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CRITIQUES DISQUES<br />
amateur de musique chorale.<br />
ÉRIC CHAMPAGNE<br />
Schoenberg: Symphonie de chambre n o 1 op. 9,<br />
Suite op. 29<br />
Ensemble Zahir/Juan García Rodríguez<br />
Naxos 8.5721442 (CD : 56 min 52 s)<br />
★★★★✩✩<br />
Bien que conçue et<br />
écrite pour quinze<br />
instruments (cinq<br />
cordes, huit bois, deux<br />
cuivres), la Première<br />
Symphonie de chambre<br />
(1907) est donnée ici<br />
dans la transcription<br />
qu’en a faite Webern pour cinq instruments, le<br />
piano remplaçant ceux qui ont été mis de côté.<br />
Cette transcription, menée avec un remarquable<br />
savoir-faire et une compréhension<br />
approfondie de l’opus 9, met en valeur la<br />
structure et les thèmes, mais elle sacrifie les<br />
sonorités voulues par Schoenberg, et peutêtre<br />
un peu de l’esprit iconoclaste qui<br />
l’animait, même si le principe de la tonalité n’y<br />
est pas encore abandonné. Quant à la Suite<br />
(1927), écrite pour sept instruments (trois<br />
cordes, trois bois, piano) et formée de quatre<br />
mouvements, elle subvertit avec ironie la suite<br />
de danses traditionnelle, intégrant aussi jazz<br />
et musique populaire sans tomber dans le<br />
fourre-tout du métissage. L’ensemble sévillan<br />
Zahir, fondé en 2005 par Rodríguez, défend<br />
cette musique avec conviction, mais on aurait<br />
souhaité un peu plus d’allant.<br />
ALEXANDRE LAZARIDÈS<br />
Schubert : Symphonie no 9 en do « <strong>La</strong> Grande »<br />
Royal Flemish Philharmonic/Philippe Herreweghe<br />
Pentatone Classics PTC 5186372 (57min 49 s)<br />
★★✩✩✩✩<br />
En 1826, après plusieurs<br />
essais inachevés,<br />
Franz Schubert termina<br />
enfin sa « Grande ». Elle<br />
fut jugée à l’époque trop<br />
difficile pour être exécutée<br />
convenablement.<br />
Depuis, elle a été enregistrée<br />
plus d’une fois par les plus grands<br />
50<br />
NOVEMBRE 2011<br />
orchestres. C’est une œuvre majestueuse et de<br />
grande proportion. Herreweghe, reconnu surtout<br />
comme chef de chœur et spécialiste de la<br />
musique baroque, a opté pour une approche<br />
plus légère : cordes sans vibrato, effectifs de<br />
l’orchestre réduits, tempi rapides… On reconnaît<br />
dès le départ sa signature : pureté des<br />
lignes mélodiques, clarté du discours musical,<br />
attaques précises de l’orchestre. Le chef<br />
conduit la Philharmonie Royale de Flandre<br />
avec beaucoup d’énergie et de virtuosité. Ces<br />
choix esthétiques peuvent plaire et surprendre<br />
dès la première écoute, mais ils peuvent<br />
aussi décevoir l’auditeur, habitué à plus<br />
de lenteurs et de grandeur solennelle. Ainsi,<br />
certains passages semblent manquer de<br />
lyrisme et de chaleur. On cherche en vain le<br />
drame et l’émotion dans certains mouvements.<br />
Dans les passages forts, la sonorité de<br />
l’orchestre devient parfois tapageuse. Et l’on<br />
remarque aussi quelques manques de justesse<br />
chez les vents. Finalement, le résultat d’ensemble<br />
est décevant malgré les qualités esthétiques<br />
mentionnées. Pour plus de profondeur,<br />
on préférera Wand (RCA), Böhm (DG) ou<br />
Blomstedt (BC). RENÉ FRANÇOIS AUCLAIR<br />
Schumann: Requiem - Der Königssohn -<br />
Nachtlied<br />
Sibylla Rubens, soprano; Ingeborg Danz, alto;<br />
Christoph Prégardien, ténor; Adolph Seidel, baryton;<br />
Yorck Felix Speer, basse; Kammerchor Saarbrücken;<br />
Deutsche Radio Philharmonie; Saarbrücken<br />
Kaiserslautern/Georg Grün<br />
Hänssler CD 93.270 (72 min 20 s)<br />
★★★★★★<br />
Cet enregistrement est<br />
un événement en soi.<br />
Trois œuvres chorales<br />
méconnues de<br />
Schumann sont illuminées<br />
avec panache et<br />
sensibilité dans cette<br />
gravure rien de moins<br />
qu’exceptionnelle. Presque mozartien dans sa<br />
fatalité, ce Requiem composé en 1852 (quatre<br />
ans avant le décès du compositeur) ne fut<br />
jamais entendu par Schumann. Il se déploie<br />
avec aisance et retenue, l’équivalent<br />
schumanien, dirait-on, du même exercice<br />
accompli par Fauré bien des années plus tard.<br />
Ici, Schumann semble confier son âme à son<br />
inexorable destin, à mille lieux des tourments<br />
dévastateurs de ses dernières années. <strong>La</strong><br />
beauté de ce chef-d’œuvre de spiritualité<br />
intime est remarquable. Son oubli et son<br />
obscurité, encore de nos jours, sont totalement<br />
incompréhensibles. <strong>La</strong> ballade<br />
Königssohn (Le Fils du roi), op. 116, date de<br />
1851 et raconte en six mouvements l’histoire<br />
d’un fils de roi qui part sans le sou à la<br />
recherche d’un royaume à conquérir.<br />
Typiquement romantique, le dévoilement du<br />
destin du héros, de son courage et de sa réussite<br />
complète une sorte de rite de passage<br />
caractéristique des contes anciens. Schumann<br />
accompagne le texte d’une musique édifiante<br />
et lyrique. Nachtlied, op.108, est une courte<br />
pièce pour chœur et orchestre, magnifiquement<br />
orchestrée, toute en subtiles teintes et<br />
contours harmoniques et vocaux.<br />
FRÉDÉRIC CARDIN<br />
Tabarinades<br />
Les Boréades/Francis Colpron<br />
ATMA Classique ACD2 2658 (CD : 59 min)<br />
★★★★✩✩<br />
Deux précisions fournies<br />
par le programme<br />
éclairent le titre du CD : «<br />
Musiques pour le<br />
théâtre de Tabarin » et<br />
« Danses et chansons<br />
françaises aux instruments<br />
(1550-1650) ». Il<br />
s’agit donc d’une musique pour un théâtre<br />
populaire, divertissant, certes, mais aussi<br />
critique à l’égard des travers sociaux de<br />
l’époque. Tabarin en avait été l’âme, et<br />
Molière n’a pas manqué de reconnaître en lui<br />
un précurseur et un inspirateur. Musique<br />
festive aussi, que les Boréades en grande<br />
forme, avec treize instrumentistes, réussissent<br />
à recréer pour nous, sous la direction<br />
attentive de Francis Colpron. Quelque trente<br />
pièces, dont plusieurs ont été adaptées par le<br />
chef, sont signées d’une quinzaine de compositeurs<br />
plus ou moins connus. Même enjouées<br />
et fortement rythmées par d’entraînantes<br />
percussions, elles semblent toutes empreintes<br />
d’une nostalgie, voire d’une mélancolie, venue<br />
du fond des âges, ce que l’on ressent en particulier<br />
dans celles qui sont réservées aux seules<br />
cordes, à cause de leur timbre voilé peut-être.<br />
À la flûte, Francis Colpron emballe son monde<br />
avec les pépiements et les gazouillements dont<br />
il a le secret. Un régal... pour les oreilles !<br />
ALEXANDRE LAZARIDÈS<br />
The Pulitzer Project<br />
Grant Park Orchestra and Chorus/Carlos Kalmar<br />
Cedille Records CDR 90000 125 (74 min)<br />
★★★★★✩<br />
Merveilleuse initiative musicologique que ce<br />
Pulitzer Project, qui nous fait revivre les<br />
années quarante, époque difficile, mais