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Nana - Lecteurs.com

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dents, mangeait des gâteaux secs, coup sur coup, avec un petit bruit desouris ; tandis que le chef de bureau, le nez dans une tasse, n’en finissaitplus. Et la <strong>com</strong>tesse, sans hâte, allait de l’un à l’autre, n’insistant pas, restantlà quelques secondes à regarder les hommes d’un air d’interrogationmuette, puis souriant et passant. Le grand feu l’avait rendue toute rose,elle semblait être la sœur de sa fille, si sèche et si gauche auprès d’elle.Comme elle s’approchait de Fauchery, qui causait avec son mari et Vandeuvres,elle remarqua qu’on se taisait ; et elle ne s’arrêta pas, elle donnaplus loin, à Georges Hugon, la tasse de thé qu’elle offrait.– C’est une dame qui désire vous avoir à souper, reprit gaiement lejournaliste, en s’adressant au <strong>com</strong>te Muffat.Celui-ci, dont la face était restée grise toute la soirée, parut très surpris.Quelle dame ?– Eh ! <strong>Nana</strong> ! dit Vandeuvres, pour brusquer l’invitation.Le <strong>com</strong>te devint plus grave. Il eut à peine un battement de paupières,pendant qu’un malaise, <strong>com</strong>me une ombre de migraine, passait sur sonfront.– Mais je ne connais pas cette dame, murmura-t-il.– Voyons, vous êtes allé chez elle, fit remarquer Vandeuvres.– Comment ! je suis allé chez elle… Ah ! oui, l’autre jour, pour le bureaude bienfaisance. Je n’y songeais plus… N’importe, je ne la connaispas, je ne puis accepter.Il avait pris un air glacé, pour leur faire entendre que cette plaisanterielui semblait de mauvais goût. La place d’un homme de son rang n’étaitpas à la table d’une de ces femmes. Vandeuvres se récria : il s’agissaitd’un souper d’artistes, le talent excusait tout. Mais, sans écouter davantageles arguments de Fauchery qui racontait un dîner où le princed’Écosse, un fils de reine, s’était assis à côté d’une ancienne chanteuse decafé-concert, le <strong>com</strong>te accentua son refus. Même il laissa échapper ungeste d’irritation, malgré sa grande politesse.Georges et La Faloise, en train de boire leur tasse de thé, debout l’undevant l’autre, avaient entendu les quelques paroles échangées prèsd’eux.– Tiens ! c’est donc chez <strong>Nana</strong>, murmura La Faloise, j’aurais dû m’endouter !Georges ne disait rien, mais il flambait, ses cheveux blonds envolés,ses yeux bleus luisant <strong>com</strong>me des chandelles, tant le vice où il marchaitdepuis quelques jours l’allumait et le soulevait. Enfin, il entrait doncdans tout ce qu’il avait rêvé !– C’est que je ne sais pas l’adresse, reprit La Faloise.60

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