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Nana - Lecteurs.com

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pour le remettre aux bras mêmes de Dieu. C’était un prolongement religieuxdes voluptés de <strong>Nana</strong>, avec les balbutiements, les prières et lesdésespoirs, les humilités d’une créature maudite écrasée sous la boue deson origine. Au fond des églises, les genoux glacés par les dalles, il retrouvaitses jouissances d’autrefois, les spasmes de ses muscles et lesébranlements délicieux de son intelligence, dans une même satisfactiondes obscurs besoins de son être.Le soir de la rupture, Mignon se présenta avenue de Villiers. Ils’accoutumait à Fauchery, il finissait par trouver mille avantages dans laprésence d’un mari chez sa femme, lui laissait les petits soins du ménage,se reposait sur lui pour une surveillance active, employait aux dépensesquotidiennes de la maison l’argent de ses succès dramatiques ; et <strong>com</strong>me,d’autre part, Fauchery se montrait raisonnable, sans jalousie ridicule,aussi coulant que Mignon lui-même sur les occasions trouvées par Rose,les deux hommes s’entendaient de mieux en mieux, heureux de leur associationfertile en bonheurs de toutes sortes, faisant chacun son troucôte à côte, dans un ménage où ils ne se gênaient plus. C’était réglé, çamarchait très bien, ils rivalisaient l’un l’autre pour la félicité <strong>com</strong>mune.Justement, Mignon venait, sur le conseil de Fauchery, voir s’il ne pouvaitpas enlever à <strong>Nana</strong> sa femme de chambre, dont le journaliste avait appréciél’intelligence hors ligne ; Rose était désolée, elle tombait depuis unmois sur des filles inexpérimentées, qui la mettaient dans des embarrascontinuels. Comme Zoé le recevait, il la poussa tout de suite dans la salleà manger. Au premier mot, elle eut un sourire : impossible, elle quittaitMadame, elle s’établissait à son <strong>com</strong>pte ; et elle ajouta, d’un air de vanitédiscrète, que chaque jour elle recevait des propositions, ces dames se ladisputaient, M me Blanche lui avait fait un pont d’or pour la ravoir. Zoéprenait l’établissement de la Tricon, un vieux projet longtemps couvé,une ambition de fortune où allaient passer ses économies ; elle étaitpleine d’idées larges, elle rêvait d’agrandir la chose, de louer un hôtel etd’y réunir tous les agréments ; c’était même à ce propos qu’elle avait tâtéd’embaucher Satin, une petite bête qui se mourait à l’hôpital, tellementelle se gâchait.Mignon ayant insisté en parlant des risques que l’on court dans le<strong>com</strong>merce, Zoé, sans s’expliquer sur le genre de son établissement, secontenta de dire avec un sourire pincé, <strong>com</strong>me si elle avait pris uneconfiserie :– Oh ! les choses de luxe marchent toujours… Voyez-vous, il y a assezlongtemps que je suis chez les autres, je veux que les autres soient chezmoi.325

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