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Nana - Lecteurs.com

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pourrait-elle donner aux juges des explications qui les toucheraient ; et leprojet lui venait de la supplier, pour qu’elle déposât en faveur de son fils.En bas, les portes de l’hôtel étaient ouvertes, elle hésitait dans l’escalier,avec ses mauvaises jambes, lorsque, tout d’un coup, des appelsd’épouvante l’avaient dirigée. Puis, en haut, un homme se trouvait parterre, la chemise tachée de rouge. C’était Georges, c’était son autreenfant.<strong>Nana</strong> répétait, d’un ton imbécile :– Il voulait m’épouser, j’ai dit non, et il s’est tué.Sans un cri, M me Hugon se baissa. Oui, c’était l’autre, c’était Georges.L’un déshonoré, l’autre assassiné. Cela ne la surprenait pas, dansl’écroulement de toute sa vie. Agenouillée sur le tapis, ignorante du lieuoù elle était, n’apercevant personne, elle regardait fixement le visage deGeorges, elle écoutait, une main sur son cœur. Puis, elle poussa un faiblesoupir. Elle avait senti le cœur battre. Alors, elle leva la tête, examinacette chambre et cette femme, parut se rappeler. Une flamme s’allumaitdans ses yeux vides, elle était si grande et si terrible de silence, que <strong>Nana</strong>tremblait, en continuant de se défendre, par-dessus ce corps qui lesséparait.– Je vous jure, madame… Si son frère était là, il pourrait vousexpliquer…– Son frère a volé, il est en prison, dit la mère durement.<strong>Nana</strong> resta étranglée. Mais pourquoi tout ça ? L’autre avait volé, à présent! ils étaient donc fous, dans cette famille ! Elle ne se débattait plus,n’ayant pas l’air chez elle, laissant M me Hugon donner des ordres. Desdomestiques avaient fini par accourir, la vieille dame voulut absolumentqu’ils descendissent Georges évanoui dans sa voiture. Elle aimait mieuxle tuer et l’emporter de cette maison. <strong>Nana</strong>, de ses regards stupéfaits, suivitles domestiques qui tenaient ce pauvre Zizi par les épaules et par lesjambes. La mère marchait derrière, épuisée maintenant, s’appuyant auxmeubles, <strong>com</strong>me jetée au néant de tout ce qu’elle aimait. Sur le palier,elle eut un sanglot, elle se retourna et dit à deux reprises :– Ah ! vous nous avez fait bien du mal !… Vous nous avez fait bien dumal !Ce fut tout. <strong>Nana</strong> s’était assise, dans sa stupeur, encore gantée et sonchapeau sur la tête. L’hôtel retombait à un silence lourd, la voiture venaitde partir ; et elle demeurait immobile, n’ayant pas une idée, la tête bourdonnantede cette histoire. Un quart d’heure plus tard, le <strong>com</strong>te Muffat latrouva à la même place. Mais alors elle se soulagea par un flux débordantde paroles, lui contant le malheur, revenant vingt fois sur les308

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