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concerts - La Scena Musicale

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Au rayon<br />

du<br />

disque<br />

par MARC CHÉNARD et<br />

MARK CHODAN<br />

Aventures montréalaises<br />

Thom Gossage Other Voices: In Other Words<br />

Songlines SGL 1591-2 (www.songlines.com)<br />

★★★★✩✩<br />

Depuis dix ans, le batteur<br />

montréalais Thom<br />

Gossage défriche un<br />

sentier musical des plus<br />

originaux. Depuis 2001,<br />

il a réalisé cinq disques<br />

à la tête de son quintette Other Voices, dont ce<br />

dernier-né sur l’étiquette vancouvéroise<br />

Songlines. Par le passé, cet ensemble poussait<br />

sa démarche plus loin à chaque parution, cette<br />

nouveauté étant la plus audacieuse de toutes.<br />

Musique véritablement collective (sans tomber<br />

dans l’improvisation totale), elle estompe<br />

avec brio la ligne de démarcation entre l’écriture<br />

(les compos du chef) et le jeu d’ensemble,<br />

produisant une musique de chambre qui<br />

s’éloigne de toutes les formules jazzistiques.<br />

On félicite d’ailleurs le batteur pour avoir<br />

« expliqué » sa démarche dans les notes du livret<br />

(et on invite aussi les intéressés à lire une plus<br />

longue entrevue dans le site Internet du label).<br />

Aux côtés du chef, on retrouve ses fidèles saxos<br />

(Rémi Bolduc et Frank Lozano) ainsi que ses<br />

corythmiciens Steve Reagele (gtr.) et Miles<br />

Perkin (cb.). Cette musique pourra en désorienter<br />

quelques-uns, mais elle appelle vraiment<br />

à une écoute extrêmement attentive (et<br />

répétée aussi), chose rare de nos jours où les<br />

formules convenues et les lieux communs<br />

abondent. Impossible du reste de signaler un<br />

temps fort parmi les neuf plages de cet album<br />

de 58 minutes, car la somme dépasse ses parties<br />

constituantes. Autant pour la démarche<br />

que pour son exécution, cet album (du reste<br />

bien enregistré et mixé) mérite une bonne<br />

demi-étoile de plus. MChé<br />

Tilting : February 9, 2011<br />

Autoproduction de l’artiste<br />

★★★★✩✩<br />

Le contrebassiste Nicolas Caloia est un organisateur<br />

de projets de tous genres, parmi eux sa<br />

très grande formation, le Ratchet Orchestra<br />

(30 musiciens). Plus<br />

modeste, son quartette<br />

Tilting compte trois<br />

autres hardis complices,<br />

soit Jean Derome (sa -<br />

xos baryton et alto, flûte<br />

basse), le discret pianiste Guillaume Dostaler<br />

et le batteur polyvalent Isaiah Ceccarelli. Ni<br />

nostalgique, ni passéiste, ce disque nous rappelle<br />

pourtant à un certain jazz des années<br />

1960, son esthétique se situant au carrefour du<br />

hard bop – par ses thèmes d’une facture assez<br />

simple et d’une pulsation rythmique nerveuse<br />

– et d’un free jazz originel caractérisé par de<br />

longs solos énergiques mais pas débridés.<br />

Sous-tendu par la basse insistante, Derome se<br />

montre particulièrement pugnace dans ses<br />

interventions, réservant dans la troisième<br />

(Stare) un moment de répit à la flûte, jouée en<br />

mode ballade. Enregistré en février dernier<br />

dans une de nos maisons de la culture, cet<br />

ensemble est mû par une singulière urgence<br />

qui manque trop souvent dans les prestations<br />

de jazz d’aujourd’hui, un atout qui fait de lui un<br />

héritier direct du free bop. On apprécie que la<br />

musique ne soit pas trop léché, mais rugueuse<br />

à souhait, ce qui lui donne sa sève essentielle.<br />

Pour se procurer cette galette, on vous recommande<br />

fortement de le voir avec ses consorts<br />

en spectacle. MChé<br />

Pianos new-yorkais<br />

Matthew Shipp: The Art of the Improviser<br />

Thirsty Ear THI 57197 (www.thirstyear.com)<br />

★★★★✩✩<br />

Depuis le début de sa<br />

carrière dans les années<br />

1980, le pianiste Mat -<br />

thew Shipp est souvent<br />

comparé à Cecil Taylor.<br />

Certes, ni l’un ni l’autre<br />

n’a la langue dans sa<br />

poche quand s’agit de<br />

parler de son art, et ils sont des chefs de file<br />

incontestables dans le post-free jazz, mais il<br />

n’y pas vraiment d’autres points de comparaison<br />

entre eux, surtout en matière de style.<br />

(Certains souligneront le fait que les deux sont<br />

illustrés autant à la tête de leurs propres<br />

groupes qu’en jouant sans accompagnement<br />

aucun, mais les comparaisons finissent là.)<br />

Cet album de deux CD est justement consacré<br />

à ces deux aspects de Shipp. Pour le premier<br />

disque, il est en trio avec Michael Bisio (bassiste)<br />

et son ancien collègue du quatuor David<br />

S. Ware, Whit Dickey (batterie), alors que le<br />

deuxième nous le présente seul, en concert. <strong>La</strong><br />

musique de Shipp est constituée le plus souvent<br />

de blocs sonores entre lesquels l’improvisation<br />

vient établir un dialogue. Le concert<br />

JAZZ CRITIQUES<br />

entendu ici consiste en une suite de pièces de<br />

son cru les mieux connues, reliées par des<br />

improvisations que le pianiste lui-même<br />

décrit comme une sorte de canalisation du<br />

cosmos. C’est une performance remarquable,<br />

dans laquelle Shipp a moins tendance à s’égarer<br />

dans des imbroglios musicaux comme il le<br />

fait parfois. Sa musique est excessivement<br />

complexe, et le fait qu’il arrive à s’y retrouver<br />

est un exploit en tant que tel. Le disque du trio<br />

est aussi affirmatif. Dickey est un partenaire<br />

sensible, mais qui évolue dans un espace<br />

sonore tout aussi complexe. Bisio, le nouveau<br />

venu dans le trio, semble à son aise dans un<br />

rôle de soutien lyrique, surtout quand Shipp<br />

explore le registre grave. Comme d’habitude,<br />

M.S. s’impose d’une manière indubitable. et<br />

cela me rappelle un autre musicien de la<br />

même trempe… C.T., justement. MCho<br />

Craig Taborn: Avenging Angel<br />

ECM 2207 (www.ecmrecords.com)<br />

★★★★★✩<br />

De temps à autre, on<br />

reçoit un disque qui<br />

rafraîchit le genre et où<br />

le musicien lui-même<br />

se renouvelle. Craig<br />

Taborn est connu pour<br />

avoir été le pianiste du<br />

quartette fulminant de<br />

James Carter dans les<br />

années 1990. Depuis qu’il s’est établi à New<br />

York il y a dix ans, Taborn s’aventure dans de<br />

nouvelles voies, le plus souvent comme<br />

accompagnateur. Après deux enregistrements<br />

en trio avec piano et l’un en quatuor aux<br />

forts accents électroniques, son quatrième<br />

disque, Avenging Angel, est une offrande en<br />

solo admirable dont la prise de son splendide<br />

est digne de l’étiquette ECM. Taborn est un<br />

musicien doué d’une telle facilité qu’il court<br />

souvent le risque de se fier à sa technique<br />

éblouissante au lieu de s’adonner à de réelles<br />

explorations musicales. <strong>La</strong> beauté de cette<br />

performance tient à son humeur fantaisiste et<br />

à son refus conscient de toute virtuosité indue.<br />

Plusieurs morceaux sont très sobres, donnant<br />

l’impression qu’il effleure à peine les crêtes<br />

des masses sonores sous-jacentes. D’autres<br />

pièces abordent une technique de contrepoint<br />

que l’on trouvait déjà dans des enregistrements<br />

précédents (improvisation sur des<br />

motifs rythmiquement complexes). L’humeur<br />

générale est introspective, avec des abysses<br />

sous la sérénité de surface. J’y perçois des<br />

traces du phrasé de Lennie Tristano et une utilisation<br />

du langage harmonique de Messiaen<br />

et de Ligeti mais j’entends d’abord et avant<br />

Taborn. Hautement recommandé. MCho<br />

TRADUCTION : ANNE STEVENS<br />

NOVEMBRE 2011 43

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