Splendeurset misères desloges d’AjoieIl s’agit des loges à bétail, bien sûr,pas des loges maçonniques.Mais au fait, qu’est-ce qu’une loge ?Voici la description qu’en donnentIsabelle Roland et Jean-Paul Pronguédans l’ouvrage Les maisons rurales ducanton du Jura, édité par la sociétésuisse des traditions populaires :Les loges destinées à abriter le bétailen estivage parsèment les pâturages.La plupart des exemples observésne sont pas datés, mais semblent remonteraux XIX e et XX e siècles, seulela loge de Sous-la-Chaux, dans lacommune d’Asuel, présentant le millésime1797. Il s’agit de constructionstrès simples, le plus souvent d’un niveausous un toit à deux pans, élevéesen maçonnerie ou en bois sur un soubassementde pierre. Une porte assezlarge, percée dans le mur gouttereauou, moins fréquemment, sous le pignon,constitue le seul accès pour leshommes et les bêtes, tandis que desouvertures relativement étroites assurentla ventilation. A l’intérieur,l’étable occupe toute la surface, lescrèches et les râteliers étant aménagéssur un ou deux côtés. A proximité dela construction, on trouve une fontaineou une citerne pour abreuver lebétail. Quelques loges abritant unehabitation pour le berger s’apparententaux fermes modestes de leur région.Voici donc le décor planté.Les recherches de l’ASPRUJLaissez-passer délivré àCharles-Auguste Broquet,vétérinaire aux Franches-Montagnes.Dans le cadre d’un inventaire généraldu domaine rural mis sur pied parle canton du Jura dans les années1990, l’ASPRUJ lance un inventairedes loges à bétail du Jura. Elle fait appelà des bénévoles. Dix-sept personnesprovenant des six districts jurassiensrépondent à l’appel. Elles sontconvoquées le 18 janvier 1994 à l’Hôtelde la gare à Moutier pour le lancementde la campagne d’inventaire.Sous la direction de Pierre Froidevaux,alors président de l’ASPRUJ, lesgroupes de travail sont formés, la formuled’inventaire arrêtée. L’ASPRUJfournit même une sorte de laissezpasseraux enquêteurs pour faciliterleurs démarches.C’est le début d’une opération quidurera plus de deux ans.Que reste-t-il de ces inventaires ? Ilsemble qu’ils ont été menés avec unzèle très variable selon les régions.Une trace subsiste toutefois dans lesarchives de l’ASPRUJ. Trois classeurscontiennent les inventaires réaliséspar Daisy Lüscher, de Rocourt.L’enquête de Daisy LüscherDaisy Lüscher a procédé à un relevéexhaustif des loges des communesde– Courtedoux, 10 loges– Roche d’Or 5 loges– Damvant 14 loges– Rocourt 13 loges– Réclère 7 loges– Grandfontaine 26 loges– Bressaucourt 3 loges– Bure 10 loges– Fahy 21 loges– Chevenez 55 logessoit en tout 164 loges.21
Le répertoire comprend des informationssur la situation générale de laloge, ses dimensions, son utilisation,ses caractéristiques architecturales,son état général, son mode d’alimentationen eau et le nom de son propriétaire.Chaque fiche est accompagnéede trois photos, en noir blanc leplus souvent, prises sous différentsangles.La plupart des loges sont en mainsprivées, onze loges appartiennent àdes communes, deux loges à des paroisses,deux au canton du Jura et uneà la Confédération.Les loges sont construites pour laplupart sur plan rectangulaire, ellescomportent un ou deux étages, sont le22Daisy Lüscher, dansson jardin à Rocourt.plus souvent recouvertes d’un toit entuiles à un ou deux pans. Les couverturesen tôle (six loges) ou en éternit(neuf loges) ne font qu’une timide apparition.Elles ont en moyenne uneassise de 64 m 2 , la plus petite occupant8 m 2 et la plus grande 299 m 2 .Leur état général d’entretien variedu niveau excellent à l’état de ruine.Quant au mode d’alimentation en eau,quand celui-ci est répertorié, ontrouve 63 loges recueillant l’eau depluie dans une citerne, 12 loges avecune citerne mobile, 8 loges alimentéespar une source et 3 loges reliées au réseaud’eau communal.Daisy Lüscher parcourait la campagneparfois le matin, parfois l’aprèsmidi.Elle était toujours accompagnéede son chien. Avant de partir, elle repéraitles loges à visiter sur une cartetopographique. Elle consultait égalementles administrations communalespour obtenir des informationscomplémentaires.« Je connaissais chaque chemin,chaque arbre », dit-elle. « Si cet inventaireétait à refaire, je le referais. Je n’aique des éloges à formuler par rapportau projet. Ce fut un temps phénoménalpour moi, une période très positive.J’avais un but. Ça m’a ouverte aupays, ça a élargi mon horizon. Lespaysans rencontrés étaient toujoursaccueillants. Même si ce que j’ai faitne sert à rien, je l’ai fait. J’ai exploré