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Nana - Lecteurs.com

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– Oh ! il est cassé !Puis, elle se mit à rire. Les morceaux, par terre, lui semblaient drôles.C’était une gaieté nerveuse, elle avait le rire bête et méchant d’un enfantque la destruction amuse. Philippe fut pris d’une courte révolte ; la malheureuseignorait quelles angoisses lui coûtait ce bibelot. Quand elle levit bouleversé, elle tâcha de se retenir.– Par exemple, ce n’est pas ma faute… Il était fêlé. Ça ne tient plus, cesvieilleries… Aussi, c’est ce couvercle ! as-tu vu la cabriole ?Et elle repartit d’un fou rire. Mais, <strong>com</strong>me les yeux du jeune homme semouillaient, malgré son effort, elle se jeta tendrement à son cou.– Es-tu bête ! je t’aime tout de même. Si l’on ne cassait rien, les marchandsne vendraient plus. Tout ça est fait pour être cassé… Tiens ! cetéventail, est-ce que c’est collé seulement !Elle avait saisi un éventail, tirant sur les branches ; et la soie se déchiraen deux. Cela parut l’exciter. Pour faire voir qu’elle se moquait desautres cadeaux, du moment où elle venait d’abîmer le sien, elle se donnale régal d’un massacre, tapant les objets, prouvant qu’il n’y en avait pasun de solide, en les détruisant tous. Une lueur s’allumait dans ses yeuxvides, un petit retroussement des lèvres montrait ses dents blanches.Puis, lorsque tous furent en morceaux, très rouge, reprise de son rire, ellefrappa la table de ses mains élargies, elle zézaya d’une voix de gamine :– Fini ! n’a plus ! n’a plus !Alors, Philippe, gagné par cette ivresse, s’égaya et lui baisa la gorge, enla renversant en arrière. Elle s’abandonnait, elle se pendait à ses épaules,si heureuse, qu’elle ne se rappelait pas s’être tant amusée depuis longtemps.Et, sans le lâcher, d’un ton de caresse :– Dis donc, chéri, tu devrais bien m’apporter dix louis demain… Unembêtement, une note de mon boulanger qui me tourmente.Il était devenu pâle ; puis, en lui mettant un dernier baiser sur le front,il dit simplement :– Je tâcherai.Un silence régna. Elle s’habillait. Lui, appuyait le front à une vitre. Aubout d’une minute, il revint, il reprit avec lenteur :– <strong>Nana</strong>, tu devrais m’épouser.Du coup, cette idée égaya tellement la jeune femme, qu’elle ne pouvaitachever de nouer ses jupons.– Mais, mon pauvre chien, tu es malade !… Est-ce parce que je te demandedix louis que tu m’offres ta main ?… Jamais. Je t’aime trop. Envoilà une bêtise, par exemple !300

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