L'économie gastronomique et l'hygiènede lacuisine sont, en somme, deux excellentes choses.L'art culinaire doit savoir réunir la variété desaliments à la variété des saveurs ; augmenter leurdigestibilité, sans en diminuer les propriétés nutritives ; plaire au goût, à l'odorat, aux yeux et ausens du beau .des cordons bleus,Brillât-Savarin, écrivait : « Dis-moi ce que tu mange, je te dirai qui %i es. »Le meilleur régime est le régime mixte avec unpeu plus de substances animales que de substancesvégétales.Le régime exclusivement animal augmente lessécrétions, accélère le pouls, hâte le développementde la puberté, tend peut-être à grandir la taille, k—conserver !a virilité et k prolonger la vie. Maisd'un autre côté, il rendtrop gros, replet, pléthorique, sanguin, prédisposé aux hémorrhagies,


—En-131—Le-aux rhumatismes, a la goutte el aux apoplexies. —Il n'est prescrit que comme régime médical contreles prédispositions k la scrofule et à la phthisie. Onl'a accusé d'engendrer le ténia ou ver solitaire.Le régime exclusivement végétal dérange la digestion, appauvrit le sang, diminue les sécrétionsorganiques, engendre des gaz et des vers intestinaux.affaiblit les muscles et le cerveau, donne du phlegmeet de l'obésité, prédispose au rachitisme, à la phthisie et aux maladies de consomption.Le célèbre voyageur Livingslon a observé que lesMakololos et les autres peuplades qui se nourrissentde viande et de lait, résistent beaucoupmieux auxfatigues de leurs expéditions que ceux qui se nourrissent de farine et de légumes. Ceux-ci meurentsouvent d'épuisement.Les Grecs orthodoxes, après leur terrible carême,pendant lequel ils vivent de mauvais pain, de champignons conservés dans l'huile de lin et d'avoine,(ont réellement pitié. carême et les joursmaigres ne peuvent que servir de remède pour lesgourmands qui sont devenus gras outropgoutteux.effet, le régime végétal est imposé par la misère, ou prescrit par le médecin, ou adopté par lefanatisme religieux.Les lègu'nistes de toutes les couleurs et de tousles pays ont beau s'écrier que les sociétés sont fondées sur le crime et l'abus de la ch:iir, que lesbouchers sont des monstres, les abattoirs des lieuxd'abomination, les chasseurs des bêles féroces; ilsonl beau montrer leur embonpoint gras à lard...,pour mon compte, je crois qu'au lieu de suivre lerégime de Pythagore, ils feraient infiniment mieuxd'en pratiquer la morale renfermée dans les versdorés que Serpaggi nous lisait l'autre soir.


—132—La cuisine française esl, comme sa philosophie,éclectique ; de sorle que l'on peut dire que la cuisinefrançaise est philosophique. Elle — est, en réalité,la meilleure tant par la forme que parla substance ;elle est cosmopolite, pleine de goût et de connaissances hygiéniques ; elle met k contribution les troisrègnes de la nature. Si elle diminuait les sauces àla farine torréfiée qui ressemblent partrop à lacolle, et craignait moins les condiments aromatiques, elle deviendrait parfaite.La cuisine italienne, la milanaise surtout et laflorentine, se rapprochentbeaucoup de la cuisinefrançaise ; mais en Lombardie ou emploietrop lesgraisses et le riz ; dans le reste de l'Italie on consomme tropde pâtes.La cuisine allemande fait un usage surabondantdes farineux et des douceurs ; elle est flegmatiqueet stupéfiante.La cuisine anglaise est unecuisine de cyclopes.La cuisine cspaguole esl une cuisine de gens avares, sans faim.Et la cuisine turque, fort malpropre, ue sert qu'àengraisser.Les deux pôles *cs opérations culinaires sont:le bouilli el le roli.Commençons par le pot-au-feu. Je ne suis pasde race royale et je ne puis pas promettre k chacunla poule au pot d'Henri IV ; maïs je liens plus quen'importe quel roi à ma parole et je vous prometssans hésiter que nous allons nous occuper sérieusement de la marmite.En faisant cuire de la viande dans l'eau, lesl'ématosinesubstances albuminoides se coagulent,


Pour—133—du sangse décompose et perd sa solubilité ; d'aulrepart, le tissu cellulaire se change en gélatine et sel'acidedissout dans l'eau, avec l'acide lactique,inosique, la créatine et la créalinine. Ces substances constituent le corps que Thénard avait appelénsmazâme ou principe nutritifdu bouillon. Lorsquel'on met de la viande dans de l'eau froide, que Ionchauffe peu k peu, les principes alimentaires solublesse séparent avant la coagulation de l'albumine. Onfait ainsi un bon bouillon,mais l'on a un mauvais—bouilli. Si l'on jette la viande dans l'eau chaudeet qu'on la fasse bouillir promptement, l'albuminedes couches externes se condense -tout de suite etforme une enveloppe difficilement perméable k l'eauqui ne pourra pas s'emparer des principes solubles.La chaleur enveloppera, en outre, chaque faisceaumusculaire interne d'une couche d'albumine coagulée. L'on aura un excellent bouilli, mais un bouillon médiocre.Donc si vous voulez faire de bon bouillon, mettez la viande coupée en plusieurs morceaux dansl'eau froide et faites cuire peu à peu ; si vous désirezavoir un bon bouilli, jelez la viande en un seulmorceau dans l'eau bouillante et faites cuire promp—tement. nous, il esl indifférent, au pointde vue de l'hygiène, de nous servir de l'un ou del'autre procédé, parce que nous employons lebouillon pour préparer la soupe el nous mangeonsensuite le bouilli. Mais dans les pays, comme enAngleterre el dans les Flandres, où l'on ne fait presque pas de potage et où l'on mange simplement laviande bouillie, il n'est plus indifférent, mais trèsimportant,au contraire, pour une bonne alimentation, de suivre une méthode plutôt que l'autre.Dans l'une comme dans l'autre méthode,l'addi-


134 —lion de quelques légumes aromatiques est un usageexcellent. Par ce moyen, le bouillon et le bouillideviennent plus savoureux et plus appétissants. LesItaliens cl tous ceux qui n'ont pas cette habitude,se privent d'un condiment très-utile. Le pot-au-feusans légumes est comme le pain sans sel.Le bouillon est un aliment nutritif, fort substantiel, de digestion facile et très-assimilable. Il necontient pas de matières inertes ou excrémentielles.Lorsqu'il est chaud et bien dégraissé, il ne présente,k mon avis, aucun danger. Je n'ai jamais pu partager la crainle de certains médecins au sujet dubouillon.Le digesteur, ou marmite de Papin, et les autoclaves qu'on a essayé d'introduire dans l'économiedomestique, peuvent servir k cuire promptementles viandes et k dissoudre la gélatine des os. Ce sontdes vases solides hermétiquement fermés au moyend'un couvercle assujetti par une forte vis de pression.Les os, les tendons, les jointures servent spécialement k faire la gélatine. La gélatine a été lour àtour vantée et portée au ciel comme aliment desplus nutritifs et des plus légers ou digestifs, puisdépréciée, calomniée et presque rejetée dans la catégorie des matA-cs inertes. En dernier lieu, lascience est intervenue et a justifié l'usage de donner la gélatine aux malades el aux convalescents ;la chimie organique a constaté qu'elle épargne lebesoin des substances albuminoïdes, en diminuantla décomposition des tissus.La manière la plus simple et la plus ancienne del'aire cuire la viande consiste k la rôtir, en la jetantsur le feu, ou en la maintenant tout près du feu aumoyen d'une broche.Dans le chapitre 28 du livre biblique des Nom-


—Lassant—135—bres, Jéhova s'entretient longuement avec Moïse, àpropos de la qualité des hosties ou holocaustes etdu mode de les faire lotir sur les autels, en lui déclarant à plusieurs reprises que l'odeur des agneaux,des veaux et des moutons rôtis lui est très agréable,eu ajoutant même ailleurs que l'odeur de la graissebrûlée dans les sacrifices était une odeur suave pourson nez.Brillât-Savarin a dit que l'on devient cuisinier,mais que l'on nait rôtisseur. Ainsi, pour ce granddocteur de l'art culinaire, il ya des génies rôtisseurscomme il ya des génies scientifiques ou artistiques. Cependant dans les* pays de montagne, où l'onfait de bons leux, j'ai vu rôtir très bien toute espècede morceau de viande, à l'aide d un tourne-brochefort simple : il consiste dans une ficelle et une clefsuspendues à un clou de façon à faire continuellement tourner k côté du feu la viande que l'on metau bout el que l'on veut rôtir.Giusti, le Béranger de l'Italie, posait, en 1841,k tous les grands rôtisseurs du passé et de l'avenirle problème suivant ;Dato che torni un secokiAgli arrosti propizio,Potrebbe il carbon fossileServire al Sanl'Uffizio ?. .Ce qui veut dire :.En admettant qu'il puisserevenir un siècle propice aux rôtis en place publique, le charbon de terre pourrait-il servir decombustible k la Sainte Inquisition ?. .. »a d'autres la solution de ce graveproblème, nous nous contenterons de déclarer quele meilleur rôti est le rôti k la broc!ie. Cependantquelle que soit la manière de le préparer,il est


—136 —Or,toujours plus nutritif et d'une digestion plus facileque le bouilli. L'art de bien rôtir consiste à savoirdiriger el arrêter k point la cuisson de la viande,afin qu'elle garde tous les principes alimentaires etqu'elle donne tous les principes aromatiques qu'ellerenferme. Sous l'aclion de la température élevée klaquelle on doit rôtir, l'albumine de la viande secoagule, IVmatosine du sang se décompose, toutesles deux se consolident et forment la croûte extérieure de couleur brune dorée et d'odeur empireumatiquepositivement suave. Lorsque la températurene s'élève pas à 70°, lématosine ne se décomposepas et la viande reste saignante ; c'est le rôti quiconvient aux estomacs affaiblis qui ont besoin deprincipes plastiques outoniques, c'est aussi le rôtiqui plaît par-dessin tous les rôtis aux Anglais,lesquels, malgré, leur passion pour la Bible, ont unepassion encore plus grande et plus rationnelle peurleurs excellents beafsleeks ou rostbeefs saignants.La cuisson des légumes demande des soins spéciaux. L'eau de source et l'eau de puits, nousl'avons déjà noté, contiennent presque toujours dessels calcaires qui se combinent avec la léguminedes haricots, des pois, des lentilles, des pois chiches,etc. et forment une combinaison insoluble.Les légumes reste% durs, et l'on dit que de telleseaux sont des eaux crues. L'eau de pluie ayant subiune espèce de filtration et manquant de chaux cuitmieux et plus facilement les légumes el les rendconRéquemment plus tendres. Mais il arrive dans cecas, qu'une grande partie de la légumine devientsoluble et se répand dans l'eau .la légumine,nous ie savons, est le principe azoté, tonique ; donc,si l'on jette l'eiu où l'on cuit les légumes, il se perdbeaucoup de substance alimentaire, et les pauvres,


—137—qui sont obligés de se nourrir par elle, se priveraient ainsi d'une bonne partie de leur alimentation.C'est donc un usage nécessaire et utile pour eux defaire la soupe dans l'eau où les légumes ont étécuits, ou de les manger avec celte même eau.Cependant si l'on veut les manger sans l'eau, ilfaut les faire cuire dans l'eau bouillante, commelorsque l'on veut faire un bon bouilli. Dans ce cas,la solution concentrée de légumine se coagule, ainsique l'albumine de la viande, k l'extérieur,et empêche la dissolution du principe nutritif.Entre la viande et les légumes, il ya une sériede mets que l'on ne pourrait pas compter et dontnous nous dispenserons de faire le menu. Nousrappellerons simplement que les sauces où entrenttrop de graisses outrop de farine sont moins quemédiocres. La pâtisserie est, en général, indigeste,parce que la température trop élevée k laquelle onla soumet cuit mal la pâte, décompose la graisse elune partie du sucre.Le désir de manger les mets lorsqu'ils sontchauds,—s'explique par la physiologie : lessubstances gélatineuses et grasses sont digéréesbeaucoup plus difficilement lorsqu'elles sont froides;en outre, il paraît prouvé par l'expérience que lachaleur excite davantage la sécrétion du suc gastrique et les mouvements de l'estomac.Beaucoup de personnes craignent de mêler ensemble le lait et les aliments acides, ou les laitageset le poisson. A ce— propos, il faut se souvenirque le suc gastrique estbeaucoupplus acide que lejus de citron et le vinaigre. L'estomac n'est pas unphilosophe sceptique, un Marphurius qui attendles coups de bâton de Sganarelle, pour recevoir, embrasser, pétrir, dissoudre et digérer, sans aucun18


et—13$—doute et sans distinction de caste, les substancesalimentaires que nous fournit la mère nature. L'estomac esl aussi.encyclopédiste, aussi démocratiqueque possible ; il fait un même parfait accueil k lamorue en salade et à la crème a la Chantilly, et illes mêle ensemble. Il faut pourtant ajouter que cebon philosophe éclectique est de temps en tempsaussi capricieux que le cerveau d'une petite maî-—iresse alors il laut tenir compte de ses exigences, si l'on veut vivre en paix avec l'hygiène.Nous venons de nommer le vinaigre, dont nousn'avons pas encore parlé.D'ordinaire, on ne leconsidère pas comme un aliment ; ii est en tout casun assaisonnement très employé et, sous ce rapportau moins, nous lui consacrerons quelques mots.Le vinaigre est une solution diluée d'acide acétique qui contient de l'albumine, du sucre, de ladextrine et autres substances qui varient selon leliquide alcoolique qui a servi à le faire.Le vinaigre facilite la digestion, excepté la digestion de la légumine, parce qu'il la change ensubslance insoluble ; il dissout toutes les substancesalbuminoïdes et change rapidement en une massegélatineuse le gluten et la fibrine. Dans la salade,il concourt à chaAer en sucre la cellulose el l'ami^don.Pris en grande quantité, le vinaigre appauvrit lesang, amaigrit, use tout l'organisme et devient unecause de marasme. Lorsqu'il était de mot'e d'avoirdes couleurs pâles et une figure sentimentale, j'aivu deux demoiselles bien portantes, deux robustescampagnardes,mourir de consomption en mangeant chaque matin, une abondante soupe au vinaigre, qu'elles exposaient auparavant au soleil.La distribution des repas peut varier selon les


—les——139—-lieux, les habitudes, les occupations, les âges,et lesconditions spéciales où l'on se trouve. En général,deux repas par jour constituent un bon système :déjeuner à 11 heures ; diner k 7 heures.Ces deux repas, plus un petit déjeuner du malinan café, au café au lait, au chocolat, etc., suffisentL'enfant,—parfaitement pour l'homme adulte.l'adolescent, la femme enceinte, le convalescent,le paysan, le travailleur doivent faire quelque repasde plus,—parexemple, le goûter. Personne nedoit travailler le matin à estomac vide, quelles quesoient ses occupations : le calé pour les uns et lecasse-croûte pour les autres sonl d'excellentes précautions hygiéniques. Après 12 heures de jeune ilest tout naturel que l'on ait faim en se levant; celuiqui n'a pas d'appétit le matin est malade ou prèsde l'être ; celui qui eu se réveillant le matin abon appétit est sûr d'être sain et de vivre longtemps.Nous avons dit que le meilleur régime est le régime mixte et que la cuisine française esrsupérieureaux autres parce qu'elle sait prendre et réunir hygiéniquementensemble les substances alimentaires destrois règnes de la nature. En effet, il faut autant quepossible que tous les divers aliments soient successivement au moins représentés au dîner :les ali—ments toniques ou azotés viande, gibier, poisson, œufs, etc. ; aliments calorifiques ouproducteurs de graisse pain, soupe, pomme de—terre, légumes, fruits, beurre, etc. ; enfin, lesaliments nerveuxthé, etc.viu, condiments, épices, calé,La variété des mets est la règle générale quidoit guider la maîtresse de la maison dans l'économie culinaire. Un bon remède contre l'antipathie


la-HO—pour certains aliments et contre lagloutonneriepour quelques autres, est celui d'habituer de bonneheure les enfants à manger de tout et de ne les priver jamais par système de ce qu'ils désirent.Lancisi, médecin du XVII0 siècle, écrivait: « Lesmets font le chyle, le chyle fait le sanget le sangfait l'esprit. » — Si l'on veut avoir l'esprit éveillé,prêt à tout saisir, il faut manger de tout.Le dîner doit être la fête quotidienne de l'estomac. Il ne faut donc pas lire ou travailler du cerveau lorsqu'on mange; il ne faut pas reprendredes occupations sédentaires ou intellectuelles aussitôt après manger ; il ne faut pas manger seul ou—sans parler : solitude des repas pour les célibataires libres, et le silence du réfectoire pour les—célibataires cloîtrés sont contraires à l'hygiène.Cette triste contrainte de manger sans parler estaussi un des inconvénients de l'internat des élèvesdans les collèges. A table, il faut toujours un peude gaîté. Comment voulez-vous que l'on puissemanger avec plaisir et digérer avec profil, si l'onest condamné à regarder l'assiette, ou k entendremarmoter je ne sais quoi k un coin de la table !...Le diner doit être aussi une fête de famille, unesource de joie et%p sociabilité, une école d'hygièneet d'éducation, un gymnase de bonne humeur.Il faut avouer que si les cuisines sont, ainsi quenous l'avons dit, des amphithéâtres,—nos tableset nos banquets ne sonl que des cimetières,—maisde beaux, de splendides, d'admirables, de séduisants cimetières artistiques, où les sarcophages, lesmausolées, les pyramides, les momies, les lombeselles auto-da-té, couchés sur un lit de neige, entourés de fleurs et de lumière, embellis d'or et deperles, embaumés d'arômes et de parfums, exha-


—-r. 141 -—ni—lants des vapeurs suaves, attirent les yeux, enivrentl'odorat, surexcitent le goût,la joie.Une table bien mise et bien garnie sert k monréveillent l'appétit ettrer que notre vie n'est pas toujours un pèlerinagek travers une vallée de larmes, mais que l'on ytrouve souvent, comme dans la Terre promise, dulait, du miel, des moulons gras et presque les fameuses grappes de raisin, que deux hommes, ditMoïse, pouvaient k peine porter k l'aide d'une barre.(Nomb. XIII, 24-25).Nos banquets peuvent servir jusqu'à un certain point, d'exposition internationale de la civilisation car, —quel est, en définitive, le but de lacivilisation et du progrès, sinon celui de l'hygiène :vivre longtemps et vivre en bonne santé,bien et gaiement ?...Nous ne voyons certainement plus des festinstels que celui de Balihasar, qui lui coûta, a ditVico, le royaume ; des repas tels que ceuxd'Apicius qui dépensait plusieurs milliers de francs-dans un seul poisson ; mais nods avons encoredes spécimens de dîners maigres qui valent la peined'être connus.Vous devez savoir que la haute hiérarchie catholique, pour s'abstenir de la chair, se réunit d'habitude autour d'une table, un vendredi, jour maigreet de jeune.Or, voilà le menu du dîner que je veux vousciter :POTAGES1 Soupe aux huîtres.2 Soupe aux herbes.


—m —PREMIER SERVICE3 Saumon au naturel.4 Saumon en matelote marinière.5 Saumon à l'amiral.6 Saumon mariné à la Saxonne.7 Saumon à la crème avec croûtes.8 Saumon à l'écaillière.9 Sole aux croûtes.10 Sole à l'italienne.11 Sole frite.12 Sole à la Colbert.13 Filets de sole à la matelote.14 Filets de sole aux croûtes.15 Filets de sole à la maître d'hôtel.16 Filets de sole à la hollandaise.17 Filets de sole aux huîtres.18 Merlan frit aux croûtes.19 Merlan grillé à la maître d'hôtel.20 Filets de merlan frits.21 Merluche de la baie de Dublin k la bonnefemme.22 Merluche de la baie de Dublin rôti.23 Merluche à fc maître d'hôtel.24 Filets de menuche à la Saint-Paul.25 Côtelettes de homards.26 Tourte d'huîtres.27 Huîtres aux croûtes.HORS-DOEUVRE28 Petits pâtés d'huîtres.29 Petits pâtés d'écrevisses.30 Croquettes de homard.


-143—DEUXIÈME SERVICE31 Homards garnis,32 Petites croûtes aux huîtres,53 Salade de homard,34 Crème à la vanille,35 Charlottes russes,36 Mille feuilles,37 Tarte à la parisienne,38 Jambon à surprise,39 Petits gâteaux auxframboises,40 Pelils gâteaux aux pommes,41 Poudding chaud,42 Poudding glacéḊESSERTFruits.—Biscuits.—Gâteaux.—Dragées,etc.Ce menu est littéralement traduit du journal irlandais, The catholic Layman, du 19 octobre 1858,qui donnait ainsi une relation exacte du dîner maigre que la fidèle population de Dundalk avait offert le vendredi, 3 septembre 1858, à S. E. le cardinal Wiseman, archevêque de Westminster etvicaire du pape en Angleterre.Vous voyez que si la chair était réellement absente de ce dîner maigre, la pêche avait été mira—culeuse, et le grand chef Poison n'eut k Dundalk aucun motif de se suicider, comme le fit kChantilly, k cause de la marée manquante, le célèbre et malheureux Vattel.


1VIIHYGIÈNE DU COEUR.Mesdames et Messieurs,Ceux d'entre vô*us qui ont élé présents kpremiers entretiens doivent se souvenir qu'en clasnossant les forces organiques de l'individu, nous avonsplacé la circulation tout de suite après la digestion.Vous comprenez donc, qu'après avoir parlé de cesac, ou estomac,qui se dilate ou se rétrécit selonla quantité de matières alimentaires qu'ony introduit,comme une cornemuse se gonfle plus oumoins, selon la quantité d'air que l'on y souffle, ilnous faut examiner maintenant ce tyran des muscles,ce véritable buveur de sang, ce petit coffre de toulesnos affections, qui se soustrait,autant qu'il le peut,au suffrage universel de notre organisme, c'est-kdirekla volonté.—Après l'hygiène de l'estomac hygiène ducœur.L'alimentation prépare le chyle et par le chylela lymphe. Avec laîlymphe, il s'agit de faire entrertous les éléments nutritifs dans le torrent sanguin,afin que celui-ci aille les porter k chaque partie denotre mécanisme vital.Le sangest le dernier produit de cent fonctionset de cent actes de la vie,—desorte que sonhygiène dépend de l'alimentation, de la respiration,de l'innervation, de l'exercice, etc. Chaque organequi fonctionne régulièrement verse dans la massedu sangsa goulle de santé, chaque cellule malade yintroduit son atome morbide. Le sang hygiénique


—14&-est ce viscère liquide, rouge et chaud qui transportedans tous les éléments anatomiques de notre individu la vie et la chaleur.Différent dans chaque partie du corps, le sang semêle et se confond dans les cavités du cœur en unliquide homogène, qui, en peu de minutes va apporter partout les principes organiques du bien etdu mal, de la santé et de la maladie, de la force etde la faiblesse, en centralisant dans notre vie individuelle les mille fonctions vitales de nos viscèreset de nos tissus.Le cœur, placé au centre de cet immense réseauvasculaire qui est chargé d'arroser de sangel d'inonder de vie et de chaleur la moindre partie de—notre corps, le cœur fait l'office d'une pompe etressent les plus petites différences de pression oude composition de sang ; il ralentit ou accélère,—d'après elles ses mouvements. La colère etl'ivresse accélèrent les battements du cœur ; ladouleur, la bile, la digitale les ralentissent.Chez un homme qui possède 8 kilog et demi,soit 8 litres environ de sang ( 1 litre de sang pèseen moyenne 1 ,055grammes), et dont le cœur bat70 fois par minute, l'organisme est parcouru parla circulation sanguine 28 fois pendant une heureet 672 pendant un jour.La circulation complète de 10 kilog. de sangestachevée en 6 minutes 24 secondes par 480 pulsations, de sorte que dans une heure la masse sanguine fait 9 tours 3/8.Ainsi que je viens de le dire, le cœur n'est passous l'influence directe de la volonté, mais chacunsait que les mouvements du cœur sont singulièrement affectés par toutes les formes d'émotions.Nous avons déjà cité la colère et la douleur. Sous19


on—146 —ces influences, l'on voit tous les jours des hommeset des femmes s'évanouir* et il en est parfois quisont foudroyés par une joie ou par une douleur violente et soudaine. Quand ces morts arrivent* ellessont dues à ce que la perturbation du cerveau produit un phénomène qui arrête le cœur aussi abso^lument que l'on arrête la roue d'une montre avecun ressort. D'autres émotions el d'antres effortsvolontaires produisent, par contre, cette rapiditéet cette force de battements irréguliers,connues sous le nom vulgaire de palpitations.Lorsqu'une émotion agréable ou pénible s'em—pare de l'esprit, ressent une bouffée de chaqui sontleur, la peau rougit et selon l'intensité de l'émotion,les changements se produisent aux joues seulement,ou se propagent jusqu'à la racine des cheveux —et même sur tout le corps.D'autre part, chezbeaucoup de personnes, uneterreur vive produit un refroidissement de la surface du corps* on éprouve ce que l'on appelle lachair de poule, tandis que la face pâlit et se contracte et que les mouvements comme la parole sontpresque interdits.Dans le premier cas, la peau rougit et s'échauffe,parce que ses vais^aux sanguins renferment uneplus grande quantitlde sang* à cause d'une actionnerveuse qui suspend la contraction des parois artérielles; dans le second cas, au contraire, l'apportdu sang à la peau est très diminué, à cause d^mestimulation vive des nerfs des petites artères, sousl'influence de laquelle elles se resserrent et interceptent plus ou moins la circulation.Les nerfs qui règlent les mouvements des vaisseaux sanguins et par conséquent la circulation, ontété appelés vaso-moteurs, et l'action de leur in-


-147-flueflee sur te système vasculajre est immense-—Les coups d'air froid auxquels J'on peut s'exposeragissent sur les nerfs vaso-moteurs des vaisseauxcapillaires de la peau : ceux-ci se contractent et lesang retlue à l'intérieur, en engorgeant et en enflammant des organes très importants à la vie, telsque les poumons ou le foie. -*-r Les alcooliquesagissent d'une manière contraire, spécialement surles nerfs vaso-moteurs de la face : sous leur influence, les vaisseaux capillaires se relâchent, s'engorgent de sangstagnant qui donne lieu à cesfigures bourgeonnées que l'on appelle figures d'ivrognes.Entrons maintenantdans le domaine d'autresobservations, encore plus simples et plus pratiquesou hygiéniques.La simple position du corps change énormémentla fréquence des battements du cœur. Elle est aumaximum, lorsqu'on se tieut debout, moyenne sil'on est assis, et au minimum quand on se couche.Le motif en est facile à comprendre : dans la position verticale, une grande partie du liquide en circulation doit être poussée de bas en haut, tandis quedans la position horizontale, le cercle s'accomplitsur un plan à peu près plat.Cette différence peut devenir, en certaines circonstances données, très importante. Le pouls d'unpeintre en bâtiments, dit Mantegazza, qui mourutpoitrinaire à 20 ans, battait 120 fois lorsque cepauvre jeune homme était couché et 200 fois lorsqu'il était simplement assis. Vous voyez que lac'est-àdireau 2/5. Mais en prenant pour exemple undifférence montait jusqu'à 80 pulsations,homme adulte qui présente la moyenne de 76 pulsations par minute restant debout, et 62 lorsqu'il


—148-Laest le cœur de cet homme debout battra :couché,—840 fois de plus par heure,—20.160 par jour,—604.800 par mois,—7.000.000 par an.Vous voyez que, même en fait de différence entrele nombre des pulsations d'un homme qui est debout et celles d'un homme qui est couché, on arrivevite aux milliards !... En effet, dans de graves syn^copes, c'est-à-dire en cas d'évanouissements profonds, il a été quelquefois funeste de soulever lecorps tout d'un coup. Si le cœur est petit ou faible,il suffit de cette imprudence pour déterminer lamort.Après une grande fatigue ou une forte hémorrhagie, il est indispensable de se mettre en repos,et pour se reposer, il faut prendre une positionparfaitement horizontale, même sans placer descoussins sous la tête.En été et dans les pays chauds, il est plus nécessaire de faire reposer le cœur que dans les pays—froids et en hiver. sieste, l'heure de reposaprès le déjeuner, pendant le moment d'ordinairele plus chaud de la fournée, n'est donc pas inutile enAlgérie ; au conlraiÉE, c'est un besoin hygiénique,surtout pendant la raison des chaleurs.Une alimentationtrop abondante ou trop tonique, les boissons alcooliques, les aliments chauds,les bains à une température élevée, l'air raréfié deshautes régions, les veilles, tous les exercices exagérés et presques toutes les passions excitent le cœur.—Il est, par contre, déprimé el affaibli par un régime insuffisant ou simplement végétal, par le sommeil prolongé, par la vie sédentaire, par les bainsfroids avant que la réaction s'établisse, par l'inertie


—149—et par les affections morales profondes et continues.Les changements brusques de climat ou de température, toutes les causes de rhumatismes, la musique par des instruments à air, la déclamation,l'art dramatique et toutes les fortes passions quitourmentent notre vie, depuis la politique jusqu'àl'amour, peuvent prédisposer à de graves maladiesorganiques et incurables du cœur. D'autres —causes de ces mêmes maladies peuvent être les compressions exercées sur différentes parties du corpspar les souliers, les jarretières, les ceintures, lescols, les cravates et les corsets .Les veilles, l'exercice exagéré du cerveau, l'abusdu café et la prédominence de ce qu'on appelle vulgairement maladie du cœur produisent quelquefoisdes palpitations. Si elles ne sont pas liées à quelques vices organiques, il estbeaucoupplus facile deles guérir avec un peu de bon sens ou de modération, qu'avec toutes les préparations pharmaceutiques imaginables de la digitale.D'ordinaire on prend la circulation périférique denotre corps comme expression d'une bonne ou d'unemauvaise santé. On a raison. Quand nous disonsqu'une personne a bonne mine, nous tenonscompte de deux éléments capitaux, de deux facteursprincipaux de la vie : nous affirmons qu'elle a unrichesang de globules rouges et qu'elle jouit d'uneinnervation harmonique,puissante qui le distribue—hygiéniquement à toule la surface du corps.Cette heureuse circulation périférique est facilemententretenue ou régularisée par un exercice modéré,par une promenade qui augmente toujours la tem-(téraiure des extrémités et de la peau, en diminuanta température intérieure du corps, ainsi que le


—180-démontre l'abaissement de la température de Ulangue.Mais être rouge, avoir la figure ronge, ne veutpas toujours dire que l'on a beaucoup de sang ; demême lorsque l'on a beaucoup de sang, il n'est pastoujours nécessaire de se faire saigner.—La pléthore vasculaire des jeunes gens dans la saison duprintemps n'est qu'une expression de vie saine elpuissante, une circulation de cette vie qui, à pareille saison, pénètre la nature tout entière, unréveil, une sève périodique de vitalité et de force.Ces rougeurs et ces pléthores on les guérit bienmieux et avec moins de danger par le régime etpar l'exercice que par la lancette et les sangsues.Une soustraction inutile de sangpeut entraînerquelquefois une habitude nuisible. Si vous aveztrop de sang, mangez moins, mangez peu de viandeet beaucoup de légumes trais, buvez moins de vin,ne dormez pas trop, faites plus d'exercice.De plus, comme il est inutile de se faire saigner,il est aussi superflu au moins de se purger ou depurifier le sang. Bouchardat, l'hygiéniste — et leet jethérapeutiste le plus autorisé de Paris, a dit,partage son opinion, qu'il regardait la salsepareillecomme une matjfcre inerte. Economisez donc la dépense de tous ces sirops dits dépuratifs, qui sontanalogues à l'Elixir d'amour du docteur Dulcamaraet ne purifient que la bourse de l'acheteur auprofit de celle des iguérisseurs et des charlatans. Unbon dépuratif vous le trouverez tout au plus dansun verre de petit lait pris à jeun le malin, avec addition, en certains «as, de jus d'herbes anti-scorbutiques et cela pendant une quinzaine de joursau commencement du printemps. Puis vous l'aurezencore davantage dans un régime léger, dans des


—1*1—promenades de deux à trois heures par jour, dansune transpiration sagement provoquée el dans lecalme du cœur.Donc* je vous disais l'autre soir, que pour pâliril ne fallait pas boire du vinaigre ; je vous dis ce soirqu'il ne faut presque jamais se faire saigner, sepurger et dépurer le sang.Car, si vous entrez dans ce malheureux système,il pourrait très facilement vous arriver d'aboutir àla façon de raisonner du malade imaginaire de Mo—lière. Le sieur Argan, dans un soliloqueque je ne veux pas vous répéter d'un bout à l'autre, parce qu'il sent trop la note d'apothicaire qu'il—avait devant lui, s'arrête à la conclusion suivante ; « Donc, de ce mois, j'ai pris une, deux, trois,quatre, cinq, six sept et huit médecines ; et un,deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf,dix, onze et douze lavements ; et l'autre mois il yavait douze médecines et vingt lavemenls. Je nem'étonne pas si je ne me porte pas si bien ce moiscique l'autre. Je le dirai à monsieurPurgon*afin qu'il mette ordre à cela. »GYMNASTIQUEle docteurLa respiration est la fonction individuelle quenous avons placée à la suite de la circulation . Ceserait donc le moment de taire l'hygiène des pou*-mons ; mais l'hygiène des fonctions respiratoiresest si vaste et si imporlante, que je ne juge pas àpropos ou d'en parler en galopant, ou de l'interrompre k demi pour la continuer un autre soir.Donc l'hygiène de la respiration et de la paroleformera le sujet de notre conversation prochaine.En attendant, nous devons nous souvenir que


—15*—l'exercice musculaire, c'est-à-dire le développementde la force vitale que nous plaçâmes à côté de laforce nutritive, a une grande action, une actionpresque égale sur la circulation et sur la respiration.Nous allons,parconséquent,consacrer le restantde notre heure à la gymastique.a L'antiquité, a écrit M. Levy, a divinisé laforce corporelle sous le nom d'Hercule, et elle ainventé la gymnastique, moins dans un intérêt d'hygiène, que pour former des athlètes et des soldats.La société moderne aspire à se gouverner par l'intelligence ; dans les luttes qu'elles ne peut éviter,elle compte non sur la force des individus, mais surles effets d'une disposition savante des masses ; etelle fait ainsi de la guerre un hommage à l'intelligence. C'est ce qui explique le luxe des institutionsgymniques chez les Anciens et leur absence chezles modernes.... »L'hygiéniste classique a en partie raison ; lagymnastique des anciens s'occupait particulièrementde former des athlètes et des soldats ; leur Dieu,leur grand Dieu était la force. Jupiter, le père desDieux, serrait dans sa main droite la foudre, lephénomène le plus terrible de la force physique.Les poètesdeÉRome, Stace, Lucain, Pétrone,avaient osé dire que la peur avait été la mère desDieux. Les anciens et les modernes ont brodétoute espèce de fables sur les Amazones, femmesguerrières qui avaient fait des expédilions en AsieMineure contre les Phrygiens, Bellérophon et Her—cule lui-même. LaBible fait de Jéhova le dieude la guerre et de l'extermination ;une parodie d'Hercule,son héros eslun Samson qui commencepar tuer unlion, puis 30 hommes, enfin millePhilistins avec une mâchoire d'âne. (Juge, xvi.)


deje-153 —Les modernes continuent toujours à parler du—dieu des gros bataillons àinvoquer, à complimenter le dieu des armées.Jusqu'ici Levy a parfaitement raison ;mais, lesanciens avaient aussi une gymnastique qui servaità élever des citoyens, à faire l'éducation du corps.—« A Sparte, cite Cantu, un historien qui a—été traduit dans toutes les langues l'éducationdes jeunes filles était publique. Avec les arts de lamusique, elles apprenaient les exercices corporels .Dans les gymnases, elles s'exerçaient avec les garçons à la course, à laau jet deslutte, au disque,javelots; elles apprenaient à chanter et à danseravec grâce ; leur vie se passait en public et en commun avec les hommes. Il en résulta que les femmesSpartiates étaient plus fortes et plus jolies que lesautres femmes de la Grèce ; elles avaient un espritplus élevé,plus de vertus civiques et plus d'aptitudeà la gestion de la chose publique. »Si telle était l'influence de l'éducation physiquesur les femmes de Sparte, il n'ya aucune nécessitéde dire quelle devait être son action sur les hommes.Les Grecs donnèrent la plus grande importanceaux gymnases. Il — yavait h palestre, le stade etl'éphébée, pièces qui servaient, la palestresurtout,aux exercices du saut, de là lutte, du pugilat, dela course, du disque, du javelot, etc.; il yavait lesphéristère pour la danse ; la columbetras pour lanatation ; l'apodiptère pour le vestiaire ; l'olèoptèrepour les frictions huileuses et le conystère pourl'application de poudres spéciales. Il yavait encoredes chambres, des salles, des portiques et des jar—dins sorte que les gymnases devinrent aussides lieux d'exercices intellectuels. Les noms de20


—154—Lycée et d'Académie sont dérivés de deux gymnasesd'Athènes. Aujourd'hui, en Allemagne et en Italie,on appelle gymnases des écoles d'instruction secondaire.Des médecins spécialistes, appelés gymnasiarquesavaient la direction de ces établissements.Pythagore lui-même présidait à un gymnase d'athlètes.« Socrate veut que le citoyen de sa républiquevaque à toutes les exigences palestriques jusqu'àl'âge de 35 ans; puis il en diminua progressivement la quantité jusqu'à 50 ans.... Cependant, iln'exclut pas tout à fait les exercices dans l'âgeavancé, il les réclame même, il en donne lui aussil'exemple comme nous le verrons plus loin, maischoisis et proportionnés aux forces, suffisants enfinpour maintenir le corps dans l'équilibre nécessaireà la santé et à la meilleure disposition d'esprit. »(Bouchardat.)Hérodicus, d'après Platou, aurait élé l'inventeurde la gymnastique médicale. A l'aide de l'exercicemusculaire, il prétendait guérir toutes les maladies;il conservait effectivement tant de pauvres êtresfaibles el chétifs, qu'on l'accusait de maintenir envietrop d'individus inutiles à eux-mêmes et à lapatrie.^Asclépiade de Bilhynie, mort 96 ans avant notreère, réduisit réellement à un commencement desystème rationnel la gymnique musculaire et il enobtint une grande réputation à Athènes, à Alexandrie et à Rome.Les Romains ne pouvaient pas se dispenser d'imiter les Grecs ; leurs fêtes agraires, leurs ludimagni, n'étaient que des solennités gymniques ;dans chaque Iherme ils avaient ungymnase.


—158-IlToutes ces institutions gymnasliques, bonnes oumauvaises, sombrèrent dans le bouleversement del'invasion. Le moyen-âge mit à la mode une dévo•tion énervante et la démonomanie.—est pourtant curieux de remarquer que chez deux peuplesbien divers, les Espagnols et les Anglais, survécurent et survivent deux écoles gymnasliques qui serapportent toutes les deux aux gymnases des athlètes. Vous comprenez que nous voulons parler desspectacles sauvages des lorèadores et des luttesaffreuses des boxeurs.—Mais au moins l'hygiène scientifique, ditBouchardat, a commencé à s'emparer des méthodessi curieuses de l'entraînement, qui consistent àdresser les boxeurs anglais au —pugilat, pour guérir plusieurs maladies, consolider et améliorer lasanté. Quant aux lorèadores, on peut déclarer queleur suppression sera le signe précurseur de larégénération ibérique.Dans ces dernières années cependant, on a songéà réparer le longoubli et la lacune de l'hygiènegymnique dans l'éducation publique ou privée.On peut citer, à ce propos, les gymnases de DeRon à Paris, de Brantingà Slokholm, d'Abrahamsonk Copenhague, de Georgj à Saint-Pétersbourg,—ceux de Berlin en Prusse et d'Aarau en Suisse.Dans la république helvélienuc, les gymnases et lestirs cantonaux constituent les établissements lesplus populaires du pays; c'est là que les Suissess'élèvent a ia santé et k l'indépendance, c'est là aussique la démocratie solennise ses belles fêtes fédérales.Un officier général a tout récemment publié :« A l'instruction intellectuelle et morale, on a jointen Allemagne, la pratique de ce qui peut développer


—156—les forces du corps. » Mais il ajoute :« J'ai visitéplusieurs gymnases, je les ai trouvés parfaitementinstallés, tout indiquait, dans les exercices, unetendance absolue à façonner des soldats. . . Rienn'est accordé à la grâce, à cette souplesse qui estplus du domaine de la femme que de celui del'homme. » (Wimpffen.)Franchement, si nous n'approuvons pas la gymnastique espagnole ou —anglaise, la gymnastiqueallemande ne nous satisfait pas non plus complètement.Notre but n'est pas celui de former simplementdes soldais et de tout refuser à la grâce et à lasouplesse. Notre aspiration n'est pas la guerre,—notre idéal n'est pas la force.— La société moderneainsi que nous l'avons dit avec M. Levy, tend à segouverner par l'intelligence :force et la souplesse aussi pour n'être pas dominésnous cherchons lapar des gymnastes qui savent marcher au pas, enavant, en retraite,se former sur un ou plusieursrangs qui s'ouvrent et se resserrent avec précision.Nous cherchons la force pour avoir la santé et,comme nous le déclarions autrefois, autant la santédu corps que la santé de l'esprit.Nous supposonsjdonc que les meilleurs gymnasesmodernes, les gyrrmases dont nous nous occuponsau point de vue de l'hygiène, doivent être ceuxque l'on a adoptés en Amérique, où l'on se soucieplus qu'ailleurs de former des citoyens instruits etvigoureux.Dans un excellent rapport sur l'instruction publique aux Etats-Unis, Hippeau nous répète les paroles suivantes d'un des médecins du collège deDarmoulh : « Depuis l'ouverture du gymnase, j'aisaisi toutes les occasions d'assisler aux exercices.


..es faitsenL'autocrate—157 —que j'ai constatés ont répondu entièrenentà mon attente. Il n'y a pas eu de cas. de maadiesgraves dans le collège,et il ya eu moins d'inlispositionslégères que je n'en avais vu auparavanttendant le même espace de temps. La dyspepsie,'inappétence, la débilité et les affections de ce;enre qui accompagnent la vie sédentaire et qui,ei, avaient été fréquentes, principalement a l'épo-[uedu changement de saison entre l'hiver et leirintemps, ont disparu. Une amélioration manifestepu être observée dans l'état sanitaire de la maion.L'augmentation de la force musculaire et de'agilité des jeunes gens a frappé les esprits les plusnattenlifs. Je suis convaincu que ces exercices onl-;randement contribué k la santé générale des éluliants. »Je vous demande pardon de m'arrêter un peuroppeut-être k ces considérations générales sur laymnastique : cela ne sera pas tout k fait inutile.lotre conseil municipal a déjà pris deux délibéraionspour doter la ville d'Alger d'un gymnase. Nouslui démontrant qu'à l'hygiène deesprit par l'instruction laïque il joindra l'hygièneie pouvons donc que l'encourager dans celte excelîtiteidée—u corps par le gymnase..Passons maintenant k laymnastique.Notre charpente, ou notre squelettepratique de l'hygièneest revêtu,elon Weber, de plus de 500 muscles, exécuteursbéissanls de notre volonté, instruments fidèles de—os besoins qui siège sous la voûteu crâne n'a qu'à vouloir ; aussitôt que le cerveau ardonné, les nerfs, plus rapides que les fils éleclriues,ont transmis l'ordre aux muscles, qui l'exéutenlel se meuvent plus promptement que l'éclair.


—158—Le mouvement est synonyme de vie, et la mortest signalée par l'immobilité de ce prince des musclesdont nous avons parlé — lecœur.« La gola, il sonno e l'oziose piume » — lagourmandise, le sommeil et la paresse, dil le chansonnier italien, nous ont donné la mauvaise habitude de—l'inertie Nous sommes devenus un peutrop idolâtres de la pensée et nous ne faisons pas assez—d'exercice musculaire. Notre siècle s'occupe exces—sivementd'ysubstituer la machine. Mais, ni lacivilisation,ni la mécanique ne doivent condamnerles muscles k l'inaction. Le rêve voluptueux d'unrepos contemplatif continu est un rêve impossible,immoral, contraire k la société, à la santé, à la longévité. La prière efficace de l'homme est l'action.« Par un exercice actif, dit Bouchardat, le poulset la respiration sont l'on et l'autre accélérés ; ondoit penser qu'alors une plus grande quantité d'oxygène est consommée et une plus grande quantitéde chaleur produite ; la circulation du sang se laitavec plus de rapidité, et il se répand en plus grandeabondance dans les extrémités ; l'excès de chaleurs'y trouve ainsi entraîné et dépensé.... Ajoutonsà cela que des découvertes du plus grand intérêt, dela plus haute importance, nous ont appris que lachaleur pouvait se transformer en force. Bien deslaits inexpliqués reçoivent ainsi une interprétationfacile.... Des observations de la plus grande valeuront aussi démontré la puissance de la gymnastiquepour prévenir les affeclions les plus redoutables.C'est surtout dans les cas d'imminence scrofulcuse,tuberculeuse ou cancéreuse, que la gymnastiquede chaque jour est indispensable.. . Il a été prouvéque la gymnastique formait la base du traitementle plus efficace contre le diabète, l'albuminurie, la


et—159 ——chorée le préservatif le plus puissant del'inappétence, de la constipation, de l'obésité, del'anémie, des névroses, de la goutte et des congestions sanguines...La gymnastique a, en outre, l'avantage d'éloignerles jeunes gens du danger des passions que favorisent les habitudes sédentaires.L'influence de la gymnastique sur la santé, ditMantegazza, est si importante que si je devais renfermer toute l'hygiène dans un seul précepte, jedirais : Faites beaucoup d'exercice au grand air.La gymnastique est donc un art, une éducationmusculaire,qui ne doit jamais manquer dans unbon système d'instruction,surtout pour les classesélevées de la société, où l'on n'a pas besoin de gagner les moyens d'existence à la sueur de sonfront.Les règles principales en sont les suivantes :La gymnastique doit être proportionnée aux for—ces de l'individu, exercer sans fatiguer. L'exercice doit toujours être en rapport avec la saison,l'âge, le sexe, la constitution des personnes.Une fois que l'on a commencé les exercices, ilfaut les continuer avec persévérance.Si en commençant l'on éprouve des palpitationsou des suffocations, il faut se reposer jusqu'à ce queces symptômes cessent.Pendant le repos on doit faire des inspirations etdes expirations lentes et profondes.A la fatigue il faut faire succéder le repos, et lafatigue doit disparaître sans laisser de douleurs dansles membres.Il faut toujours se garder des courants d'air froidlorsque l'on transpire en s'exerçant ou que l'on serepose.


d'où—160—Les habillements ne doiventjamais serrer le corps,surtout le cou, la poitrine, le ventre.Tant que la saison le permet, il faut choisir deslieux ouverts, dans un air sec et pur. Le bord de lamer, les endroits élevés, éloignés de toute émanation miasmatique seront les lieux préférés.En hiver, on s'exercera au milieu de la journée ;en été, dans les heures qui suivent le lever, on quiprécèdent le coucher du soleil : toujours avant demanger.Schreber a diclé ce que l'on appelle la gymnastique de chambre qui n'exige ni appareils, ni locaux spéciaux ; Ling a réglé la gymnastique passive,qui consiste en frictions et en massage ; Fleury y aajouté l'hydrothérapie, et il en a retiré des avantagescontre les ankyloses, les contractures, les rhumatismes chroniques et quelques formes d'atrophie etde paralysie musculaire. Dans la séance prochainenous nous occuperons de la gymnastique de la respiration.En attendant, nous terminerons notre entrelienpar une revue rapide des exercices gymniques leplus en usage, en vous mettant d'abord en gardecontre les excès.Les efforts oA les exercices violents et continusdes muscles consomment une quantité de force etde matière vitale plus grande que celle que l'on pro—duit, une faiblesse, un amaigrissement etdes lièvres lentes que l'on ne peut pas guérir. Lescadavres des ouvriers qui meurent de fatigue etd'épuisement tombent tout de suiteen putréfaction,comme si la mort avait déjà commencé dans lesdernières heures de la vie.—Les efforjs instantanés peuvent occasionner divers accidents graves,tels que la rupture des muscles, des tendons, des


Le—161——os, du cœur et d'autres viscères ; des luxations,des congestions, des suffocations et des hernies.La station debout longtemps continuée est uneposition fatigante qui donne promptement lieu àdes douleurs lombaires, par suite de la contractionErolongée des muscles de cetle région et des memresinférieurs. La station assise,le supplice desécoliers et des bureaucrates, est moins fatigante etl'on peut en changer la position de temps en temps;elle engendre tout de même des céphalalgies, descongestions sanguines, la gravelle et la constipa—tion. mélier elle bureau déforment beaucoupde jeunes personnes surtout k l'âge de la puberté.« La marche, disait Rousseau, a quelque choseidées ; je ne puis presquequi anime et avive mespenser quand je resle en place, il faut que mon corpsmettre mon esprit. » — Dix-soit en branle pour yhuit siècles avant Rousseau, Cicéron avait déjà dit :Tout ce que je conçois et que je pense a lieu pendant que je marche.La promenade est un exercice général el modéréde tout le système musculaire, par conséquent l'undes plus hygiéniques. Par lui toutes les fonctionsaugmentent d'énergie à cause des secousses et dubalancement imprimé aux organes, l'appétit devientvif et le travail d'assimilation plus complet. Tousceux qui vivent sous le soleil, et surtout dans unpays aussi favorisé par le soleil que l'Algérie, devraient faire une promenade d'une heure au moinspar jour au grand air, à la campagne, au bord dela mer, ou dans les endroits boisés. Les excursionsbotaniques et géologiques valent encore mieux queles promenades méthodiques et géométriques toujours faites' aux mêmes endroits et à la même heure.La course ne convient qu'aux enfants et aux ado-21


tesceftts elle fortifie la constitution en déyfirloppant Je système musculaire ; encore faut-il teurrecommander de s'y livrer fiyec retenue. Dans uneatmosphère maritime, cet exercice modéré et tmquemû^entinterrompu, ranime fô «circulation, fortifie, et peut convenir aux sujets faibles, ou lympliat|ques.En général la course excite la circulation—et }a respiration, jusqu'à produire des congestions(Je§ poumons, du cœur, du foie, de la rate ou ducerveau.Le saut est un exercice violent et dangereux quidemande un effort de presque tous les muscles.Lorsque l'on touche terre, les viscères, spécialement le cerveau et Je foie, éprouvent une secoussequ'il faut adpucir en tombant doucement sur la poinrte des pieds. Une chute sur les talons peut produireune mort instantanée ou de graves accidents, Lesefforts nécessaires pour sauter suspendent la respiration ; apssi les personnes atteintes de maladies despoumons ou du cœur devront-elles éviter cet exercice fatigant.La corde offre une sorte de saut modéré qui peutponvenjr aux enfants faibles et languissants, voirmême à la généralité de nosenfants; mais à la condition qu'ils en agent modérément, qu'ils évitent{'exposition aux courants d'air et les heures tropchapes de la journée, dans nn pays surtout commele nôtre, car l'impulsion que le jeu de la corde imprime à (a circulation est très-énergique.« L'escrime est, dit Fleury, un excellent exercice qui met en jeu tout le système musculaire etdéveloppe spécialement la poitrine, de sorte qu'ildonne aux mouvements énergie, légèreté, rapidité,sûreté; an maintien, noblesse et élégance; à l'œilaç^té et promptitude ; i\ rend le tact- plus délicat ;


-163-■il excite le cerveau aux déterminations promptes etdécidées ; il initie à' une juste mesure de la forcé,—de l'habileté et du courage. Pour être plussalutaire, cet exercice doit avoir lieu indifféremment avec la main droite ou la main gauche. Hconvientbeaucoupaux jeunes gens débiles et auxhommes de lettres, dont les travaux tendent k augmenter la susceptibilité nerveuse.Le billard est un jeu très utile aux personnesâgées,par les mouvements variés qu'il exige. On afait le calcul qu'en deux heures de jeu de billard,on se meut autant que si l'on parcourait la distanced'une lieue. L'octogénaire lord Palmerslon attribuait son agilité et sa vigueur k la partie de billardqu'il faisait tous les soirs après dîner.Mais si l'on veut que ce jeu soit hygiénique, ilfaut qu'il ait lieu dans des salles spacieuses et bienaérées, non dans l'atmosphère des cafés, empoisonnée par la fumée du tabac et la combustion du—gaz ; il faut jouer pour se reposer, ou pour digérer, non pour gagner de l'argentLa balle, les boules, les billes, la paume, lesvolants, les cerceaux, etc., sont tous des exercicesque l'on a tort peut-être de croire utiles aux entantsseulement. Martial déclarait qu'il convient de jouer—autant aux enfants qu'aux vieillards : Folle decetpueros ludere, folle senes ; Malebranehe, mêmevieux, jouait, folâtrait comme un enfant; Macehiavellis'amusait avec les paysans de San Casciano.La natation est une gymnastique à laquelle, enAlgérie, nous voir habituer de bonneheure, les enfants des deux sexes. Elle a pour effetd'exercer tous les muscles, d'agrandir la poitrineet de fortifier les organes. Le grand avantage queprésente la natation, c'est d'éviter les secousses et


—164 -les perles continuelles auxquelles la course, lessauts et d'autres exercices donnent lieu ; aussi soneffet est-il plus franchement tonique. L'excitationl'activité de la cirde tout le système locomoteur,culation capillaire, produisent une révulsion puissante et favorable aux congestions intérieures, uneaugmentation remarquable dans la respiration etdans la digestion. Les enfants qui nagent devraient,en outre, se rouler sur le sable chaud de la plage ;la peau s'habitue ainsi aux alternatives atmosphériques de froid et de chaleur. La natation enfin peutsouvent sauver d'un danger de mort soi-même oules autres. Lorsque les anciens Romains voulaientpeindre un ignorant, ils disaient : Il ne sait ni lire,ni nager.L'équitation est un exercice qui est malheureusement réservé aux riches. Quelques-uns l'ont placéparmi les exercices passifs. Il est évident que quandun cheval va au pas, sur un terrain uni, les mouvements qu'il communique sont insensibles ;nosmontures algériennes en fournissent de nombreuxexemples ;sans dossier.—on est k peu près comme sur un siègeL'équitationau pas est favorableaux personnes faibles et convalescentes ; le trot neconvient qu'aux patsonnes fortes ; le galopest uneallure douce et agrlable, mais il est au-dessus desforces des personnes dont la poitrine est délicate.—Cet exercice sert de stimulant k toutes les fonctions, il rend la composition du sangplus complète,il favorise la nulrition, et ne diminue pas, ainsique les Arabes le démontrent, l'activité des fonctions reproductives. Sydenham affirmait que si unmédecin possédait contre la phthisie un remède devaleur égale k l'équitation, il gagnerait facilementtout ce qu'il voudrait. L'équitation convient aux


—465 —Cetdames qui mangentbeaucoup, se lèvent tard etmarchent peu; elle ne convient jamais aux femmesenceintes.La voiture, la navigation et la balançoire sonten réalité des exercices presque passifs, des moyensd'aération plutôt que de gymnastique et nous n'encauserons pas ce soir.La chnsse, d'après Levy et Legrand de Saulle,présente de grands inconvénients. Fleuryen a revendiqué l'influence salutaire. Il est évident quequand on en abuse, la chasse peut devenir funeste,comme le peut devenir une simple et innocentepromenade, lorsqu'elle dépasse la juste mesure desforces de l'individu. Mais comme je chasse moimêmedepuis 40 ans sans en avoir jamais été malade, je ne veux pas vous en faire une défense quipourrait être suspecte de partialité. Je vous citeraiquelques appréciations d'un médecin militaire, quine chassait pas et qui a écrit l'hygiène de l'Algérie.j Lâchasse, dit Marit,est une distraction et unpuissant moyen de développement par l'activité quiesl communiquée k tous les sens, k tous les organes, surtout à ceux de la locomotion, en y comprenant les extrémités supérieures qui ne sont pasexercice rend leétrangères à son action. —chasseur adroit, actif et lui fait braver toutes lesintempéries; elle excite l'amour-propre et développe la finesse;celui qui chasse souvent devient ingénieux et l'habitude d'être seul le rend fier, indépendant, rude et un peu sans gêne. La variété desmouvements active les fonctions : l'appétit devientpressant, la digestion est facile, l'assimilation rapide et le sommeil réparateur. »A cela, je dois ajouter que la chasse ne convientpas aux personnes faibles ou atteinles de lésions


—inorganiques ;—mais spécialement à ceux qui ontdes habitudes sédentaires et sont vigoureux.La chasse à l'affût et la pêche à la ligne sont arejeter parmi les guet-apens qui deviennent souventfort peu hygiéniques.La danse enfin la danse est une invention du—diable, disent certaines personnes. Cependant: Pétrarque s'écrie qu'à la cour d'Avignon, on dansebeaucoup tropet que Belzébuth est le maître decérémonie du bal. Rostan aussi, un médecin quia écrit : « Onavaitbeaucoup d'.esprit et de talent,avouera que rien ne produit une impression plussingulière sur l'esprit que de voir deux êtres soidisantraisonnables, sauter l'un devant l'autre, sefaisant des gestes et des mines. S'il nous restequelque coulume qui atteste notre origine sauvagec'est bien certainement celle-là. »D'autres aussi ont trouvé qu'iln'y arien de plusridicule au monde, que de regarder danser, en sebouchant bien les oreilles pour ne pas entendre lamusique. En — outre, la danse peut être commela chasse un exercice réellement nuisible lorsqu'onen abuse; lorsque l'on serretrop la taille etqu'en laissant trop découverte une partie du thoraxon ne se protège nus assez contre les changementsde température, lorsqu'ons'entasse dans des apfiartementsétroits, mal aérés, excessivement échauléspar l'éclairage k gaz et remplis de poussière ;lorsque à la surexcitation que le plaisir, la lumière,ia musique et les conversations ne tardent pas à faire naître, onajoute la tempête tumultueuse despassions, qui tourmentent la vie des jeunes personnes. Dans ces conditions, la danse, la valse en particulier, toutes les danses qui lui ressemblent, affaiblissent la constitution, causent des vertiges,occa-


—1«7 -sionncnt des maladies de cœur ou de poumons, etpréparent pour les jeunes filles plusieurs maladiesqui deviendront mortelles, ou incurables, ou fortincommodes.Mais la danse en plein air, sur la verdure, dansdes jardins et même dans des appartements bienaménagés, la danse — modérée, alternée de repos,sans gêne d'habillements et sans tempêtes dans lecœur, convient à la santé des jeunes filles lymphatiques ; elle peut servir à développer convenablement les membres pelviens frappés de faiblesse, etpeut aussi servir à calmer chez les demoiselles, fortes et robustes, unecertaine exubérance de viesensible ou plastique qui les agite.Enfin, pour répondre à Rostan et à ceux quicrient que la danse est une invention diabolique,je vous répéterai ce qui a été raconté sur les habitudes de cet excellent homme de Socrate, que lesaristocrates d'Athènes, disait Serpaggi, condamnèrent à mort, croyant tuer en ce vieillard la véritéet la justice : « Convaincu, dit Athénée, de l'heureuse influence d'un exercice bien gradué, et persuadé qu'en tout il est une manière de faire leschoses qui, en les revêtant d'un caraclère de dignité, les sanctionne, Sociale ne craignit pas, dansun but hygiénique, d'apprendre la danse dans unâgé avancé. »


.—L'airl'air—16*—plusVIIIHYGIÈNE DES POUMONS ET DE LA VOIXMesdames et Messieurs,Des ailes par-dessus la vie !Des ailes par delà la mort !Voilà le rêve de l'humanité.De l'air, beaucoup d'air, du bon air, du grandair — c'est le cri ou le besoin de tout ce qui vit,—depuis la violette jusqu'au palmier, depuis le versjusqu'à l'aigle, depuis la mouche jusqu'à l'homme.Si l'eau de la mer n'était pas aérée les poissonsy mourraient.« Il fait bon respirerl'air, chantent les montagnards d'Ecosse, il fait bon respirer l'air libre que—rien n'arrête dans sa course ; l'air frais qui enveloppe le cœur de l'homme, l'anime et en chassela crainte —; fort qui frappe le visage et y faitcourir le sang. Du bon air et du bon lait nous rendent plus forts que les hommes pâles des villes. »Qu'est-ce que c'est donc l'air?...atmosphérique est un fluide élastique,diaphane, pesant^ui enveloppe le globe terrestre,le revêt d'une couche de 15 a 16 lieues d'épaisseur—et constitue ce que. nous appelons le Ciel.Réputé simple dans l'antiquité et le moyen âge—l'air a été reconnu par Lavoisier, de 1772-89,comme un corps composé. Cette gloire scientifique appartient à la France, et depuis cette époque1 on sait que l'air est une combinaison de 21 parties ou volumes de gaz oxygène et de 79 parties ou—volumes de gaz azote quelques fractions de


-—169-gaz acide carbonique, de vapeurs aqueuses et de gazozone.Avant la découverte de Lavoisier,on croyait quel'air entrait simplement dans les poumons pour rafraîchir la chaleur du sang ; après, on s'aperçut eton constata que l'air qui pénètre dans les poumonsabandonne au sangune partie de son oxygène etque le sang abandonne à l'air expiré une certainequantité d'acide carbonique.Cette absorption de l'oxygène par le sanga poureffet de transformer le sang veineux ou noir, impropre k la vie, ensang artériel ou rouge et nutritif;elle est tellement nécessaire, qu'un air privéd'oxygène devient rapidement mortel pour tous les êtres-qui le respirent.Donc, pour être vital ou vivifiant, l'air doit contenir de l'oxygène et en contenirla quantité nécessaire à la transformation du sangnoir ensang rouge.La science démontre qu'un homme adulte derespirant 16 ou 17taillé et de corpulence moyenne,fois par minute et introduisant à chaque inspiration1[3 de litre environ d'air dans les poumons, fait passer 7 ou 8 mètres cubes d'air en 24 heures dans sesorganes —et consomme en 1 heure toute la quantité d'oxygène que contiennent 90 litres d'air, c'està-dire116 grammes, ou 2,160 litres en 24 heures,soit un peu plus de 2 mètres cubes.La quantité d'air strictement nécessaire à l'homme serait donc de 7 à 8 mètres cubes par jour;mais on commettrait une grave erreur si l'on pensait qu'un homme réduit à ne recevoir que cettequantité d'air continuerait à vivre sans souffrance ;les faits démontrent que cette provision n'est passuffisante. Les hygiénistes ne sont pas d'accordsur la quantité d'air nécessaire. Les uns disent22


—L'air—170 —lequ'un homme a besoin de 8 ou 10 mètres cubesd'air au minimum par heure ; d'autres affirment quepour une respiration normale il faut de 300 à 384mètres cubes d'air par 24 heures. Dans — notrepremier entretien nous avons dit avec Huxley quepour se trouver dans de bonnes conditions il fauthabiter une chambre qui ait au moins 3 mètres entous sens.Après cela il ne suffit pas que l'air ait la quantité voulue d'oxygène, que le parsang la voie de larespiration absorbe ou brûle constamment ; il nesuffit pas qu'il ne contienne point l'acide carbonique expiré par les poumons en quantité capablede produire du malaise, des maux de tête, des faiblesses, des évanouissements, l'asphyxie et la mort.—Un bon air ne doit être, en outre, ni trop humide,nitrop sec, ni trop chaud, ni trop froid ; il doit êtreinodore, renfermer la moindre quantité de poussière possible et point de miasmes provenant de la décomposition de substances animales ou végétales.Dans ces conditions, l'air n'est pas seulement unélément essentiel à tout ce qui vit et peut-êtremême à tout ce qui existe sur notre planète :—l'air est un aliment — un aliment que nous avonsbesoin d'absorber, d'assimiler et de transporter parl'intermédiaire du ^ngaux parties extrêmes de nostissus, pour yentretenir le mouvement de leursmolécules et la circulation mystérieuse de la vie.est plus que le pain quotidien-pain detoutes les heures, le pain de toutes les minutes, lepam de toutes les secondes, le pain du premier etdernier soupir.Nous avons, par conséquent, nécessité d'unegrande quantité et d'une bonne qualité d'air.—Cependant le progrès humain a su enrichir notre


—174—il—organisme à uii tel point, qu'il en a presque faitune seconde création ; a donné le microscopeet le télescope à l'œil, les produits de tous les climats à l'appareil digestif, la vapeur k notre systèmede —locomotion, le télégraphe à nosimpatiences,mais il a laissé le poumon plus pauvre que jamais,en ne lui accordant que peu d'air rendu mauvaispar l'encombrement, ou de l'air rendumiasmatique par le dépeuplement.Notre état social nous fait généralement respirermal.En Angleterre, il meurt chaque apnée en moyenne67,000 individus, par suite de maladies de poitrineou tuberculeuses ; c'est-à-dire q\ie chaque It) minutes,un Anglais meurt de consomption. Dans lemême espace d'un an, il meurt à Londres de cesmaladies 7,000 personnes,—k Paris 4,000. De1846 à 55, un tiers des décès de l'hôpital de Vienne—appartint à la même catégorie d'affections. EnAlgérie el à Alger, malgré l'incontestable influencesalutaire du climat sur la phthisie, une grande partied'indigènes sont atteints de maladies de poitrine, àcause du mauvais air qu'ils respirent et de la mauvaise hygiène qu'ils suivent.Les causes principales de ces terribles maladiespropagent dequi augmentent d'intensité et sepatsuitede l'agglomération de ki population dansjour en jour, sont : la respiration d'air impurlesgrandes villes, la diminution de l'exercice musculaire, et l'inertie pulmonaire qui en est la conséquence. Dans le siècle dernier, des hôpitaux mal—aérés de Londres recevaient 2,800 pauvres petitsorphelins par an. 2,690 mourraient. Le Parlementse préoccupa de ce massacre d'innocents el décidaque ces malheureux êtres seraient nourris et soi-


—172—gnés à la campagne, en différentes localités. Lamortalité descendit immédiatement de 2,690 k 450.—En Lombardie, les paysans,qui mangent plusmal que les ouvriers des villes, meurent plus rarement de phthisie, parce qu'ils respirent mieux,vivent au grand air et au soleil.L'hygiène de la respiration peut se restreindre,d'après Mantegazza, k deux préceptes :Respirer du bon air ;Respirer activement.Si les physiologistes et les hygiénistes ne sontpas d'accord pour déterminer le nombre précis demètres cubes d'air dont un individu a besoin pourbien respirer,—le nez et la sensibilité pulmonairepeuvent très-bien servir k en reconnaître la bonneou la mauvaise qualité.Les personnes riches peuvent facilement allerchercher le bon air, l'air qui leur convient, où il est :elles peuvent se donner un logementsalubre etagréable, habiter la campagne, voyager, naviguer.—Toutle monde peut faire beaucoupun air moins mauvais,possible ; les moyens sont simples :pour respireraussi peu empoisonné queils consistentsurtout dans la propreté des habitations et dans lapropreté du corpsiSur ce terrain chacun a facilitéde contribuer k assawiir le climat, la localité, l'air deson pays, de sa ville, de son habitation, de sa cage,de son nid. On fera œuvre de bon citoyen et on gagnerabeaucouppour sa propre santé.L'on peut avoir soin de la salubrité de lair ambiant ou du milieu atmosphérique dans lequel onvit de différentes manières :L'air qui entre par les croisées est presque toujours meilleur que celui qui entre par la porte. —Donc beaucoup de croisées aux maisons, —donc


—173 —rien de plus épidémique que l'impôt sur les porteset fenêtres.Aussitôt qu'on se lève, il faut ouvrir la fenêtrede la chambre où l'on a couché, découvrir le lit, etmême laisser les draps exposés k l'air, spécialementen été.Il ne faut jamais boucher hermétiquement leschâssis des croisées, ni faire du feu de charbon, nilaisser des fleurs odorantes pendant la nuit dans leschambres k coucher.Il faut choisir toujours pour chambre k coucherune pièce spacieuse qui ne soit pas contiguë k desendroits où se forment de mauvaises émanations.Pendant l'été, de mai knovembre, dans les payschauds eu particulier, il convient de tenir les vitresdes croisées des chambres k coucher ouvertes et lespersiennes fermées.Autant que les conditions météorologiques lepermettent, il convient de lire, d'écrire, de coudre,de broder, de travailler k fenêtres ouvertes.Enfin, il ne faut jamais que les cabinets de retraite et même les cuisines répandent des odeurs aumilieu de l'appartement, surl'escalier, ou ailleurs.Vous-savez tous combien notre odorat souffre deces émanations ; mais la souffrance de l'odorat eslbien minime en comparaison de celle des poumonset de la respiration ; par la respiration surtout,nous empoisonnons en pareilles circonstances lesang, et nous introduisons continuellement dansun élément d'infection.l'organisme,Pour neutraliser ces émanations,nairement de chlorure de chaux ouon se sert ordid'acide phénique; mais le chlorure de chaux a une odeur forteet incommode, l'acide phéuique est dangereux.


Dans1—174 -deOn peut, au contraire,sans risques le mélange suivant :.Charbon pulvérisé, 10 parties.Plâtre id.—Sulfate de fer id. 1—employer facilement etCette même poudre peut être employée aussi bienpour les cabinets de retraite, que pour les récipientsqui servent aux malades.En Algérie, ce n'est pas, malheureusement, l'hygiène qui a servi de guide dans les constructionspubliques ou privées ; c'est au contraire l'économie.la spéculation, le provisoire, l'avidité des gros bé—néfices et un mauvais génie de routine, sorteque jusqu'à ces dernières années, les habitationsont été bâties à rebours du bon sens et en violationflagrante des règles élémentaires de l'architecture—hygiénique. le centre même de la ville,aux environs de la place de Chartres, au commencement de la rue de la Marine, il existe, enlr'autres,des maisons tellement infectes,quelles ne sont pasde notre siècle.Cela disant, je n'ai point l'intention de vousvous plaindre de l'administration, de laexciter kmunicipalité ou Ses propriétaires. Je suis de ceuxqui croient que 1 numanité est un assez grand entant, qui compte probablement plusieurs millionsd'années, et qui ne doit plus avoir besoin de marcher k l'aide de lisières. Il est temps, dans unecolonie surtout, que chacun s'habitue k faire sesaffaires et k s'occuper de son hygiène par soi-même. Quand vous avez besoin d'un logement et quevous rencontrez une maison sale,éclairée,ler sur lemal aérée, peuaussi solide que celle qui vient de s'écroutournez lesboulevard de la République,


—115-Aujourd'huiafons — et vous la verrez disparaître sans l'intervention de l'autorité.Les maisons mauresques pouvaient avoir quelques avantages du temps de la Régence, lorsque lairille était sillonnée de petites rues étroites et tortueuses où ne pénétrait pas le soleil ; lorsque chaiuemaison ne servait qu'à une famille avec desfemmes qui ne sortaient pas et des hommes qui—sortaient peu. Elles avaient tout de même lesinconvénients de la stagnation des odeurs de la cuisine el autres, d'une humidité presque constanteentretenue par les citernes, les fontaines, les terrasses et la pluie qui descendait par l'ouverturesupérieure de la cour.—que lavilleest coupée par des rues larges, inondées de soleil,la fraîcheur relative des maisons mauresques peutdevenir nuisible quand on y entre ; puis la coutume actuelle de couvrir l'ouverture de la cour parâes châssis vitrés paralyse l'avantage d'avoir percédes fenêtres donnant dans les rues. Elles restentlonc mal aérées. Et les maisons mauresques sonten général de mauvaises habitations qui doivent peui peu disparaître.Je ne vous dirai rien des constructions tant vantées des villages kabyles ; elles sont aussi jolies etattrayantes de loin que sales, infectes et asphyxiantes, lorsque l'on a le courage d'ymettre les pieds.Les logements les plus insalubres, à mon avis,sont les entresols. A Alger surtout, où il ya beaucoup de chaleur et beaucoup de poussière, il n'estsas facile de comprendre que l'on puisse dormir,espirer et vivre, en été surtout, dans des entresolsort bas,s'ouvrant sous des arcades. Ce sont de Ieniesoubliettes que l'industrie a créées à ses adeptes,2t on peut regarder comme heureuses les populations


—Si—176——EtJeNousqui ne se servent pas,ainsi qu'en Italie, de pareilslogements. En tous cas au pis aller, la mansarde valait encore mieux que l'entresol. Il est bien entenduque ce disant, il n'est pas question des entresolsqui ont de 2 mètres à 2 mètres 1/2 de hauteur,avec des croisées qui s'ouvrent directement sur larue. Mais pour les entresols ordinaires et pour lesentresols des vieilles maisons de notre ville, jemaintiens l'accusation de grave insalubrité. Dansl'exercice professionnel, surtout en temps de choléra et de lyphus, j'ai vu la part que ces détestableslogements faisaient à la mort.En tout cas, il faut se rappeler que dans les dernières heures de la nuit, vers le matin, on respireun air appauvri d'oxygène et surchargé d'acide carbonique. Il paraît aussi que vers la fin de la journée,notre organisme éprouve une certaine déperditiond'oxygène, qui serait l'une des causes du sentimentde lassitude qui survient k ce moment.Donnez donc matin et soir un bon déjeuner etun bon dîner d'air pur k vos poumons — en vouslevant de bonne heure et en vous promenant souvent hors de la ville.les enfants surtout. —que cela soit fait pourdisais l'autre soir quel'on s'occupe be»icoup trop du cerveau ettrop peudes muscles. Loreque l'on parle d exercice musculaire, c'est presque comme si l'on parlait d'exercice—pulmonaire: l'un suit l'autre. devons, parconséquent, établir en principe que les entants ontd'abord k développer leur corps puis l'intellect.—vous voulez former de ces hommes, dont parlele poète latin (Horace, Ode III, 3.) de ces hommesjustes et inflexibles, dont lintelligence solide neplie ni devant les exigences de la foule, ni sousles menaces des tyrans, ni dans les tempêtes de la


—on—car—177 —Cesnature, ni sous les foudres des dieux —; de ceshommes qui restent droits et calmes au milieu desruines du monde et en face de la mort,—donnez—beaucoup d'air à vos enfants fortifiez leurs poumons et leur cœur avant de les — soumettre à lavieille pédagogie.est duenon-La viciation de l'air, avons-nous dit,seulement aux émanations provenant de l'agglomération ou de la malpropreté,—mais aussi au voisinage des marais et au défrichement des terres.Les miasmes des marais ou des terres incultes,quelle que soit leur nature encore inconnue, proviennent de la décomposition de nombreux débrisde plantes et d'animaux que la chaleur de l'été laisse à la surlace des marais mal desséchés ou des terres incultes, et que les pluies de l'automne rendentsolubles et volatils. — miasmes, vous le savez,deviennent une cause de maladies, d'empoisonnement, de consomption et de mort lente ou rapide .—On peut résister individuellement à la peste, autyphus, au choléra, k la variole ; on va impunémentd'un pôle à l'autre, on vit dans toutes les latitudes ;ne s'habitue jamais à l'action morbide desmiasmes paludéens mêlés à l'air que l'on respire,ce sont de vrais poisons.Le foyer, la source, le prototype de la mal'aria—réside dans les Marais-Pontins. C'est le cadeau,le souvenir que le gouvernement du pape laisse auxpopulations du patrimoine de Saint Pierre.Les Marais-Pontins, du temps des Volsques, renfermaient, selon Pline l'Ancien, 25 villes et unepopulation rurale en conséquence. Le consulAppuis y construisit, 311 ans avant notre ère, la voieromaine qui prit son nom et que l'on a en partierétablie. Aujourd'hui ce pays a une surface d'environ23


—178—20,000 hectares qui s'étendent de Sisterna-à Terracinesur une longueur de 50,000 et une delargeur'20,000 mètres. Là ne peuvent plus vivre que lesanglier et le buffle ; l'influence de cet immensemancenilier théocratique s'étend plusieurs lieues àla ronde, et la métropole du monde chrétien ellemême,ainsi que Montalembert l'appelait, en est infectée.La France aussi contient un grandnombre deterrains marécageux. D'après Vijlermé, 8 départements ne contiennent pas moins de 30,000 hectares de marécages en moyenne ; 16 autres le cèdentà peine à ceux-ci pour le nomhre et l'étendue deleurs marais.. Les départements des Bouches-du-Rhône, de la Vendée, de la Charente-Inférieure dela Gironde, de la Loire-Inférieure, de l'Ain sontcouverts de marais dans une surface de 234,100hectares. Et la surface totale des marais en Francene s'eténd pas à moins de 450mille à 500 mille hectares.Presque toutes les contrées du globe ont des marais. Le Mississipi, le fleuve des Amazones, la—Plata, l'Orénoque, le Gange et le Nil répandent auloin des miasmes délétères qui s'élèvent de leursinondations et deleurs eaux stagnantes et donnentnaissance ala ne%e et au choléra.En Italie, outre les marais pontins, il ya les maremmesenToscane, les lagunes à Venise et à Comacchio,les marais de Calabre et de Sicile, les rizièresde la Lombardie, du Piémont, de Modène, de Ferrare...Le maximum de l'intoxication paludéenne estprécisément—fourni par les rizières. Pendant lespremières années de ma jeunesse, j'ai passé presque toutes mes vacances d'étudiant à côté des ter-


—179—. .rains où l'on cultivait le riz, et je peux vous faire unportrait, d'après nature, des malheureux habitantsde ces contrées, où, pendant que les cultivateursmouraient empoisonnés de la manière la plus navrante, avec une journée de onze baiocchi ou 60centimes les grands propriétaires, comme le duc deGalliera, devenaient des Crésus, des archi-millionnaires,les rois de l'époque.—Les paysans de ces endroits paraissent vieux lorsqu'ils entrent dans la vie et portent sur tout leurêtre les traces de la constitution maladive et délabrée de leurs parents. Amaigris, boursouflés,hydropiques depuis l'enfance, leur ventre s'engorgepeu à peu et une tristesse incurable se révèle à travers leur insensibilité stupide. S'ils vivent, tous cessymptômes augmentent d'intensité. Un teint pâleet livide, un œil terne el abattu, une poitrine resserrée, une voix grêle, un état de souffrance de l'appareil pulmonaire, une démarche lente et pénible,un regard apathique les rendent vieux à 30 — ans,quand ils y arrivent, décrépits à 40. Le cerveau luimêmeet le moral participent à la dégradation del'organisme : les grandes émotions politiques ousociales leur sont inconnues, et les mots de libertéet de patrie, qui font encore battre le cœur de tousles peuples, ne réussissent pas à les galvaniser ! .Malgré ce misérable état physique et social deshabitants des pays marécageux en général et en par—ticulier des pays où a lieu la culture du riz, jeles ai vus par deux ou trois fois, ainsi que l'on voitle ver se dresser contre le pied qui le foule etl'écrase, j'ai vu ces malheureuses victimes humaines s'armers'insurger, de pioches et de fourches, tenter de renverser les digues et de disperserl'eau, pour s'opposer au moins à l'extension, ou à


c'estAvant—180 —l'établissement de nouvelle» rizières. (Castenaso prèsMais j'ai vu aussi la cavalerie du papeBologne.)—courir au galop sur ces maudits de la société, exécuter des dragonnades, ramener les eaux stagnantes,faire cordon autour des rizières, rétablir l'ordre etl'infection, la misère et la mort !...Si je m'arrête sur ces détails et sur la terribleinfluence de l'air miasmatique des marais et desfièvres intermittentes, dont on s'effraye tant et avec—raison, pour justifier l'Algérie d'une accusation en grande partie exagérée, c'est pour combattre un funeste préjugé que l'on a contre elleau-delà de la mer, c'est pour encourager les immigrants à venir habiter notre beau pays, où s'ilreste encore quelques foyers d'infection paludéenne,ils seront bientôt assainis — et ils ne sont pas,en tout cas, aussi vastes qu'en Europe, en Amérique, en Asie, en Océanie, partout ailleurs.Car, en définitive, l'Europe et la France ellemême,ainsi que je vous l'ai dit, sont plus couvertes et plus infestées de marais que l'Algérie. «—En ItaUe, le pays que l'on a l'habitude d'appeler la—belle Italie, au Nord, au centre et au Sud-Estcouverte de marais et de rizières : en Italie, lalièvre pernicieuse*est cent fois plus fréquente et—plus grave qu'à A^er. AGrosseto, en Toscane,et dans son territoire, pendant l'été et l'automne, ontout ce quine voit plus ni oiseaux, ni insectes :peut se mouvoir et déserter le pays n'y laisse que—sa malédiction. les chemins de fer, ilsuffisait à quelques personnes d'aller de Rome àNaples ou de passer une nuit dans une auberge dela route, pour être atteintes d'une attaque de fièvrepernicieuse—mortelle. A Venise, en 1848, detoute la garnison du fort de com-Marghera, qui se


—Ici-181-Enfin,posait d'environ un millier d'hommes, il n'yeutque le. colonel, un officier et moi exempts de lafièvre ; malgré les attaques continuelles de l'ennemi, il avaitn'yplus d'hommes en état de faire leservice de nuit.Eh bien, en Algérie, dans la province d'Algersurtout, les terrains marécageux et les terrains à—défricher disparaissent tous les jours : la Maison-Carrée, le Fondouk, Boufarik, jadis endroits marécageux et insalubres, sont aujourd'hui des payssalubres, fertiles, charmants qui ne laissent rien à—désirer. Dans peu d'années d'ici, la densité dela population et la liberté d'action aidant, on pourrail yavait des marais, ici adire en Algérie :—régné la fièvre intermittente. en Algérie,—répétons-le souvent et si fort, que le vent puisse—porter notre voix au-delà des mers, en Algérie,il n'ya pas la Brenne, la Bresse, la Sologne, leBrouage, les Dombes, les Landes ; il n'y a pas etil n'yaura jamais de—rizières, car si quelqu'unavait l'intention maudite d'yintroduire la culturepestiière du riz,vous avez le droit de vousy opposer, de vous insurger s'il le faut, et d'en détruiremême les traces,—avec la certitude que vous nerencontrerez pas de soldats du pape, qui viennentvous forcer de mourir empoisonnés par l'air derizière ! . . .Le meilleur moyen de guérir de l'intoxicationpaludéenne est celui de se transporter dans un autreendroit sain et élevé,au milieu d'un air sec et pur.Mais lorsque l'on est forcé d'habiter un endroitmarécageux, ou de vivre dans un air miasmatique,les précautions à prendre sont les suivantes :Suivie un régime tonique avec beaucoup deviande, peu de légumes, bon vin sec et amer.


et—182—A-EnEviter en même temps toute espèce d'indigestionou d'excès.Ne jamais sortir le soir, car 1 air miasmatique estbeaucoupplus malfaisant pendant la nuit.Etre toujours habillé d'étoffes en laine.Habiter des endroits élevés, ou la partie supérieure de la maison, au moins la nuit.Entourer les habitations d'arbres à feuillage tou—jours vert surtout de tournesols qui par leursfonctions respiratoires dépouillent prodigieusementl'air d'une grande partie de son humidité, et avecl'humidité, la dépouillent peut-être des miasmestrouver combinés. Italie, onqui peuvent s'ya fait des études très consciencieuses à ce sujet, eton a conclu que les plantations de tournesols autourdes maisons, sont un bon préservatif contre l'empoisonnement des marais. Cette plante, en outre,peut se rendre très utile par sa graine huileuse, quipeut encore servir de nourriture à la volaille.Enfin, une excellente précaution estcelle deprendre de temps en temps quelques petites dosesde quinquina ou de quinine et de boire aussi quelques tisanes amères de centaurée ou d'écorce desaule.L'air peut être afcssi vicié par l'humidité, par lapoussière et par ljrchaleur. Bien que ces considérations rentrent plutôt dans la climatologie quedans l'hygiène des fonctions individuelles,—dirons quelques mois du svroco ,nousqui vicie l'airatmosphérique par la chaleur et par la poussière.Nous savons que le siroco est un vent du Sud.Les Arabes l'appellent simoun ou démon. En effet,s'il y avait un enfer, un pareil vent ne pourrait sortir—que de pareille fournaise. son approche, leciel se couvre el devient gris, la chaleur augmente


—de-183 —rapidement et avec elle la sécheresse ; l'atmosphèreest rouge, enflammée ; l'air n'a plus sa transparenceet les objets éloignés apparaissent à travers un voilecouleur de feu. Ce phénomène paraît tenir au sableet à la poussière qui sont en suspension dans l'airel réfléchissent les rayons du soleil.En arrivant sur la côte, ce souffle démoniaque aperdu beaucoup de sa chaleur ;cependant sa température s'élève de 32 à 40 degrés centigrades àNombre. C'est toujours un air brûlant qui agit surtoutes les constitutions : on perd la force, l'énergie, le sommeil ; on devient anxieux, irritable ; lessensations sont troublées, l'affaissement est considérable, la. volonté affaiblie ; la dilatation de l'aircause un malaise, une angoisse inexprimable ; lescapillaires périphériques se dilatent, la face devientrouge, les mouvements lents, l'appétit nul, la digestion et la respiration pénibles.Les nuits sontinsupportables. Les malades, plus que tous les autres, éprouvent l'effet de cette ardente haleine quifrappe d'un coupmortel un grand nombre de personnes affaiblies ; les hémorrhagies, les congestionscérébrales, le délire, les apoplexies deviennent—fréquents. 11 s'ensuit un anéantissement physique et moral qui arrive jusqu'au suicide.Ce démon aérien étend son empire de dévastationsur tout ce qui existe ; il brûle animaux et végétaux—ceux-ci plus encore que ceux-là.Malheur aux hommes qui pendant le siroco selivrent à de rudes travaux ou à de longues marches!Les Arabes ont l'habitude de se couvrir la figure etils font bien. En pareih moments le seul remèdeest de rester chez soi et en repos, autant qu'onle peut fermer toutes les ouvertures du loge—de s'abstenir de toute occupation soute-ment,


—184 —nue et de toute espèce d'excès,surtout de régimeou de boissons.Après ce que nous venons de dire sur la composition et la pureté de l'air frais, il est facile d'établir que l'air frais et pur, incessamment renouvelé,est le plus vivifiant et le plus hygiénique.C'est à ce titre que l'on doit préférer l'air desmontagnes, lequel imprégné des arômes des herbes,de la senteur des pins, des sapins, des chênes etd'une infinité d'essences d'autres arbres, renouvelésans cesse par les grands courants de l'atmosphère*fournit à 1 organisme un des éléments types de saconservation et de son bien-être.Mûhry et Hirsch ont constaté que la demeure surles hautes montagnes sert à prévenir la phthisiechez ceux qui en ont la prédisposition, ou à la guérir lorsqu'elle commence. Fuchs a démontré quedans le Nord de l'Europe cette même maladie diminue avec l'augmentation de l'altitude des pays. Surles Alpes et les Carpathes, dans le Hartz et l'Erzgeberg,à Pinzgau, en Styrie et en Carniole, au versant occidental des Pyrénées, sur les plateaux de—l'Asie, de l'Arménie, de la Perse, la phthisie esttrès-rare.Nous avons citâailleurs les Incas qui habitent laCordillère des An^s et travaillent toute la journéedans les mines argentifères à des hauteurs qui varient de 7,000 à 1 5,000 pieds au-dessus du niveaude la mer. Ces malheureux travailleurs malgré leurmauvaise alimentation, à l'aide d'une poignée defeuilles de coca et de l'air de leurs gigantesquesmontagnes,présentent un thorax très-développé etse portent assez bien.Le philosophe de Genève était enthousiaste del'air des montagnes de sa patrie.


—185—« Ce fut là, dit Rousseau, que je démêlais sensiblement, dans la pureté de l'air où je me trouvais,la véritable cause du changement de mon humeur etdu retour de cette paix intérieure que j'avais perdue depuis longtemps. En effet, c'est une impression générale qu'éprouvent tous les hommes sur leshautes montagnes, où l'air est vif et subtil ; on sesent plus de facilité dans la respiration, plus de légèreté dans le corps, plus de sérénité dans l'esprit.Les plaisirs y sont moins ardents, les passions plusmodérées; il semble qu'en s'élevant au-dessus duséjour des hommes on y laisse tous les sentimentsbas et terrestres, et qu'à mesure qu'on approche desrégions éthérées, l'âme contracte quelque chose deleur inaltérable pureté. On yest grave sans mélancolie, paisible sans indolence. Je doute qu'aucuneagitation violente, aucune maladie de vapeur pûttenir contre un pareil séjour prolongé, et je suissurpris que des bains d'air salutaire et bienfaisant desmontagnes ne soient pas un des grands1 remèdes dela médecine et de la morale. »Les pensées du philosophe suisse sont si justes etsi vraies que tous les ermites de la Thébaïde, tousles moines d'Orient et d'Occident, tous les cloîtrésde nos jours ont mis et mettent en pratique ses enseignements. Jetons un regard de curiositéhy—giénique autour d'Alger même —et nous verronsà vol d'oiseau que c'est sur les hauteurs, dans lesendroits les plus délicieux, que les couvents, lesorphelinats, les séminaires, voire même les zaouïasdes muphtis, renferment les bienheureux qui dansun bon air de montagne, frais et pur, se dévouent àla pénitence et à la purification. Nous appren—drons ainsi qu'à une demi-heure d'Alger nous avonsl'air et la température des montagnes, soit à El-24


- m-Biar, soit à la Bpuzaréa r~ et qu'entre Alger etConstantine nous possédons tous les avantages delà Suisse dans la ï&bylie,.Nous terminerons notre entretien de la respiration pulmonaire par quelques mots sur la gymnastique du poumon et de la voix.Il ne suffit pas de vivre au milieu du bon air, ilfaut savoir le mettre en contact fréquent et répétéavec le sang. La respiration est analogue a la circulation. L'appareil respiratoire, ainsi que l'appareilcirculatoire, est une sorte de pompe qui envoie unfluide à travers une série de tubes distributeurs à unsystème de cavités qui, dans leur ensemble, ont unecapacité plus grande que celle des tubes.Un fait qui mérite d'être remarqué, c'est que lemécanisme de la respiration est quelque peu différent dans les deux sexes. Chez les hommes le cfc'aphragme,muscle mince et voûté qui sépare la poitrine (ta ventre, joue le rôle le plus important, lescôtes inférieures se mouvant relativement très-peu ;chez les femmes, au contraire, l'acte respiratoire esten grande partie le résultat du mouvement des côtessupérieures spécialement. Ce fait — n'a pas encoreété assez étudié et nous ne nous y arrêterons pas :nous noterons seukment en passant qu'il est peutêtreune des causesjjui rendent chez la femme plusvisibles les émotions et moins fréquente la phthisieOr, ceux qui mènent une vie sédentaire, ceux quise servent d'habillements trop étroits ceux qui occupenttrop le cerveau, ceux qui restent courbés surle métier, le microscope,—les livres, respirentmoins que ceux qui se promènent, travaillent ouparlent.Le moyen le plus simple et le plus naturel d'obvier à cet inconvénient et d'activer la respiration,


espire—487 -consiste à faire pendant quelques minutes des inspirations profondes, en quittant les occupations sédentaires, en se promenant, en parlant, ou en fermantla bouche et en appuyant en même temps un doigtsur une narine pour forcer l'air à pénétrer plus profondément dans les poumons.L'exercice de la voix rend la respirationbeaucoupplus active. Segond a calculé qu'une personne quichante—dans 20 minutes une quantitéd'air plus grande qu'une personne d'égale constitution qui ne chante pas n'en absorbe dans 1 heure. Lire à haute — voix, crier, siffler, chanter,déclamer, professer sont donc autant d'exercices etde moyens gymnastiques qui peuvent devenir utiles et nécessaires pour ceux qui respirent mal etatteintsont prédisposés à la phthisie. Cuvier, —d'une lente affection pulmonaire, en était guéri quelque temps après avoir professé au Muséum.Il est certain que l'abus de la voix ou de l'activité respiratoire peut occasionner des inflammationsdu pharynx, du larynx, des bronches, des poumons—et produire même des hémopthysies. Mais l'abus,chacun le sait,est toujours nuisible, et il convientde proportionner constamment l'exercice à la forceindividuelle et de se nourrir en conséquence.Silvester a conseillé d'appliquer à la gymnastiquepulmonaire les mouvements d'élévation et d'abaissement des bras dont on se sert pour faire revenirà la vie les noyés.Enfin, Steinbrenner, Ramdge, Seiber ont imaginé un tube respiratoire, que Manlegazza a modifiéel simplifié de la façon que vous voyez représentéesur le tableau.Cet appareil consiste en un entonnoir en ferblancou en os, qui se continue dans un tube en gomme


—188 —L'allongementélastique, de 2 centim. environ de diamètre et de lalongueur approximative d'un mètre, partagé en 2portions par un dernier tube en verre.Lorsque l'on veut se servir de ce tube, on y faitd'abord passer à traversun peu d'eau tiède ou froideselon la saison ou l'irritabilité de l'individu.Ensuite on applique exactement l'entonnoir à labouche avec les deux mains et on comprime en—même temps les narines avec les index puis onrespire k l'aide du tube. Le tube en verre sert k faire glisser en sens contraire les deux parties de tube élastique pour allonger ou raccourcir l'instru—ment selon le besoin.l'effort musculaire de la respiration et on doit le faiaugmentere peu à peu, au fur et à mesure que la personneacquiert de la force et de l'habitude.Je sais que cet appareil a été ridiculisé, chose facile, par un professeur de Strasbourg. Malgré celale docteur Janssens l'a Introduit en Belgique et ils'en trouve bien ; il l'a, à son tour modifié pour lefaire servir aux inspirations de vapeurs médicina—les. Mantegazza l'a employé pour lui-même ; ilaffirme qu'étant de poitrine délicate, avec une respiration courte et une grande disposition aux bronchites, après deux»ans d'exercice, il a gagné unetelle force d'organes respiratoires qu'il peut faireses cours à haute voix, sans se fatiguer : son étatgénéral s'est amélioré et la circonférence de sonthorax a augmenté de 5 centimètres.


l'orticaire—189—IXHYGIÈNE DE LA BEAUTÉMesdames et MessieursNous disions l'autre soirque pour respirer un bonair, un air salubre, les moyens à la portée de toutle monde consistaient dans la propreté des habitations et dans la propreté du corps.Comme le poumon, la peau est un organe derespiration et d'excrétion, d'absorption el de d'exhalation.La peau est en contact presque immédiat avec tousles agents physiques extérieurs :lumière, calorique,électricité, humidité, miasmes, froid. La peau subittoutes les influences météorologiques et fonctionnesous les conditions de la pression atmosphérique.En outre, la peau a tant de rapports étroits ousympathiques avec nos organes internes, qu'ellesouffre ou jouit avec eux de leur état vital, commedeux amis qui depuis la naissance se sont habituésà vivre d'une vie commune, d'une vie unique d'u—-ne vie, dirais— je, presque plus fraternelle que celledes frères Siamois.Une éruption de la peau peut servir de remède kune maladie interne ; une vaste brûlure peut produire des inflammations organiques el tuer. Ledocteur Gregoryétait atteint d'orticaire toutes lesfois qu'il mangeait la plus petite quantité de blanc—d'œuf ; est en effet le plus souvent unemanifestation d'un régime indigeste ou échauffant.La peau est encore un miroir ou se reflètent les


-190 -images de la santé, de la souffrance, des passions,des émotions, des sentiments, de la douleur. Nousavons déjà fail remarquerautrefois, qu'à ce sujet,l'observation empirique ou vulgaire a devancé lascience, en désignant par la bonne mine, c'est-àdirepar les caractères apparents de la peau, la bonnesanté.On a aussi raison de dire qu'il faut sauver la peau,lorsque l'on veut dire qu'il faut sauver la vie.La fonction principale de la peau consiste dansune élimination constante de gaz et de vapeurs parla transpiration insensible, qui—évaporation et dans l'exhalation d'un liquideaqueux par la transpiration sensible.—Laest une véritablesueurest sécrétée par une espèce particulière de glandesplacées dans l'épaisseur de la peau en nombre presque infini. Krause a calculé que le nombre desglandes sudoripares de la surface de notre corpsdoit se monter à près de deux millions et demi.Wilson les évalue à un chiffre plus considérable,parce que dans la paume de la main seulement, ilen a trouvé 3,582 par pouce carré.Les analyses du produit de la transpiration nesont encore ni complètes, ni constantes. Du reste,tout le monde s;jÈ qu'elle donne des résultats différents, selon les individus et selon les parties ducorps.Quelle que soit la nature de la sueur, Seguinaffirme que la perte quotidienne que l'on subit parla transpiration insensible de la peau, représente1/67 du poids de notre corps, c'est- à-dire presquele double de ce que l'on perd par les poumons.L'Anglais Rye a trouvé qu'elle équivaut à 1/83.Vulenlin a constaté que la perte par la transpirationdermique est à celle du poumon comme 3 : 2.


—191—La peau élimine aussi du gaz acide carbonique etprobablement quelque autre substance, ear, sanscela, il ne serait pas facile de comprendre que desanimaux, tels que lapins, chiens, poules, chevaux,enduits d'une couche de peinture ou de vernisépais, meurent. Bouley —a vu mourir trois chevaux, dans le 7e, le 9e et le 10e jour après l'expérience. A l'autopsie, on vérifia que les poumonsétaient engorgés de sangnoir.L'hygiène de la peau peut, en somme, se réduireaux règles générales suivantes :1. Maintenir libre et uniforme la circulation capillaire de toute la surface cutanée ;2. Entretenir et exciter une transpiration facileet harmonique ;3. Débarrasser la peau de tous les résidus de sessécrétions :4. Empêcher le contract des matières nuisiblesqui pourraient être absorbées ;5. Se garantir contre les changementstrop brusques de l'atmosphère.Nous parlerons tout d'abord des bains,ensuitedes habillements,puis des cosmétiques.BAINSD'après Hufeland, la première des causes qui contribuent à multiplier parmi nous la goutte, la phthisie, l'hypocondrie, les fièvres,c'est notre négligence à entretenir la peau dans un état continuel depropreté et d'activité par l'usage des bains. Terrainprincipal el vaste des crises, il faut que la peau soitperméable et douée d'une grande énergie pour quela nature puisse salutairement diriger vers elle les


—192—mouvements de sa force conservatrice. Le dernierdes hommes sait que l'entretien de la peau est nécessaire à la santé de tous les animaux. Le soldat,le palefrenier néglige tout pour étriller, bouchonner,laver son cheval.Dans les pays chauds spéchlement l'omission desbains est une cause de maladies nombreuses : furoncles, anthrax, charbon, abcès, ophtalmies, éruptions,gale, gale bédouine, etc. L'Islamisme l'a reconnu etle prophète Mohammed ne s'est pas fait faute de recommander à ses fidèles les lotions, les ablutions,les immersions el les bains de toute espèce. Aus—si est-il juste de dire que les Maures ne sont pascomme nous exposés aux affections que nous venons d'indiquer. Le seul peuple africain qui fasseexception à cette excellente coutume serait, selonle voyageur célèbre Livingstone, celui des Manganjas,dans l'Afrique centrale : un vieillard de ce payslui racontait qu'il ne s'était baigné ou lavé qu uneseule fois, et qu'il ne se rappelait plus l'impressionque le contact de l'eau avait produite sur sa peau .Ce n'est qu'à l'aide de soins excessifs de propretédes habitations et des corps que les Hollandais etles populations des Pays-Bas sont parvenus à rendresalubre et habitable la contrée la plus malsaine del'Europe. %Les lotions ou les ablutions consistent dans l'actede laver ou d'asperger avec de l'eau froide, unepartie du corps ou le corps tout entier. Ce moyenest excellent pour nettoyer la peau, pour toniûerles lissus ramollis et pour diminuer ou pour activerla transpiration. Elles doivent toujours se faire avecde l'eau froide, la première enfance exceptée, etlorsque le corps n'est pas en sueur. Leur duréesera courte, afin que la réaction soit plus facile.


—193-On ne sauraittrop blâmer les personnes qui seservent d'eau plus ou moins tiède : une pareillecoutume ramollit la peau et la rend plus sensibleau froid ; elle est surtout nusible aux constitutionsfaibles, nerveuses, lymphatiques, molles, sensuelles.L'eau froide sert non-seulement à entretenir lapropreté, mais aussi à améliorer la santé, lorsquecelte pratique est suivie d'un exercice modéré augrand air.L'hydrothérapie, depuis quelque temps,venue presque populaire.Beaucoupest dede monde aadopté la bonne habitude de laver le corps chaquematin en sortant du lit avec de l'eau froide de 8 k12 degrés centigrades. La meilleure manière depratiquer de pareilles ablutions consiste a sauterdu lit dans un baquet ou dans un grand plat quicontient depuis le soir une petite quantité d'eau.On y trempe deux grosses éponges que Ion porte,en croisant les bras, sur les épaules, puis on lespresse et on les passe rapidement 5 ou 6 fois surtoute le périphérie cutanée du corps. Les Anglaisont fabriqué pour cet usage des baquets élastiquesportatifs très commodes.Ces ablutions excitent la circulation capillaire dela peau,régularisent les fonctions d'absorption etrendentd'exhalation, le corpsmoins susceptiblede ressentir les changements atmosphériques etfortifient spécialement les enfants d'un certain âge.Elles sont dangereuses pour les personnes prédisposées k la phthisie ou atteintes de rhumatismes.Les bains ont été parfaitement étudiés au pointil les a divisés ende vue hygiénique par Fleury ;bains froids, en bains neutres, et en bains chauds.Les bains froids de 0 k 25° abaissent la température animale, diminuent la fréquence du pouls,25


-194 —Enactivent l'absorption ; ils sont excitants si on neles prolonge pas, débilitants s'ils sont prolongés ;ils peuvent devenir dangereux lorsque le corps estsous l'influence d'une grande fatigue et d'une pros—tration générale. A Genève, en janvier 1850,j'ai vu une partie de la population se baigner dansle lac, pendant que d'autres personnes patinaient—sur la neige glacée des environs. Russie, oncérémonie du baptême des enfants enhiver, sur la Newa, en faisant un trou dans la glace.Il est vrai de dire que quelques enfants passentpratique laainsi de la Newa au paradis.Les bains neutres ou indifférents, bains de propreté, de 25 k 30°, n'exercent aucune influence surla température du corps, l'activité du pouls et lessécrétions de la peau. Ils ont une action calmantedes plus sûres et des plus inoffensives ; ils sont unexcellent remède contre les irritations dermiques;ils servent à neutraliser l'action trop excitante desbains de mer, et contribuent mieux qu'autre choseà faire reconquérir le sommeil lorsqu'on l'a perdu.Les bains chauds, de 30 à 40°, élèvent la température animale, accélèrent le pouls, activent l'exhalation. Prolongés, ils débilitent ; courts, ils excitent. Ils deviennenfadangereux pour tous ceux quiont des maladies de c%ur, ou une constitution forte,pléthorique, apoplectique.—Fourcroycite unhomme mort d'apoplexie une heure après avoirpris un bain chaud: cet exemple n'est pas le seul,et l'action nuisible de bains tropchauds est tellement évidente el désagréable, qu'on l'évite trèsvolontiers.Les bains tièdes, ceux qui se trouvent enlre lesbains neutres et les bains chauds, sont les bains leplus en usage. Seulement, beaucoup de dames


-195—croient prendre des bains lièdes, lorsqu'elles prennent des bains chauds. Ces bains excitent la sensibilité cutané.;beaucoup tropet donnent une mauvaise habitude sybaritique, qui peut occasionner diverses maladies propres à leur sexe. Les conséquences en sont encore plus graves, lorsqu'il s'agit defemmes délicates, anémiques, nerveuses, chlorotiques.Un bain tiède quotidien d'un quart d'heure à 20minutes, est une habitude hygiénique, presque indispensable pour les enfants.Les précautions à prendre, avant ou après le bain,sont ;Ne se mettre jamais dans l'eaupendant le travail de la digestion ; il faut que trois heures au moinsaient suivi le dernier repas ; le meilleur momentest celui qui précède le dîner ou le déjeuner ;Se garantir en sortant du bain coutre l'action duvent ou du froid ;Faire avant et après les bains à bas?é température,Les bains maures différent essentiellement denos bains. On entre dans des étuves, dont la chaleur de plus en plus élevée dépasse 35 degrésune promenade modérée au soleil.centigrades. Parce moyen, on provoque une transpiration très-abondante, puis on masse et on frotteavec vigueur toutes les parties du corps.Après ces bains le corps est souple et tout sentiment de lassitude a disparu ; mais un usage fréquent les rend dangereux k cause de l'affaiblissement qui suit les pertes abondantes qu'ils occasionnent. Ils réclament, par conséquent, un régimetonique et réconfortant, c'est-'a-dire contraire aurégime des indigènes.Le massage et les frictions sont un moyen souve-


—196 —rain d'épuration de lapeau etd'excitation de sesvaisseauxcapillaires, de sorte que les bains maurespeuvent être en quelques circonstances d'une grande efficacité. Mais ils sont dangereux pour les personnes atteintes d'affections de poitrine ou de cœur,ou prédisposées aux maladies cérébrales ; ils sontdangereux pour tout le monde lorsque l'on négligeles précautions dont il faut s'entourer ; ils sontpneumonies et deune cause de bronchites, dephthisies parmi les indigènes ; enfin a Alger cesétablissements manquent non-seulement du luxeoriental, mais de comfort nécessaire.Les bains de mer ont été tout récemment étudiés par V'irchow, avec le talent que l'on reconnaîtau célèbre patbologiste de Berlin. Il conclut queces bains produisent un abaissement de températureanimale de 1 k 2 degrés et une diminution dansl'activité du cœur. Ils aident à la transformationon éprouvedes tissus. Pendant la saison des bains,une augmentation d'appétit et il en résulte même—une augmentation de poids dans le corps. Ledocteur Mess, directeur des bains de Sweningen, aconstaté qu'ils ont toujours une influence d'amélioration sur l'anémie. Ils sont très indiqués pourles enfants, les scml'nleux, les rachiliques, les personnes nerveuses"u atteintes de névroses, et pourceux qui sont affaiblis par l'étude, par la cachexiepaludéenne, ou par tout autre cause.Les femmes enceintes doivent s'en abstenir sielles sont robustes et sanguines ;celles, au contraire , qui ont une constitution délicate et quicraignent de ne pouvoir pas arriver k terme degestation, se trouveront quelquefois mieux des bainsde mer que de tout autre moyen.L'eau de la Méditerranée marque de 5 à 4 degrés


-W-—de plus que celle de l'Océan; mais elle •renfermeune plus grande quantité de principes salins quiaugmentent sa densité et remplacent l'action dufroid. —Sur notre plage, où la température est assezélevée, l'action de l'eau de mer est très-sensible àcause de l'excitation qu'elle réveille; elle rend l'exercice de chaque système plus complet et modiliel'état des organes engorgés. L'agitation continuellede la mer donne beaucoup de puissance k ces immersions par le choc qu'elle produit et par la forcede résistance qu'il faut déployer.Une saison de bains de mer ne doit pas excéder-le nombre de 25 a 30. Les mois de mai, de juinetdejuillelsont peut-être les préférables. L'eau—de mer est plus tonique le matin de 6 k 8 h. que lesoir. La durée des immersions peut varier selon—l'âge, la constitution, la force et la santé. En général les bains les plus efficaces sont ceux qui durentpeu de temps. Les enfants et les personnes délicatesprendront des bains de 10 minutes, laps de tempsqu'on augmentera insensiblement jusqu'à une demi-heure. Un homme tort, s'il nage ou se donnedu mouvement, peut rester dans la mer d'une demiheurek une heure. Une lois dans l'eau il ne faut—pas demeurer immobile,mais se livrera un exerciceproportionné aux forces individuelles; le meilleurest sans contredit la natation, qui exerce le corpset le met sans cesse en contact avec de nouvellesquantités d'eau salée,Les bains de mer sont conlre-indiqués aux vieillards, aux pléthoriques, àd'affections inflammatoires, de faiblesse pulmonaiceux qui sonl atteintsou de maladiesre, de vices du système circulatoire,de la peau.Nous ne parlerons pas de bains du lumière, de


—198—NousCeLelait, de sang, d'abattoir, etc. indiquerons—plutôt une lacune,—un besoin de notre ville. Toulle monde comprend que je veux parler d'un établissement de bains publics à bon marché, tels qu'ilen existe à Londres, à Paris, k Lyon, un peu partout, où ils sont bien moins nécessaires qu'à Alger.HABILLEMENTS« Il est certain, dit Roslan, que la nature nenous a pas faits pour être vêtus :ble que, siil est vraisemblal'homme avait conservé sa premièresimplicité, il eût été naturellement plus couvertqu'il ne l'est dans l'état actuel de la civilisation. »En effet, la bible nous présente Adam et Evedans Une toilette des plus simples et elle a soin——d'ajouter qu ils n'en rougissaient point. n'estqu après l'affaire de la pomme que le Seigneur Dieufit à Adam et à sa femme des habits de peaux, dontil les revêtit, en les chasaant du paradis terrestre.(G. m,21.)Quoi qu'il en soit, besoin ou pudeur, la civilisation nous a appris k nous habiller. Ce serait à lascience de nous guider, pour empêcher la dispersionde la chaleur animale et pour nous défendre contreles intempéries de ^'atmosphère.—Rabener a dit: mhabitfait l'homme. peuple a ajouté: L'habit ne fait pas le moine. Lafemme croit que : L'habit fait la beauté.Un habillement hygiénique doit être léger, mauvais conducteur du calorique, d'étoffe claire et decouleur blanche ou demi-teint.Les étoffes claires laissent passer les excrétionsde la peau et entretiennent toujours une certainequantité d'air. Les étoffes imperméables sont, parconséquent, fort insalubres.


—199—La couleur blanche a l'avantage de refléter lesrayons lumineux et calorifères. Elle est donc unmauvais conducteur ou irradiateur de la chaleur ;en hiver, elle empêche la déperdition de la chaleurde notre corps; en élé, la pénétration de la chaleurextérieure. L'expérience est facile à faire ;partient à Franklin :elle apon n'a qu'à prendre diversmorceaux d'une même étoffe leinls de différentescouleurs, et à les étendre sur la neige ou la glace ;quelque temps après on trouvera le maximum dela fonte de la neige ou de la glace sous le morceaud'étoffe teint en noir, et le minimum sous le morceau de couleur blanche.Stark a de plus découvert que les étoffes blanches absorbent moins que les autres les émanationsputrides ou odorantes. Les médecins, les étudiantsen médecine et les habitants des pays marécageuxpourront profiter de cette découverte.Les étoffes blanches exigent, en outre, plus desoins de propreté, et c'est précisément à causede cela que l'on doit les préférçr ;. car les tissusde couleur foncée ne demeurent guère plus propres,mais ils cachent davantage la malpropreté. Aussi,est-il hygiénique que le linge de corps soit toujoursde couleur blanche.Quant à la matière dont les étoffes sont fabriquées la plus hygiénique est, sans conteste, la—laine. Ces étoffes sont poreuses, excitantes, mauvaises conductrices de la chaleur animale et bonnesirradiatrices du calorique extérieur. L'usage habituelrie la flanelle peut préserver des affections de poitrine, des rhumatismes et des fièvres. A Venise, ily a un sage proverbe qui dit : « Il vaut mieux suer,que tousser. »Après la laine vient la soie qui aux mêmes qua-


—Les—200-lilés hygiéniques de la laine, joint plus de douceur,plus de légèreté et de souplesse ; mais elle est beaucoup tropchère pour la plus grande partie de l'espèce humaine.Le coton est préférable au chanvre et au lin, caril conserve davantage la chaleur et s'imbibe moinsd'humidité. Le chanvre et le lin ont juste les qualités contraires aux habillements hygiéniques : ilsde transpiration et entretiennent laabsorbenttroppeau froide. En été et dans les pays chauds le lingede corps doit toujours être en toile de coton.Les fourrures ou les vêtements en peaux de bêlestels qu'en usent quelques sauvages, ou quelqueshabitants du Nord,sont des objets presqu'inconnusseu-profiterai—et inutiles dans ce pays. Jelament de cette occasion pour vous rappeler que lesmatelas, Jes édredons, les traversins et les coussinsen plume, et quelquefois même en laine, sont icipeu salubres et le plus souvent dangereux et nuisibles C'est un usage à proscrire. Ces objets entretiennent une chaleur excessive, absorbent et conservent toute l'humidité et toutes les évaporationsmalsaines. Le crin animal, ou tout au moins le—crin végétal, est beaucoupplus hygiénique.Maintenant qft'il me faut passer rapidement enrevue les différentes pièces de notre habillement,—depuis le chapeau jusqu'aux souliers, c'est bienle moment, ou jamais, de vous dire avec l'ancienphilosophe : J'aime Platon, maisj'aime davantagela vérité. Car je ne voudrais pas à aucun — prix déplaire à une partie de l'auditoire et je ne dois .pasnon plus voiler, comme on dit quelquefois, la vérité vraie : Amiens Plato, sed magis arnica verilas.peaux de bêtes dont le Seigneur Dieu revêtit Adam el Eve en les mettant à la porte de l'Eden,


—201—se transformèrent au moyen âge en montagnes defer, qui donnèrent à l'homme,aux chevaliers surtout, l'aspect de monstres sortant d'un monde inconnu. — Aujourd'hui,ce qui règne et gouverneen autocrate infaillible sur les mille et une vétillesqui eutourent notre corps,en France plus qu'ailleurs, c'est la mode. L'hygiène n'a presque rien à yvoir. Aussi un malin a-t-il pu, après avoir peintdans une galerie de tableaux le costume de chaquenation,représenter le costume français par un homme déshabillé, portant sous son bras un paquet delinges et d'étoffes avec cette devise : « J'attends lamode.«•Déclarons tout d'abord qu'au milieu de ce carnaval de la mode, l'habillement des nouveau-néss'est de beaucoup amélioré. Au lieu d'emmailloter,de comprimer, de serrer, de ficeler de la tête auxpieds ces pauvres petits êtres, de façon à les renfermer comme des momies dans une espèce de coque ou d'étui qui ne permettait pas le moindre—grâce aux attaques incessantes demouvement;tous les médecins et de tous les hommes sensés, onse conlente aujourd'hui généralement de les couvrir assez pour les garantir contre le froid, leurlaissant en même temps la faculté de se mouvoiret de respirer librement.Cependant, dans quelques départements de Franceon a encore le goût déplorable des têtes pointues.Or, dans ces localités,s'étant aperçu que la têtedes petits enfants est molle et capable de prendrefacilement les formes qu'on lui imprime, on s'estévertué à la comprimer de toutes les façons, mêmeau moyen de cordes, me disait un jour un magistrat de notre ville, qui était né dans ces pays-lk, etqui exhibait un vertex conique des plus prononcés.26


Cela—202 —Foville, aliéniste éminent, a constaté que de cetusage abominable résulte souvent l'épilepsie, lafolie ou l'idiotie. Remarquons, de plus, que touslès enfants viennent au monde avec le crâne plusou moins allongé et conique. Ce qu'il yak faire,c'est tout juste le contraire de ce que l'on faitprincipalement dans la Seine-Inférieure, dans lesDeux-Sèvres et dans le Maine-et-Loire : il fautcomprimer doucement et progressivement en basle sommet de la tête pour lui imprimer cette formecrânienne ronde que Retzius a appelée brachycéphaliqueet qui laisse prendre au cerveau un développement normal.Quelquefois il faut aussi comprimer latéralementet donner une certaine saillie aux os du nez pouréviter l'aplatissement de sa racine, qui constitue lenez camard, déforme la figure, gêne la respirationet devient cause d'ozène, ou d'haleine insupporta-—. ble. vautbeaucoup mieux que de se préoccuper du filet ou frein de la langue, qui n'a presquejamais besoin d'être coupé.Un autre usage déplorable, dans noire pays surtout, est celui de coucher les petits enfants sur despeaux de mouton et des coussins en plume, et deles couvrir, en outre, jusqu'aux yeux avec desédredons ou des couvertures, et de les entourer derideaux, qui les étouffent. Ce système est l'équidont nousvalent de l'emmaillotage asphyxiant,avons parlé Le meilleur moyen d'obvier aux inconvénients de l'agitation enfantine pendant la nuit,est celui qui a été conseillé par Bouchut. Avant decoucher l'enfant on l'habille d'une espèce de chemise en coton, ou en laine douce, ayant la formed'un sac, qui dépasse les pieds, avec deux manchesfermées qui descendent au-delà des mains et une


—Les-203-coulisse en haut que l'on serre légèrement autourdu cou. Par ce simple vêtement, l'enfant sera toujours, quoi qu'il fasse, couvert et enveloppé.Enfin, les Anglais, qui en ce genre de soinshygiéniques montrent plus de sens et de tact queles autres peuples, ont avantageusement remplacéles lisières ou les bras des nourrices condamnées àcolporter des entants somptueusement habillés pourl'honneur et la gloire des mères, par les petitesvoitures que l'on voit depuis quelque temps circuler dans nos rues.Passons aux papas et aux mamans.En Algérie, où la chaleur est élevée, les vêlements devraient :Permettre la libre circulation de l'air autour ducorps, de façon à modérer la transpiration cutanée ;Soustraire l'économie du corps aux brusquesvariations de la température, afin d'en favorisertoutes les fonctions.Nous avions déjà indiqué ces règles en énumérantles qualités hygéniques de l'habillement. Onvoit par là que le costume indigène est, en somme,plus approprié au climat que le nôtre: il suffit d'yjeter un coup d'œil pour s'apercevoir que le nôtre.possède tous les défauts contraires aux conditionsque nous venons de poser.Mais parlons-en à un point de vue général.Les souliers devraient servir à garantir les piedscontre l'humidité et le froid, et k nous donner unebase commode, sûre et solide pour marcher et pourmaintenir facilement le corps eu équilibre.A propos de cela le spirituel Alphonse Karr adit que: l'on veut que le contenant soit plus petitindigènes nous donnent kque le contenu.ce sujet une leçon de civilisation hygiénique plus


Si—204—Neavancée : leurs souliers sont plus commodes et plusutiles que les nôtres.—Leshommes européenspourtant, ont commencé à se servir de souliersqui laissent au pied une certaine liberté d'aclion etde développement régulier. Mais les dames, dansleurs bottines étroites, en étoffes légères, avec destalons tels qu'on les porte maintenant, offrent unprodige de gêne et d'équilibre difficile à compren—dre.l'on estropiait, comme en Chine, lespieds des femmes pour les empêcher de circuler,elles crieraient à bon droit contre la barbarie ; c'estcependant ce qu'elles font avec leurs souliers, quine servent qu'à rendre nécessaire le métier de pédicure.La crinoline que l'Empire avait mise à la mode—est tombée avec l'Empire. parlons pas desmorts ; espérons que cela sera pour l'éternité—c'étaient des choses trop incommodes et trop indécentes ! . . .Le corseta élé le point d'attaque de tous lesmédecins et de tous les écrivains depuis Galien jus—qu'à Fleury. La satire française, en disant : Lecorset est fait pnur soutenir les faibles,pour remplacer les absents et pour ramener les égarés —aplus que tous peuffcêtre concouru k modifier et kcorriger les cuirasses, les carcans garnis de fer, quiont tant contribué k torturer et k déformer la plusbelle et la plus délicate moitié du genre humain.—Je ne m'arrêterai pas k vous faire l'énumération desgraves inconvénients des anciens corsets. Je veuxseulement mettre sous vos yeux la forme naturelledu thorax et la déformation que les corsetstrop résistants ettropserrés ont quelquefois produite.—Mon ami, le docteur Bertani, dans son livred'hygiène, déclare avoir examiné plusieurs cadavres


—205—dé femmes qui avaient fait usage de corsets serrés;elles étaient presque toutes jeunes ; malgré cela,outre la déformation du thorax il a rencontré degraves déviations dans les viscères de l'abdomen.Laissez donc de côté à tout jamais ces vilainsciliées, proscrivez-les surtout pour les jeuues filles;lorsque l'âge, un certain embonpoint ou toul autretronccirconstance spéciale exigent un soutien duchoisissez-le souple, léger, large, sans ressorts etsans baleines.La cravate, selon Percy, fut introduite en France par un régiment de Croates en 1660. Elle avaitatteint des proportions monumentales ; la tête et lecou des hommes avaient complètement disparuentre la perruque et la cravate ;par bonheur perruques et cravates sont descendues à des doses presqu'homœopathiques,de sorte que l'on peut s'attendre à les voir s'évanouir bientôt, pour allerrejoindre la crinoline. Du reste les Orientaux et lespaysans en général s'en sont toujours passé ; — ilsont ainsi employé un bon remède contre les mauxde gorge, les angines et les congestions. Cela estencore plus vrai pour les écharpes et les cache-nez,qui ne servent qu'à multiplier les occupations desmédecins et les affaires des pharmaciens.Les chapeaux devraient servir k préserver la têtede la pluie, du froid ou de la chaleur. Les chapeaux k cylindre des hommes, ces tours de Babelque tout le monde critique et dont le monde comne garantissentme il faut s'est fait une obligation,ni contre la pluie, ni contre la lumière, ni con—tre la chaleur. Les chapeaux protéiformes desdames sont aujourd'hui des problèmes insolubles :on ne sait pas à quoi ils peuvent servir, sinon a—obérer le budget domestique. Un chapeau de


—206-Ovidedame coûte de 20 à 50 fr., en France il ya 18 millions de femmes, dont 5 millions au moins portentun chapeau du prix moyen de 20 fr. ; si les damesfrançaises voulaient pendant l'été 1872 faire sacrifice de leurs chapeaux qui ne servent à rien du tout,elles pourraient verser dans la caisse pour la libération du territoire la somme non indifférente de 100—millions. Lorsque les femmes américaines voulurent contribuer à la fondation de la Républiquedes Etats-Unis—elles jetèrent à la mer les théset les étoffes qui venaient d'Angleterre et s'habillèrent d'étoffes grossières du pays.Le chapeau le plus hygiénique pour les femmes etpour les hommes en Algérie est le chapeau en pailleà larges bords.Les pendants, les boucles d'oreilles, les bracelets,les colliers — ne sont que des souvenirs traditionnels de notre existence primitive.« Le sauvage, dit Motard, nous semble ridicule,parce qu'il perce son nez ou ses oreilles pourysuspendre des objels religieux, des reliques absurdes ; nos Européennes ne se contentent pas toujours de cela ; elles s'entourent la tête, le cou, lespoignets de cercles, de peignes, de colliers ; ellesse sanglent la tail^ ; elles ont découvert leurs bras,leur poitrine, leur dos, pour braver à la fois la chaleur d'une salle de bal el les dangers d'un retour aumilieu de la nuit. »Les perruques et les faux-cheveux se vantentd'une très grande antiquité. — Le prophète Isaïecrie que le Seigneur couvrira les filles de Sion deconfusion, en arrachant de leurs lêlcs les faux cheveux qu'elles portaient.-- Xénophon assure que les—Perses portaient des perruques. consoleune des ses amies devenue chauve,en lui disant de


■*207 —Le—prendre une perruque d'Allemagne. Saint-Grégoire, de Tours, loue la piété de Sainte-Gorgonieparce qu'elle ne portait ni cheveux frisés, ni perruques capables de déshonorer sa vénérable tête partenu k Constan-—leurs déguisements. Concile,tinople, en 692, excommunia ceux qui avaient descheveux bouclés, frisés ou artificiels.Malgré l'analhème du Concile constantinopolitain,les ecclésiastiques prirent la perruque, en 1660.Le premier qui s'en servit fut l'abbé de la Rivière,évêque de Langres, surnommé k cause de cela, lepatriarche des perruques. En 1676, les chanoinesde Reims suivirent l'exemple épiscopal et le scandale fut tel, qu'en 1689 l'abbé Thiers se décida kécrire l'Histoire des perruques. Dans ce livre, ontrouve un procès fort curieux qui eut lieu entre lechapitre de l'église cathédrale de Beauvais et lechanoine Raoul Joyqui portait perruque et quiavait eu l'intention de dire la messe sans l'ôter.Jean de Balesden,aumônier de Louis XIV etmembre de l'Académie française, dut présenter unesupplique au cardinal de Vendôme, légat du papeen France,pour avoir la permission de dire lamesse avec une perruque.Je vais vous dire la réponse textuelle de SonEminenee :« Louis, Cardinal, Diacre du titre de Sainte Marie In porticu, légat a latere de notre très-saintPère le Pape Clément IX et du Saint-Siège versLouis XIV, roi de France et de Navarre, et dansl'étendue de ses Etals. Nous,ayant égard k latrèshumblesupplication qui nous a été faite de la partde notre irès-cher fils, Jean de conseillerBalesden,et aumônier du roi, de lui accorder la permission


—208 —de dire et célébrer la sainte messe avec une perruque fort modeste, et comme on les fait à présentavec une tonsure et une couronne ; en considérationde sa vertu, piété, mérite et de son âge ou infirmité,lui accordons ladite grâce ; et pour cet effet, nousenjoignons à tous supérieurs et autres à qu'il appartiendra, de le recevoir quand sa dévotion le requerra, pour célébrer, en vertu de sainte obédience,et par le pouvoir que nous tenons de la pure grâcedu Saint-Siège et de notre saint-Père. Donné à—Paris, le 28 mai 1668.Signé : le Cardinal de Vendôme, Légat.De Bonfils, auditeur et secrétaire.Je n'entends pas par cela remuer comme l'abbéThiers les foudres de l'Eglise contre ceux ou cellesqui portent perruques ou faux cheveux ; je n'entendspas non plus faire maintenant l'énumération de tousles inconvénients hygiéniques qui s'attachent à cesfausses choses qui déforment la tête de nos femmes—d'Europe. Je déclare seulement que ni à Florence, ni à Rome, ni à Paris, ni à Londres je n'airencontré aucune Vénus, aucune Eve, aucune Madleineavec de faux cheveux; et je citerai ce que lepoète espagnol Martial écrivait à une femme romaine du temps de lwmpire de Néron, appelée Galla,ou la Gauloise :h Tu n'es qu'un amas de mensonges. Lorsque jete vis à Rome, les cheveux étaient de ceux quiavaient poussé sur la tête des femmes du Rhin. Chaque soir, tu mets les deux tiers de ta personnedans des coffres. Tes joues et tes sourcils sont facturés par tes esclaves. Il n'y a personne qui puissedireje t aime, car tu n'es pas ce que l'on aime, etpersonne n'aime ce que tu es. »


-209—COSMÉTIQUESPour se former une idée du rôle que les cosmétiques, c'est-à-dire les prétendus facteurs de la beauté,ont eu dans les mœurs et l'existence de la femme,il faut remonter au temps We l'empire romain aumoins. Bottiger a fait de main de maître le tableaude la toilette d'une dame romaine. —Sabine, dit-il,en se couchant le soir, se couvre la figure de miede pain trempée dans le lait d'ânesse. Le matin, ense réveillant, elle claque des doigts pour appelerde cette façon une nuée d'esclaves cosmètes, quisont chargées, l'une après l'autre, de lui arrangerla figure de façon qu'elle puisse recevoir les visiteurs. La première débarrasse la peau de l'emplâtredu soir, une autre fait disparaître les rides, unetroisième la blanchit, une quatrième la farde. Puisviennent celles qui doivent placer les faux sourcils,les fausses dents, les faux cheveux ; puis les autresqui doivent teindre les yeux, les cils, les sourcils,les cheveux, en noir ou en roux ; puis les autresqui ont l'office d'arranger, de nouer, de friser,d'épingler, de parfumer, de poudrer la chevelure,vraie ou fausse, avec de la poussière d'or ou d'argent. Lorsque la dame se regarde dans son miroird'argent poli, malheur à celle qui n'a pas rempli sacharge selon le goût ou le caprice de sa maîtresse ! . . .Elle lui enfonce de longues épingles dans les chairs,ou l'abandonne à un homme, un esclave, un argousinappelé lorarius, lequel l'attache par les cheveux et la fouette à plaisir ! Je vous fais grâce dureste, nous ne sommes plus au temps de l'empireromain.Les cosmétiques proprement dits, ont presquedisparu de la toilette de nos dames ; ils ont été ré-27


—EllesCependantcarlégués dans les cabinets de§ artistes de théâtre. Et—c'est fort heureux les préparations de plomb,de soufre, d'antimoine, de bismuth, d'argent, dezinc, de chaux, de mercure, d'arsenic, mises jadiseii usage pour conserver une beauté qui manque ouqui passe ne font que favoriser les ravages du temps.altèrent la couleur de la peau, la rident,l'irritent, lui enlèvent toute fra.îch.eur, la couvrentde dartres et d'érysipèles. Elles peuvent même donner lieu à des coliques, à des névroses et à de plusgraves inconvénients, ainsi qu'ilarriva, il ya pende temps, chez une troupe d'un théâtre de Paris, àcause du blanc de fard.Pour se dégoûter de ces pernicieuses habitudesil u ayqu'à considérer de près les Mauresques lorsqu'elles ont leur figure enluminée avec de la çéruseet du carmin, des névis et des paillettes, leurs yeuxleur sourcilsnoircis par le sulfure d'antimoine,Îieints en noirs, leurs cheveux brûlés par la chaux,eurs mains et leurs pieds badigeonnés par le henné.Ce qui nous reste et dont on peut se servir, cesont les savons, les pommades et les eaux aromati—ques. il laut remarquer que les odeursfortes peuvent devenir nuisibles ou incommodes àsoi-même et aux autres. Les graisses des pommades ne servent qu'P enduire les cheveux et la peaudu crâne d'une couche de vernis qui arrête la poussière, gêne la transpiration et favorise la calvitie.Pour entretenir la chevelure le meilleur moyen consiste à la laver de temps en temps, à frotter les cheveux avec de l'huile d'olive ou d'amandes douceslégèrement parfumée, à les attacher doucement et, àne les faire jamais servir de support à des paquetsde on ne sait quoi. Contre la — chute des cheveuxle seul remède est le rasoir, ou les ciseaux.


—car—211La—Après cela faisons table rase de tout ce fatras deparfumerie, de tous ces spécifiques pompeux quine servent qu'à —nuire, ou à vous tromper. LaFontaine de Jouvence prend sa source dans unebonne hygiène et une vie régulière ; le Régénérateurvrai réside dans le sang ; l'Eau de Zénobie esl l'eaufraîche, l'eau pure,—l'eau limpide. fraîcheur,l'incarnat du teint, dit Lévy, les attributs flatteursde la beauté sont au prix de la santé générale. Unrégime bien ordonné, la sobriété et la modérationen toutes choses, sont les cosmétiques les plus sûrset les plus irréprochables.XHYGIÈNE DE LA MORTMesdames et Messieurs,En commençant ces cours, nous avons dit quel'hygiène est l'art de vivre longtemps et en bonnesanté. Nous avons tout de suite ajouté que tout cenous avons même cité les deux versdu poète italien, lequel déclare avecbeaucoup desagesse que l'on commence à mourir dès que l'onqui vit meurt ;naît :S'incomincia a morirQuando si nasce .Nous avons affirmé sans hésitation que cela étaitjuste ; la vie animale, la vie de tous les êtresorganiques, la vie même de tout ce qui existe nes'entretient qu'au prix de tout ce qui l'entoure,qu'au prix de cette loi éternelle et générale qui veut


—tu—que le gros poisson mange le petit, et que Darwin alutte pour la vie. Si la natuappelé struggle for life,re n'était pas un vaste, un immense cimetière, la vieanimale et la vie végétale n'existeraient plus, ellesdisparaîtraient de la face de notre globe.Lorsque nous avons parlé de l'hygiène de l'estomac et que nous avons fait un peu de chimie culinaire, nous avons commencé par dire que dans lacuisine il n'yavait que cadavres de plantes et cadavres d'animaux, que la seule substance minéraledont nous nous alimentons esl le sel. Si la ma—tière n'était pas en mouvement continuel et éternel,si par ses diverses combinaisons et transformationsnon interrompues elle ne donnait pas lieH au développement de ces forces, de ces phénomènes quinous étonnent et qui régissent l'harmonie du monde, la circulation de la vie serait vite interrompue. Nous avons remarqué avec Helmhotz que sil'on parvenait à arrêter la terre tout d'un coup, laforce de son mouvement se transformerait en calorique,qui la chaufferait de 100,000 à 150,000degrés et la réduirait en vapeur. — « Les premiersanneaux, écrit Moleschott, de la chaîne de la vie animale s'attachent à l'impulsion de la force plastiqueL'oxygène qui alimentequi fait naître les plfcites.la flamme forme en grande partie le sang, lequel vaconstituer les tissus ; l'échange moléculaire deceux-ci engendre la pensée ; puis le sang et le cerveau sont de nouveau transformés à l'aide de l'oxygène en simples combinaisons qui nourrissent etmûrissent le bourgeon végétal. Aussi ya-t-il mortdans la vie et vie dans la mort ; mais cette mort n'arien de. lugubre, rien —d'effrayant, car dans l'airet dans la putréfaction, se trouvent et circulent lesgermes toujours en mouvement de la renaissance. »


—213 -—D'après ces données, nous avons fait quelquesexcursions rapides, trop rapides et trop incomplètes, sur l'hygiène des fonctions individuelles. Nousavons cherché les règles à suivre pour favoriser, outout au moins pour ne pas déranger la nutrition, lacirculation, la locomotion, la respiration et la transpiration. Nous avons,par conséquent, examiné encourant les aliments et les boissons, le travail et lagymnastique, les habitations et les habillements :nous avons commencé par les dents et nous noussommes arrêtés aux perruques; des agapes desEsquimaux dans une baleine pourrie, nous sommesarrivés au repas quotidien de deux jaunes d'œuf parjour de l'octogénaire Cornaro de Venise.Beaucoup de choses, immensément de choses,nous resteraient à dire et k examiner, même enpassant sous silence celles qui, bien qu'en République et sous le gouvernement du suffrage universel, nous sont défendues,parce qu'elles se rattachent à la politique.Or, comme par des raisons qu'il est inutile d'énumérer,il nous convient d'interrompre,pour lemoment, nos cours, et de nous séparer pendantquelque temps, je juge à propos d'ajouter à ce quej ai pu et que j'ai su vous dire sur la vie, quelquesmots,quelques idées hygiéniques sur la mort.—Après l'art de bien vivre, l'art de bien mourir.S'il est vrai que l'hygiène a pour but de prolongerl'existence, il s'en suit, par conséquent, qu'elle doitenvisager la mort en face et la reculer autant quepossible, en la dépouillant de toute la peur et detoutes les terreurs dont les superstitions et l'orgueilhumain l'ont entourée. S'il est admis que les extrêmes se touchent, il est évident que les mêmesténèbres enveloppent le point de départ et le point


Est-cedestinée—214 —tanttantd'arrivée de notre existence : avant, comme après,notre ignorance est complète. Quittons donc toutecrainle et toute horreur; faisons l'hygiène de lamort.Fatum !—inéluctable ,universelle ,tout ce qui vitéternelle, brutale, si vous —voulez,doit mourir, se transformer, payer sa dette ànature. — Celachacun et pour tout,—a été et cela sera toujours—existera telle qu'elle est—lapourque noire planèteque l'homme vivrad'air et de sang.Ce qui est nécessaire el absolu ne peut pas êtreun mal : une pareille proposition serait un blasphème contre la Nature.Pourquoi donc nous plaindre ou nous effrayerde la mort ? Est-ce que nous nous plaignons ounous nous effrayons de la nuit ou du sommeil, del'inconscience du premier âge ou de l'apathie dn—dernier ? que la parabole vitale que nousparcourons tous également de l'enfance à la vieillesse,ne nous prévient pas, peu à peu, que cet admirableorganisme composé d'oxygène, d'hydrogène, d'azoteet de carbone, quipense, agit, se meut, parle et sereproduit, doit rendre à l'atmosphère, au milieuambiant de tous lettres, l'oxygène, l'hydrogène,l'azote et le carbone^lont se compose la plante, etles sels aussi dont sont formés les minerais?...Est-ce que cette sublime faculté de reproduire—nous-même notre espèce, est-ce que les deux—mots tant répétés : croissez et —multipliez, nenous préviennent pas dès notre origine qu'il fautdisparaître de l'espace et du temps pour conserverl'harmonie, l'économie, le progrès de l'espèce humaine ? .. .» Rien de rien, dit Lucrèce,et rien ne se trans


~~LaIl-215Que—Assez—-forme en rien : Esc nihilonihil, m nihilum nilpasse reverti, mort est un devoir : il fautdonner ce que. nous avons reçu. — > La cellule,l'ovule qui a été fécondé, vivifié, nourri par ceuxqui ont existé, doil féconder, vivifier, nourrir de sadécomposition ceux qui viendront après lui. Lapériode de la multiplication est le point culminant,l'apogée, l'apothéose, pour ainsi dire, de l'espècehumaine ; elle se trouve placée entre la naissance etla mort naturelle ; elle est limitée, circonscrite entrela croissance et le déclin ; elle nous dit dans un langage que tous les êtres répètent :! votredroit est satisfait, accomplissez votre devoir, faitesplace à ceux que vous avez engendrés,on ne peutpas exister a l'état de parasités, rentrez dans la vieuniverselle.Si Pascal a dit que l'humanité est un homme quivit toujours,— nous pouvons affirmer que l'hommese retrouve toujours dans l'humanité.Cette façon de considérer la mort fournit unmoyen sûr et rationnel de prolonger la vie et de laprolonger d'une manière moins triste et moins pénible qu'on ne le fait d'ordinaire.La mort, disons-nous, est un devoir, un devoirpeut-il donc yavoir kde tout ce qui vit.—redouter dans l'accomplissemenl d'un devoir commun à tous,auquel nul n'a jamais eu le pouvoir de—se soustraire? n'ya vraiment k craindre queavons mis de redoutable et d'horrible :ce que nousy—le législateur a inscrit la peine de mort commechâtiment suprême des crimes les plus atroces ;la mère répèle souvent k son petit enfant que s'il—n'est pas sage le Seigneur va le faire mourir; lepoète a peint la mort sous la forme d'un hideuxsquelette armé de faulx et entouré de cadavres qu'il


—la—216 ——Jefauche comme le moissonneur fauche les épis;Bible nous raconte que Adam et Eve étaientnés immortels, mais que Jéhova s'étânt aperçu qu'ilsavaient goûté du fruit défendu de l'arbre de lascience du bien et du mal, le condamna à travailler et k mourir. ..Donc notre éducation nous apprend k considérerla mort comme une peine, un châtiment, un épouvantait, un mal.Cependant le niveau et la fatalité du trépas ne sontpas seulement une loi d'égalité universelle absolue, devant laquelle l'ambition et la puissance humaines doivent s'humilier, mais un fait qui doit nousfaire triompher des terreurs et des superstitionsque l'on a si follement accumulées autour destombeaux.Si 1 egoïsme s'indigne de ne pas posséder de privilège et tremble devant la loi égalitaire de la nature, l'amour se résigne et prend patience ensongeant au devoir et à la nécessité de la mort. —Or, ce qui rassure et calme une mère ne saurait êtreà redouter, car la véritable tendresse ne se trompejamais.Dans trente ans d'exercice professionnel ,j'aisouvent assisté à laAaissance et à la mort, aux épidémies et aux guewes. puis donc dire elaffirmer que j'ai vu plusieurs fois quelques hommescourageux guérir de maladies qui auraient fait succomber des hommes peureux ; j'ai vu des personnes saines et robustes, en pleine jouissance desanté, être enlevées d'un moment à l'autre par lesmaladies épidémiques, à cause seulement de lapeur de mourir ; j'ai vu des soldats gaillards et bienportants, fuir par lâcheté du champ de bataille,pour aller mourir de convulsions dans l'hôpitalquelques heures après.


—duil—217 —il—ilIIhygiène'La Fontaine de Jouvence, disions-nous l'autresoir, prend sa source dans une bonne 'etdans une vie régulière : fhygiène de la mort, dirons-nous ce soir, consiste à n'en avoir pas peur,à ne pas user l'existence par une pareille préoccupation, en songeant plutôt qu'il faut rendre à quidç droit ce corps qui ne nous appartient pas, cecorps que nous avons en location, car, dans la circulation-de la vie, il a servi au premier hommeaussi bien qu'il servira au dernier.Et, en vérité, qui voudrait parmi nous vivreseulement l'âge de Mathusalem, le grand'pèré deNoé, qui vécut, dit-on, 969 ans? faut être roi—et le roi David pour se cramponner à la vie de façon à condamner la pauvre jeune fille Abisag, deSunam, à réchauffer un corps déjà refroidi par—la vieillesse et la débauche ; faut être possédéspar le démon du moyen-âge pour ne pas reculerdevant la transfusion du sang ; faut s'appelerle pape Innocent VIII pour croire et admettre qu'unbain de sang d'enfants ait la vertu de prolonger—la vie ; faut être fou comme Paracelse pourchercher un Elixir dt longue vie dans l'or potable ;il faut être académicien comme Màupërtuispour enduire le corps de graisse à la façon desEsquimaux et croire qu'avec cela on résisterait àFaction destructive de l'air ! . . .D'un autre côté on ne doit pas penser k la morttrop à ta légère en jetant, comme on dit, le bonnetpar-dessus le moulin, ni penserydu matin au soiren tons les jours sa fosse : le débauché etle trappiste ne savent pas apprécier la vie.Le dédain, ou le mépris de la vie 'est plus qu'unenous sommes occupés de—faute, un crime. Nousl'hygiène parcequ'ellé nous apprend k conserver


LeSISl'existence aussi longue et aussi saine que possible ;nous ne pouvons donc pas avoir maintenant l'intention de faire l'apologie de la mort.—Lescivilisations se mesurent par la durée moyenne de la viedelà population tout entière et nous pouvons nousmalgré lesréjouir et nous vanter, que, de nosjours,désastres el les catastrophes, malgré les vices ellesinjustices qui affligent notre société, la durée de lavie humaine s'est élevée et s'élève toujoufs.Cet important résultat ne s'obtient qu'en diminuant les causes de destruction provenant de lamisère et de l'ignorance, du despotisme et de la—lâcheté. Prométhée moderne apprend aujourd'hui aux masses la chimie et la physique, la physiologie et l'hygiène. Liébiga écrit qu'après lesprogrès de la chimie et la découverte de l'oxygènela prospérité des Etats et la richesse des individus sesont accrues de beaucoup. Dans les Etals barbares,dit-il, où les impôts sont mal répartis, une classeest exposée à la famine, aux souffrances et à lamort; toutes les nations qui entretiennent desarmées permanentes nombreuses n'ont que l'apparence de la force, parceque une saignée continuelleleur ôte le meilleur sang et la sève la plus vivifiante,leur puissance ressemble à l'ivresse du sauvage,lequel perd en mêmel temps, lorsque l'ivresse sedissipe, le courage et la force.Or, la terre est un grand Etat, oùl'économie,l'ordre, l'harmonie, l'existence et le bien-être,dépendent de cette vicissitude continuelle de vie quenous aimons tant, et de mort que nous craignonsdavantage. Sur la base d'une fausse donnée,sur lesdéductions de quelques faits particuliers, exceptionnels, passagers, inconcluants, Malthus a élevél'échafaudage, j'allais presque dire l'échafaud le


—219-plus épouvantable que l'on ait jamais dressé enface de l'humanité. Il a dit : toute cause de destruction abolie, l'espèce humaine se multipliera en raison géométrique pendant que la production desmoyens de vivre ne pourra jamais se faire, au maximum, qu'en progression arithmétique. Cet économiste a calculé que tous les 25, voire même tous les20 ans, la population se doublera comme 2, 4, 8,16, etc., et la production ne s'élèvera qu'à 1, 2,3, 4, etc. -Donc, si l'humanité parvient un jour,ainsi qu'il faut l'espérer, k supprimer la guerre,la misère, les vices, les épidémies, l'exploitationde l'homme par l'homme et toutes les causes sociales de destruction, nous serons vite réduits, selonMalthus, à nous manger les uns les autres, commeles cannibales des régions septentrionales du Congodu temps de Lopez, ou, ce qui n'est guère pluscommode,à nous arranger de tellesorte que lamultiplication de l'espèce soit toujours en rapportavec la production des aliments. Pauvre Malthus !—pauvres Malthusiens ! voilà à quoi mène une erreurde calcul,c'est-à-dire une théorie basée sur deschiffres qui ne sont pas,qui ne peuvent pas êtrepratiquement exacts. Cependant Malthus était unéminent économiste; les Malthusiens sont, même àleur insu, des calculateurs, des banquiers; maisautre chose est la multiplication des intérêts des intérêts, autre chose est la reproduction du genrehumain. Ce qui est arrivé à l'émigration européenneen Amérique aussitôt après sa découverte, ou cequi peut arriver dans l'espace circonscrit et restreint d'une île, ne doit pas servir de règle pourfixer la force reproductive de la masse des hommes.La théorie des Malthusiens ressemble au projetde la paysanne, qui, allant au marché avec un


panier d'œufs sur la tête, comptait ce qu'elle lesaurait vendus, ce qu'elle aurait gagné, te qu'elleaurait fait du bénéfice, jusqu'à ce qu'elle s'imaginâtd'acheter en peu de temps le château et là fermeoù elle était chargée de garder la bassé-cour. A cemoment l'extase lui fit oublier le panier qu'elleaVait sur la tête^ elle fit un bond de joie et son rêvese traduisit dans une omelette sur le pavé. Ce quiproduit les funestes extravagances des Malthusiensn'est certes pas la joie, mais la peur, l'égoïsmé,l'avidité des jouissances matérielles. Eh bien ! queces philanthropes d'un genre tout nouveau se fttesiirent! Il restera toujours dés causes naturelles dedestruction que l'on rie pourra jamais supprimer etqui empêcheront toujours la multiplication par progression géométrique du genre humain, commeelles l'empêchent et l'ont empêché pour tous lesgenres et toutes les espèces du régné organique. Ceque Malthus craiilt pour l'homme, devrait déjà êtrearrivé pour les animaux, qui n'ont inventé ni lesrizières, ni les mitrailleuses pour tuer les Uns auprofit des autres.Le Célèbre Linnée fut le premier à faire lé calcul,que chacun peut promptement refaire; qu'un arbrequelcobque né pressant que deux graines par an,si ces deux graines reproduisaient à leur tour deuxarbres portant deux autres graines chacun, au bonidu êourt espace de vingt ans, l'arbre en question setrbuverait multiplié par un nombre dé 1,032,576—individus, chose que personne he verra jamaisarrriver, sans se donner aucune peine pour l'empêcher. Dans les différentes espèces du règne—animal, comme dans l'espèce huimine, il existeet il existera toujours une sérié d'êtres qui se prêtent à celte loi de la lutte pour la vie* c'esl-à-dife


forcément—211—une série d'individus moins perfectionnés, moinsprogressifs» moins intelligents, moins actifs, moinscondamnés à—vigoureux disparaîtrepour laisser la place à ceux qui sont plus favoriséspar la nature. C'est en cela que réside l'harmonieuniverselle. Quoi qu'on fasse, toutes les races humaines ne formeront jamais une seule et uniqueespèce: on ne supprimera jamais, par exemple,l'influence du climat, ni l'influence de la civilisatien.Je vous disais un soir que l'Arabe» inerte etignorant, est fatalement condamné k disparaître aucontact de l'Européen actif et intelligent ; dansl'Océanie, 20 millions d'indigènes disparaissentde jour en jour ; en Asie et en Amérique, lesPeaux Rouges s'en vont ; en Afrique, le Nègie necoexistera pas longtemps au contact du blanc, aussitôt que les chemins de fer traverseroht le désert.Dans l'avenir, dans la continuité dés Siècles, cescauses et ces phénomènes subsisteront; la mortse chargera toujours, sans que nous nous eu préoccupions, de faire place à la vie. Est-ce que l'ons'est jamais soucié de maintenir l'équilibre desa toujours eu autant d'homsexes ? Cependant, il ymes que de femmes. La Nature estprévoyante.Confions-nous à ses lois ; ne craignons pas la vie,ne craignons pas la mort.Mais, dira-t-on,rien n'est plus triste et plusaffligeant que de voir mourir !... L'agonie est souvent une scène de douleurs, décris, de convulsions,de délire, de souffrances qui déchirent le cœur !...Oui!... c'est triste et navrant!... II faut cependant considérer que ces genres de mori sonl ceuxd'une société imparfaite et vicieuse, où l'on succombe d'ordinaire victime de ses passions, ou décelles des autres.


-222SesPar-Nous savons que la vie est, ou devrait êtrevieillesse ne s'accomplit pas,une parabole, une courbe où l'homme monte, s'ar—rête et descend. Lorsque cette parabole del'enfance à lal'écomievitale est tronquée, interrompue violemment :—les forces organiques résistent, il ya lutte ; lamort est douloureuse parce qu'elle n'est pas naturelie. — Quede vies arrêtées dans leur développement par un travail trop prolongé,par un régimeinsuffisant, par une foule de passions et de vices,qu'un peu d'instruction ou de moralité aurait évités ! . . Est-il donc étonnant que ces existences,tranchées avant l'heure, se révoltent pour ainsi direcontre une destruction précoce,et qu'il s'engageune lutte douloureuse quand la nature persiste àanjmer une matière usée ?...La vie qui s'éteint naturellement n'a rien d'effrayant; elle se retire avec calme, sans efforts, sansviolences, sans douleurs. Au crépuscule de la vie—l'homme meurt en détail. fonctions organiques perdent progressivement leur activité les unesaprès les autres, les sens se ferment peu à peu ;ainsi isolé,petit à petit du monde, le vieillard arrivetranquillement à l'heure du repos suprême. Lemédecin écossais Vb Kunter disait en mourant àl'âge de 65 ans : «rSi j'avais la force suffisantepour tenir une plume j'écrirais combien il est douxde mourir. »Ce qui épouvante, ce qui tourmente l'humanité—eiUl'outre-tombe, le par de là la mort ! Pourquoi tant d'anxiété? Est-ce que nous connaissons—le monde antérieur à noire naissance? deçà,comme par delà la mort il ya l'océan, l'océan dela pensée. Bien des — voyageurs sont partis, aucunn'est revenu ; aucune histoire, aucune géographie,


—les—223UneLeCe—leles—aucunedescription, aucun témoignage de l'autremonde. On a demandé des ailes, mais on n'a eu queles ailes de l'imagination et on a fait le vol d'Icare— on est tombé dans la mer de -l'inconnu. Orphée, Enée, Danle ont prétendu descendre auxenfers ; on a inventé des descriptions à faire dresserles cheveux de marbre sur la tête des statues!—Qu'en est-il résulté?-scepticisme funeste.terreur folle, ou unparadis a été fabriquéselon le goût et les croyances de chaque peuple :les Grecs et les Romains ont imaginé l'Olympe poulies Dieux et les demi-dieux, les Champs-Elyséespour les héros et les philosophes ;peuple d'Israël disait simplement qu'il allait rejoindre ses pères—; les Indiens et les Scandinaves yont plantédes grandes forêts où l'on continue à chasser et ilsemportent en mourant leurs armes ; le Musulman croit troquer son harem contre les houris éter—nellement belles ; nous yavons placé la musiqueavec des chœurs d'anges et d'archanges...—Que conclure après cela? qui disait Socrate: Je sais que je ne sais rien !. .Ce qu'il ya de plus extravagant ou de plus curieuxest l'histoire des tombeaux, c'est-à-dire l'histoirede la protestation du désespoir contre la loi inexorable de l'anéantissement, c'est-à-dire l'histoiremonumentale de la vanité posthume. L'Egypte,—où la vie n'était qu'une longue préparation à la mort,nous a transmis dans ses tombes les monuments les—plus grandioses de l'architecture pyramides ;Romains élevaient des Mausolées qui ont pu—servir et servent encore de forteresse le châteauSaint Ange de Rome n'est que le mausolée del'empereur Adrien.A présent que la disparition des esclaves et des


~où—ne—ernpereurs nous impossible la construction deren


Sachons—225—époux en lui disant : Péto, cela ne tait pas de mal ;—Catherine Riario Sforza qui sacrifie ses fils laissésen otage, en criant aux soldats du pape qui l'attaquaient :—Tuez-les, j'en aurai Charlesd'aulres;Quint, qui s'essaye dans la bière avant de mourir,—sont des types malades d'une époque qui n'estpas la nôtre.Ni mépris, ni crainte. — N'ayons pas peur de lamort, n'en faisons pas un épouvantail à nos enfants,n'abrégeons pas notre vie avec les terreurs d'outretombe,respectons le mystère, impénétrable peutêtre.vivre nous saurons mourir.— —La peur de la mort fait commettre toutes les—bassesses, toutes les folies, tous les crimes. Parpeur de la mort l'esclave se traîne au pied du tyran;par peur de la mort le citoyen qui doit défendrepatrie et famille fuit devant l'ennemi et abandonnetout ce qu'il a de plus cher aux horreurs de la guerre ; par peur de la mort en temps d'épidémie lamère abandonne son enfant ; par peur de la mort onabsout le crime et on condamne la vertu ;de la mort on trahit honneur et patrie,avec l'ennemi !...Rien au contraire n'est plusbeau,par peuron pactiseplus solennelet plus sublime que l'homme qui garde sa conscience—et sa sérénité lorsque la vie l'abandonne ;r quel'homme qui de sang-froid voit venir l'heure fatalesans crainte et sans inquiétude, sans superstition et—sans cynisme ; que l'homme, que le héros qui,convaincu d'avoir fait son devoir, tout son devoir,rien que son devoir,s'appuie avec calme à ce mauditpoteau où l'on va le fusiller, écoute sans faiblesse etsans murmure la sentence prononcée par ses ennemis et tombe résigné dans la fosse,Pas de vengeance !...en répétant :29


—Gymnastique—Bains.TABLEPage*I. Introduction. Historique. Idées — générales.Apborismes 5II. Division de l'hygiène. Fonctions digestives.Faim. Soif. Mastication. Dentition.—Hygiène de la bouche 25lit. Classification des aliments. — Inorganiques:Sel. Eau. Organiques et toniques : Viande.Lait. QËufs. Pain53 mIV. Aliments caloriques. Huile. Beurre. Grais—se. Légumes. Fruits 79V. Aliments nerveux. Vin. Café. Tabac. Coca.—Kaad.... 93VI. Hygiène gastronomique. Nutrition. Règles—culinaires 122VIL Hygiène du coeur.1 44VIII. Hygiène des poumons et de la voix. Air.—Habitations. Gymnastique pulmonaire 168IX. Hygiène de la beauté.Habillements. Cosmétiques 189X. Hygiène de la mort. Art de bien mourir. — 211

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