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Nana - Lecteurs.com

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cher… Oh ! moi, vous savez, je suis une bonne fille, je dis les choses<strong>com</strong>me elles sont. Maman était blanchisseuse, papa se soûlait, et il en estmort. Voilà ! Si ça ne vous convient pas, si vous avez honte de mafamille…Tous protestèrent. Qu’allait-elle chercher là ! on respectait sa famille.Mais elle continuait :– Si vous avez honte de ma famille, eh bien ! laissez-moi, parce que jene suis pas une de ces femmes qui renient leur père et leur mère… Il fautme prendre avec eux, entendez-vous !Ils la prenaient, ils acceptaient le papa, la maman, le passé, ce qu’ellevoudrait. Les yeux sur la table, tous quatre maintenant se faisaient petits,tandis qu’elle les tenait sous ses anciennes savates boueuses de la rue dela Goutte-d’Or, avec l’emportement de sa toute-puissance. Et elle nedésarma pas encore : on aurait beau lui apporter des fortunes, lui bâtirdes palais, elle regretterait toujours l’époque où elle croquait despommes. Une blague, cet idiot d’argent ! c’était fait pour les fournisseurs.Puis, son accès se termina dans un désir sentimental d’une vie simple, lecœur sur la main, au milieu d’une bonté universelle.Mais, à ce moment, elle aperçut Julien, les bras ballants, qui attendait.– Eh bien ! quoi ? servez le champagne, dit-elle. Qu’avez-vous à me regarder<strong>com</strong>me une oie ?Pendant la scène, les domestiques n’avaient pas eu un sourire. Ils semblaientne pas entendre, plus majestueux à mesure que Madame se lâchaitdavantage. Julien, sans broncher, se mit à verser le champagne. Parmalheur, François, qui présentait les fruits, pencha trop le <strong>com</strong>potier, etles pommes, les poires, le raisin roulèrent sur la table.– Fichu maladroit ! cria <strong>Nana</strong>.Le valet eut le tort de vouloir expliquer que les fruits n’étaient pasmontés solidement. Zoé les avait ébranlés, en prenant des oranges.– Alors, dit <strong>Nana</strong>, c’est Zoé qui est une dinde.– Mais, Madame… murmura la femme de chambre blessée.Du coup, Madame se leva, et la voix brève, avec un geste de royaleautorité :– Assez, n’est-ce pas ?… Sortez tous !… Nous n’avons plus besoin devous.Cette exécution la calma. Elle se montra tout de suite très douce, trèsaimable. Le dessert fut charmant, ces messieurs s’égayaient à se servireux-mêmes. Mais Satin, qui avait pelé une poire, était venue la mangerderrière sa chérie, appuyée à ses épaules, lui disant dans le cou deschoses, dont elles riaient très fort ; puis, elle voulut partager son dernier240

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