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Nana - Lecteurs.com

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encore du tintouin, histoire de se faire bêcher ensuite ! Elle ne savait pasce qui la retenait de flanquer tout ce sale monde à la porte. Et, la ragel’étranglant, sa voix se brisa dans des sanglots.– Voyons, ma fille, tu es grise, dit Vandeuvres, qui se mit à la tutoyer.Il faut être raisonnable.Non, elle refusait d’avance, elle resterait là.– Je suis grise, c’est possible. Mais je veux qu’on me respecte.Depuis un quart d’heure, Daguenet et Georges la suppliaient vainementde revenir dans la salle à manger. Elle s’entêtait, ses invités pouvaientbien faire ce qu’il voudraient ; elle les méprisait trop pour retourneravec eux. Jamais, jamais ! On l’aurait coupée en morceaux, qu’elle seraitrestée dans sa chambre.– J’aurais dû me méfier, reprit-elle. C’est ce chameau de Rose qui amonté le <strong>com</strong>plot. Ainsi, cette femme honnête que j’attendais ce soir,bien sûr Rose l’aura empêchée.Elle parlait de M me Robert. Vandeuvres lui donna sa parole d’honneurque M me Robert avait refusé d’elle-même. Il écoutait et discutait sansrire, habitué à de pareilles scènes, sachant <strong>com</strong>ment il fallait prendre lesfemmes, quand elles se trouvaient dans cet état. Mais, dès qu’il cherchaità lui saisir les mains, pour la lever de sa chaise et l’entraîner, elle se débattait,avec un redoublement de colère. Par exemple, on ne lui ferait jamaiscroire que Fauchery n’avait pas détourné le <strong>com</strong>te Muffat de venir.Un vrai serpent, ce Fauchery ; un envieux, un homme capable des’acharner après une femme et de détruire son bonheur. Car, enfin elle lesavait, le <strong>com</strong>te s’était pris d’un béguin pour elle. Elle aurait pu l’avoir.– Lui, ma chère, jamais ! s’écria Vandeuvres, s’oubliant et riant.– Pourquoi donc ? demanda-t-elle, sérieuse, un peu dégrisée.– Parce qu’il donne dans les curés, et que, s’il vous touchait du boutdes doigts, il irait s’en confesser le lendemain… Écoutez un bon conseil.Ne laissez pas échapper l’autre.Un instant, elle resta silencieuse, réfléchissant. Puis, elle se leva, alla sebaigner les yeux. Pourtant, lorsqu’on voulait l’emmener dans la salle àmanger, elle criait toujours non, furieusement. Vandeuvres quitta lachambre avec un sourire, sans insister davantage. Et, dès qu’il ne fut pluslà, elle eut une crise d’attendrissement, se jetant dans les bras de Daguenet,répétant :– Ah ! mon Mimi, il n’y a que toi… Je t’aime, va ! je t’aime bien !… Ceserait trop bon, si l’on pouvait vivre toujours ensemble. Mon Dieu ! queles femmes sont malheureuses !85

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