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Nana - Lecteurs.com

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Alors, ils ricanèrent, les yeux luisants, se donnant des détails sur latable d’hôte de la rue des Martyrs, où la grosse Laure Piédefer, pour troisfrancs, faisait manger les petites femmes dans l’embarras. Un joli trou !Toutes les petites femmes baisaient Laure sur la bouche. Et, <strong>com</strong>me la<strong>com</strong>tesse Sabine tournait la tête, ayant saisi un mot au passage, ils se reculèrent,se frottant l’un contre l’autre, égayés, allumés. Près d’eux, ilsn’avaient pas remarqué Georges Hugon, qui les écoutait, en rougissant sifort, qu’un flot rose allait de ses oreilles à son cou de fille. Ce bébé étaitplein de honte et de ravissement. Depuis que sa mère l’avait lâché dansle salon, il tournait derrière M me de Chezelles, la seule femme qui lui parûtchic. Et encore <strong>Nana</strong> l’enfonçait joliment !– Hier soir, disait M me Hugon, Georges m’a menée au théâtre. Oui,aux Variétés, où je n’avais certainement plus mis les pieds depuis dixans. Cet enfant adore la musique… Moi, ça ne m’a guère amusée, mais ilétait si heureux !… On fait des pièces singulières, aujourd’hui. D’ailleursla musique me passionne peu, je l’avoue.– Comment ! Madame, vous n’aimez pas la musique ! s’écria M me DuJoncquoy en levant les yeux au ciel. Est-il possible qu’on n’aime pas lamusique !Ce fut une exclamation générale. Personne n’ouvrit la bouche de cettepièce des Variétés, à laquelle la bonne M me Hugon n’avait rien <strong>com</strong>pris ;ces dames la connaissaient, mais elles n’en parlaient pas. Tout de suite,on se jeta dans le sentiment, dans une admiration raffinée et extatiquedes maîtres. Madame Du Joncquoy n’aimait que Weber,M me Chantereau tenait pour les Italiens. Les voix de ces dames s’étaientfaites molles et languissantes. On eût dit, devant la cheminée, un recueillementd’église, le cantique discret et pâmé d’une petite chapelle.– Voyons, murmura Vandeuvres en ramenant Fauchery au milieu dusalon, il faut pourtant que nous inventions une femme pour demain. Sinous demandions à Steiner ?– Oh ! Steiner, dit le journaliste, quand il a une femme, c’est que Parisn’en veut plus.Vandeuvres, cependant, cherchait autour de lui.– Attendez, reprit-il. J’ai rencontré l’autre jour Foucarmont avec uneblonde charmante. Je vais lui dire qu’il l’amène.Et il appela Foucarmont. Rapidement, ils échangèrent quelques mots.Une <strong>com</strong>plication dut se présenter, car tous deux, marchant avec précaution,enjambant les jupes des dames, s’en allèrent trouver un autre jeunehomme, avec lequel ils continuèrent l’entretien, dans l’embrasure d’unefenêtre. Fauchery, resté seul, se décidait à s’approcher de la cheminée, au57

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